Petites conversations nocturnes

Ron se réveilla en sursaut en plein milieu de la nuit. Son esprit se mit à bouillonner dès qu'il se rendit compte de l'endroit où il se trouvait quelques instants plus tard. Il était au 12 square Grimmauld, dans la chambre qu'il partageait avec Harry d'habitude. Ce dernier avait décidé de prendre l'ancienne chambre de Sirius, ce qui voulait dire…

Un petit gloussement interrompit le flot de ses pensées.

« Merde »

Il s'était réveillé parce qu'il avait fait un rêve érotique mettant en scène la personne qui se trouvait dans le lit voisin. Comment allait-il nettoyer tout ça ? Il connaissait le sort adéquat mais il n'était pas assez fou pour tenter de le lancer en silence pour la première fois, qui plus est sur mini-Ron et encore moins sous le regard curieux d'Hermione.

Tu es réveillée ? demanda Ron, dans une vaine tentative pour gagner du temps.

« Est-ce qu'elle le remarquerait si je prenais ma baguette avant d'aller dans la salle de bains ? »

Même si je n'avais pas été en train de lire, je me serais quand même réveillée. Tu faisais… de drôles de bruits.

Hermione ne leva pas les yeux de son livre « Les Contes de Beedle le Barde ».

« Des bruits ? Réfléchis, bon sang, réfléchis ! »

Je faisais un cauchemar… oui c'était juste ça. Je rêvais… d'araignées. Elles étaient pleines de poils… Tu sais bien que j'ai peur… des araignées…

Ron savait que c'était une excuse minable mais il priait de toutes ses forces pour qu'elle ne remarque rien.

Si tu fais ce genre de bruits quand tu rêves d'araignées, je ne préfère pas savoir ce qu'elles étaient en train de te faire…

Ron en fut horrifié alors que la bouche d'Hermione forma un sourire narquois. Il aurait voulu être avalé par le lit lui-même. N'allait-elle pas le laisser s'en tirer simplement ?

« Je la laisserai s'en tirer si la situation était inversée… quoique, non, je ne le ferai pas. Je me moquerai, sur ! »

Ses pensées restèrent figées sur l'image d'une Hermione gémissant dans son sommeil. Mini-Ron fit un soubresaut dans son pantalon ce qui ramena Ron à son dilemme premier : comment nettoyer tout cela sans subir d'humiliation, ou plutôt sans subir d'humiliation supplémentaire.

Lorsqu'Hermione reprit la parole, Ron sortit à nouveau de sa rêvrie.

C'est parfaitement naturel, Ron. 83% des hommes se « lâchent » pendant leur sommeil. Cela confirme juste ta virilité et ta capacité à –

Tais-toi, pitié ! Par la barbe de Merlin, pitié, tais-toi tout de suite ! coupa-t-il sur un ton hystérique.

Il attrapa sa baguette sur sa table de chevet et décida qu'il serait toujours moins embarrassant de se remettre en état de suite plutôt que de laisser Hermione voir la tâche sur son pantalon. Il se leva pour quitter la chambre tout en lançant un sort de nettoyage.

Un silence gênant s'installa lorsqu'il revint se coucher dans son lit en soupirant. Jamais il n'avait autant souhaité être seul. Il avait pourtant été ravi lorsqu'Hermione avait timidement avoué ne pas vouloir dormir seule après qu'Harry avait décidé de dormir dans la chambre de Sirius. Ce n'était pas une situation des plus romantiques mais il avait espéré, en son for intérieur, que quelques longues conversations nocturnes allaient l'aider à lui voler son cœur. Il n'imaginait pas ce genre de conversations…

La culpabilité commença à le ronger de l'intérieur alors qu'il restait assis là. Elle n'avait pas mérité qu'il lui crie dessus et malgré l'horrible vérité que ses propos avaient mise en avant, il savait qu'au fond elle n'avait fait cela que pour détendre l'atmosphère.

Désolé de t'avoir crié dessus Hermione, dit-il doucement, le regard fixé sur le plafond.

Vu les circonstances présentes, c'était assez compréhensible, dit-elle tout aussi calmement.

Elle resta silencieuse et Ron se demandait s'il devait se tourner et s'endormir.

Des araignées ? Non, mais franchement, Ron, tu aurais pu trouver quelque chose de plus plausible quand même !

La colère de Ron se raviva lorsqu'il l'entendit de nouveau glousser derrière son livre. Il se redressa sur un coude et la fixa, persuadé qu'elle était devenue folle.

Mais qu'est-ce que tu voulais que je dise d'autre ? dit-il, irrité.

Au départ, quand tu as commencé à gémir, j'ai cru que tu rêvais de nourriture. Oui, avec tous ces « Encore » et tous ces « Trop bon ».

« Achevez-moi, » pensa Ron.

Je n'ai compris que plus tard, quand les choses ont commencé à… progresser.

Elle avait réfléchi avant de choisir ce mot.

Je ne te savais pas exhibitionniste… Vouloir faire CA dans une bibliothèque.

Ron se laissa tomber avec force sur le matelas et se plaqua son oreiller sur le visage.

