Titre :Le Souffle de l'Aube
Disclaimer : 99% des personnages mentionnés dans cette histoire sont tirés de l'animé Yu-Gi-Oh 5D's. Seul le personnage de Yûki vient de mon imaginaire.
Rating : Je laisse un gentil T pour le moment, histoire de rester convenable. Il se pourrait très probablement que cette bienséance finisse par avoir raison de moi et se transforme en rating M durant l'histoire. Voilà voilà.
Que dire ?
Cette histoire fait des tours et des loopings pas possible dans mon esprit depuis maintenant plusieurs mois, alors je me suis dit que la poster sur ce site m'aiderais peut-être à m'en débarrasser. Non pas que je ne l'aime pas. Bien au contraire. Je ne sais pas pourquoi j'ai dit ça...
Bref.
J'ai remarqué aussi que cette fandom était étonnamment déserte depuis quelques temps. Certes, la sortie de l'animé remonte à maintenant quelques années. Mais tout de même, seulement 22 fictions françaises, dont plus des trois-quart qui ne comportent qu'un unique chapitre... C'est pour le moins désertique. Allons, chers auteurs tricolores, un peu d'inspiration que diable !
Aussi, malgré l'univers plus médiéval dans lequel se déroule mon petit conte, j'ai voulu garder l'un des principal attrait de l'animé et de la franchise Yu-Gi-Oh en général, à savoir les monstres. J'espère que la manière dont j'ai choisit de les introduire ne vous semblera pas trop complexe à assimiler.
Au pire, je ferais un petit dictionnaire récapitulatif pour les plus troublés d'entre vous.
Dernière petite remarque avant que je ne vous lâche - je ne vous agace pas ein ? Qui a dit oui ?! - n'hésitez pas, je vous supplie même de le faire, à me prévenir si vos yeux aguerris aperçoivent durant leur lecture une petite faute qui tenterait de se dissimuler parmi les autres mots bien orthographiés. Ces petites bêtes là semblent prendre plaisir à venir s'immiscer sans mon consentement dans mes écrits.
Sur ce, bonne lecture !
Chapitre 1
Triomphe
« Allons Yusei, tu peux faire mieux que ça ! »
Dans la cours du palais royal, les bruits de coups raisonnaient à un rythme effréné. Les deux corps s'opposant s'entrechoquaient dans une même cadence comme une danse millimétrée, les avant-bras bloquant les coups adverses, un mouvement vif esquivant de justesse un coup de pied dans les tibias.
Se repositionnant au mieux sur ses appuis, Yusei ripostait comme il le pouvait aux coups de celle qui lui faisait face. Esquiver au bon moment, éviter les revers, tenter une frappe au niveau des côtes, se remettre aussitôt en position pour se préparer au prochain coup. Profitant d'une mauvaise réception sur ses appuis, son assaillante lui assena un coup de paume précis dans l'abdomen, avant de se glisser derrière lui pour le frapper durement à la nuque, le faisant s'effondrer face contre terre sous le choc.
La tête enfoui dans le terreau des jardins, Yusei toussait pour expirer le nuage de poussière qui endiguait ses poumons. Posant ses mains à plat sur le sol, il se redressa pour s'asseoir, soupirant en constatant que ses vêtements étaient couverts de terre. Ce coup-là lui vaudrait sûrement des crampes le lendemain, ainsi qu'une réprimande de sa mère. S'entraîner aux joutes physiques avec ses vêtements de valeurs n'était pas la chose la plus avisé qu'il eu fait.
Au dessus de lui son opposante émettait un claquement de langue désapprobateur, les bras croisés et le sourcil levé lui donnant l'air d'un parent réprobateur.
« Alors, quelle excuse vas tu me sortir cette fois, cher Prince ? Un muscle ankylosé durant notre dernier entraînement ? Un élan soudain de galanterie envers la plus fervente gardienne de ton royaume ? Ou bien encore un brusque rappel de tes leçons de bonnes manières t'interdisant formellement d'agresser une demoiselle ?
- Non, rien de tout ça, dit-il en époussetant ses mains sur ses cuisses. Plutôt un sentiment de bonheur incontrôlable qui m'envahit depuis l'aube et m'empêche de me concentrer pleinement.
- Ah oui c'est vrai, la fameuse réunion père-fils a donc eu lieu ce matin. Ça m'étais complètement sortie de l'esprit.
- Tu mens très mal Yûki, l'accusa t-il.
- Seulement quand je le veux bien, » elle rit, tendant la main pour aider son ami à se relever, qui l'accepta avec gratitude.
Fudo Yusei, prince de son statut, était un jeune homme approchant de sa vingt-et-unième année, aux yeux bleus cobalt et au teint halé typique du climat ensoleillé du Royaume de Metropolis. Ses cheveux brun possédaient d'étranges et singulières mèches couleur d'or, caractéristique physique unique aux membres de la famille royale de Metropolis, qui semblait se transmettre depuis des générations à chaque nouveau descendant de la royauté. Il était d'une nature fraternelle, sociale et magnanime, et son tempérament obstiné causait même aux personnes les plus vindicatives à son encontre à se rapprocher inévitablement de lui.
C'était un fait ; plus on passait de temps en sa compagnie, plus il devenait difficile de ne pas devenir un de ses alliés.
« Néanmoins, continua t-elle, si tu négliges autant ton entraînement au profit de pensées plus florales je serais forcée de suspendre tes exercices journaliers jusqu'à ce que tu sois plus enclin à y participer. Et cela ne risque pas de plaire à notre bon Roi, ajouta t-elle en haussant un sourcil taquin.
- Oserais-tu donc me laisser de côté au profit d'un autre élève à cause d'un léger écart d'attention ?
- Vous savez bien que vous êtes l'unique personne qui importe à mes yeux, Votre Altesse, dit-elle en accompagnant ses mots d'une révérence théâtrale.
- Je ne te savais pas avoir une telle inclinaison pour moi.
- Jamais je n'oserais mon prince, affirma Yûki en se redressant. Et puis je sais de source sur que vous serez bientôt déjà pris, ajouta t-elle avec un clin d'œil complice.
- Et pourrais-je savoir quelle est l'identité de l'effronté qui a osé tenir pareil propos ?
- Une personne que je tiens en haute estime et que jamais je n'oserais trahir.
- Pas même si ton prince te l'ordonnais ?
- Ce serait trahir mon honneur. »
Yusei se mit à rire en retirant les derniers grains de poussières de ses cheveux, attrapant sa veste laissée de côté pour l'entraînement sous l'œil attentif de son instructrice.
Yûki avait à un moment fait partie de ces personnes vindicatives. Elle avait aperçue Yusei pour la première fois au cours d'une cérémonie d'entrée donnée en l'honneur des nouveaux membres fraîchement promu de la Garde Intra-Muros, à laquelle elle avait participé en tant que l'un des soldats nominés. Yusei avait alors dix-huit ans, et était venu en tant qu'invité d'honneur féliciter les nouvelles recrues de la Garde de Metropolis. Une forme de devoir royal envers son pays qu'il accomplissait avec de plus en plus de rigueur, au fur et à mesure que son âge grandissant lui conférait également plus de responsabilité en tant qu'héritier légitime.
