Avant-propos : Cette fic suit le même schéma que Rédemption mais raconté (très) différemment. Puisque je n'aimais pas du tout ce que j'avais fait dans la précédente fic, j'ai décidé de recommencer une autre (que j'ai appelé You can smile again, parce que je n'ai aucune originalité). On peut considérer l'histoire comme une version alternative de l'arc des élections.
Ça reprend globalement le même schéma, mais plus focalisé sur l'aspect émotionnel de Ging et la critique du fonctionnement et des lois des hunters, etc. Il y aura donc du spoil ! Ce premier chapitre est directement pris d'un passage en particulier (qui dure trois panel lol). La fic est aussi publiée sur sous mon pseudo Kaguy, et Wattpad sous le pseudo Gyjoua.
Enjoy !
Chapitre 1 : Dérapage
L'image d'un vieil homme assis en tailleur s'affichait à l'écran. Son expression ennuyée trahissait un désir d'achever son discours le plus rapidement possible. Il se racla la gorge puis commença :
« Je suis Isaac Nétéro, l'actuel président de l'association. Je laisse ma place à quelqu'un d'autre, bonne chance à tous. Juste une chose. Le prochain président devra être élu. Tous les hunters pourront y participer. Si jamais le taux de participation est inférieur à quatre-vingt-quinze pour cent, l'élection sera considérée comme nulle et un autre vote aura lieu. Je compte sur les zodiaques pour s'occuper de la date et du reste. J'estime que cette mission sera de rang D, facile à priori. Et donc, il leva la main, je vous fais confiance. Portez-vous bien ! » la vidéo s'arrêta brusquement.
Beans pleurait en silence. S'il était plus fort, peut-être que Nétéro l'aurait emmené avec lui combattre ces créatures. Peut-être même que ce dernier aurait été encore en vie. Avec frustration, il éteignit l'ordinateur, puis resta un long moment à fixer l'écran noir. Beans refusait d'y croire. Nétéro était immortel à ses yeux. Âgé de plus de cent dix ans, celui-ci possédait la force et l'énergie d'un homme dans la vingtaine. Seule son apparence semblait avoir été affectée par le temps. Alors pourquoi avoir préféré se sacrifier pour vaincre le roi ? Aucun autre choix ne s'était présenté à lui ?
Beans se souvint de ses dernières paroles, « Des sacrifices seront nécessaires pour accomplir cette mission. » Il comprit.
00000000
Beans ne s'était jamais senti aussi découragé. Le bureau du président – ou plutôt de l'ancien président - débordait de paperasses que seul lui trouvait le courage de toucher. Des papiers administratifs poussiéreux, qui n'attendaient qu'à être traités. En temps normal, Beans s'en serait occupé sans se plaindre. Mais cette fois-ci, il se contenterait de les ranger dans un coin. Tant pis de l'urgence pour certains, impossible pour lui de travailler dans ces conditions. Ce fut donc avec mélancolie qu'il déplaça cette montagne de feuilles mortes.
Au coin de la table, une fois le tas retiré, une ancienne photo du président se dévoila. Beans ne put réprimer un sanglot. Le sourire malicieux de son supérieur couplé à son regard enjoué le rendaient nostalgique. Il avait l'impression de le voir en face de lui, en chair et en os. Il s'attendait presque à l'entendre gentiment se moquer de lui et de lui sortir un « tu prends ton travail trop à cœur, Beans » comme il aimait si souvent le répéter. Beans espérait sincèrement que tout ceci n'était qu'une autre des plaisanteries habituelles du président et que celui-ci ressortirait d'un placard pour le narguer de sa crédulité.
Toujours animé par cet espoir naïf, Beans regarda vers la porte. Et ce qu'il aperçut le fit sursauter.
Pendant une fraction de seconde, il jura voir le vrai Nétéro en personne, avec un sourire débonnaire et victorieux du tour qu'il venait de faire. Mais non, ce n'était pas lui. L'homme devant l'entrée affichait une expression sérieuse, et ses habits sombres contrastaient avec le kimono clair de l'ancien président.
« Monsieur Freecss ?!
– Yo, dit-il nonchalamment en levant la main. Appelle-moi juste Ging. »
Ging Freecss, alias le Sanglier, un archéologue hunter double étoile. Il était un des membres éminents du zodiaque, un groupe formé de douze hunters reconnus par Nétéro et qui avaient le devoir de prendre en charge l'association en cas d'urgence.
