CHAPITRE 1 : HOLD YOUR BREATH

Un petit rouge-gorge se posa sur le bord de la fenêtre ouverte, sa petite tête se tournant à droite puis à gauche. Sans doute à la recherche de quelque chose à se mettre dans le bec, il vola jusqu'à une panière de fruits largement garnie. Les pommes et oranges étaient bien trop grosses pour lui aussi le volatile se ravisa pour venir loucher sur le raisin. Choisissant un raisin pas trop gros, il le goba d'un coup et s'attaqua au reste de la grappe. Fait donc, petit oiseau … Il n'y avait plus que toi pour le manger.

Finalement, le rouge-gorge repartit sans plus de cérémonie, volant vers un lointain horizon. Uniquement suivit d'un regard rose bien trop vide, bien trop épuisé. Des yeux qui avaient été rieurs un peu avant maintenant statiques sur ce visage pâle. Non cadavérique. Le dos calé contre un oreiller sur lequel son corps translucide semble se fondre, Momoi regarde par la fenêtre d'un air absent. Perdue dans les méandres d'un esprit prisonnier d'un corps qui ne tient plus la route, elle se demande si elle verra la fin de son calvaire bientôt.

Sur le lino du sol, une brochure pour un centre destiné aux grands malades en fin de vie l'attend. Sauf que la rose l'a jeté. Elle n'en veut pas, elle ne veut pas. Elle sait qu'elle va mourir mais ça … ça c'est comme lui dire « puisque tu vas crever, autant le faire ailleurs qu'ici, tu prends de la place ». Ses mains blanches sont posées sur ses cuisses, sur le drap. Momoi regarde dans le vide, cherchant quelque chose pour la divertir un peu. La télécommande est trop loin, elle n'a pas la force de tendre le bras. Même respirer fait mal. Être dans cet état lui fait mal.

Voilà 9 mois qu'on lui a déclaré sa maladie. Si elle avait commencé par garder le sourire, choisissant de privilégier son temps avec sa famille, tout s'était détérioré trop vite pour que son courage éphémère ne tienne la route. On lui demandait de tenir, de continuer de croire mais ce n'était que des idioties. Elle allait mourir. Point.

Momoi avait tout abandonné quand elle avait appris. Ses études à l'université, ses projets d'avenir, la grande famille qu'elle aurait aimé avoir. A partir de ce moment-là, elle s'était mise à sortir tous les soirs, à s'amuser, à oublier. Elle avait dépensé sans compter, voyager sans se retourner. Dire les quatre vérités aux personnes l'ayant blessé auparavant, remercier les autres. La rose avait même eu officiellement un petit-ami. Taiga était adorable bien que maladroit. Il n'avait cessé de rougir ne sachant pas quoi dire pour se présenter. Alors Momoi avait sourit et lui avait demandé de sortir avec elle.

Le même soir, confidence sur l'oreiller oblige, elle lui avait raconté pour sa maladie, lui précisant bien qu'il n'avait pas à supporter ça avec elle. Le rouge avait encore toute sa vie, inutile de se traîner un boulet à la jambe. Pourtant, il l'avait serré dans ses bras, lui murmurant qu'il resterait près d'elle. Jusqu'à la fin. Pour la première fois, Momoi avait pleuré.

Mais Kagami, puisque c'était son nom, n'appréciait pas Aomine. Il fallait dire que le bleu était une vraie teigne par moment. S'étant auto-proclamé comme celui qui ferait sourire la rose encore et encore, il ne supportait pas la concurrence de ce mec venu de nul part. C'était lui l'ami d'enfance, c'était lui qui la connaissait depuis plus longtemps, qui souffrirait le plus de sa perte. C'était lui plus que tout. Le rouge avait tenté de faire des efforts mais en vain. Et à vrai dire, Momoi n'avait jamais cherché à les faire s'entendre. C'était comme ça et voilà. S'ils pensaient qu'elle avait du temps à perdre à chercher à flatter leur ego, qu'ils s'enfoncent le doigt dans l'œil et ce, jusqu'au coude.

Elle avait envie d'arracher la perfusion à son bras et de s'allonger comme elle le désirait. Ce maudit fil empêchait librement la jeune fille de se positionner à sa guise. Là dans ce lit, les jours passaient lentement. D'abord, le jeune Midorima, son très jeune médecin et qui n'avait qu'un an de plus venait régulièrement pour vérifier ses constances. Et qu'elle était en vie. Il savait qu'elle n'appelait plus dès qu'elle se sentait mal. Il s'était énervé et après du subir la froide colère de sa patiente. La voix féminine ne s'était pas haussée une seule seconde mais les mots avaient été cru et douloureux. Le jeune étudiant n'avait pas été préparé à ce genre de réaction à l'école de médecine et n'avait pas su réagir. Lui qui tenait à garder ses émotions cachées avait pour une fois laissé la place à l'incompréhension la plus totale. Que le manque d'expérience peut-être cruel.