Lors de son arrivée sur l'estrade elle était assise au premier rang, réservé aux meilleurs de sa promotion, et avait assisté au première loge à son discours de congratulation. Elle avait bien dût admettre qu'il serait sûrement loin d'être un mauvais héritier lorsque son tour viendrait de monter sur le trône ; il savait parler avec aisance, était droit, fier, pouvait s'imposer parmi la foule, et son désir de réussir était communicatif.
Mais quelque chose l'avait malgré tout dérangé chez lui. Une sorte de méfiance face à son attitude enjouée et son assurance peut-être un peu trop démonstrative à son goût. Elle le trouvait trop jeune, trop irresponsable, trop gâté pour assumer son rôle d'héritier. Ce ressentiment ne l'avait jamais vraiment quittée.
Jusqu'au jour où les circonstances l'avait de nouveau amenée à se retrouver en sa présence, cette fois-ci sur le champ de bataille.
La pauvreté croissante du royaume voisin de Satellite avait causé de nombreux habitants à fuir le pays dans l'espoir de trouver meilleur vie ailleurs. Parmi eux, certains en désespoir de moyen ou simplement par profit avaient décidés de s'allier par dizaines pour piller les villages ruraux avoisinant Metropolis, détruisant les récoltes et volant les biens des villageois. Cette menace grandissante se rapprochant chaque jour d'avantage de la capitale, il avait été décidé d'envoyer une unité spéciale afin de stopper l'avancée des pilleurs par le Nord. Yûki avait alors été désignée pour être à la tête des opérations, et le jour du départ de la troupe, elle avait été informée que le prince se joindrait à eux et leur viendrait en aide s'il devait y avoir des complications.
Cet arrangement conclu dans son dos n'avait fait qu'augmenter son aigreur vis-à-vis de Yusei. Elle n'avait pas réussit à comprendre pourquoi il tenait tant à les accompagner. La simple idée de penser qu'en venant avec eux, le prince s'imaginait gagner les faveurs du peuple sans trop risquer de donner de sa personne, au vue de la menace minime que générait quelques pilleurs de récolte, la faisait fulminer de rage.
Mais arrivé au point de ralliement, la situation s'était si brusquement dégradée que la colère toujours présente dans son esprit avait très vite laissé place à l'état d'alerte.
Les attaques étaient venues de tout les côtés, surprenant les soldats à cheval et effrayant les montures. Des flèches arrivaient sur eux par dizaines, dispersant la troupe qui s'agitaient dans tout les sens pour éviter les projectiles meurtriers. Encore étourdit par le choc de l'attaque surprise, Yûki s'apprêtait à sonner la retraite, lorsqu'un immense jet de flamme s'était abattu dans leur direction, atteignant mortellement plusieurs soldats.
Les flammes embrassaient les champs d'herbes entourant la garnison, causant le chaos total dans la troupe. Les fumées noires provoquées par les cultures calcinées envahissaient peu à peu le ciel et réduisaient la visibilité des soldats, ainsi que les chances de pouvoir discerner leurs opposants.
Mais parmi ces émanations obscures une forme s'était malgré tout distinguée, dépassant de plusieurs mètres les conifères poussant près des champs de récolte ; celle d'un gigantesque serpent de feu s'élevant au dessus des flammes, la gueule grande ouverte prête à enflammer de nouveau les champs de blé.
« Soldats, reformez les rangs ! Retranchez-vous vers les collines au Nord et préparez-vous au combat ! L'un de nos ennemis possède une Invocation et il n'est peut-être pas le seul, nous devons stopper à tout pris leur avancée avant qu'ils ne menacent la sécurité de nos frontières ! Sherry, on engage la formation A !
- À vos ordres, commandante ! »
L'ordre époumoné par Yûki avait été comme un brusque rappel à la raison de son unité. Ressaisissant avec vigueur le harnais de leur monture, la troupe avait rétablit sa formation et s'était mise à cavaler en direction du lieu indiqué par Yûki pour tenter de se mettre à l'abri des flammes.
Ce n'était censé être que de simples pilleurs de moisson, personne ne les avait mis au courant d'une telle puissance d'attaque. Encore moins que l'un d'entre eux possédait une Invocation aussi dangereuse.
Tout les humains ne possédaient pas une Invocation. Ces esprits, dont l'existence elle-même restait encore flou aux yeux des hommes, semblaient venir d'un autre monde coexistant avec celui des hommes, et possédaient des pouvoirs extraordinaires capables d'édifier comme de causer la destruction. Ces êtres avaient la capacité de communiquer avec les humains et pouvaient s'ils le désiraient décider de s'attacher à l'un d'entre eux, créant un lien indéfectible et inébranlable.
Les raisons de leur choix restaient parfois inconnues, mais lorsque cela se produisait, ces esprits pouvaient alors apparaître à tout moment, dès que l'humain auquel ils étaient liées le demandait, pour lui prêter sa force et le protéger jusqu'à la fin de son existence.
Posséder une Invocation était un signe de puissance ainsi qu'une grande fierté pour les hommes. Il n'était pas rare de voir un Invocateur rejoindre les rangs de l'armée afin d'utiliser ses facultés pour protéger son pays. La Garde Royale de Metropolis, chargée de veiller nuit et jour à la sûreté de la famille souveraine, était de ce fait exclusivement composée des meilleurs Invocateurs du pays, afin d'assurer au mieux la sécurité de la couronne.
Mais tout comme les humains, il existait autant d'Invocations malveillantes que bienveillantes. Et il arrivait que certaines choisissent de se lier à des humains dont les intentions étaient bien moins louables que ceux de la Garde.
Yûki observait le champs de bataille en flammes, essayant d'élaborer au plus vite une stratégie de riposte en attendant le moment clé. Cinq de ses hommes étaient déjà inaptes au combat à cause d'une seule frappe ; un simple bataillon n'allait probablement pas suffire à les arrêter si plusieurs d'entre eux possédaient des Invocations similaires à ce serpent.
« N'espérez pas pouvoir vous enfuir aussi facilement ! avait crié l'un des pilleurs, dissimulé derrière les flammes. Vous autres de Metropolis allez payer pour vous être montrés aussi égoïste et rapiat pendant que notre peuple criait famine ! »
Serpentant entre les flammes en laissant une traînée enflammée derrière lui, le gigantesque python s'était mit aussitôt en mouvement et talonnait de près la troupe metropolitienne, faisant siffler sa langue chaque seconde un peu plus près des soldats. Yûki, qui était restée à l'arrière de l'unité pour fermer le groupe et avoir une vue d'ensemble sur sa troupe, sentait la chaleur incandescente émanant du serpent se rapprocher à grande vitesse de son échine.
« Sherry, la formation !
- Je l'ai presque, commandante ! »
Se tournant une nouvelle fois pour observer l'avancée fulgurante du reptile, Yûki avait retenue un frisson en tombant face aux deux yeux topazes qui la guettaient à seulement une trentaine de mètre de sa monture, semblant briller d'une excitation morbide. Ils allaient manquer de temps.