Le fait de savoir que Ging était potentiellement présent depuis le début l'effraya. Beans n'avait peut-être pas le niveau d'un triple hunter, mais il n'était pas un homme facile à surprendre. Dans un autre contexte, cette imprudence aurait pu lui valoir très cher.
« Vous m'avez fait si peur ! Beans, rassuré, s'avança vers lui, vous êtes au courant pour monsieur le président ?
– Oui, j'ai vu la vidéo, un moment de gêne s'ensuivit, désolé de ne pas avoir toqué. J'étais dans les parages, et je pensais que ce serait une bonne idée de venir te dire quelques mots. »
Vous mentez. Je n'ai pas du tout senti votre présence, pensa Beans.
Bien qu'il avait été perdu dans ses pensées plus tôt, très peu de chose pouvait échapper à sa vigilance. Ging, aussi étrange paraissait-il, restait un bon ami. Parmi son entourage, il était l'un des rares à l'aider dans ses tâches, du moins lorsqu'il le pouvait (même si c'était seulement pour des raisons personnelles, comme accéder à diverses informations plus ou moins confidentielles en toute discrétion). Néanmoins, l'archéologue dégageait toujours cette aura indescriptible, à la fois chaleureuse et malfaisante. Le meilleur adjectif pour le décrire serait monstrueux, selon Beans. Monstrueusement fort, monstrueusement malin ou encore monstrueusement imprévisible, tout lui convenait.
« Donc, continua Ging, d'ici quelques jours, les zodiaques vont venir ici. L'un d'entre eux choisira de faire un tirage au sort. Je parierai sur Cheadle ou Saccho, voire au pire Cluck ou Kanzai. En connaissant Pariston, faire un vote ou discuter ne mènera nulle part. Tiens, prends ça. »
Ging lança un bout de papier que Beans attrapa in extremis. Intrigué, il le déplia. Cinq règles y étaient inscrites (Beans dut relire plusieurs fois, l'écriture de Ging laissant clairement à désirer), que Beans devina être celles des prochaines élections. Les trois premières concordaient à la volonté du président (sauf la deuxième, mais elle allait de pair avec la troisième). Beans était surpris de constater que Ging suivait les ordres de Nétéro, connaissant le caractère fougueux du personnage. Mais (mal)heureusement, les deux dernières prouvaient qu'à tout jamais, Ging conserverait sa nature puérile.
« Ging, vous êtes sérieux ?
– Je ne vois personne s'objecter pour ça. Pariston prendra ce risque s'il peut avoir l'avantage, même si c'est une chance sur douze. Il est déjà très en avance, donc ce n'est qu'un bonus pour lui. Pour les autres, ça leur permettra de potentiellement reprendre le dessus.
– D'accord, mais quel est mon rôle dans cette histoire ? »
Ging révéla un sourire narquois.
« Tu le sais très bien, non ? Ils vont sûrement faire appel à toi pour le tirage. Puisque tu es le seul à être « neutre » ici. Tous les autres dans ce bâtiment sont soit des fans de Pariston, soit des intérims. »
Beans voyait clair dans son jeu. Évidemment que Ging ne compterait jamais sur le hasard. Évidemment qu'il n'en avait rien à faire de la volonté de l'ancien président. Tout ce qui l'importait, c'était de s'amuser.
« Donc si je comprends bien, vous essayez de m'inciter à trahir mes collègues pour vous permettre d'avoir l'avantage ? »
Ging parut indigné.
« Ça n'a rien à voir ! Tu préfères peut-être prendre le risque de piocher les règles de Pariston ? Puis, je suis quasi sûr que les autres ne prendront même pas la peine de respecter la dernière volonté de Nétéro. Au moins, tu es assuré que ses ordres soient respectés. »
Beans devait avouer que Ging était très fort pour trouver des excuses. Dommage pour lui, il le connaissait trop bien pour se faire avoir aussi facilement. Personne ne pouvait le tromper.
