Disclamer :Les personnages ne sont pas à moi, pas plus que les lieux. Seul ce que j'en fais m'appartient, et je le fais par pur plaisir, celui de voir mes deux chouchous ensemble ('fin, le Harry de J.K, j'ai un peu de mal avec ses crises d'ado pré-pubère, mais bon...)

Avertissement : Pour tous les irrascibles irrespecteux bornés qui ne comprennent pas que l'amour n'a pas de sexe, étant donné que cette histoire est un Drarry, je vous conseille de faire demi-tour... Pour ceux qui ne sont pas forcément à l'aise avec de grandes démonstrations de tendresse autres qu'une tappe sur l'épaule, ne vous inquiétez pas, il n'y a pas de grand débordement. Pour ceux qui ne sont pas à l'aise avec les histoires de mort ou de suicide, je vous déconseille d'aller plus avant.

Pour ceux qui restent !

Enjoy !!

Aimer tue...

Une Plume à Papote glisse sur un parchemin vierge perdu au milieu de pages déjà noires d'encre. L'amas de parchemins s'étale sur le sol de la salle de bains, alors qu'un jeune homme brun prostré dans la baignoire ouvre son coeur, les yeux vides emplis de larmes.

... Tu ne peux même pas savoir à quel point je souffre de ne pas pouvoir t'aimer. Je ne me retrouve plus dans ma vie... Voldemort est mort, j'ai rempli mon rôle ; rien ne peut plus me contraindre à vivre dorénavant. À quoi bon, t'aimer, si ça me tue.

Quelle ironie, n'est-ce pas ? J'ai vécu tant de morts et survécu tant de fois, pour en arriver là, à vouloir m'éteindre. L'Amour, qui m'a servi à vaincre mon ennemi de toujours, me détruit maintenant.

Tout ça pour ça. Tout ce sang versé, toutes ces horreurs commises, toutes ces tortures effectuées... Tous ces morts, que je pourrais rejoindre en un claquement de doigts, en un sort. Ça sert d'être puissant, finalement... J'ai même réussi à inventer ma mort. C'est un beau sort, tu sais, sa formule est si pleine de sens pour moi...

Je suis pitoyable, hein ? C'est digne d'une Pouffsouffle énamourée de première année. Et je suis un Gryffondor. Le courage de vivre me quitte depuis quelque temps, maintenant. De toute façon, à quoi m'attendre mis à part ton mépris ? Et je ne veux certainement pas de ta pitié. Je préfère encore que tu me haïsses... Ne dit-on pas qu'entre la haine et l'amour il n'y a qu'un pas ? Je me suis accroché à ça longtemps... Mais maintenant, ça ne me suffit plus... Quand je vois haine et mépris affiché sur ton visage, je ne peux m'empêcher de me demander ce qu'il y a derrière ce masque de glace, d'airain. Je ne peux m'empêcher de vouloir lire tes pensées ; savoir si tu es le digne fils de ton assassin de père...

J'ai cherché, je t'ai observé longtemps à la recherche d'un indice, et je n'ai vu que tes bras blancs à la peau parfaite totalement immaculée... Pour ce que ça vaut, je suis fier de toi. Tu ne peux pas savoir à quel point j'ai été soulagé. Tu n'es pas un meurtrier.

J'étais prêt à mourir pour toi, même si tu avais du sang sur les mains. Mais tes doigts graciles sont toujours purs, exempts de tortures et de crimes. Je suis heureux d'avoir eu raison ; tu es quelqu'un de bien malgré ce que tu veux faire croire.

Je t'aime, si tu savais comme je t'aime !

Je ne sais même pas comment cette histoire a bien pu commencer. Un matin, je ne me suis pas levé en me disant que j'allais t'aimer, non... Mais je me suis rendu compte lorsque j'étais avec Ginny que j'aurais préféré être entre tes bras blancs. Protégé contre ton torse. J'en suis arrivé à provoquer les disputes, à vouloir qu'on se batte pour sentir ton corps tout contre moi...

Au début, j'ai presque cru déceler de la surprise dans tes yeux couleur d'orage. Et puis tu as frappé plus fort, et je fixais mes iris dans les tiens, immobile. Je ne voulais pas que mes mains rencontrent ton corps si doux. Pas comme ça en tout cas... Alors j'attendais que tu me frappes toujours plus, que tu reportes ta rage sur moi ; que j'aie au moins cette importance... Je voulais rester là, sous tes coups, toujours, jusqu'à sentir le goût métallique de mon propre sang. Mais on n'en est jamais arrivés là. Tu arrêtais toujours avant de me marquer, avant de me faire vraiment mal. Avant de me satisfaire... J'aurais pu mourir sous tes coups, pour que ton visage soit le dernier à s'imprimer sous mes yeux...

