LE CHOIX DE NOS PÈRES
CHAPITRE 01 : Des Squelettes dans les Placards
Dans ma famille on a toujours été très unis, mais les aléas de la vie, les non-dit nous ont séparés. Parfois, on s'en rend compte trop tard, les êtres chers sont perdus. Et parfois, il n'est pas trop tard...
Il y a des jours où l'on se dit qu'il aurait mieux valu ne pas se lever, comme aujourd'hui. Alexander fit une grimace devant sa glace. Son reflet magique, une jeune fille d'environ quatorze ans, lui renvoya un sourire admirable. Énervée, elle envoya un flacon de poudre sur son image. Elle repartit grognon vers son lit.
— J'en ai marre! Je ne suis pas une petite fille modèle! Rhhh! Pourquoi papa ne comprend pas ça!
La voix de sa mère la tira de ses moroses pensées.
— Ma chérie tu viens déjeuner?
La colère qu'elle avait amoncelée se fana. Cette femme était vraiment la maman idéale et lui en vouloir pour ce père trop borné n'aurait pas été juste.
Virginia Potter toqua et poussa le battant de la porte pour apercevoir sa fille avachie sur son lit.
— Alors, ma chérie?
Alexander leva la tête vers la porte. Elle ne vit d'abord qu'une abondante chevelure rousse et puis deux yeux pétillants. Un nuage de tache de rousseur constellant son visage lui donnait un air encore juvénile. Sa mère avait gardé le regard espiègle de l'adolescence.
Alexander, elle, avait hérité les cheveux noirs de son père : Harry Potter. Ses yeux étaient bleus comme ceux de son grand-père. La seule trace de sa mère en elle était ses petites taches de son qui ponctuaient son "petit minois", comme disait sa grand-mère. Tout le monde s'accordait à dire qu'elle était un parfait mariage entre les Potter et les Weasley.
— Alors, chérie? Ce n'est pas que ça m'ennuie de parler dans le vide mais si on ne veut pas rater ton train, il faudrait peut-être que tu te bouges.
— Ok, m'an. J'en ai pour cinq minutes.
Madame Potter referma la porte et descendit l'escalier. Les colères de sa fille étaient aussi soudaines qu'éphémères. Heureusement... Sinon, la vie chez les Potter aurait rapidement viré à la guerre entre père et fille. Et dire qu'ils s'adoraient! Ca ne les empêchait pas de se disputer.
Oh, les mères… Toujours inquiètes les jours de rentrée scolaire, pensa Alexander.
Quelques minutes plus tard, elle était prête. Ses pas précipités dans le couloir du haut avertirent les Potter de l'arrivée imminente de leur fille. La tornade noire déboula dans l'escalier à toute allure. Les Potter sourirent. Leur fille apprendrait-elle un jour à descendre un escalier sans courir? Elle était vraiment pleine de vie, de vie pour deux.
Alexander s'affala à sa place entre ses parents et en face de son petit frère, Jeremy. La chaise vacilla avant de se stabiliser.
— 'lut pa'! J'su'is en retard? demanda-t-elle entre deux bouchées.
Monsieur Potter retira sa tasse de café de ses lèvres et regarda sa fille puis sa femme d'un air amusé, avant de répondre calmement :
— Bien sûr que non Juliet! On serait déjà dans la voiture sinon.
— Papa! grogna Alexander. Je croyais qu'on était d'accord! Ne m'appelle pas comme ça!
— Quoi? Qu'est-ce que j'ai fait? Je n'ai plus le droit d'appeler ma fille par son nom de baptême?
Virginia lui fit signe d'abandonner. Harry n'eut pas l'air de vouloir céder une nouvelle fois. Non, il lui avait déjà trop cédé. Elle devait vivre sa vie de petite fille et non plus une vie qui n'était pas la sienne.
— Tu ne me laisses pas le choix, ma puce. Ta mère et moi pensions que ça allait te passer. Mais ça fait sept ans et ça ne te passe pas! Je n'en peux plus! Ta mère voudrait que je sois moins brutale mais, chérie, j'ai bien peur que la douceur ne soit plus de mise.