Tu dormiras dans ta propre chambre à partir de demain ! cria-t-il de dessous sa cachette duveteuse.

Arrête de faire le bébé, Ron, ce n'est pas comme si tu étais le premier à avoir rêvé de faire des cochonneries à la bibliothèque.

Ron souleva son oreiller pour pouvoir mieux l'observer. Sa voix était sure et monocorde, pourtant Ron ne s'y fiait pas. Ses joues étaient légèrement roses et elle se mordillait la lèvre inférieure. L'aveu qu'elle venait de faire indirectement l'embarrassait. Ron se redressa de nouveau sur un coude.

Vraiment ? Ton amour des études prend une toute autre tournure tout d'un coup, la taquina-t-il.

C'est bon, Ron, quel élève ayant été à Poudlard n'a jamais rêvé de se laisser aller au milieu des allées sombres dédiées à la littérature Moldue.

Ron était sous le choc. Sans parler de la réaction de mini-Ron au vu des images mentales qu'Hermione venait de lui créer. Il ne pouvait pas s'empêcher de l'imaginer là-bas, les lèvres gonflées, haletant sous ses caresses. C'était comme en troisième année lorsqu'elle avait giflé Malefoy. Il la voyait sous un tout autre jour.

Qui êtes-vous et qu'avez-vous fait de mon Hermione ?

Ron devait bien vérifier d'une manière ou d'une autre que c'était bien elle qui avait dit cela : sa meilleure amie Hermione, obsédée par les livres, n'émettant aucune objection à l'idée de parler de quelque chose que Ron aurait considéré comme un blasphème pour elle.

Ce n'est pas un secret vu que toute ma relation avec Viktor s'est passée dans la bibliothèque de Poudlard.

Et cela lui suffit. L'imaginer avec ce prédateur Bulgare mit fin à tous ses fantasmes et il s'empêcha de crier et de casser des choses autour de lui. Heureusement pour lui, Hermione sembla s'en rendre compte et continua.

J'ai du apprendre à tousser et à bouger mes pieds bruyamment à chaque fois que je retrouvais Jane Austen.

« En quelle année était Jane Austen et est-ce qu'elles m'auraient laissé regarder ? »

Les pensées de Ron devaient se lire sur son visage puisque dans la seconde suivante, Hermione lui avait jeté son livre à la figure.

C'est une auteure. Tu n'es qu'un sale pervers !

Ron avait esquivé le livre et se mit à glousser, gêné que ses réactions hormonales soient si évidentes. Il adorait la voir toute chose. Ca le rendait… tout chose.

Ce n'est pas de ma faute, tu parlais tout haut de retrouver quelqu'un dans les rayonnages de la bibliothèque. Pas la peine de me jeter un livre, mes pensées étaient tout à fait innocentes.

Si tes pensées étaient innocentes alors je ne te demanderai plus jamais de te joindre à la S.A.L.E.

Son regard le mettait au défi de raconter le mensonge qu'il était déjà en train de fignoler dans sa tête. Mais c'était inutile, il savait pertinemment qu'il ne pourrait pas lui dire sans se trahir.

D'accord, tu as gagné, je ne suis qu'un adolescent pervers ! avoua-t-il avant de se souvenir d'un détail. Tiens, au fait, 83% c'est drôlement précis. D'où tu sors tes statistiques ? Ce n'était surement pas au programme. Des fois j'ai même l'impression que tu inventes des nombres pour éviter que les gens ne te contredisent.

Ne sois pas stupide, Ron. Je n'invente pas de chiffres pour me rendre intéressante. Je l'ai trouvé sur Google.

En voyant son air ébahi elle continua.

C'est un truc Moldu. C'est un moteur de recherche sur Internet. On tape ce qu'on veut et il t'affiche les différentes pages web qui le mentionnent.

D'accord, alors premièrement, des fois j'ai l'impression que tu me parles en grec. Et deuxièmement, pourquoi tu as été chercher ce genre d'information sur un truc qui s'appelle « Gogol » ?

Les joues d'Hermione prirent une teinte rose vif.

Google, Ron, le moteur de recherche s'appelle Google. Tu aurais vraiment du prendre l'option d'Etudes des Moldus. Dans le monde Moldu, tout le monde m'aurait compris.

Tu ne m'as toujours pas dit pourquoi tu as recherché des informations sur…

Ron marqua une pause, cherchant ses mots. Même s'il faisait tout son possible pour l'embarrasser, certaines choses restaient difficiles à dire devant elle.

… des informations sur CA.

J'aime comprendre les choses. Quand j'entends parler de quelque chose que je ne connais pas, je me mets en tête de faire des recherches dès que l'occasion se présente. Et vu que je partageais le dortoir de Lavande et Parvati, c'était inévitable que j'entende parler de ces choses là.

Elle avait dit tout cela en fixant son dessus de lit.

Les filles parlent de ce genre de choses ?

Ron était choqué. Les filles n'étaient-elles pas censées parler de vêtements et de ce truc qu'elles se mettaient sur les yeux ?

