Salut les petits pots de fromage blanc !

Bienvenue dans le recueil La cours des grands ! Oui, c'est un jeu de mot entre la cour des grands et la cours de récréation parce que c'est pas parce que les profs de Poudlard sont adultes qu'ils ont grandi dans leur tête ;)

Venez suivre les frasques des professeurs dans ce recueil d'OS basés sur les enseignants de Poudlard de notre univers (LVO). Pas besoin d'avoir lu la fic principale pour comprendre globalement.

Ici, l'action se situe au cours de l'année scolaire 2019-2020, année d'entrée à Poudlard de Lily Luna Potter.


Bonus 1 : Vol au-dessus d'une bibliothèque


Un bruit sourd.

Le coeur d'Adelia manqua un battement. Serait-ce…? Elle leva le nez de son livre et se tourna rapidement vers la fenêtre.

Personne.

La jeune femme soupira. C'était seulement un élève qui venait de faire tomber sa plume. Quelle bande de maladroits. Ils ne faisaient que lui donner de faux espoirs à chaque mouvement un peu plus brusque que les autres.

Non, Adelia n'était pas comme certaines de ses prédécesseures aigries et acariâtres. Pas du tout. Mais dernièrement, elle était moins patiente avec les élèves qui osaient respirer un peu trop fort dans la bibliothèque. Et elle avait une bonne raison pour ça. Elle attendait.

Oui, elle attendait de le voir. Chevaucher son balai devant la fenêtre. C'était devenu sa fenêtre préférée. Celle juste à droite du bureau auquel elle était assise toute la journée. Alors elle continua sa veille discrète, tentant sans grand succès de se concentrer sur sa lecture. C'était pourtant un livre passionnant ! Un livre sur… Sur quoi déjà ? Ah oui, le Règlement n°125-57-693 sur les épaisseurs de fonds de chaudron. Quoi ? Pourquoi lisait-elle ça ? Le livre était ouvert devant elle depuis plusieurs heures. Les élèves devaient la prendre pour une folle. Quelle personne saine d'esprit pourrait passer autant de temps sur un sujet pareil ? A part son auteur, en la personne de Percy… Weasley. Tiens, Weasley. Comme les farces et attrapes.

Elle referma le livre et l'envoya se ranger d'un coup de baguette magique. Adelia décida qu'il ne servait à rien de faire semblant d'être occupée, cela ne faisait pas passer le temps plus vite. Elle se leva, à la fois pour se dégourdir les jambes, voir si un élève avait besoin d'elle et se changer un peu les idées. Elle devait arrêter de penser à lui en permanence. Après tout, si elle s'attendait à une visite surprise tous les jours, ce ne serait plus une surprise. Logique.

Lorsque les élèves présents dans la bibliothèque entendirent sa chaise grincer, ils cessèrent immédiatement de chuchoter et se mirent à tourner les pages avec une délicatesse incomparable. Adelia se dit que Madame Pince avait dû traumatiser des générations entières d'étudiants pour que la crainte des bibliothécaires perdure. Oh, bien sûr, il y avait des règles et la jeune femme s'appliquait à les faire respecter. Cependant, elle aidait toujours ceux qui avaient besoin d'elle et elle était globalement très patiente. Sauf quand elle attendait un signe d'Alex. Et elle savait qu'un signe viendrait, comme chaque jour depuis trois semaines. Et deux jours, pour être précise.

Trois semaines et deux jours plus tôt… Adelia laissa son esprit divaguer en vagabondant parmi les rayons, faisant glisser son doigt d'une tranche de livre à l'autre. Elle adorait faire ça. Sentir le cuir, tantôt rêche, tantôt doux, des reliures. Essayer de deviner l'âge du livre ou encore son éditeur rien qu'avec cette sensation. Elle était douée. Après tout, elle les connaissait si bien.