Réprimant un juron, Yûki regardait autour d'elle, cherchant un moyen de gagner quelques secondes, quand un feulement lourd s'était mit à résonner derrière elle, faisant se cambrer de peur la plupart des montures de l'unité. Resserrant de toute ses forces la prise de sur son harnais, Yûki avait juste eu le temps de se tourner pour voir le reptile se dresser brusquement sur toute sa longueur, ouvrant de nouveau son immense gueule rougeoyante pour se préparer à lancer un autre jet de flamme.
Il ne lui avait pas fallut longtemps pour évaluer la faible distance séparant sa troupe de la déflagration qui s'apprêtait à leur tomber dessus.
Si cette attaque nous atteint, c'est la garnison toute entière qui risque d'y passer !
« Sherry, c'est maintenant ou jam-! »
Mais son ordre avait été subitement engloutit par une détonation venue de nul-part, causant un gigantesque flash lumineux qui avait envahit les alentours du champ de bataille, recouvrant entièrement le bataillon. Yûki avait cessé de respirer l'espace d'un instant, croyant que le serpent venait de lancer son attaque fatidique. Mais rien ne vint.
« Qu'est-ce que-... »
Un puissant rugissement avait soudain retentit au dessus de la troupe, créant un sursaut d'effroi au cheval de Yûki qui tentait tant bien que mal de le maîtriser, ainsi qu'à ceux du reste de ses soldats restés tous désespérément immobiles au milieu du champ d'herbe, paralysés par la peur. Levant le regard vers la source de lumière, Yûki avait plissé les yeux pour essayer de distinguer la cause de ce phénomène.
« Stardust... »
Quelques mètres au dessus de sa tête, un énorme dragon blanc au poitrail bleu vif se dressait au milieu du champ de blé, les ailes grandes ouvertes face au serpent de feu, répondant à ses sifflements d'intimidations par des grondements sinistres.
Stardust Dragon, le gardien de la famille royale de Metropolis.
Cet esprit était connu et adulé par tout les citoyens du Royaume de Metropolis, qui le percevaient comme le symbole du pays, le protecteur et gardien du peuple metropolitien ainsi que de sa nation. Il s'était lié il y a de cela des siècles à la famille royale de Metropolis, se léguant comme un héritage familial de descendant en descendant, et protégeait chaque nouvel héritier au trône en devenant son Invocation.
C'était la première fois que Yûki voyait Stardust Dragon de ses propres yeux, et son apparition la laissait un instant sans voix. Il émergeait de lui une telle puissance apparente qu'elle sentait tout son corps se détendre l'espace d'un instant, comme rassuré par sa simple présence. Mais son instinct de soldat avait rapidement reprit le dessus, et la situation dans laquelle elle se trouvait elle-même ainsi que son bataillon lui revenait brutalement à l'esprit.
Cherchant rapidement du regard les membres de sa troupe, elle avait fait claquer la hanse de son cheval et était partie au galop, se dirigeant avec hargne droit vers l'un de ses soldats, immobile juste en dessous de Stardust, un bras levé vers lui comme pour lui communiquer ses mouvements.
« Ramenez immédiatement votre dragon !
- Le ramener ? s'était exclamé Yusei. Il est la seule chose qui empêche ce serpent de réduire toute la troupe en poussière !
- Ne discutez pas et faites ce que je vous dit ! »
Yusei était resté un instant interdit face à la fureur soudaine de sa commandante. Tournant son regard vers son Invocation, il avait observé un instant son dragon, semblant attendre son avis pour agir. Rappeler Stardust signifierait laisser ce serpent de nouveau libre d'agir. Il ne lui faudrait que quelques secondes pour anéantir le reste du bataillon en un souffle.
Au dessus d'eux, Stardust battait violemment des ailes pour repousser tant bien que mal le reptile au plus loin de la troupe, faisant siffler le serpent de rage qui s'enroulait sur lui-même pour se protéger des bourrasques du dragon.
Hochant lentement la tête en signe d'approbation, Yusei s'était tourné vers son dragon et l'avait fait disparaître d'un simple mouvement de tête, ne laissant qu'un nuage de poussière étincelante derrière lui.
Sentant probablement la disparition de son opposant, le gigantesque reptile avait fait de nouveau siffler sa langue en signe de victoire, et se redressait presque aussitôt pour faire valoir sa puissance, grondant sa colère face à Yusei et Yûki à présent sans défense.
Yusei resserrait nerveusement sa prise sur son harnais, les yeux fixés sur le python rougeâtre qui lui renvoyait un regard haineux, et sentait son cheval reculer de peur. Mais la main de Yûki avait saisit violemment la hanse de sa monture, l'empêchant d'aller plus loin. Ses yeux demeuraient irrémédiablement fixés sur le serpent, attendant le moment propice, et lorsque le reptile s'était mit à serpenter de nouveau en direction duo, la gueule grande ouverte, Yûki avait hurlée jusqu'à en cracher ses poumons :
« MAINTENANT ! »
Traversant le champs de blé en quelques secondes, une flèche en argent avait sifflée au visage de Yusei, évitant le reptile de feu et les arbres du domaine pour venir se planter dans l'abdomen d'un pilleur dissimulé derrière l'un des conifères de la prairie, qui s'était effondré raide mort sur le sol roussie.
Au même moment, l'immense serpent s'était alors mit à couiner de douleur, se tordant dans tout les sens en poussant des cris strident avant de brutalement disparaître dans une explosion de poussière écarlate, laissant un silence de mort derrière lui.
« Suivez moi. »
Le ton sec de Yûki avait brutalement ramené Yusei à la réalité, les yeux toujours fixés vers le champ où se trouvait il y a encore quelques secondes le monstre qui aurait très probablement causé leur mort.
Encore sous le choc, il avait suivit sans mot sa commandante en direction d'un regroupement d'arbres pour se mettre hors de vue des pilleurs et de leurs potentiels archers. Imitant sa supérieure, il était descendu de selle pour attacher la hanse de son cheval à l'une des branches d'un arbre, observant d'un œil les flammes du champ de blé s'éteindre une à une.
Il avait juste eu juste le temps de se tourner pour faire face à sa commandante avant de sentir la douleur cuisante d'une claque en plein visage, le faisant perdre l'équilibre l'espace d'un instant.
« Si votre plan est de servir de sacrifice humain pour éviter à l'un de vos fantassins d'être blessé, alors vous pouvez tout aussi bien rentrer vous réfugier dans votre palais. Je ne veux aucun suicidaire à l'intérieur de mes rangs, avait sifflée Yûki d'une colère froide.