« Ne me prenez pas pour un idiot, Ging. Avouez que vous les avez écrites dans le simple but de m'amadouer, afin que j'accepte malgré l'absurdité de vos deux dernières demandes. Vous souhaitez juste assouvir votre soif de curiosité et de plaisir. Et ça m'étonnerait beaucoup que la majorité des autres membres ne pensent même pas à imposer les règles de notre président, notamment Cheadle ou encore Kanzai. Vos méthodes de voyous, je les connais par cœur. »
Son ton acerbe l'étonna lui-même. Il ne voulait pas paraître énervé, mais l'hypocrisie était un défaut absolument impardonnable à ses yeux.
« Pas la peine de le prendre comme ça. Tu n'es pas obligé, après tout. Je te demande juste un service, rien de bien méchant. La quatrième est inoffensive, et la dernière n'est qu'un leurre. »
Beans haussa un sourcil.
« Un leurre ? C'est encore une blague ?
– C'est juste pour pouvoir faire passer plus facilement les autres règles. Je n'ai pas l'intention de devenir président.
– Mais alors... Pourquoi tout ce remue-ménage ?
– Tu m'en poses de ces questions... Ging retrouva son sourire moqueur, si ma proie bouge comme je le souhaite, alors la chasse est un succès. »
Il se dirigea vers la porte. « Je veux juste profiter de mon sentier. C'est tout. »
Beans s'attendait à une réponse davantage réfléchie, mais cela s'annoncerait surprenant de la part de l'archéologue. Une volonté de brusquer Ging, de briser son masque verni d'arrogance s'empara de Beans. Ce dernier était loin d'être sadique, mais l'aisance qu'affichait son collègue, malgré le décès du président, l'offusquait. Son attitude insolente méritait d'être punie. Juste au moment où Ging tourna la poignée, il dit :
« Ging... Vous êtes au courant pour votre fils, n'est-ce pas ? »
Le dénommé ouvrit la porte.
« Oui. Mais il va être sauvé, donc je me fais pas de soucis. »
Beans ne put se retenir. Cet homme n'avait pas le droit de se montrer aussi apathique.
« Gon s'est suicidé. Ils se sont servis de sa rage pour vaincre une des chimera ants. »
C'était calculé par le président, pensa Beans. En réalité, la situation était bien plus compliquée que cela. Il ne disait pas toute la vérité, juste un très bref résumé.
Ging tourna sa tête vers lui. Comme désiré, il avait touché une corde sensible à en juger par son regard noir. Si Beans avait pu prédire la suite des évènements, il n'aurait sûrement jamais lancé le sujet.
« Qu'est-ce que tu racontes comme ânerie ? »
Beans sentit une très lourde pression dans l'air. Il commença à paniquer. Pendant un instant, il avait oublié la puissance que renfermait Ging.
« Eh bien... il semblerait qu'il soit arrivé quelque chose à Kaito. C'est sûrement à cause de ça si le président l'a laissé participer. »
Ging resta silencieux un moment. Puis, il ouvrit grand les yeux, comme s'il venait de réaliser quelque chose.
« Il a vraiment fait ça ? Juste parce qu'il a pris peur de lui ? »
Sa voix se cassa à la fin. Beans ne comprenait pas où il venait en venir, de plus celui-ci semblait être perdu dans un autre monde. Beans craignait le pire. Il regrettait amèrement sa provocation.
Avant qu'il ne put s'excuser, Ging arracha la porte avec une facilité déconcertante et la balança sur Beans, qui fut incapable de l'éviter. Malgré la puissance du choc et un mal de crâne évident, il parvint à déplacer la porte sur le côté et à se relever. Juste au moment où Beans se ressaisit, le hunter détruisit le bureau d'un coup de poing. Le meuble se brisa en deux, laissant des fractures se répandre sur les deux côtés, témoins de la violence de l'impact. La photo du président, quant à elle, voltigea et tomba intacte sur le sol. Ging ne perdit pas une seconde pour l'écraser avec fureur.
Beans fut complètement choqué par la réaction soudaine de Ging. Il voulait le calmer, mais son corps refusait de bouger. Tout ce qu'il pouvait faire, c'était de le regarder pulvériser les murs d'un seul coup et l'entendre lâcher des insultes diverses et variées. Les feuilles, qui étaient rangées dans des classeurs près du bureau - ou du moins ce qu'il en restait - se retrouvaient éparpillées un peu partout, certaines salies par les bottes chevronnées du hunter.