N'ayant constaté aucune anomalie durant sa déambulation, Adelia retourna près de son bureau tout en rêvassant. Elle avait l'impression que c'était hier. Leur premier rendez-vous. Ils se tournaient déjà autour depuis un bon moment. Des rires, des contacts furtifs, des clins d'oeil. Même Deborah, qui n'avait pourtant aucune prédisposition à reconnaître un flirt, avait remarqué leur petit manège en salle des profs.

L'enseignante de Sortilèges, exaspérée par l'absence d'action de la part de son amie, l'avait menacée d'envoyer une lettre anonyme au professeur de Vol pour l'inviter à un rendez-vous avec Adelia si celle-ci ne faisait pas le premier pas. Adelia, faisant preuve de plus de finesse, fit déposer par un Elfe de Maison son roman préféré, Le souffle du dragon endormi de Victoria Hanson, sur le bureau d'Alex, non sans y avoir glissé un petit mot. Elle lui proposait une rencontre à la bibliothèque de Pré-au-Lard, un mardi. Tous les mardis, la gérante, Garance, aménageait un coin lecture et y servait le goûter. Adelia adorait s'éclipser de l'école pour se rendre à ce rendez-vous hebdomadaire, laissant la surveillance de la bibliothèque au bon soin de ses collègues, et elle avait décidé d'y convier Alex.

Elle y était allée seule, s'était installée sur son fauteuil préféré, juste en dessous de la fenêtre, et avait ouvert le premier livre qui lui était passé sous la main. C'était forcément une merveille. Garance sélectionnait toujours avec goût les ouvrages qu'elle laissait à disposition sur la petite table à portée de main d'Adelia. Mais ce jour-là, la jeune femme n'était pas très concentrée. Elle avait passé son temps à regarder au-dessus des pages en l'attendant. Et quand il était arrivé, son coeur avait bondi dans sa poitrine. Qu'est-ce qu'il était beau !

Il avait une allure folle. Lorsqu'il était rentré, la lumière derrière lui l'avait auréolé, accentuant les mèches folles qui volaient autour de sa tête, à l'image de leur propriétaire lorsqu'il fendait les airs sur son balai. Il était venu s'installer à côté d'Adelia et ils étaient restés là à lire, parler et siroter leurs boissons pendant des heures. La connexion n'avait pas mis longtemps à s'établir. Après tout, chacun d'eux était passionné, l'une par la lecture, l'autre par le vol. Ce qui leur faisait un point commun : l'amour de l'aventure et de la découverte.

Garance avait dû les mettre dehors à l'heure de la fermeture. Ils n'avaient pas vu le temps passer.

Leur soirée s'était achevée par un dîner aux chandelles dans l'appartement de la jeune femme à Pré-au-Lard. Elle avait toujours refusé d'occuper le logement de fonction qui lui était attribué à côté de la bibliothèque de Poudlard. Et c'était le genre de moment où elle était ravie d'avoir pris cette décision. Car ils n'avaient pas beaucoup dormi cette nuit-là.

Le lendemain matin, ils étaient tous deux retournés au Château séparément, pour éviter de mettre la puce à l'oreille de leurs collègues. Seule Deborah, en voyant les cernes de son amie, avait compris ce qui s'était passé et lui avait adressé un clin d'oeil doublé d'un sourire entendu lorsqu'elle était arrivée dans la Salle des Profs pour boire un café avant le début de la journée.

Depuis ce matin-là, pas une journée ne passait sans qu'Adelia ne reçoive un petit mot sur son bureau ou qu'Alex ne passe devant la fenêtre de la bibliothèque juste en face pour lui faire coucou. Et leurs rendez-vous du mardi commençaient à devenir une habitude.

