Disclaimer: Je ne possède rien d'autre que Serella (malheureusement héhéhé)
Couple: Plusieurs avec Serella. ;)
Rated: T pour le moment mais il se peut que ça change.
Chapitre 1: Sous les mers
Le temps était d'une clémence qui ne lui ressemblait pas. Où étaient donc passés les nuages et le tonnerre qui avaient accompagnés les derniers jours avec une lenteur acerbe? Serella se posait justement cette question en contemplant les vagues s'écraser contre la rive. Si elle avait pu, elle aurait été s'asseoir sur le sable et contempler l'océan sous un jour nouveau, un jour qu'elle ne lui connaissait pas. Mais Port-Royal était affreusement bien gardé par des soldats en uniforme, armés de fusils et d'armes capables d'ôter la vie au moindre geste. Surtout si elle se montrait.
Serella prenait déjà d'énormes risques en s'aventurant si près de la terre des hommes, pourtant elle ne pouvait que s'extasier de voir une vie si éloigner et à la fois si proche de la sienne évoluer. Même si elle vouait une haine sans borne à ce peuple, elle devait bien admettre qu'il la fascinait. Cependant,si jamais quelqu'un la voyait, il tenterait de la capturer voir de la tuer directement pour en rapporter un bon bénéfice -les écailles de sirène comme le corps tout entier valaient assurément très cher sur le marché, et le marché noir en particulier. Et malgré les avertissements qu'on lui prodiguait chaque jour, elle persistait à vouloir gagner la surface et passer ses heures à regarder un monde qui lui vouait une haine farouche. Qui pouvait luter contre un sentiment réciproque ? Qui en avait le pouvoir et surtout, le courage de le faire ?
La jeune sirène n'avait pour but que la vengeance envers ceux qui avaient osé s'en prendre à son royaume, elle était l'unique héritière des océans et elle se devait de les protéger de ceux qui voulaient s'en emparer. Depuis que la célèbre fontaine de jouvence avait été découverte et que le rituel nécessitait une larme de sirène, beaucoup de ses semblables avaient péri dans cette quête idiote et sans succès. Ça n'était que justice selon elle de venger ses sœurs. Une vie pour une vie, telle était sa devise, et elle la poussait à agir, à vivre dangereusement quitte à en perdre la vie à tout moment. Elle s'était jurée de retrouver tous les hommes ayant voulu aller à la fontaine et elle le ferait.
Le jour de son anniversaire, elle décida de remonter à la surface avec pour objectif de prendre forme humaine et de s'enrôler comme membre d'équipage sur n'importe quel navire passant à sa portée. Elle jugeait qu'il était enfin temps qu'elle tente sa chance quelque part, quitte à prendre le risque de se faire découvrir au moindre faux pas, mais au moins son dix-huitième anniversaire serait-il célébré avec bonheur et sérénité. Si jamais elle venait à mourir, elle pourrait le faire la conscience tranquille en étant persuadée être morte pour une noble cause, pour une chose qui en valait la peine et qu'elle défendait en la croyant juste.
Sans rien dire à personne, elle gagna un reste de plage encore épargné par la marée montante et attendit patiemment que son corps sèche entièrement pour trouver forme humaine. Elle faisait cela pour la première fois et ignorait totalement la souffrance que la transformation exigeait même si elle en avait entendu parlé dans les profondeurs par sa nourrice.
Alors que des tremblements la prirent de toutes parts, qu'elle réprimait l'envie de hurler et de retourner dans l'eau, elle sentit une résistance au niveau de sa queue céder. Cette dernière commença à se séparer en deux parties semblables et lisses, à perdre leurs écailles verdoyantes jusqu'à disparaître complètement. La douleur était fulgurante et la sirène eut l'impression que son corps entier s'enflammait, qu'on lui enfonçait des lames acérées dans les jambes mais peu à peu, celle-ci se dissipa complètement dans le néant et elle put se détendre et regarder ce qu'elle était devenue. Le résultat était saisissable mais Serella constata avec malheur que le soleil renvoyait des reflets de couleurs vertes sur sa peau. Elle se reprit en songeant qu'elle n'écumerait pas les mers dévêtue, et que ce problème là ne serait plus qu'une courte préoccupation dès lors qu'elle serait habillée mais encore fallait-il trouver des vêtements. Elle réprima une grimace et ramena ses jambes contre sa poitrine, tant pour se dissimuler d'éventuels passages de gardes que pour la chaleur ardente du soleil qui lui brûlait la peau.