Je n'ai jamais réussi à comprendre comment j'en étais arrivé là. Pourquoi mes sentiments étaient aussi forts. Pourquoi j'avais envie de rire en pleurant ou de pleurer en riant chaque fois que tu posais ton regard haineux sur moi. Tout ce que je sais, c'est que j'ai une boule dans la gorge, qui ne s'envole jamais.

Je m'amuse, je ris avec mes amis, je travaille. Je ne sais pas comment. Cela doit tenir de réflexes, d'habitudes innées imprimées au fond de moi. Personne ne sait. Et pourtant... Il ne doit pas être compliqué de voir que quand je fais des potions, je pense à toi. Que quand j'ai des devoirs de Métamorphose, je repense à toutes les fois où McGonnagall a pu te punir. Qu'en Botanique, je t'imagine lever un sourcil d'un air hautain, disant à la prof que jamais un Malfoy n'a mis les mains dans la bouse de dragon et que ce n'est pas maintenant que ça va commencer !

Le pire, c'est le Quidditch... Je pensais qu'être sur mon Éclair de Feu me ferait toujours tout oublier, mais c'est raté... Dans ces cas-là, je ne pense seulement plus qu'à toi. Je vois ton visage dans le ciel, j'entends ta voix dans le vent, et je m'imagine que tes mains sur ma peau seraient aussi fraîches et douces que la caresse de l'air.

Je deviens fou, tu vois. Fou d'amour pour toi. Mais je ne suis pas érotomane ; je sais que tu ne m'aimes pas, et que tu ne m'aimeras jamais. Je ne demande pas grand-chose de plus, pourtant... Juste l'impossible... Juste toi...

Mais maintenant, cela n'a guère plus d'importance. Je t'ai raconté tout ça, toute ma vie, qui est une succession de danses avec la mort, qui se résume à toi, mais qui ne rime plus à rien... Je vais ranger toutes ces feuilles et te les faire parvenir, pour qu'au moins tu saches... La vie est belle, Draco, pour qui sait l'apprécier. Aime. C'est mon mot d'ordre. Même si au bout du compte aimer me tue, l'amour m'a créé et il m'a fait survivre. Aime. Aimer tue, mais aimer construit aussi...

Adieu mon amour, ou celui que tu ne seras jamais...

Je t'aime,

Harry

°0oo0°

Une magnifique chouette blanche au regard intelligent atterrit sur le lit vert et argent de la chambre du Préfet en Chef de Serpentard. Un jeune homme aux cheveux de lune sort de sa salle de bains privée, une serviette autour des hanches. Il a un haussement de sourcil : « Hedwige ? » La chouette hulule doucement, le regard triste. « Potter... » Le garçon exprime sa perplexité. Que lui veut son pire ennemi ? Il s'approche du volatile qui tend obligeamment sa patte. L'enveloppe est lourde, gonflée. Le blond la soupèse, vérifie le destinataire. La lettre lui est bien adressée. Il ouvre l'enveloppe et écarquille ses yeux gris, surpris. C'est la plus longue lettre qu'il ait jamais reçue. Cinq rouleaux de parchemin s'étendent devant lui. Il déroule le premier qui lui tombe sous la main : c'est le début de la lettre. La voix de Potter s'élève dans la chambre verte et argent. Ce sera l'unique fois, prévient-il. Si jamais le blond veut relire la lettre, il devra le faire seul. La voix du Survivant paraît sourde, étouffée. Lasse.

Le garçon décide d'écouter la suite ; il n'aura pas à lire de ses yeux, et cette voix l'apaise. Elle l'apaise mais lui fait aussi mal. Il se sent étrangement inquiet du ton employé ; la gorge semble comme nouée.

Il s'habille, prêtant une oreille attentive à la voix de son ennemi. La chouette est toujours juchée sur le lit, on dirait qu'elle pleure. Il y a une grande détresse dans ses yeux d'ambre depuis qu'elle entend la voix de son maître.