- Je voulais simplement éviter qu'il y ai plus de pertes inutiles dans ce combat-
- Risquer votre vie chaque fois qu'un soldat est en mauvaise posture n'est pas une stratégie à adopter ! Ici c'est un champ de bataille, il n'y a pas de place pour les actes héroïques. Il faut réfléchir avant d'agir et penser à l'intérêt commun avant tout. Vous êtes l'héritier de Metropolis, vous devez rester en vie avant tout pour pouvoir ensuite être là pour votre pays afin de l'aider à se reconstruire après la bataille. C'est ça votre premier devoir envers votre peuple ! »
La main sur sa joue endolorie, le prince fixait sa commandante les yeux grands ouverts, semblant ne rien comprendre aux raisons de sa fureur. Les poings serrés, Yûki sentait sa colère atteindre un point de non-retour. Le voir toujours aussi désespérément ignorant et dans l'incompréhension totale après ce qu'il venait de se passer lui mettait les nerfs à vifs. Elle n'avait pas de temps à accorder à un enfant impulsif et buté, alors que son unité attendait ses ordres à quelques mètres de là.
« Votre dragon est connu presque partout dans le monde comme étant l'Invocation de votre famille. En le sortant ainsi à la vue de tous, vous venez de signaler à nos ennemis que le prince du Royaume de Metropolis se trouvait dans nos rangs ! Pensez-vous qu'il soit avisé de leurs faire savoir que le futur dirigeant du pays qu'ils exècrent se trouve à simplement quelques centaines de mètres d'eux, avec seulement une dizaine de soldat pour le protéger ?
- J-Je n'avais pas pensé à-
- Évidemment que vous n'y avez pas pensé, vous ne connaissez strictement rien aux préceptes du combat et encore moins à la manière d'utiliser une Invocation lors d'une bataille ! Le simple fait que vous soyez ici malgré votre inexpérience flagrante est une bêtise monumentale. Je comprends que vous ayez voulu participer à cette expédition dans le but de montrer à tout Metropolis votre capacité à protéger le royaume, mais cela ne vous donne en aucun cas le droit d'agir sur votre propre initiative, et mettre de ce fait en péril la mission comme vous venez juste de le faire. C'est pour cette raison qu'un soldat se doit de toujours suivre le commandement de son supérieur, et ne jamais discuter ses ordres ! »
Yûki essayait tant bien que mal de retrouver son calme, essoufflée par ses émotions qui venaient d'exploser au visage du prince. Elle avait observée Yusei durant leur trajet jusqu'au village attaqué, si confiant et heureux de pouvoir enfin montrer ce qu'il valait. Et elle le retrouvait maintenant à se tasser un peu plus sur lui-même à chacune de ses paroles, son regard exorbité fixant le vide avec accablement. Quelque part, malgré sa colère, elle en venait à regretter que cette assurance qu'elle avait crue apercevoir il y a seulement quelques heures n'était en réalité qu'une mascarade apparente. Elle aurait aimée pour une fois pouvoir se tromper quant à ses présomptions envers le prince.
Quelques mètres plus loin, des bruits de sabots signalaient que la troupe se rapprochaient de leur position, sans doute dans l'inquiétude de ne pas les voir réapparaître. Soupirant lourdement, Yûki s'était détournée pour saisir la hanse de son cheval, dénouant le nœud de la branche pour libérer l'animal.
« Restez ici. Sans l'appui de leur Invocateur il ne nous faudra pas longtemps pour maîtriser le reste des rebelles. Je serais moins distraite si je vous sais en sécurité. »
Occupée avec son harnais, Yûki ne s'était pas tout de suite rendu compte que Yusei ne s'était pas donné la peine de lui répondre. Non pas que sa remarque eu exigée une réponse, mais son mutisme avait fini par l'interloquer. Troublée par ce silence, Yûki s'était retournée pour jeter un œil au prince. Il n'avait pas bougé ne serait-ce que d'un pouce, la tête toujours enfouie dans ses épaules, observant le sol sans vraiment le voir. Toujours aussi désespérément muet. Yûki fronçait les sourcils, désemparée par son attitude. Elle n'arrivait pas à comprendre ce qui pouvait bien se passer dans l'esprit de Yusei. À un moment il clamait haut et fort son désir de protéger ses troupes, et l'instant d'après il était silencieux comme un agneau.
Levant les yeux au ciel, Yûki avait retourné son attention vers sa monture, posant le harnais sur le flan de son cheval. L'avantage, c'est qu'elle était sûr qu'il ne ferait plus rien de stupide dans cet état là. Le reste, elle pourrait s'en inquiéter plus tard. Saisissant sa selle des deux mains, elle s'apprêtait à poser un pied sur l'étrier quand la voix de Yusei s'était de nouveau fait entendre, plus caverneuse qu'avant :
« Comment pourrais-je être capable de venir en aide à une nation en deuil, si lorsque je combattais aux côtés de leurs défunts je n'ai pas fait tout ce qui était en mon pouvoir pour tenter de les sauver ? »
Le pied encore sur l'étrier, Yûki s'était tournée pour observer son prince, le regard toujours rivé sur le sol. Elle restait un instant sans bouger, perturbée par sa voix si abattue, simplement à regarder ses yeux éteints. Relâchant sa prise sur sa selle, elle s'était approchée en silence jusqu'à son niveau, posant sa main sur son épaule juste assez fort pour avoir son attention.
« N'oubliez pas qui vous êtes. Votre rôle ainsi que celui de votre famille est de faire en sorte que ce pays prospère. C'est ce pour quoi vous allez prêter serment lorsque vous atteindrez votre majorité. Je ne vous connais pas, et pour être tout à fait sincère je reste assez septique en ce qui concerne vos prédispositions à devenir roi. Mais je sais aussi que vous aimez sincèrement ce pays ainsi que ses habitants, et que vous ferez tout ce qui est en votre pouvoir pour devenir une personne digne de gouverner un jour ce royaume. Si vous souhaitez réellement pouvoir être un jour un souverain respectable et respecté, alors commencez dès aujourd'hui à agir en tant que tel. Ayez autant de considération envers votre propre vie que vous en avez pour celle de vos soldats. Et au lieu de chercher à fuir la vue d'un peuple en deuil, battez-vous réellement pour que vos citoyens soient fiers de pouvoir dire que leur prince a combattu corps et âme pour ramener la victoire à son pays !
- ...Commandante Rivers, c'est cela ? avait demandé Yusei après un court silence.
- Oui, Votre Altesse. »
Yusei se redressait finalement pour faire face à son interlocutrice. Et lorsque son regard avait rencontré celui de Yûki, ses yeux étaient devenus si expressifs qu'ils la surprirent l'espace d'un instant.
« Mes amis m'appellent Yusei. Ce serait pour moi un honneur que vous m'appeliez également ainsi. »
Yusei avait tendu une main vers Yûki, comme une promesse muette d'une amitié naissante. Yûki était restée un instant inerte face à cette poignée de main, indécise sur l'attitude à adopter.
« Je crois que j'aurais grand besoin de vos conseils à l'avenir, avait continué Yusei, ainsi que de votre aide en ce qui concerne ma maîtrise au combat.
- Vous appelez ça une maîtrise de combat ? Si c'est ce que vous pensez, je crois en effet que mon aide ne sera pas de trop. »
Yûki observait cette main toujours tendu vers elle, et le regard assuré de Yusei qui l'ébranlait encore. Fronçant les sourcils. Tergiversant.