Kagami ne devrait plus tarder. Il sait qu'il doit passer en premier et tôt parce qu'une fois qu'Aomine sera là, il sera jeté sans ménagement de la chambre d'hôpital. Alors, lui aussi veut profiter. Il n'abuse pas, il ne cherche pas la bagarre. Le garçon a vite compris que malgré son statut de petit-ami, Aomine était le cran au dessus. Aomine lui tirait des sourires. Aomine la faisait rire. Kagami savait qu'il perdait contre Aomine mais il avait promis de rester avec elle. Personne n'allait le faire mentir.

La porte s'ouvrit sur sa grande stature d'ailleurs. Immédiatement, un sourire transforma son visage viril en un masque de joie absurde. Il n'avait pas à se forcer... Déposant un sundae à la cerise sur la table près de sa petite-amie, le rouge se baissa pour picorer tendrement ses lèvres.

-Bonjour...

-Bonjour.

-Je t'ai apporté ça … Tu m'avais dit que tu aimais ça !

-Merci beaucoup. Je le mangerais un peu plus tard, je n'ai pas faim pour l'instant.

Menteuse ! Je sais que tu mens ! Je sais que tu obliges ton médecin à le donner à quelqu'un d'autre dès que je suis partit !

Elle imaginait tellement bien ce que pouvait se dire Kagami à cet instant. Et ce n'était que la pure vérité. Midorima avait une conscience mais un esprit combatif un peu faible face à elle. Pourtant, leurs échanges divertissaient un peu la rose qui voyait en eux, le fait que le vert devenait de plus en plus bon aux petites piques acides destinées à la faire se bouger un peu. D'ici sa mort, il allait devenir excellent, le grand Tsundere ~

Momoi a maigrit. Beaucoup. Au moins 10 kilos, ce qui la fait passer en maigreur certaine. Ça la fatiguait davantage mais elle ne pouvait rien : manger la faisait vomir. Le tuyau à gauche était destiné à l'alimenter un peu. Kagami se baisse pour ramasser la stupide brochure et la pose près du sundae.

-Taiga...

-Hmm ?

-Tu veux bien allumer la télé ?

Sitôt demandé, sitôt exécuté. L'écran noir grésille un peu avant de laisser un reportage animalier apparaître. Mais la rose fait zapper le garçon jusqu'à tomber sur un match de basket. Elle aime le basket. L'ancienne étudiante n'en a jamais fait mais elle aime le regarder. C'est beau un garçon qui joue au basket.

Aujourd'hui, il lui reste précieusement 90 jours à vivre. Presque la dernière ligne droite. Momoi sait où elle sera. Ici dans ce lit.

Je ne supporte plus de la voir dans cet état … !

Idiote petit Maman. Tu penses que ta fille s'aime actuellement peut-être ?!

Nous devons nous préparer aussi.

Son père est déjà plus carré, il a vit compris, sa fille lui ressemble. Étonnamment, les deux ont déjà discuté de tout. Où aura lieu l'enterrement, qui sera présent, le choix des fleurs, tout le tintouin. Momoi apprécie ce côté de son père parce qu'à sa façon, il veut la laisser tout contrôler avant le dernier round. Sa façon de dire qu'il a confiance en elle et qu'il n'y a qu'elle pour tout gérer sur ce sujet. C'est aussi son moment à elle.

La grande main chaude de Kagami caresse et tente de réchauffer la sienne. On dirait un glaçon hein ? Et encore, il ne sait pas pour ses pieds.

-Je vais fermer la fenêtre, tu es glacée.

Fais donc très cher ! Recouvre-la davantage si tu penses que ça va servir à quelque chose. Fais ce que tu veux. Les yeux roses suivent la balle orange sur l'écran plus loin, hypnotisés. Tous ces mouvements, c'est incroyable. Ça doit être magique en vrai … Le rouge l'entoure de ses bras, présence rassurante. Il regarde la télé aussi, commentant parfois le match. Ah, c'est vrai qu'il y a joué au basket. Il devait être impressionnant vu sa carrure.

-Taiga ?

-Oui ?

Ils se regardent un peu et elle ferme les yeux.

-Réveilles-moi quand tu pars, d'accord ?

-... D'accord.

Elle sent dans sa voix la peur. Celle de ne peut-être pas arriver à la réveiller justement. A la sentir contre lui et savoir qu'elle n'est pourtant plus là.

Momoi ferme les yeux, terrassée par la violente vague de fatigue qui venait de s'abattre d'un coup.


A son réveil, la rose est seule. Le visage de Midorima flotte au dessus d'elle, légèrement interrogateur.

-Je me demandais si tu étais en vie.

-Mourir sans t'avoir vu te rater un lancer ? Jamais …

Il l'aide à se relever et l'ausculte un peu. Pupilles, cœur, poumons et prise de sang. Comme d'habitude. Le vert deviendra un bon médecin. Il est très doux dans ses gestes contrairement à ses paroles. Sa grande main tient le bras de sa patiente avec une prudence non feinte. Elle est fragile.

-C'est bon.