Le jeune homme est habillé, maintenant. Il s'est assis sur le matelas moelleux et écoute toujours, le visage de plus en plus livide à mesure que les parchemins s'affaissent sans vie... Il a l'impression d'assister à la vie de l'Élu. Il a l'impression de le comprendre, de vivre à sa place. Il a envie de pleurer pour tous ces morts, lui qui ne pleure jamais. De pleurer pour cette innocence gâchée, pour cette enfance jamais vécue et à jamais perdue. Il ressent la même culpabilité qui étreint le coeur de l'expéditeur de cette lettre. La culpabilité du survivant dont la vie jonchée de morts continue malgré tout. Il se sent mal. Il ne veut pas accepter l'évidence ; le Survivant lui écrit sa vie, car le Survivant ne veut plus survivre...

Et puis, il y a toutes ces allusions. Et puis, il y a la fin de cette lettre sans contresens possible à laquelle il est arrivé. Il y a cette déclaration. Il y a cet... amour. Il se sent coupable, encore : il est le dernier à pouvoir être aimé par Potter et à pouvoir l'aimer. Indirectement, l'Élu est responsable de la mort de Lucius Malfoy. Mais est-ce un mal ? Pourquoi accabler Potter d'une mort supplémentaire ? Après tout, lui-même n'a rien fait pour sauver son géniteur... Il n'aurait pas aimé avoir à tuer son Mangemort de père, parce qu'il avait un tant soit peut d'estime pour lui, peut-être même d'amour. Mais maintenant que la guerre est finie, il se rend compte qu'il aurait souhaité faire plus qu'être neutre... Qu'il aurait souhaité ne pas se cacher. Il n'a pas de mort sur la conscience, mais il n'a pas de vie non plus. Juste un sentiment d'inachevé et d'impuissance...

Maintenant que la guerre est terminée et qu'une sorte de paix règne entre les sorciers, il a pensé que peut-être Potter accepterait cette fois son amitié. Mais c'était sans compter le caractère borné du Gryffondor. Sans compter les rancunes d'adolescents et la culpabilité de l'Élu. Élu qui a tué. Même si c'était l'ennemi à vaincre, l'Élu a du sang sur les mains. Potter et sa philosophie gryffondorienne ont été dépassés par les évènements. Et le jeune Malfoy est certain que pendant la guerre, le Survivant n'a été qu'une arme de plus ; le fer de lance de l'Ordre du Phénix. Finalement, le jeune homme blond est satisfait de ses choix. Non pas fier, mais à peu près satisfait. Il regrette certains de ses choix, presque tous, même, mais il est heureux de les avoir faits. D'avoir pu les faire. Potter, lui, n'en a pas eu le droit. Ses choix sont morts en même temps qu'est née sa destinée, c'est à dire avant que lui même ne vienne au monde. Potter est l'Élu, et un élu n'a pas de choix, juste le devoir d'être manipulé pour l'accomplissement de sa prophétie.

Le Serpentard aurait voulu connaître l'enfant perdu, le petit Harry noyé sous l'image de héros. Mais il ne sait plus. La déclaration à coeur ouvert change la donne. Il a peur de devoir quelque chose à Potter. Il n'a jamais eu d'amis ; juste des gens qui lui étaient utiles. Mais aujourd'hui, il ne sait plus. Quand est-il ? Potter ne lui apporterait rien, sinon un renversement de l'image des Malfoy. À quoi bon se lier à lui ? D'amitié, bien sûr. L'amour est proscrit. L'amour n'existe pas, l'amour rend faible. C'est une histoire à laisser aux femmes, les hommes n'ont pas accès à ce mystère. Surtout pas les Malfoy. Et puis c'est un homme, par Merlin ! Un homme...

Le jeune homme n'a jamais pensé à son ennemi en tant qu'homme, à vrai dire, mais toujours en tant qu'égal. Et le blond ne s'est jamais senti homme. Juste un copié-collé de son père, un fils d'aristocrate ayant une éducation et des devoirs. Et depuis quelques mois, le garçon ne se sent toujours pas homme, mais plus du tout Malfoy. Juste Draco.

La voix de Potter s'est tue. Le garçon blond est toujours assis sur le bord du lit. Les coudes appuyés sur les genoux, la tête entre les mains, il se repasse la lettre mentalement. Il relève la tête, sentant ses doigts humides. Le liquide sur ses mains n'est pas du sang. Transparent, salé. Des larmes.