Malgré leur âge similaire, le prince était encore immature dans bien des domaines. Il suivait tête baissé ses émotions sans prendre la peine d'avoir d'autres avis que le sien. Son éducation princière l'avait rendu quelque peu puéril, et aussi inapte au travail d'équipe. Il était impulsif, têtu, beaucoup trop idéaliste, incapable d'évaluer une situation, et encore moins de réfléchir avant d'agir.
Et malgré tout...
Un sourire de coin sur les lèvres, Yûki avait saisit la main tendue vers elle avec conviction, renvoyant le même regard déterminé au prince.
« Ce serait pour moi un honneur, Yusei. »
Il essayait de faire de son mieux.
C'était ce qu'elle avait pensé à ce moment là. Malgré son inexpérience et son caractère enfantin, il avait une détermination dans le regard qu'elle n'avait jamais vu chez aucun autre de ses soldats. Et ce jour-là, en acceptant de retourner sa poignée de main, elle avait décidé de tout miser dessus.
Sa loyauté sans faille envers son peuple et son désir fantaisiste de sauver chaque soldat durant la bataille avait suffit à la convaincre. Ce jeune prince aux idéaux un peu trop utopique et au regard remplit de rêveries irréalisables avait été pour elle ce dont Metropolis avait désespérément besoin. Et elle se devait de faire en sorte que cette tête brûlée ne risque plus sa vie inutilement pour pouvoir un jour assurer la relève lorsque son heure viendrait d'être roi.
Le lendemain même, Yûki avait demandé son transfert immédiat dans la Garde Royale.
Yûki regardait avec nostalgie l'écusson de sa garde brodé sur sa veste d'uniforme, où s'était ajouté avec les années quatre étoiles argentés indiquant son grade de Général de corps d'armée, quand elle sentit quelqu'un lui donner un léger coup de coude dans les côtes.
« À quoi donc es-tu en train de penser ? questionna Yusei.
- Quelques vieux souvenirs sans importances. »
Yusei s'apprêtait à demander plus de détails, quand un hennissement de cheval résonna dans l'allée principale du palais. Interpellé, le duo s'avança un peu dans la cours, discernant bientôt des bruits de pas qui ne leurs étaient pas étrangers ; un claquement discret de talons hauts suivit de près par de lourd pas de bottes en cuir usées, aisément reconnaissable à leurs oreilles.
« Et voici donc l'arrivée de notre tant attendu Premier Bouffon du prince, » fit Yûki le sourire aux lèvres.
Sortant de l'ombre du préau, un jeune homme se dessina en premier, et Yûki eu un rire moqueur en apercevant son ami Crow, le dos voûté et les mains résolument installées dans les poches de sa veste en cuir pâli par l'usure, un bandeau empêchant ses cheveux roux de dévaler sur son visage.
« Hey, l'aristo ! s'indigna Crow en arrivant à leur hauteur, qui est-ce que tu oses traiter de bouffon ?
- Premier Bouffon, rectifia Yûki, le doigt levé pour appuyer ses propos. Et qui d'autre que toi cela pourrait-il être ? Certainement pas Aki voyons, tu sais très bien que j'éprouve le plus profond des respects envers elle.
- Respect auquel je n'ai évidemment pas droit, » rechigna Crow faussement vexé, son visage rappelant celui d'un enfant boudeur.
Yûki ricana, observant avec amusement son ami rougir d'une colère feinte, tandis que derrière lui une jeune femme sortait à son tour de l'ombre de l'abri. Ses hautes bottes incarnat et son luxueux manteau pourpre faisait d'autant plus ressortir ses cheveux vermillons, et ses grands yeux parme pétillants de joie. L'accueillant avec un sourire, Yûki désigna Yusei d'un signe de tête qui se dirigeait déjà vers elle, l'air plus encore guilleret qu'avant.
« Je te rappelle que nous sommes tout les deux dans la même unité spéciale ma belle, continua Crow, et que nous occupons officiellement le même poste. Mais si bien sûr tu as des réclamations à faire à ce sujet, je suis tout disposé à y répondre autour d'un Duel, susurra t-il, un sourire provocateur aux lèvres la défiant d'accepter.
- Navrée, mais les Duels d'Invocateurs sont interdits dans l'enceinte du palais, trancha Yûki en balayant son défi de la main. En revanche tu pourrais essayer d'entraîner Yusei, il est un peu dans les nuages ce matin. Une aide masculine pourrait peut-être le remettre d'entrain.
- Pas sûr, ricana t-il, à mon avis on l'a perdu pour le reste de la journée. »
Yûki le questionna du regard, la tête inclinée sur le côté. Crow désigna l'autre duo d'un signe de tête, un sourire narquois au visage. Suivant son regard, Yûki observa Yusei en pleine discussion avec Aki, le visage éclaircit par la joie, avant de sourire et de la prendre dans ses bras jusqu'à ce que ses pieds ne touchent plus sol, l'embrassant avec toute la timidité et la tendresse du monde entre chaque rires étouffés d'Aki.
Oui, je crois en effet qu'il est inutile de continuer l'entraînement pour aujourd'hui...
Yûki eu un soupir d'exaspération, levant les yeux au ciel en mimant l'irritation, un sourire se dessinant malgré elle sur son visage. Son agacement était bien moindre en réalité, et elle était sûrement avec Crow la dernière des personnes sur cette Terre à bien vouloir se plaindre du bonheur qu'affichait publiquement ses deux amis. Ils leurs avaient dissimulés leur inclinaison l'un pour l'autre pendant si longtemps – sans grand succès d'ailleurs – qu'il était plus agaçant pour eux de penser qu'ils avaient du dissimuler pendant des mois leur bonheur, par simple peur des réactions alentours.
Mais il était vrai que leur statut respectif d'héritier et héritière de royaumes voisins pouvait aisément justifier leurs inquiétudes. Une union entre eux signifierait également celle de leurs deux royaumes, ce qui n'était pas quelque chose qu'ils étaient en droit de décider seuls.
Brisant leur étreinte, Aki se tourna vers Yûki pour la prendre à son tour dans ses bras avec toute l'affection qui lui restait, Crow s'en tournant vers Yusei pour lui asséner une accolade plus masculine.
« Yûki, cela fait si longtemps que je ne t'ai plus vu, se plaignit gentiment Aki. Mon impatience à la simple pensée de vous revoir tous me faisait presque compter les jours qui me rapprochait de mon retour ici. »
Yûki lui rendit son étreinte avec la même affection, riant en entendant ses paroles.
Izayoi Aki était l'unique enfant du roi de Spartan, un royaume voisin de Metropolis avec lequel il entretenait d'excellentes relations depuis des décennies, grâce notamment à l'amitié qui subsistait entre les souverains des deux pays. Malgré un caractère affirmé commun à toutes les princesses du royaume de Spartan, elle était d'un naturel calme et s'exprimait toujours avec douceur, même lorsqu'elle était en colère, ce qui avait tendance à l'agacer et à faire souvent rire Yûki. Par son seul sourire, Aki rendait les gens heureux. Elle avait l'art d'apaiser les cœurs par sa simple présence, et chacun de ses éclats de rires semblaient renfermer en eux quelques fragments magiques de bonheur.
Yusei avait fini par s'éprendre si fort de son rire, qu'il s'était juré un jour de pouvoir l'entendre jusqu'au dernier souffle de sa vie.