Qu'allait-elle faire à présent ? Elle ne pouvait pas déambuler complètement nue sur la plage au risque de se faire repérer dès l'instant où elle sortirait de derrière les rochers. Elle caressa la peau nue de ses jambes qu'elle sentait pour la première fois, c'était une sensation douce et agréable qu'elle devait de toute façon endurer. Puis elle se souvint que les humains -surtout les hommes- étaient sensibles aux charmes des sirènes en particulier à leur voix. Si elle pouvait tomber sur quelqu'un, elle userait des accents mélodieux de la sienne pour envoûter le premier homme venu. Serella ne saurait dire si le dieu des océans l'avait entendu, néanmoins elle entendit bel et bien des pas se rapprochant dans sa direction. Elle hésitait, c'était la première fois qu'elle serait confrontée à de véritables hommes.
"-Y'a quelqu'un ?" appela-t-elle d'une douce voix qui reflétait une crainte feinte.
La sirène entendit des pas arrêter leur course à quelques mètres d'elle. Toujours dissimulée derrière les roches qui la coupait du monde des hommes, elle espérait que l'homme ne viendrait pas directement dans sa direction.
"-Qui est là ?" lui répondit une voix masculine hésitante
"-Moi, je me nomme..." commença-t-elle en se mordant la lèvre inférieure.
Serella ne pouvait utiliser son vrai prénom, elle venait d'en prendre conscience. Il avait des consonances beaucoup trop fantastiques pour être celles d'un prénom de femme ordinaire. Elle pouvait bien mentir sur ses origines mais comment être sûre que l'individu la croirait ? Mieux valait jouer la carte de la prudence, et oublier son nom qui pourrait lui porter préjudice si elle n'y prenait pas garde.
"Je me nomme Raven" continua-t-elle "j'ai besoin d'aide."
Elle voulut ponctuer sa phrase d'un "je suis blessée" mais cela n'aurait fait qu'inciter l'homme à la rejoindre. Au lieu de cela, elle attendit simplement que l'homme réagisse.
"-Que vous arrive-t-il ? Etes-vous blessée ?" s'enquit l'homme. "J'arrive."
La jeune sirène serra les poings, elle se préparait à attaquer. Dès qu'elle sentirait l'homme suffisamment proche d'elle, elle bondirait sur lui et s'attaquerait directement à sa gorge pour l'empêcher de crier et de prévenir du secours. Elle devait être prête, elle n'aurait droit qu'à un seul essai...
La présence de l'homme se fit tout proche et sans attendre davantage, Serella se releva brusquement et planta ses dents dans la mâchoire du soldat qui n'eut même pas le temps de comprendre ce qui lui arrivait. Il s'effondra simplement sur le sol, dans une marre de sang qui maculait la terre. Serella contempla le corps sans vie du soldat, et aucune forme d'émotion ne parcourut son être, aucun remord. Elle se contenta de siffler entre ses dents et de dévêtir le corps pour se draper au minimum de la chemise qu'elle nouerait de façon à s'en faire une robe courte.
Elle récupéra sur le cadavre une petite bourse pleine, une dague ainsi qu'une épée courte et fine qu'elle prit avec elle également. Elle noua autour de sa poitrine les manches de la chemise qui était beaucoup trop grandes pour son corps élancé puis elle noua ses cheveux en une longue tresse qui retombait devant son épaule droite. Elle inspira un grand coup et prenant la route du port sur sa gauche, elle tourna le dos à l'océan sans un mot dans une démarche malhabile qui s'assura à chaque nouveau pas.
