Chapitre 1 : Evasion sans surprise !

Mais il était trop tard. Tandis que la brigade inquisitoriale s'avançait vers eux, Fred et George décollèrent d'un coup de pied et firent un bond de cinq mètres dans les airs, le piton de fer se balançant dangereusement sous leurs balais. Fred se retourna vers l'esprit frappeur qui voletait à sa hauteur au dessus de la foule.
- Rends-lui la vie infernale à cette vieille folle, Peeves, lança-t-il.

Et Peeves que Harry n'avait encore jamais vu obéir à l'ordre d'un élève, ôta de sa tête son chapeau en forme de cloche et se mit au garde-à-vous devant Fred et George qui firent demi-tour sous les applaudissements nourris de la foule avant de s'élancer au-dehors dans le ciel étincelant du crépuscule.

La lune si resplendissante en ce soir, ne faisait qu'augmenter la félicité ressentie par les deux jeunes hommes. Et alors que chacun d'eux, les mains rivées sur son balai, profitait de ses premiers moments de liberté, Fred se retourna un instant et appela son frère :

- George ! On ne le voit plus ! On ne le voit plus !

Son jumeau s'arrêta à son tour et regarda en arrière. Un geste qui lui fit enfin comprendre qu'en effet, ils l'avaient fait. Là où quelques secondes auparavant s'élevaient hautes et fières les tours de Poudlard, ne restait maintenant qu'une lune claire. Ils venaient de quitter leur collège, ils venaient de signer pour leur nouvelle vie d'adulte. Dans un demi-tour parfait qui laissait entrevoir ces années de quidditch, Fred s'approcha de son frère et murmura d'une voix qui ne lui était pas familière :

- J'ai l'impression… j'ai l'impression qu'on est libre ! ON EST LIBRE !

Il se mit alors à observer plusieurs cercles autour de son frère, ce dernier le regardait, partagé entre l'envie de le suivre et une autre idée qui le faisait plus frémir encore. Finalement, il coupa la poire en deux et suivant son jumeau, il s'en approcha de plus en plus pour pouvoir enfin lui dire :

- Tu as raison, finalement, on a réussi… Jusqu'à ce que maman apprenne la nouvelle.

Cette fois, Fred s'arrêta net, comme fauché en plein vol par un cognard lancé à pleine vitesse. Cette première nuit d'adultes avait désormais un goût amer.

- Elle comprendra George… dit-il dans un ton qui semblait plus interrogatif qu'affirmatif. Et puis, maintenant qu'on a fait tout ça, je n'ai pas envie de faire demi-tour.
- Moi non plus, mais il faut se rendre à l'évidence, ça ne risque pas de lui faire plaisir tout ça…
- On le savait déjà avant de prendre cette décision. C'est pas maintenant qu'on va faillir. On va… on va rejoindre notre nouvelle demeure et lui écrire une lettre. On va lui dire qu'elle peut le prendre comme elle veut mais que notre décision est prise.

George n'avait pas bougé d'un iota, les yeux dans le vide, il ruminait cette phrase : « rejoindre notre nouvelle demeure ». Il se laissa alors une nouvelle fois porter par ce vent revivifiant vers le 93 Chemin de Traverse. Bien sûr que la route fut longue mais rien ne leur semblait impossible après la folle journée qu'ils venaient de vivre. Rien à ce moment là n'aurait pu faire tomber leur moral en dessous du niveau de la mer.

Et lorsqu'ils virent les lumières de Londres se dessiner dans l'horizon, ils s'entendirent dans un regard pour avaler la première de leur invention qui leur fut vraiment utile « l'invisibons ». S'il avait su que ce bonbon qui leur avait créait tant de problèmes leur aurait servi à rejoindre leur tout premier magasin. Mais voilà que maintenant ils pouvaient survoler la ville sans peur d'être vu par un moldu.