Pourtant ce jour-là, Alex n'avait toujours pas donné signe de vie. Il était déjà dix-sept heures… Adelia commençait à osciller entre la déception, la peur qu'il se soit lassé d'elle et l'angoisse qu'il lui soit arrivé quelque chose. Elle essayait de se rassurer en se disant qu'il devait juste être très occupé à préparer les plannings des matchs de Quidditch ou à commander du nouveau matériel pour ses cours. Il lui semblait qu'il lui en avait parlé la semaine précédente mais elle n'en était plus très sûre. Peut-être l'avait-elle rêvé… Et puis, s'il s'était blessé, elle serait déjà au courant. A Poudlard, il n'y avait ni téléphones, ni internet, mais les nouvelles circulaient à la vitesse de la lumière. Ou du son plus vraisemblablement.

Le temps passait donc à la vitesse d'un escargot qui aurait fumé du cannabis. Et encore.

Lorsqu'Adelia quitta la bibliothèque aux alentours de dix-neuf heures pour rentrer dîner chez elle, elle était passablement énervée. Elle se dit que cette réaction était peut-être un peu excessive mais elle était quelque peu déçue et cette contrariété transparaissait derrière une mine maussade.

Elle sortit du Château en tenant fermement sa cape dans les mains pour tenter de se protéger du froid mordant. Elle n'avait jamais voulu raccorder sa cheminée personnelle au Château, considérant qu'un peu de marche chaque jour lui ferait le plus grand bien. Cependant, l'automne était particulièrement glacial cette année-là et Adelia regretta de ne pas avoir accepté le poste qu'on lui avait proposé à l'Ecole de Magie de Uagadou l'année précédente. Au moins là-bas, elle n'aurait pas eu besoin d'empiler trois capes pour éviter d'avoir les doigts congelés.

Elle traversa le parc et le village en ressassant ces pensées. Elle allait passer une soirée triste comme un dragon qui n'arrivait pas à cracher du feu. Elle n'avait plus qu'à sortir de son placard un pot de pâte à la citrouille à tartiner et à la manger à la cuillère en écoutant en boucle La solitude de l'hippogriffe des My Wand Is Bigger.

Elle ouvrit sa porte avec la ferme intention de respecter à la lettre ce programme spécial déprime passagère quand elle s'arrêta brutalement dans l'embrasure.

Les lumières étaient allumées.

Bizarre, elle n'était pas du genre à oublier d'éteindre avant de partir.

Elle s'avança prudemment dans la pièce à vivre, baguette en garde, prête à se défendre contre un potentiel intrus. Son coeur s'était mis à battre la chamade. Elle n'était pas entraînée à faire face à ce genre de situation. La dernière fois qu'elle s'était battue en duel, c'était en cours en première année à l'Université. Et ce n'était déjà pas particulièrement brillant à l'époque.

Retenant sa respiration, elle se tourna vers sa cuisine. Et fut comme paralysée.

Il était là.

La table mise. Un plat fumant posé au milieu. Du poulet et des frites de patates douces. Son plat préféré.

Un sourire béat s'étira sur ses lèvres. Cet homme était parfait.

- Ah, cool, tu es arrivée. On va pouvoir se mettre à table, je crève de faim !

Adelia s'approcha de lui et le serra dans ses bras.

- Qu'est-ce que tu fais là ?

- Je me disais qu'un dîner ensemble te ferait plaisir et comme les autres fois c'est toi qui a cuisiné, c'était mon tour.

- Merci, c'est exactement ce dont j'avais besoin. Je…

- Tu ?

- Non rien, ça a l'air délicieux ! Je ne peux pas attendre une minute de plus avant de goûter ce que tu nous as préparé.

- Alors à l'attaque.

Fiou, elle n'était pas passée loin de la catastrophe. Elle avait failli lui dire "Je t'aime". Au bout de trois semaines. Et deux jours. Elle devait être folle, ce n'était pas possible autrement. Elle ne devait pas prendre le risque de l'effrayer si rapidement en lui avouant ses sentiments. Et s'il ressentait la même chose ? Non, ce n'était pas raisonnable. Et puis, ce n'était pas le moment d'y penser. Les frites étaient vraiment délicieuses.