Monsieur Potter s'énervait rarement, mais entendre jour après jour le prénom d'Alexander le minait.
Son fils, son seul fils.
Quand, quatorze ans plus tôt, on lui avait annoncé qu'il aurait des jumeaux, il avait été le plus heureux des hommes. "Un garçon et une fille" avait dit le médico-mage. C'était fantastique! Virginia et lui s'étaient arrêtés sur deux prénoms : Alexander et Juliet. L'accouchement avait été difficile. Les enfants se présentaient mal et, comme la plupart des jumeaux, ils étaient prématurés. Les bébés avaient failli mourir avant d'avoir vécu. Mais quand deux cris bien distincts s'élevèrent de la salle de travail, Harry put se remettre à vivre. Les cris de sa petite fille et de son petit garçon n'avaient cessé de le combler de joie même si, au cours des mois qui suivirent, ils en profitèrent toutes les nuits. Juliet et Alexander avaient dès lors été d'inséparables chahuteurs. Leurs oncles, les jumeaux Weasley, se retrouvaient dans leur farce. Ils ne manquaient jamais de gâter ces enfants au grand dam de leur entourage qui faisait souvent les frais de leurs frasques.
Harry Potter ne souvenait pas clairement comment cette histoire de prénom avait commencé. Enfant, Juliet avait les cheveux courts et elle ressemblait à son frère comme un reflet. Ils s'étaient souvent amusés en échangeant leurs places et leurs noms. Les Potter ne disaient rien à cette époque là, ce n'était qu'un jeu d'enfant. Enfin jusqu'à l'accident qui avait coûté la vie de son fils. Le souvenir douloureux de ce jour était toujours aussi brûlant. C'était aussi la dernière fois qu'il avait pu appeler sa fille Juliet. Après ce jour, elle ne voulut répondre qu'au nom d'Alexander. Rien n'avait pu mettre fin à sa décision. Les Potter étaient têtus, il était normal qu'elle le soit.
— Je m'appelle Alexander J. Potter! Et ça ne me passera pas.
— Ta mère et moi t'avons appelée Juliet Potter.
— Arrêtez tous les deux! s'emporta madame Potter. Il est mort et enterré! Laissez son âme reposer en paix! Harry laisse-la s'appeler Alexander si elle veut!
Une larme coula sur la joue de Virginia.
Faire pleurer sa mère. Alexander venait de faire pleurer la femme qui l'avait portée sept mois et qui avait prix soin d'elle tout ce temps.
— J'en ai marre de ces non dit! Mon frère est mort : oui. Je veux garder son prénom : oui. Mais tout ça, c'est pour ne pas l'oublier!
Alexander éclata en larmes.
— Vous ne parlez jamais de lui devant moi! A chaque fois que papa me voit sur un balais, il pâlit et m'ordonne de descendre comme si j'avais commis un crime. Il aurait peut-être mieux valu que se soit moi! C'était mon idée, c'aurait dû être moi! Pourquoi ce n'est pas moi?!
Harry fit basculer sa chaise en se levant pour se précipiter vers sa fille. De ses bras puissants, il la pressa contre lui. Son petit ange avait gardé tout ça en elle. Elle n'avait jamais rien dit. Il lui chuchota :
— Mais non, chérie, mais non, c'était un accident. Vous nous étiez tous les deux aussi précieux. Le perdre, ça a été comme mourir. Mais j'ai été égoïste, j'ai cru qu'il n'y avait que moi qui souffrait, que tu étais trop petite pour vraiment comprendre. Je n'ai pas vu ta douleur. Excuse-moi, chérie.
La voix de son père était éraillé. Pour la première fois depuis des années, elle voyait le masque "Harry Potter" se fendiller. Derrière se cachait l'homme, son papa.
— C'est pas grave, papa. C'est pas ta faute.