« Deux mois tout au plus, ce n'est pas aussi long. Et puis je suis sûr que tu te languissais surtout à l'idée de revoir une certaine personne, la taquina Yûki en pointant Yusei d'un signe de tête, causant un rougissement joyeux à Aki qui la fit d'autant plus sourire. Pardon, je crois que je ne me lasserais jamais de te tourmenter. Mais toi aussi tu m'as manqué. La vie ici n'est plus la même sans toi, surtout lorsque l'on a pour seule compagnie ces deux spécimens là. »
Elles tournèrent presque simultanément leurs regards vers l'autre duo, observant un instant sans mots les deux jeunes hommes se battre à même le sol comme deux chiens s'amusant dans un bac à sable.
Il faut dire qu'il n'y a pas grand chose à dire, pensa Aki en levant gentiment les yeux au ciel.
« Et dire que l'un d'eux est censé un jour succéder au trône de Metropolis, et l'autre protéger notre royaume des menaces extérieures. Yûki soupira en prenant un air accablé. Mais laissons donc ces deux animaux s'amuser dans leur terre pour le moment. Raconte moi plutôt comment c'est passé la rencontre de ce matin. »
Il semblait évident au vu de son empressement que cette question lui trottait dans l'esprit depuis qu'Aki était arrivée. Et à la vu du pétillement de joie qui apparu presque aussitôt dans ses yeux, Yûki se dit qu'elle avait sûrement dû attendre secrètement d'être enfin questionnée à ce sujet. Car il aurait bien entendu était inconvenant que ce soit elle qui engage d'elle-même cette conversation.
« Tout c'est passé à merveille, fit Aki en souriant de plus belle. Et c'est allé aussi extrêmement vite, je dois dire. En même temps, il n'y avait pas de grande objection du côté du père de Yusei comme du côté du mien. Il avait été convenu il y a de cela des années que nos deux pays tenteraient une alliance durable au travers d'un mariage entre nous deux. Le fait que ce soit Yusei et moi qui ayons pris l'initiative de demander à nous fiancer avant que nos parents ne nous parlent de leurs projets a juste accéléré les choses, conclue t-elle, haussant joyeusement des épaules.
- J'aurais bien aimé être là lorsque vous leurs avaient annoncés la nouvelle, riait Yûki, essayant d'imaginer la réaction des souverains des deux pays face à la demande de leur enfant respectif.
- C'était assez comique je dois dire, confirma Aki. Je crois que c'est la première fois que j'ai vu le père de Yusei être autant pris au dépourvu. Yusei aussi a d'ailleurs dû être étonné, il s'est mit à serrer ma main si fort que j'ai cru que mes doigts allaient prendre la forme de sa poigne !
- Je veux bien te croire. Pauvre Yusei ! Un peu plus et son cœur serait sûrement sorti de sa poitrine. Mais je suis vraiment contente pour vous deux, souffla tendrement Yûki, prenant les mains d'Aki dans les siennes. C'est tellement rare de nos jours qu'un mariage royal soit prononcé au nom de l'amour réciproque entre les deux promis, et non dans le but de sceller une entente entre leurs pays. C'est certes un peu bateau comme vœux, mais je vous souhaite tout le bonheur du monde et plus encore.
- Ce seront sans doute les meilleurs vœux que j'entendrais. Merci Yûki. »
Aki la prit de nouveau dans une embrassade, un petit sourire tremblant sous l'émotion du moment. Le bonheur de l'instant semblait embaumer les jardins du palais. Tout semblait plus joyeux autour d'eux, plus coloré. Presque doucereux.
Les festivités en l'honneur du mariage seraient sans doute gigantesques, et dureraient des jours. Au vu d'une alliance comme celle-ci, de nombreux souverains et autres importantes personnalités se déplaceraient des quatre coins du continent pour offrir leurs félicitations aux futurs mariés, en espérant sans doute aussi de cette manière s'attirer la sympathie du couple princier et s'en faire de nouveaux alliés. Les royaumes de Metropolis et Spartan s'unissant dans une alliance durable ? Mieux valait avoir ces deux nations de son côté plutôt que parmi ses ennemis.
Tout ces rassemblements occasionneraient sûrement également un renforcement de la garde. Une telle effervescence de richesse réunit au même endroit durant plusieurs jours avait de quoi attirer nombre de personne mal intentionnée. En temps que Général de corps d'armée du royaume de Metropolis et Gardienne de la Royauté, Yûki serait au première loge dans toutes ces organisations à prévoir.
Les semaines à venir risquent fort d'être longues... gémit Yûki, pensant au travail qui allait bientôt lui tomber dessus.
De bruyants bruits de pas provenant de l'entrée du château coupèrent court ses lamentations intérieures, attirant l'attention du groupe. Essoufflé comme un bœuf par la course, un garde se dirigeait prestement vers eux, le visage visiblement rougit par l'effort.
« Je vous pris de pardonner mon intrusion Messires, Mesdames, fit-il en s'inclinant respectueusement devant chacun, reprenant son souffle par la même occasion, mais j'apporte un message urgent de la part du roi.
- Qui a t-il, Ushio ? demanda Yusei en poussant négligemment Crow sur le côté pour remettre sa veste en place.
- Le roi exige de toute urgence votre présence à tous dans la Salle du Conseil, Votre Majesté.
- Que se passe t-il ? s'empressa Yûki. Parles, tu nous inquiètes. Toute la joie du groupe semblait s'être comme évaporée en quelques secondes.
- Je vous pris de m'excuser Madame, reprit-il en s'inclinant de nouveau. Je n'ai pas tout les détails, mais il semblerait que le roi Jack Atlas soit revenu victorieux de sa conquête du territoire de Satellite. Il sera de retour dans sa résidence à Domino City d'ici environ deux semaines. Le roi Fudo souhaiterait vivement s'entretenir avec vous tous à ce sujet.
- Victorieux ? s'exclama Crow sous le choc. Après seulement deux mois de front ?
- Oui, Messire, confirma Ushio, le ton grave.
- Dieu du ciel, fît Aki la mine apeurée, une main posée sur sa poitrine pour calmer sa stupeur. Avec ce nouveau territoire qui touche vos frontières et les tensions qui demeurent entre vos deux pays, je crains qu'il ne soit tenté du pire...
- Mon père a pensé la même chose lorsqu'il a appris qu'Atlas était entré en guerre contre Satellite, fît Yusei. Il est évident pour tous qu'il veut utiliser ce nouveau territoire acquis comme voie d'accès vers notre royaume.
- Mais bon Dieu c'est quoi son problème avec nous ? s'indigna Crow, avec toute l'ardeur et le lâché-prise que lui avait transmit ses origines paysannes.
- Inutile de continuer cette conversation ici. » éluda Yûki, posant une main apaisante sur l'épaule de Crow qui se détendit presque instantanément.
Fixant un à un Yusei, Aki et Crow, le groupe hocha la tête simultanément, n'ayant pas besoin de mot pour se comprendre.
« Nous te suivons, Ushio » commanda Yusei, endossant de nouveau son rôle d'héritier.