La rose soupire. Elle n'aime vraiment pas ça. Elle le regarde nettoyer l'endroit où l'aiguille s'est plantée et récupère ensuite le papier pour coller l'étiquette à son nom sur le flacon qui contient le liquide pourpre. Le garçon aux lunettes fait une boule informe, remonte ses lunettes et tire vers le fond de la pièce, directe dans la poubelle. Et c'est un sans-faute.

-J'ai encore réussi, tu as donc l'obligation de manger tout ton repas ce soir.

La fille lève fièrement le nez et regarde autour d'elle.

-Où est Taiga ?

-Ton copain ? Je l'ai viré de la chambre, il ronflait tellement fort, ça dérangeait tout l'étage. Il avait pour ordre de ne surtout pas te réveiller.

Les yeux verts sont perçants derrière la fine lame de verre. Il est en colère.

-Tu n'as pas mangé ce midi.

-Nan.

-Tu vas boire ce sundae ?

-Dai-chan n'aura qu'à le prendre.

Ils se fixent et le garçon soupire le premier, massant l'arrête de son nez. Midorima a de grands doigts et elle sait qu'il joue du piano parfois. Mais elle n'a jamais pu l'étendre faire. Elle aimerait bien pourtant.

La porte s'ouvre encore, laissant Aomine entrer. Sa peau sombre ressort tellement ici, on dirait qu'il apporte le soleil. Il sourit mais ne se force pas.

-Yo !

Momoi se fend d'un vrai sourire alors qu'il tape dans l'épaule de Midorima qui manque de lui faire manger son stéthoscope. Ils ont beau ne pas s'apprécier, le vert ne cache pas qu'il préfère le bleu au rouge.

-Bakagami a encore laissé un sundae ?

Le futur policier crache sa haine comme un serpent le ferait avec du venin. Il prend le sundae comme s'il était couvert de microbes et porte la paille à ses lèvres. C'est pareil à chaque fois. Il déteste le petit ami de son amie d'enfance mais pourtant, il boit cette boisson. Tellement compliqué.

Aomine n'est pas doux, il se jette pratiquement sur le lit. Midorima remonte ses lunettes d'un geste agacé mais la rose devine son sourire derrière sa grande main. Il finit par les laisser, prétextant aller porter l'échantillon aux analyses.

-Tu l'as apporté ?

-Évidemment !

Le garçon sort une brosse à cheveux de sous son pull blanc en laine fine. Il aide Momoi à se relever un peu et se glisse derrière, ses longues jambes musclées de chaque côté. Doucement, il passe la brosse dans les longues mèches, dans un geste tendre qui n'appartient qu'à eux. La main gauche du garçon caresse le bras de la fille qui est toujours aussi hypnotisée par la télé. La monotonie des mouvements est rassurante quelque part. Elle le laisse faire avec confiance.

Elle ne sait pas que la gorge du garçon vient de se serrer alors que la mèche rose qu'il brossait vient de tomber dans sa main. L'un des inconvénients de la maladie. Les bras du garçons se resserrent autour de sa taille tandis que le dos de Momoi touche son ventre et son torse. Aomine pose son front contre le sommet de sa tête et serre les dents. Les mains blanches se posent sur ses bras.

Ne pleure pas.

C'est un ordre silencieux qu'il respecte. Ils restent là à attendre. Que l'heure des visites se terminent, qu'il doivent repartir. Aomine sera là demain sans faute. Comme toujours malgré les ordres du vert. Qu'est-ce que Midorima avait hurlé quand il avait découvert une fois que le bleu se traînait une horrible fièvre...


Quand le garçon repart, il recouvre Momoi qui dort. Midorima l'a obligé à faire manger la rose et même s'il déteste ça, il a carrément enfoncé la cuillère dans la bouche de son amie. Elle doit manger aussi comme ça. Ne serait-ce que de la vulgaire compote de pommes.

Pour l'instant, il attend au bus. Il n'y personne, normal vu l'heure. Aomine n'a conscience de rien, il va rentrer dans son appartement, se mettre au lit et se réveiller le lendemain matin. C'est idiot mais une sensation étrange le force à baisser les yeux. Stupéfait, il voit une main retirer son portefeuille de sa poche. Choqué de ne rien avoir sentit avant, l'étudiant reste immobile.

Avant que l'information ne monte au cerveau.

-Oy, connard, tu fous quoi ?!

Le petit voleur détale comme un lapin mais le bleu le poursuit. Il a un excellent niveau physique, si bien qu'il le rattrape et le plaque contre un mur. Merde, il est tout jeune ce gamin en plus !

-Toi … Rend-moi ça. Maintenant !

Il serre davantage les frêles épaules et plonge ses yeux furieux dans ceux du voleur.

Des yeux turquoises remplis de peur.

-Ton nom ?!

-Kuroko...

-Kuroko quoi ?!

Le plus petit avale sa salive et retient son souffle.

-Kuroko Tetsuya …


Lali oh ! Oui, encore une ... mais pour ma défense, je n'ai plus trop la motivation pour écrire les autres du coup, je passe à autre chose en attendant !

Un gros merci à ma Beta Reader : Dop !

En espérant que cette nouvelle fic vous plaise ~