Il a envie de rire de l'ironie. Lui qui n'a jamais pleuré pleure sur le sort de sa Némésis. Sa respiration se saccade, mais il ne hoquette pas. Les larmes glissent doucement et simplement sur ses joues, sans fioritures. Cela lui paraît naturel de pleurer, tout à coup. Il n'en avait pas envie, mais maintenant, ça lui fait du bien. Il regrette de ne pas l'avoir fait plus tôt. Et il pleure, toujours plus. Encore. Pour son enfance perdue et celle de Potter. Pour la guerre et tous ses morts. Pour les crimes, pour les tortures. Pour l'horreur à laquelle il se bénit de pas avoir assistée. Il pleure pour tout et n'importe quoi. Et au bout d'un moment, il ne pense même plus. Son esprit est vide, son regard aussi, mais les torrents coulent toujours de sous ses paupières ouvertes sur l'évidence. Un instant, il songe à fermer les yeux pour tarir les larmes. Mais rien de semble l'empêcher de pleurer.

Et d'un coup, comme il avait commencé à pleurer, sans savoir, les larmes cessent de couler. Et Draco se dit que s'il reste prostré sur son lit, il se figera en statue. Si une seconde de plus, il reste à fixer le mur, plus jamais il ne pourra se lever, pleurer ou rire. Être heureux. Mais s'il reste encore quelques secondes, il pourra tout oublier. Sa jeunesse, la guerre, la mort. Potter.

Draco s'est levé. Il a décidé. Ce sera Potter. Il n'a pas grand-chose à lui donner, juste la vie, s'il arrive à temps. Draco court dans les couloirs froids et vides. Oubliée sa dignité. Il court. Oubliées les larmes qui sillonnent ses joues pâles et qu'il n'a pas pensé à essuyer. Un Malfoy ne court pas, un Malfoy ne pleure pas. Mais Draco n'est plus un Malfoy. Juste Draco.

Il court, toujours. Puis il arrive enfin devant le tableau de la Grosse Dame. !elle hausse un sourcil sceptique devant sur air dépenaillé et son écusson de Serpentard tandis qu'il reprend son souffle. Il a les poumons en feu, mais il est décidé. Son but n'est pas encore atteint. Il balbutie difficilement un « urgence... vite... » Elle lui sourit avec indulgence et lui réplique que sans mot de passe il ne peut pas entrer. Il n'a pas la force d'être un Malfoy une dernière fois. Il n'a pas non plus la force d'être en colère. Et il sait que le temps lui est compté. Il s'affaisse, tombe à genoux. Il est tout près du but et l'entrée lui est interdite.

Les larmes qu'il pensait avoir épuisées se remettent à couler. « Potter... Harry... » Il ferme les yeux, le souffle coupé par sa détresse. Il entend un cliquetis et se redresse brusquement, les iris plein d'espoir. Le portrait a pivoté. C'est donc ça le mot de passe ? S'il avait le temps, il ricanerait de l'orgueil gryffondorien. Mais il ne l'a pas. La Grosse Dame ne semble pas heureuse de le laisser entrer, mais cela lui importe peu. Il se précipite dans le tunnel et arrive dans une salle rouge et or. Confortable et chaleureuse. Weasley et Granger discutent à côté d'une cheminée au feu ronflant. Potter avait raison, ils ne se doutent de rien.

Deux escaliers. Il prend celui de gauche, comme dans son propre dortoir. « Malfoy ! » La voix du rouquin lui parvient alors qu'il passe le premier palier. « Pas Malfoy ! Draco ! ». Il continue. Monte les marches quatre à quatre. Il arrive enfin au septième palier. Il déboule dans la chambre et la travers en courant, sans s'arrêter.

°0oo0°

La chouette s'envole, transportant la vie de Potter entre ses serres. L'Élu referme la fenêtre de la salle de bains et y appuie son front. Il fixe le point blanc qui disparaît rapidement derrière une tour, comme une étoile filante. Apparition éphémère. Il fait un voeu, même s'il sait pertinemment que ce n'est pas une étoile filante. Et que cela ne lui sert plus à rien. De toute façon, le voeu ne sera pas exaucé. Trop improbable, trop impossible. Trop Lui. Il détourne le regard de l'endroit où a disparu la chouette et se retrouve à fixer la lune, sans la voir. En la regardant un peu malgré tout. Elle paraît lui sourire. La bouche de Potter se plisse en retour. C'est une belle nuit pour mourir. Il est heureux, il a envie de sourire. Il veut prolonger ce dernier instant le plus longtemps possible. Il se sent presque vivant, comme ça. Il regarde la lune, toujours...