Sans plus de cérémonie, le groupe se dirigea en hâte vers les portes principales du palais suivit par le garde, en direction de la Salle du Conseil, tout leur laisser-aller d'il y a quelques minutes envolé. L'heure n'était plus aux réjouissances matrimoniales.
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Un peu plus tard dans la soirée, à des centaines de kilomètres de là, une humeur bien plus festive régnait entre les murs de la résidence provisoire de Jack Atlas. Celui-ci avait décidé après sa victoire expéditive contre l'armée de Satellite de prendre position dans l'un des domaines privés de l'ancien dirigeant du pays, afin de s'y reposer quelques jours avant de reprendre la route vers Domino City. Il lui restait également plusieurs affaires administratives à régler quant à l'intendance de son nouveau territoire durant son retour au pays. Il fallait bien que quelqu'un se charge de mettre en action les nouvelles directives qu'il avait prévue pour ce royaume, avant que celui-ci ne fasse officiellement parti intégrante du pays de Domino.
Mais pour l'instant, l'heure était aux réjouissances.
« J'espère que ton séjour ici ne te rendra pas nostalgique mon cher Rex, fit Jack à l'intention de l'homme assit face à lui, je m'en voudrais d'être responsable du mal du pays d'un de mes plus cher conseiller.
- Vous n'avez pas à vous inquiéter de cela Votre Altesse, ce dépaysement va me faire le plus grand bien. Ce pays m'est fort agréable et le climat y est plus doux qu'à Domino City. C'est parfait pour un homme de ma condition, » ajouta t-il en se saisissant de sa tasse de thé pour la porter à ses lèvres.
Jack eu un petit sourire moqueur à ces paroles, observant en silence son conseiller savourer sereinement quelques gorgées de son breuvage.
Rex Godwin était un homme mûr d'apparence très distingué, aux long cheveux grisonnant ramenés en arrière, et qui malgré les années qui s'accumulaient derrière lui demeurait encore étonnamment vigoureux. Ses manières aristocrates et son intelligence aiguisée lui avaient très vite valus de gagner la confiance et la reconnaissance de Jack Atlas, deux choses bien durs à acquérir. Il prenait souvent plaisir à parler de lui-même sur son âge avancé, que ce soit pour en rire ou dans certains cas pour rappeler succinctement à ses interlocuteurs que malgré les apparences, il restait un homme d'expérience aux nombreuses connaissances et au bras long, et donc un homme que l'on se devait de craindre et respecter.
Lorsqu'il lui prenait d'ironiser ainsi en s'adressant à Jack, il lui arrivait parfois de se demander laquelle de ces deux raisons le motivait.
« Et puis, continua Godwin, j'aurais la chance de ne pas me retrouver seul avec mes démons. Notre cher Jeager sera également là pour me tenir compagnie.
- Certes, ce cher trésorier... » souffla Jack en se saisissant également de sa tasse de thé, observant du coin de l'œil un petit homme aux cheveux violet et au maquillage extravagant rager à l'autre bout du salon contre un serviteur.
C'était en réalité Jack qui avait demandé personnellement à ce que son trésorier reste à Satellite avec Godwin, et il ne doutait pas que celui-ci devait sans doute être au courant. Il avait bien évidemment justifié son choix, expliquant à Jeager que de nombreuses activités administratives et financières, qui demandait toute l'attention d'un homme à l'aise avec les chiffres requéraient ses compétences ; mais c'était en fait purement et simplement le moyen le plus efficace qu'il avait trouvé pour ne plus avoir à subir la présence de son régisseur durant au moins quelques semaines, voir quelques mois. Car malgré sa grande utilité pour ce qui était de gérer les comptes du royaume de Domino, Jack ne pouvait simplement plus supporter la présence de cet homme, avec son insupportable rire épointé et ses constants projets d'enrichissement du pays d'ordre plus que discutable.
Il n'arrivait pas à comprendre comment Godwin pouvait réussir à supporter avec une telle facilité apparente ses incessants couinements sur les rentrées d'argent mensuelles et annuelles du pays. Mais d'une certaine manière, la capacité qu'avait cet homme à endurer les bavardages de son trésorier sans sourciller ni perdre un instant son sourire renforçait d'autant plus le respect que Jack avait envers lui.
Comme si le silence de la conversation entre les deux hommes l'avait interpellé, Jeager se dirigea vers eux le pas sautillant, laissant libre court au serviteur tourmenté de s'éclipser discrètement de la pièce. Jack ne prit même pas la peine de dissimuler son mécontentement lorsqu'il vit le trésorier s'avancer vers lui, un sourire complaisant s'affichant sur son visage de fouine.
« Monseigneur, » susurra t-il d'une voix doucereuse en frottant ses mains gantées, le dos rond pour paraître plus obligeant, « concernant ce nouveau territoire acquis, je pensais depuis peu à une idée pour commencer dès lors à faire valoir vos droits sur les richesses de ce pays. »
Jack ferma ses yeux d'agacement, se pinçant l'arrête du nez par habitude pour contenir son irritation. Assit de l'autre côté, Godwin sirotait tranquillement son thé, observant avec un amusement brillamment dissimulé son roi perdre patience face aux jacassements de son collègue.
« Il faudrait peut-être profiter des changements de lois à venir pour augmenter les redevances des citoyens, monseigneur, continua Jeager sans prêter attention aux réactions de son roi. Après tout, un revenu supplémentaire ne serait pas de trop pour aider à l'agrandissement de votre puissante armée-
- Pour provoquer la colère du peuple de Satellite et causer une rébellion alors que nous venons tout juste de conquérir ce royaume, et que nos soldats sont épuisés ? siffla-il, le ton glacial. Rendez-vous plutôt utile Jeager, et allez demander aux cuisiniers de me préparer un en-cas.
Closant net la discussion, Jack révoqua son trésorier sans plus de cérémonie, ne lui accordant qu'un vague geste de la main lui indiquant de prendre congé dans l'instant. Jeager, hébété de la réponse de son roi, disposa des deux hommes sans demander son reste et fila hors du salon, cachant son embarras du mieux qu'il le pouvait alors qu'il prenait la même porte que celle empruntée plus tôt par le serviteur qu'il avait lui-même congédié.
« Ce satané clown me file la nausée chaque fois que je l'aperçois, cracha Jack, les lèvres tordues par le dégoût et un certain mépris.
- Ne soyez pas si rude envers lui, fit Godwin avec un amusement contrôlé. Il a su se montrer très compétant au fil des années.
- Ça vaut mieux pour lui, sans ça je l'aurais remercié depuis longtemps. »
Jack posa sa tasse sur le rebord de la table basse, croisant les jambes en se repositionnant au mieux dans son fauteuil. Les deux hommes restèrent un instant silencieux, appréciant simplement le confort du moment présent.
Il est vrai que l'on était pas si mal que ça dans ce pays. Le soleil était plus présent qu'à Domino City, le royaume de Satellite se trouvant plus au sud que celui-ci, et le climat y était plus sec. Ses grandes plaines étaient également un grand changement par rapport au royaume de Domino, qui dominait les autres pays du haut de ses pics et ses montagnes. Et malgré le manque évident de richesse, les gens habitant ici semblaient être en quelque sorte plus... souriant que dans son pays.