Beans avait passé la plupart de ses journées dans cette pièce, à prendre soin du bureau et à s'occuper des problèmes administratifs que l'ancien président était incapable – ou plutôt refusait – de résoudre. Il se remémorait l'odeur omniprésente de la pipe de son supérieur, que celui-ci fumait lorsqu'il méditait, et de sa tasse de thé au romarin que Beans se permettait de goûter en cachette. Tous ces souvenirs furent détruits en un instant. Le bruit assourdissant des meubles renversés ressemblait à un appel à l'aide pour Beans, comme si ce lieu ressentait la douleur que lui infligeait Ging. Pour le coup final, ce dernier prit ce qui restait du bureau, et le lança sur la fenêtre qui se brisa. Le court mais perçant cri du verre fendu signa la fin du massacre.
Des débris recouvraient la totalité du sol. La tuyauterie se dévoila à travers les fragments des murs, certains tuyaux cassés en deux, d'autres intacts. Le plafond faisait partie des rares rescapés, bien que des fissures s'étendaient sur les recoins. Une odeur de plâtre et de poussière envahirent les lieux, ce qui provoqua une nausée chez Beans.
Ging se tenait au milieu, l'air visiblement calmé. La tension était retombée, et Beans put enfin se déplacer. Il tomba à genoux, priant pour que le hunter ne le prenne pas pour cible. Ses yeux s'humidifiaient de terreur à l'idée que ce monstre ne vienne le déchiqueter. Celui-ci l'observait. Une lueur satisfaite s'animait dans ses yeux noisettes. Son sourire mesquin tordait son visage en un rictus sadique.
« Je n'avais aucune raison de faire ça, mais putain, qu'est-ce que ça fait du bien ! »
Beans ne réagit pas sur le coup, hébété par ce qu'il venait de se passer.
« De... de quoi ?
– Sois pas deg', t'auras l'occasion de te défouler un autre jour. »
Quelque chose se brisa en Beans. Ging venait de se payer sa tête.
« Non, c'est une blague ! Vous n'étiez pas en colère ? Mais alors pourquoi avoir fait ça ? »
Le choc qu'il avait reçu lui causait forcément des hallucinations. Ging n'était pas fou à ce point. Personne ne pouvait l'être.
« Quand tu m'as sorti « qu'ils se sont servis de lui comme arme », tu insinuais que Nétéro a utilisé Gon volontairement pour son propre compte, dans le seul but de me faire enrager, hein ? Beans sentit son visage se décomposer à une vitesse affolante, je pensais que ce serait le moment idéal pour me lâcher un coup. J'ai toujours haï cet endroit. »
Beans craqua. Ce n'était qu'une farce. Un troll. Ging se moquait de Gon, comme il se moquait de tout.
« Vous vous rendez compte que vous avez failli me tuer avec cette porte ? Et comment vous pouvez vous... comporter comme un gamin écervelé alors que notre président est mort ! Même Pariston n'aurait pas fait un truc pareil !
– Normal, il est faible. Il se serait contenté de faire tomber la photo.
– Assez ! »
Beans se releva brusquement, les poings serrés. Le désir de lui coller une bonne raclée brûlait jusqu'au fond de ses entrailles, mais la différence sidérale de niveau entre lui et son collègue l'empêchait de réaliser son rêve.
« Pas la peine de t'inquiéter. Je vais tout réparer si tu veux. Comme ça, tu pourras tout détruire aussi. »
Ging s'approcha de la sortie, puis lui fit un signe de la main avant de partir pour de bon.
L'archéologue était un bon ami, mais parfois, il pouvait aussi se montrer insupportable, voire méprisable. Ce n'était pas surprenant si les autres membres du zodiaque le détestaient. Son caractère de cochon, couplé à sa nonchalance, le rendait peu appréciable. Néanmoins, Beans le respectait malgré ses défauts. Après tout, Nétéro se comportait également comme un enfant.
Cependant, Beans lui en voulait terriblement, bien qu'il admettait son erreur de l'avoir provoqué en premier lieu. Il pensa à la photo du président, et chercha à la récupérer sous les résidus de bois et de plâtre. Il la retrouva, légèrement abîmée dans le cadre réduit en miettes. Il prit la photo délicatement, et retira d'un souffle les morceaux de verre. Beans était heureux de constater que même la bêtise humaine ne pouvait avoir raison de Nétéro.
Il repensa à Ging. Peut-être que Gon ne devrait jamais rencontrer son père.
N'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé ! Bon ou mauvais, j'accepte tout !