La forme change devant ses yeux. Sans sans rendre compte, il a activé sa magie. Sa vision se trouble, se transforme. Ce n'est plus la lune, qu'il voit, mais une scène. La scène. Celle qu'il ne voulait pas voir, mais qu'il mourrait d'envie d'observer. Et finalement, sa magie a décidé pour lui. Et il voit le jeune homme blond, de dos, en train d'enfiler sa robe de sorcier. Et il entend sa voix monocorde. Il se fait penser à Binns. Il sourit, mais les larmes coulent de nouveau. Malfoy n'écoute pas. Il s'en fiche. Il laisse la voix de Potter déblatérer dans la vide, et il n'écoute pas. Le garçon aux cheveux de jais reprend le contrôle de sa magie et tourne le dos à la fenêtre. Il n'est pas en colère, il savait. Mais il est quand même déçu...

Il s'affaisse contre le mur sous la fenêtre, se recroqueville, et il pleure. Encore. Ficu Gryffondor et son coeur d'artichaut. Il a envie de mourir. Plus que tout. Et cela devient une obsession. Mourir. Il n'a pas testé son sort, mais instinctivement, il sait que ça va marcher. Ça doit marcher. Il retourne dans la baignoire et s'y fait couler un bain brûlant. Il ne sent pas la chaleur, il frissonne. Augmente la température. Il est toujours habillé. Sa robe de sorcier noire flotte à la surface de l'eau. Blanc de l'émail et noir de la robe. Il lui manque une couleur...

Son sort ne lui dit plus rien ; trop facile, trop rapide. Il relève ses manches et regarde ses bras. Rouge. Mais rouge trop pâle. Il veut quelque chose de beau pour la fin. Mourir. IL se rappelle tout à coup, de façon totalement inopportune le thé qu'il a but ce matin. Sans touiller. Le nuage orange qui se disperse tout doucement du sachet noir dans l'eau chaud du bol blanc. Il éclate de rire en lançant un sort. Il ne pourra pas tomber plus bas ; de prendre pour un sachet de thé !

Il contemple le résultat de son maléfice ; une de ses veine vient d'éclater. Il n'a pas mal, pas de piqûre, pas de brûlure. Juste le rire voilé par les larmes. La douleur, il ne la ressent plus, plus maintenant. Pas après avoir expérimenté la torture sous toutes ses formes. Il relance le sort. L'autre bras, une autre veine. L'eau est chaude, il infuse. Plus qu'à attendre...

Il appuie sa tête contre la bord de la baignoire, serein. Un sourire lointain flotte sur ses lèvres. Il se sent si vivant ! Et pourtant déjà mort... L'entre-deux si jouissif que procure la douce agonie. IL ferme les yeux ; la lumière commence à l'éblouir et il n'a pas la force de l'éteindre. Des étoiles dansent sous ses paupières. Des milliers d'étoiles filantes. IL en profite pour faire de nombreux voeux. Fous, inutiles et tardifs, mais tellement pleins de vie. Il sourit toujours, de ce sourire compliqué, à la fois douloureux et heureux. Il est bien, il ne frissonne presque plus. IL n'a pratiquement plus conscience de son corps. Il est heureux. Les yeux clos, il sent la tête lui tourner. Mais il sourit, toujours. C'est agréable, confortable ; il s'endort.

°0oo0°

Lorsque Draco atteint enfin la porte de la salle de bains des Septième année de Gryffondor, celle du dortoir s'ouvre à la volée, claquant une nouvelle fois contre la mur. Weasley se tient dans l'embrasure, rouge de colère. Si Draco n'avait pas envie de pleurer, encore, il en aurait ri. « La fouine... » commence le rouquin. Mais Draco ne lui laisse pas le temps de finir : « Où est Potter ? ». La belette le regarde, ébarlué, la bouche ouverte. « En quoi ça te regarde, Malfoy ? ». Le blond ne peut s'empêcher de ricaner, son orgueil a repris le dessus. Weasley se rapproche, menaçant. IL répète la question. Cherche à savoir pourquoi le Serpentard poursuit son ennemi jusque dans son dortoir. Le garçon aux cheveux de lune ressent une pointe de jalousie. Cette amitié est belle, protectrice... Mais elle n'a pas suffit ! Weasley ne sait même pas. À quoi bon l'amitié alors ?