La taverne qu'on lui avait indiquée n'avait pas été si simple d'accès. Pour elle qui ignorait tout de la ville, les rues et les ruelles n'étaient que dédales fourbes et cruels qui n'attendaient que de la trahir et de la fourvoyer. Après deux bonnes heures de recherches intensives, elle avait dénichée ladite taverne d'où elle était à présent accoudée au comptoir devant une choppe de bière brune -breuvage qu'elle n'avait jamais goûté. Le goût ne lui avait pas déplût mais aux premiers abords c'était une chose qu'il ne fallait pas forcer avait-elle comprit en regardant un homme s'écrouler sur une table après avoir généreusement déversé un flot de paroles obscènes.
L'endroit était également remplie de femmes vêtues de robes longues plus la plupart mais très courtes pour d'autres et Serella était surprise de voir les hommes s'échanger des femmes ainsi. Puis lorsqu'elle vit de l'argent circuler de mains en mains, elle comprit qu'il n'y avait dans leur relation aucune forme de sentiment. Elle se sentait atrocement ridicule dans sa chemise blanche bouffante avec son corset de cuir lacé et son pantalon marron qui se perdait dans des bottes montantes. Elle n'avait pas l'allure d'une femme ordinaire d'après ce qu'elle voyait, mais l'homme qui tenait la boutique dans laquelle elle avait déniché ses vêtements n'avait rien eu de mieux à lui proposer. Elle avait dû se contenter de ceux-ci et elle ne put s'empêcher de remarquer que les hommes se retournait davantage sur son passage bien qu'elle ne leur accorda que très peu d'attention.
Elle était plongée dans ses pensées quand un homme vêtu de façon différente des soldats qu'elle avait rencontrés vint prendre un tabouret à ses côtés et la sortit de ses songes:
"-Alors beauté, qu'est-ce qui t'amène dans c'genre d'endroit ?" demanda-t-il d'une voix rauque avec un sourire carnassier
"-La vengeance et peut être aussi, l'appât du gain," répondit-elle franchement sans pour autant lui accorder un regard "Je souhaite m'enrôler sur un navire."
"-A pour ça je peux peut être t'aider t'sais ? J'm'y connais un peu dans l'métier tu piges ? Les hommes ici qu'tu vois, ils me connaissent tous et tous me respectent! Oui madame! Vous avez devant vous, le seul et l'unique Bartingale II, écumeur des mers et du Kraken frisé." se présenta-t-il
"Cet homme est fou..." songea Serella en faisant mine de sourire. Elle se tourna vers l'homme en attendant de voir si celui-ci allait poursuivre dans un discours sans queue ni tête quand elle songea à s'échapper sur le champ avant de se retrouver coincée. Inconsciemment, sa main glissa sur le manche de l'épée du soldat qu'elle avait volé et elle tressaillit. Elle se demandait si elle aurait autant de faciliter à tuer avec cette arme que de ses propres mains, l'un comme l'autre, elle n'hésiterait pas le moment venu. Bartingale se tenait toujours devant elle, le torse bombé d'une fierté incertaine, en attendant des éloges de la part de la sirène.
"-Bien sûr, mon aide ne serra pas gratuite..." poursuit-il en voyant que Serella ne disait rien
"-Je..."commença la jeune femme
"-Ne l'écoutez pas madame! Cet homme n'est qu'un ivrogne, un soûlard! Il est mousse sur une galère marchande dont les affaires sont en train de faire faillite et la seule raison pour laquelle il est connu de tous ici, c'est parce qu'il est un joueur de dés et qu'il est endetté auprès de chacun ici présent!" coupa l'homme qui tenait le comptoir avec un sourire ravi.
"-Pourquoi ne pas tout simplement le tuer ?" demanda Serella en toute simplicité
"-A quoi servirait un homme mort ? Il ne peut plus rembourser sa dette" répondit le barman en s'éloignant vers un autre client.