La pauvreté rapproche sans doute les gens, supposa Jack en observant vaguement la décoration de l'habitacle, plutôt sobre mais néanmoins chaleureuse.
« Dites moi, reprit Godwin avec détachement, interrompant les vagabondages intérieurs de Jack qui semblait avoir un instant oublié sa présence, si je puis me permettre de vous poser cette question, qu'avez vous prévu exactement concernant le royaume de Metropolis ?
- Pour tout dire je n'en ai encore aucune idée, railla Jack en s'enfonçant dans le canapé. Je sais très bien que je n'ai rien à craindre venant d'eux, ces pacifistes répugnent la guerre comme la peste. Mais les Invocateurs qui naissent chez eux sont d'une puissance inouïe comparés aux nôtres et à ceux des autres pays, et aussi bien plus nombreux. Leurs connaissances associées à mes ressources me permettraient de conquérir les terres par dizaines et d'enrichir leur pays en même temps que le mien, mais ces idiots de conservateurs se bornent à refuser toute alliance avec notre pays. »
Il ragea soudainement, abattant son poing sur l'accoudoir de son fauteuil.
« Mais il se trouve que je suis aussi borné qu'eux, reprit-il en sifflant entre ses dents, et bien décidé à m'emparer par la force de cette puissance qu'ils protègent si jalousement sans même en profiter. Mais un conflit entre nos royaumes reste pour l'instant trop risqué, et je n'ai pas encore suffisamment d'hommes pour partir avec l'avantage. Si seulement j'arrivais à faire s'introduire un espion dans la capitale...
- Ce serait idéal en effet, mais tout les indicateurs que nous avons envoyés là-bas sont revenus bredouille, ou ne sont pas revenus du tout. Ils gardent leur sagesse avec autant de rudesse qu'un dragon garde son trésor. Leurs défenses internes sont vraiment impressionnantes je dois dire.
- Venant de toi Godwin, c'est un sacré compliment que tu leur fais, ironisa Jack. Mais le problème reste épineux. Quoi qu'il en soit, je vais pour l'instant me contenter d'observer leurs réactions face à ma victoire. Me voir à deux pas de leur royaume venir titiller leurs frontières ne les laissera sans doute pas de marbre. Après tout, le seul moyen de faire réagir une fourmilière est de lui donner un bon coup de botte. Et si celui-ci n'est pas assez fort pour les faire agir, alors je ferais en sorte qu'ils sentent bien passer le deuxième, » murmura t-il, les yeux brillant d'une dangereuse malice.
Godwin méditait les paroles de son roi, une main soutenant son menton. Ils leurs suffiraient en effet seulement de quelques informations internes sur ce pays pour qu'ils puissent adapter leurs troupes en conséquence, et le tour serait joué. Malheureusement, il était devenu clair qu'envoyer un espion dans Metropolis même était chose impossible. Mais si l'on procédait à l'opposé de cette idée, dans ce cas peut-être que...
Une ébauche d'idée commença à naître dans l'esprit du conseiller, grandissant un peu plus au fil de ses réflexions intensives. Mais plus il s'y penchait, plus ses chances d'aboutir lui semblait mince.
En revanche peut-être qu'avec son aide... Oui, cela pourrait devenir faisable...
« Votre Altesse, reprit-il, j'aurais peut-être une idée qui pourrait dissoudre tout vos problèmes.
- Que veux-tu dire ? demanda Jack, et l'on voyait sans mal que cette seule phrase avait suffit à rassembler toute l'attention le roi, ce qui était chose rare.
- Je préfère ne pas encore en parler si cela ne vous dérange pas. Compte tenu de ses faibles chances d'aboutir, je ne voudrais pas vous faire vous réjouir inutilement. Mais si tout se passe comme prévu vous saurez tout à votre retour à Domino City, durant la fête organisée pour célébrer votre victoire.
- Tu m'intrigues de plus en plus en me disant tout cela, Godwin...
- Faites moi confiance Votre Altesse, si tout se déroule comme je l'espère votre patience sera dûment récompensée. Vous pouvez considérer cela comme un cadeau personnel de ma part pour féliciter votre triomphe. »
Jack observa un instant son conseiller, le visage blanc de toute émotion. Il ne le montrait pas – ce ne serait pas digne d'un roi de son statut – mais la curiosité le rongeait de savoir ce que manigançait Godwin. Il savait, pour connaître depuis maintenant plusieurs années cet homme, que celui-ci avait une idée habile derrière la tête, et il lui accordait bien volontiers toute sa confiance. Après tout, qu'avait-il à perdre ?
Mais tout de même, de là à résoudre tout ses problèmes...
« Très bien, finit-il par dire, tu as toute ma confiance. J'attendrais donc ce " cadeau " avec la plus grande impatience. Il sourit, et observa un instant le feu qui crépitait encore dans la cheminée. Ceci étant dit, je vais dans mes quartiers. Il me reste encore des documents à traiter, et j'aimerais pouvoir prendre un peu de repos avant demain.
- Bien sur Votre Altesse, dit Godwin en se levant pour saluer son roi. Je vous souhaite une bonne fin de soirée. Il s'inclina respectueusement tandis que Jack se levait également.
- Oui, à toi aussi. »
Sans plus de politesse, Jack tourna le dos à son conseiller et sortit de la pièce par la grande porte, ses lourdes bottes faisant grincer le plancher du couloir sous ses pas.
Le silence s'installa de nouveau dans la résidence. Godwin resta un instant ainsi, simplement assit à siroter son thé avec parcimonie en observant à son tour le feu de cheminée d'un air absent.
En considérant les nouveaux fonds acquis par leur victoire sur Satellite, obtenir la somme nécessaire à la mise en place de son projet serait sans doute une tâche aisée. La seule véritable contrainte restait en réalité le peu de temps pour le mettre à exécution. Sans compter le danger encouru dû à ses faibles chances de réussite.
Dégustant avec flegme la dernière gorgée de sa boisson, Godwin posa sa tasse sur une table basse pour se saisir d'une petite cloche en or disposée juste à côté, faisant sonner son carillon pour appeler un serviteur. Une jeune femme entra presque aussitôt dans le salon, saluant respectueusement le conseiller en attendant patiemment sa requête.
« Veuillez faire savoir à Monsieur Jeager que je l'attends dans le salon. Vous le trouverez sans doute dans les cuisines, ajouta t-il avec un sourire poli.
- Bien, Monsieur. »
Quelques minutes plus tard le trésorier entrait dans le salon, un plateau repas entre les mains supposément destiné au roi. Faisant fi du ridicule apparent du régisseur, Godwin intima à l'homme de s'approcher, l'air sévère.
« Contactes Kiryu au plus vite, je vais avoir besoin de ses compétences. »
Premier chapitre plutôt long, je le conçois. Notre cher Jack adore se faire désirer.
Un avis constructif ? Ou non constructif ? Même une minuscule onomatopée ? Oui je sais, je suis une auteure désespérante.
H.