Ils n'avaient pas réellement pris le temps de visiter les lieux en profondeurs, pas vraiment eu le temps de vérifier l'état de salubrité des lieux, ils avaient juste trouvé que l'endroit était fort bien placé et surtout, s'étaient mis d'accord sur le fait qu'ils ne devaient pas gâcher l'argent dans un lieu plus conventionnel. Après tout, comme l'avait fait remarquer George, les gens viendront chez nous pour les services que nous avons à leur offrir et pas pour se retrouver dans une pièce aux mus blancs sentant la lavande comme chez notre tante Gidelza. Il était certain que rien ne ressemblait ici à une pièce recouverte de tapisserie à fleurs, parfumée par d'énormes bouquets de fleur.

Les murs étaient si sales et humides que la peinture d'un rouge criard s'écaillait et venait tomber sur les cartons de marchandises entreposés n'importe où. Les carreaux recouverts d'une substance indescriptible ne laissaient filtrer aucune lumière de l'extérieur. Le sol recouvert d'un plancher laissant passer dangereusement quelques échardes de bois. Autant dire qu'il devait être impossible d'accueillir qui que ce soit dans ces locaux répugnants de saleté. Et pourtant, les yeux de nos deux frères brillaient d'une lueur infantile. Cette pièce concentrique était d'ores et déjà leur bébé.

Fred se laissa tomber sur le sol en déplaçant un nuage important de poussières et regarda le plafond, un sourire béat accroché aux lèvres. Il fut arraché de ce moment de bonheur par la voix de George qui déjà s'approchait, un morceau de parchemin à la main et une plume froissée.

- Il vaut toujours mieux de se débarrasser du pire avant…

Quiconque serait rentré ici n'aurait pas eu la même notion de pire. Mais pour nos jumeaux, nettoyer cette pièce était une partie de plaisir à côté de ce qu'ils devaient faire maintenant : mettre leur cœur sur papier pour tenter de noyer le poisson.

- Bien George mais on lui dit quoi ?
- Je suppose qu'il faut trouver un moyen pour qu'elle n'ait pas des envies de meurtre…
- Tu parles de maman là… quoi qu'on dise, elle ne sera forcément pas d'accord…
- Sauf si on lui fait croire le pire pour voir arriver ce qu'il y a de plus abordable…

Dans un sourire entendu pour son frère, George se laissa à son tour tomber par terre et se mit à griffonner quelques mots d'une écriture chiffonnière. Fred le regardait, ne pouvant refreiner de temps à autre un rire mal contrôlé et un « nan, tu vas pas oser ? ». Et pourtant, dix bonnes minutes plus tard, le jeune homme relisait à voix haute sa missive.

Chère maman,

Avant même que tu ne décides à prendre la poudre de cheminette pour venir nous chercher là où tu ne sais pas, laisses-nous t'expliquer ce qui nous pousse à agir ainsi.

Tu sais comme nous que cette période de guerre contre tu-sais-qui n'est facile pour personne, nous même souffrons plus que tu ne veux le croire de cette situation. Ce n'est alors pas volontairement que nous nous sommes décidés à quitter Poudlard, non, crois-nous, c'est non sans une pointe d'appréhension et de peur que nous avons fuis. Car oui, nous avons fuis ! Mais avions nous réellement le choix ? La réponse est non. Car sans cela, ils s'en seraient pris aux élèves, alors qu'est-ce que le sacrifice de deux personnes pour sauver tous les autres.
Mais dans cette épreuve, un bonheur est survenu. Nous avons rencontrer deux jeunes filles qui malgré leurs origines plus que douteuses, se révèlent être de bonnes épouses. Car oui maman, au moment où tu recevras cette lettre, nous serons mariés et futurs pères de famille.

Alors tu vois maman, nous avons finalement réussi à devenir de vrais adultes, mais peut-être pas de la façon dont tu crois.
Car non, nous n'avons pas rejoint les mangemorts et nous avons encore moins épousé une de leur fille. Nous n'allons pas tout de suite avoir d'enfants et pourtant, nous sommes des adultes. Pour la simple et bonne raison que nous avons réalisé notre vœu le plus cher, nous sommes enfin propriétaires d'un magasin sur le chemin de traverse.

Avec tout notre amour,

Tes fils, Fred et George.

La lettre pliée et accrochée à la patte d'un hibou, les deux frères se laissèrent tomber sur le sol, fatigusé mais pressés d'être au lendemain pour pouvoir réaliser ce qu'ils s'étaient jusque maintenant contentés d'imaginer.