Blessé dans son orgueil, "l'écumeur des mers" s'en alla non sans marmonner dans sa barbe et Serella prit une nouvelle gorgée de sa bière avant de se retrouver à nouveau seule. Elle réfléchissait à un moyen de gagner un navire. Un autre individu masculin vint de nouveau perturber ses songes mais celui-ci avait l'air plus menaçant que Bartingale. La jeune femme regarda le corps de ce nouvel invité qui, tout de noir vêtu, une épée à la ceinture, paraissait musclé et digne de confiance. Ce même homme contemplait la jeune femme de ses yeux bleus d'un regard avide, qui en disait long sur ce qu'il pensait mais Serella ne s'emballa pas et demeura de marbre face à se regard ardent.
"-J'ai cru comprendre que vous cherchez un navire madame... Je peux p't'être vous aider..." fit-il avec un sourire avenant
"-Contre mon corps ou de l'argent ? Je ne compte vous offrir ni l'un ni l'autre alors déguerpissez!" cracha la sirène.
"-Hola doucement petite! Je ne souhaite que t'aider ! J'ai cru comprendre que tu avais soif de vengeance et d'argent, sans doute ce que je vais te dire risque de t'intéresser. Je suis pirate vois-tu, dans ce genre de job, j'excelle un peu plus que tous ces pourris que tu vois ici. Mais je n'ai pas besoin d'hommes -pas plus que de femmes- seulement j'ai l'impression que ta tête me revient même si je crois me tromper, je préfère t'aider au cas où je te devrai quelque chose. Et si ce n'est pas toi que je cherche, garde à l'esprit que la chance a été de ton côté tu me suis ? poursuivit l'homme
"-Oui, il me semble. Quel est cette chose qui est censée pouvoir m'intéresser ?" enchaîna la sirène dont la curiosité venait d'être piquée au vif.
"-Il existe un bateau tellement rapide que nul autre ne peut égaler. Le Black Pearl on le nomme. Son capitaine est Jack Sparrow, un homme pour le moins particulier. Si jamais tu le vois, donne-lui ça de ma part en disant que Stephen n'a pas oublié. Il saura de quoi je parle. Bonne chance à toi gamine " acheva Stephen en lançant un clin d'œil à Serella avant de s'en aller d'un pas nonchalant, sa longue cape noire flottant dans son dos.
Serella ouvrit la main pour voir le présent qu'elle devait remettre au prénommé Jack Sparrow et découvrit une tache noire sur un bout de papier froissé et, bien qu'elle en ignorait la réelle signification, elle était suffisamment intelligente pour comprendre qu'il s'agissait d'une menace. L'encre qui maculait le papier était d'un noir si intense qu'on aurait pu se perdre dans la contemplation de celui-ci pendant des heures, du moins ce fut l'impression qu'eut la jeune femme en rangeant dans sa poche le message. Au moins venait-elle de trouver une raison pour laquelle chercher un bateau -pirate par dessus le marché- et c'était la seule opportunité qu'elle attendait.
N'ayant plus de raison de s'attarder au comptoir de la taverne, elle quitta l'endroit devenu trop bruyant pour elle, ne pouvant plus supporter une seconde de plus cette ambiance devenue subitement lourde tout comme sa tête et elle inspira avec vigueur l'air frais et revigorant de la nuit avant de porter ses pas en direction de la plage sur laquelle elle s'assit. Pas question de toucher les vagues cependant o elle se transformerait de nouveau. Avec un pincement au cœur, elle réalisa à quel point cela lui faisait mal de voir l'eau sans pouvoir la toucher, elle qui en fut toujours si proche... Assise sur le sable, les jambes croisées et la tête droite, elle regarda les vagues se perdre à l'horizon jusqu'à fusionner avec le ciel, effaçant toute frontière entre eux deux pour ne faire plus qu'un indissociable bleu nuit. Elle observa les vagues s'écraser contre le sable et l'écume se former mais elle ne pouvait rien faire de plus même si, juste en face d'elle, sous la mer, se tenait ses sœurs et sa vie qu'elle avait en quelque sorte abandonnées.