En face d'elle, Jeremy alors âgé de deux ans s'agitait sur sa chaise haute. Il ne comprenait pas pourquoi tout le monde pleurait et encore moins pourquoi on l'ignorait. Il poussa un cri et se mit à pleurer pour attirer l'attention. Alexander se détacha de l'étreinte de son père, elle se leva, fit le tour de la table pour s'occuper de son petit frère.
— Oh, Jeremy ne pleure pas mon ange.
Elle l'attrapa et le souleva.
— La, la c'est fini. Tu ne peux pas être triste voyons, trois anges veillent sur toi.
— N'ange?
— Oui, c'est ça trois anges.
Son père la coupa.
— Je t'en prie chérie, il est encore bien jeune. Il ne comprendra pas. On lui parlera de ses parents et d'Alexander quand il sera un peu plus grand.
Alexander n'insista pas. Après tout, c'est vrai, Jeremy était bien jeune pour apprendre que les Potter étaient ses parents adoptifs. Après le décès de Ronald Weasley et de sa femme, Virginia et Harry Potter, qui gardaient alors Jeremy, avaient décidé d'adopter le petit rouquin.
Chaque famille a ses secrets, certains sont plus vieux que d'autres. A quelques lieues au nord de Londres, une autre famille. Autre famille, autres mœurs. Le manoir Malefoy était agité en ce matin de rentrée. Drago Malefoy était calmement installé autour de la grand table en chêne massif dans la salle à manger, entouré de sa femme et de son fils, quand une folle furieuse de quatorze ans entra en courant, encore vêtue de sa chemise de nuit et trimbalant à bout de bras une robe froissée.
S'arrêtant au bout de la table, la jeune Bethsabée foudroya du regard celui qu'elle appelait père.
— Il est hors de question que je porte ça! dit-elle en brandissant ledit vêtement.
— On ne fait pas toujours ce que l'on veut, mademoiselle ma fille.
— Oh, ça je suis au courant! Mais là je dis non! Je ne suis pas une poupée! J'ai besoin de bouger, de respirer dans mes vêtements!
— Tu es une jeune fille à présent, Beth!
— Oh, la belle excuse! C'est tombé quand? Dans la nuit, tu t'es dit : tiens, ridiculisons ma fille?
— Cela frise l'insolence, Bethsabée! Un ton en dessous je te prie, n'oublie pas à qui tu t'adresses.
Oups, quand son père en venait à l'appeler par son prénom en entier, cela était rarement bon signe.
Mais c'était vraiment dur de se retenir… Vraiment trop dur.
— C'est pas juste! Quand Ulrik est entré en quatrième année, on lui a pas demandé de se ridiculiser!
— Ne mêle pas ton frère à tout ça. Tu es une jeune fille et ton frère sera bientôt un homme. Il me succèdera et toi, il faudra te trouver un bon parti. Et ce n'est pas fagotée comme tu l'es d'habitude que tu y arriveras!
Voilà, c'était tombé. Son père comptait la marier. La voix éraillée, elle articula :
— Quoi? Dis-moi que j'ai mal entendu. Tu penses déjà à me marier!
Madame Malefoy décida de mettre un terme à cette scène. Elle se leva et, tout en s'approchant de sa fille, elle essaya d'arranger les dégâts.
— Mais non, ma chérie, pas encore, tu es bien trop jeune. Mais tu arrives en âge où il est temps que nous, tes parents, te trouvions un fiancé convenable.
Elle s'approcha pour consoler sa fille mais Beth rejeta la main de sa mère pour partir en courant s'enfermer dans sa chambre.
Ulrik, leur fils aîné qui allait entamer sa dernière année se leva.
— Je vais essayer de lui parler. Vous la connaissez, tête de mule comme elle est, elle est capable de rater le train.
— Très bien. Mais elle portera sa robe ou elle ira prendre ce train dans le plus simple appareil.
Ulrik sourit.
— Ne la tente pas trop, papa. Ma petite sœur chérie serait bien en mesure de se rendre nue sur le quai si elle était sûre de pouvoir t'ennuyer sans en avoir à subir les conséquences.