Tu plaisantes ? Je suis au courant de tous les détails croustillants concernant les couples qui ont vu le jour que ce soit dans notre année, l'année supérieure et l'année inférieure. Sans parler de toutes les rumeurs qui ont pu exister.

Ron faillit s'étrangler.

Tous les couples ? demanda calmement Ron, sans oser la regarder.

Hermione semblait avoir compris où il voulait en venir.

Oui, Ron, TOUS les couples, toi et Lavande Brown compris.

Ron mourait d'envie de savoir ce que son ex petite amie avait pu dire sur lui, pourtant il ne voulait pas aborder le sujet Lavande. Hermione avait encore une fois compris à quoi il pensait et pris une décision pour lui en continuant.

Apparemment, elle aimait beaucoup tes grandes mains mais il t'a fallu un moment pour effacer toute ta maladresse…

De nouveau, Ron aurait souhaité être englouti par le matelas.

Les filles sont diaboliques. J'arrive pas à croire que Lavande ait raconté toutes nos séances de bécotage alors que je n'ai rien pu tirer de McLaggen concernant votre rencard.

Hermione fit alors un grand sourire avant d'émettre une série de gloussements moqueurs.

Oui, et bien, ce que je peux te dire c'est que McLaggen est devenu un peu trop « tactile » sous une branche de gui et qu'après ça je lui ai jeté un très vilain sort qui a rendu son petit copain complètement hors-jeu pendant un certain temps.

Il adorait cette fille. Sans l'ombre d'un doute, il était follement amoureux d'elle.

C'est genial ! Franchement, tu es la sorcière la plus intelligente du monde. Pas étonnant qu'il refusait d'en parler !

Attends une minute. J'arrive pas à croire que tu lui aies demandé ! TU devrais avoir honte de toi pour vouloir m'espionner comme ça !

Mais tu viens de me dire que tu parlais de moi avec Lavande !

Non, j'ai dit que j'étais au courant de tous les détails croustillants pas que j'en avais parlé avec elles ! Pour ton information, je ne lui ai jamais rien demandé concernant votre relation. Mais il est vrai qu'elle adorait raconter en détails vos petits rendez-vous, surtout quand j'étais là.

Un silence gênant s'installa rapidement entre eux et Ron sut qu'il devait dire quelque chose. Il avait espéré que cette histoire ne revienne jamais sur le tapis mais vu la mission dangereuse dans laquelle ils se lançaient, il ne voulait pas qu'il leur arrive quelque chose sans que l'affaire ait été réglée.

Ecoute, Hermione, pour cette histoire avec Lavande, c'était stupide. Je ne l'aimais même pas. C'est juste que Ginny a dit quelque chose, enfin elle l'a plutôt hurlé… Bref, elle a dit que moi je n'avais jamais embrassé personne quand Harry et moi on l'a surprise avec Dean derrière une tapisserie.

Il se sentait idiot de lui parler de son manque d'expérience.

Lavande était juste là. Je voulais juste embrasser une fille moi aussi, pour ne pas être le seul à ne pas l'avoir fait. Ca ne devait pas aller plus loin que ça. Tu ne peux pas savoir –

Il marqua une pause, cherchant ses mots.

Tu ne peux pas savoir à quel point j'aurai préféré attendre, oui, attendre –

Son regard s'ancra au sien. Elle avait une expression étrange mêlant vulnérabilité et désir.

J'aurai préféré attendre quelqu'un d'autre, quelqu'un de très spécial, murmura-t-il enfin.

Un court silence s'installa de nouveau. Ron mourait d'envie qu'elle dise quelque chose.

Je n'aurais pas du t'envoyer ces canaris. Ce n'était pas juste, je n'avais pas à attaquer un de mes meilleurs amis.

Sa voix respirait la mélancolie et elle s'était mise à jouer avec son dessus de lit à nouveau.

Je suis désolée.

Elle pointa sa baguette sur sa lampe de chevet et l'éteignit.

Le fait d'éteindre la lumière semblait vouloir dire que la discussion était close mais Ron ne put s'empêcher de lui répondre.

C'est pas grave, je le méritais. Embrasser quelqu'un dans la Salle Commune alors que j'avais accepté ton invitation à la fête de Slughorn… Je regrette. Tu es très spéciale pour moi Hermione.

Il se demanda si elle ferait le lien avec l'une de ses phrases précédentes. L'obscurité de la pièce l'aidant, il continua son aveu.

Si je n'avais pas fait tout ça alors c'est peut-être à moi que tu aurais jeté un sort pour avoir été trop tactile sous le gui.

Un autre silence. Ron se demanda si Hermione ne s'était pas endormie alors qu'il venait d'avoir un accès de courage.

Je ne crois pas que je t'aurais jeté un sort si tel avait été le cas.

Sa voix était faible mais Ron avait entendu chaque mot de sa phrase. Il eut l'impression que sa poitrine allait exploser. Il ne pensait pas que son corps supporterait tant de bonheur.

Bonne nuit, Hermione.

Bonne nuit, Ron, dit-elle avant de glousser. Fais de beaux rêves !

« Elle est vraiment diabolique, non ? »