Le rouquin est à un mètre de Draco, maintenant. « Malfoy » grince-t-il, des éclairs dans les yeux. « Pas Malfoy... ». Draco a instinctivement pris un ton suppliant. Weasley le fixe, encore une fois surpris par sa réaction.

Draco profite de cet instant de répit pour ouvrir la porte et se précipiter dans la salle de bains. Il n'a que trop duré. Il n'a pas le temps de palabrer avec la belette. Ce dernier entre à sa suite et l'attrape par le bras, prêt à le sortir avec pertes et fracas. Mais tous deux se figent. La pièce envahie par la buée les met d'accord. Ils papillonnent des yeux avant d'apercevoir la forme noir qui flotte dans l'eau rouge de la baignoire.

Weasley lâche le bras de Draco, éteint. Le blond se précipite vers la baignoire, les larmes revenant à l'attaque. « Potter... ». Il pose une main sur la joue de sa Némésis. Froide, gelée. Il se penche vers le visage du brun. Un sourire flotte sur les lèvres, bleuies malgré l'eau brûlante.

Cette fois, Draco hoquette, il a une boule dans la gorge. « Va chercher de l'aide » hurle-t-il au rouquin qui n'a toujours pas bougé. Celui-ci tourne les talons et sort en courant. Draco ne le suit pas du regard, il est trop absorbé par la contemplation du corps devant lui; IL passe les doigts dans le cou de Potter, cherchant son pouls. « Harry... » murmure-t-il, la voix aiguë, la gorge nouée.

Il ne sent pas le coeur qui bat. Le sien aussi semble s'être arrêté. Il se penche encore vers son ancien ennemi. IL a enfin accepté l'évidence. Il ne veut pas le voir mourir. Pas aujourd'hui, ni demain. Ni jamais. Il entre dans la baignoire. L'eau le brûle, mais il repousse la douleur.

Pourvu qu'il ne soit pas mort.

« Merlin, faites qu'il ne soit pas mort ! » supplie-t-il.

Il regarde l'état des bras. Il a quelques notions en médicomagie ; quelques sorts et il referme les blessures. Un peu. Pas complètement, mais il ne peut guère faire mieux. Il assoit le corps sans vie de Potter contre une paroi, se coince en face. Il observe. Avec les yeux. Puis les mains. Ses doigts se promènent sur le visage blanc et froid comme la glace. Le contact le brûle de l'intérieur. Les secours seront bientôt là. Il sera bientôt mis dehors. Il veut faire quelque chose. Mettre toutes les chances de Potter de son côté. Mais il a déjà fait tout ce qu'il pouvait, quoi d'autre ?

Une histoire lui revient. Un conte moldu, pour lequel son père avait puni sa lecture. L'idée qui s'impose à son esprit lui paraît absurde, hors de propos. Presque pécheresse. Mais au final, elle ne le dégoûte pas comme elle le devrait. Elle l'attire, plutôt, magnétique. Il décide d'essayer. Qu'a-t-il à perdre de toute façon ? Plus rien. S'il n'essaie pas, au contraire, il aura tout perdu. Il se rend compte que Potter est tout, pour lui. Son passé, son présent, et sans doute son avenir.

Alors avec l'énergie du désespoir, l'espoir de l'agonisant, il s'approche de Potter. De son visage. Son souffle balaie quelques mèches de cheveux. Son souffle s'accélère. Son souffle se bloque. Maintenant, lui aussi a besoin d'aller jusqu'au bout. Il n'a rien à donner à Potter, mais Potter lui a déjà pris quelque chose qu'il ne pensait pas posséder, semble-t-il. Potter lui a déjà pris son coeur...

Draco se rapproche encore. Ses lèvres atteignent enfin la bouche de Potter. Harry. Harry qui sourit toujours, figé. Harry qui ne respire pas.

Les secours arrivent. Draco se recule. IL se sent mal. Bizarre. Il sort de la baignoire, trempé. Lance un sort ; tout redevient sec. Ses vêtements, le sol, mais pas ses joues. Non, sur ses joues, les larmes coulent toujours sans qu'il ne s'en aperçoive. Encore une fois, une brève fois, il s'empare des lèvres bleues et froides de Harry.

Les secours arrivent. Il s'éloigne de quelques pas.

Les secours sont là.

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Alors ?? aimé, pas aimé ? veut une suite ou pas ? Veut des réponses ? un hypothèse à proposer ?