Il sortit de la pièce, laissant seuls ses parents.
Drago se tourna vers son épouse.
— Tu penses qu'elle la mettra?
— Oui, ta petite princesse sera la plus époustouflante. Tu peux faire confiance à notre fils, je suis sûre qu'il a des moyens de pression sur notre petite princesse.
Ulrik Malefoy avait beau frapper à la porte de sa sœur, la jeune demoiselle ne semblait pas décidée à lui ouvrir. Dans ces cas-là, les grands moyens s'imposent. La baguette à la main, il énonça :
— Alohomora !
Le déclic du verrou se fit entendre et une voix sanglotante bougonna :
— C'est pas juste ! T'as pas le droit de te servir de la magie!
— Bien sûr que si, je suis en dernière année petite sœur.
— Oh! Arrête ça, tu sais très bien de quoi je veux parler.
Ulrik était maintenant près du lit. Il était grand et athlétique. Tous le monde s'accordait à dire que le grand blond était le portrait craché de son géniteur. Sa petite sœur, elle, empêtrée comme elle l'était dans ses couvertures avait un côté fragile que sa peau claire et ses cheveux blonds faisaient ressortir. Oui, il n'y avait pas de doute, ils étaient bien des Malefoy.
S'installant sur le lit, il lui caressa la tête.
— Allez mon cœur, tu sais bien que papa ne te vendra pas au premier con venu!
— Tu crois que ça me console! Ah, chic alors! Mon père ne me vendra pas à n'importe qui! Mais à qui alors? Un vieux sorcier puissant qui veut une descendance et qui renforcera le pouvoir de notre père? Alors c'est ça, je ne suis qu'un ventre sur patte?
Ulrik attrapa les épaules secouées de sanglots et pressa cette petite chose tout contre lui pour la câliner.
— Chut, la, la… Je suis là moi. Tu sais très bien que je ne laisserai jamais une telle chose se produire.
Ulrik se rappelait encore des paroles de son père quand il avait découvert ce petit bébé.
— Voici ta petite sœur, Ulrik. Attention, elle est fragile. Tu devras la protéger. Maintenant tu es un grand frère.
Le jeune garçon avait hoché la tête et depuis ce jour, il avait toujours pris son rôle au sérieux.
Beth abattit son petit poing sur le torse de son frère.
— Ulrik, tu m'étouffes! Tu me sers trop fort! Je suis pas un vif d'or! protesta la jeune fille.
— Bien sûr que non, mon ange. Allez, je vais te laisser t'habiller maintenant.
— Qui te dis que je vais porter cette fichue robe de petite fille modèle?
— Je te connais, tiens. D'accord, tu veux que papa arrête de te traiter comme sa petite princesse mais tu ne veux quand même pas le voir en colère, je me trompe?
— Non…
— De toute façon, tu pourras te changer dès ton entrée dans le Poudlard Express.
Le regard de Beth s'illumina. Mais oui, bien sûr …
Beth sécha ses larmes, s'approcha de son frère et lui déposa un gros baiser sur la joue. « Je t'adore toi! T'es le plus fort. Allez, fiche moi le camp, je vais la mettre cette fichue robe! »
Il avait gagné. Et sans employer la menace qui plus est.
A Suivre...
Le Petit Mot de l'Auteur :
L'on n'est pas forcé de savoir écrire pour aimer ça. C'est mon cas, je ne me considère pas comme quelqu'un de doué (qui peut en faire son métier...). Mais mon style, si j'ai vraiment un style, me semble abordable et en fait tout à fait lisible. Donnez moi un ordinateur et je vous écrirai une histoire... Cette phrase pourrait très bien me définir. J'adore écrire, la preuve cette petite histoire qui est née l'espace d'un week-end de mes retrouvailles avec Alice (mon portable adoré qui était malade). Alors, ne soyez pas trop intransigeants. Et bonne lecture. Merci Cristal^^ Mahel, Mardi 20 Avril 2004
