Bonjour à tous !

Après des années d'absence pour des raisons diverses et variées, je replonge dans l'univers de FF... Qui me semble si loin ! Le bordel pour retrouver comment on publie et tout.

Ci-après une petite histoire qui me trotte dans la tête avec mes personnages préférés. J'espère que ça ne va pas partir en live, mais en tous cas, promis, je la finirai, maintenant que je suis lancée. Si je peux avoir un rythme de publication hebdomadaire ce serait pas mal...

N'hésitez pas à me dire si ça vous plait ! Merci :)

Prologue

Lycée de Jamestown, bal de promo 2007

Je soufflai en remettant une mèche de cheveux derrière mon oreille. Quelle idée d'avoir tenté le chignon, je savais pourtant que mes cheveux n'accepteraient pas si facilement d'être domptés - à moins d'y passer trois bombes de laque. Puisqu'on y était, quelle idée aussi d'avoir voulu participer au bal de fin d'année. Tout ça pour faire plaisir à Jane, qui finalement, restait sagement assise dans un coin, les joues rosies par la chaleur ambiante. Le réfectoire, vidé et décoré pour l'occasion, était bruyant. Des rires fusaient de partout et la musique me faisait vibrer les tympans. Bien entendu l'alcool avait été proscrit. Bien entendu, certains sentaient fortement la bière et la sueur alcoolisée. Je soupirai.

Tout ça pour faire plaisir à Jane ? Je me fustigeai mentalement de ma mauvaise foi. J'étais contente d'être ici, au fond. Soyons honnêtes. C'était la fin de l'année, la fin du lycée. Adieu l'adolescence, les groupes stéréotypés, les querelles dignes d'un soap-opéra et toutes ces débilités qui m'avaient tant fait râler ces dernières années. Bonjour l'été, prélude à l'entrée dans la vie adulte. Enfin !

Bien sûr, mon assurance et mon impatience de m'installer sur les bancs de la fac n'étaient qu'une façade. La vérité c'est que j'avais aimé mes années de lycée. Je faisais partie de l'un des groupes "marginaux". Vous voyez, pas le club des sportifs, pas celui du club d'échec, encore moins celui du journal du lycée. Pas non plus les groupes de jeunes prédestinés aux études d'art ou de lettres siphonnées, en mode vêtements amples vert-fluo-power et orange-tu-me-vois-de-loin-pétard, bandeau dans les cheveux, discussions perchées et sachets d'herbe so nature. Mon groupe d'amis était plutôt celui que personne n'emmerde, mais que personne ne vient chercher non plus. J'ai toujours eu l'impression d'avancer en parallèle des autres lycéens à vrai dire - pas vraiment dans le même monde.

Je jetai un regard pensif en direction de Jane. Oui j'étais contente de participer à cet événement décrit comme incontournable dans la vie de tout jeune diplômé, mais officiellement, c'était elle qui m'y avait traînée presque de force. Elle y avait été invitée par son copain, et si nos amis Marie et Sylvain avaient catégoriquement refusé de se "présenter à cette mascarade", pour les citer, James avait joué le jeu et m'accompagnait comme cavalier.

Jane avait toujours fait partie de notre groupe, qui était constitué depuis le collège. Nous étions une bande d'amis - Jane, Marie, James, Sylvain et moi - qui avions grandi ensemble. Et pourtant, Jane n'avait pas grand chose à voir avec nous. Jane était lumineuse, belle, douce et gentille, là où le reste de notre petit groupe - je m'y incluais sans hésitation - était effacé, d'un physique commun, révolté et cynique.

Mais c'était ma voisine, nous nous connaissions depuis le jardin d'enfant, et nous étions tout simplement inséparables. Aussi, même si Jane avait tout pour intégrer les groupes les plus populaires, elle ne m'avait jamais lâchée.

Chacun se connaissait dans la petite ville de Jamestown où nous avions grandi, et c'était bien sûr le cas aussi dès l'entrée au lycée du coin. Rares étaient les nouveaux que l'on découvrait du jour au lendemain, arrivés comme des aliens - ou des cheveux sur la soupe.

En fait, il y en avait eu deux, débarquant l'année dernière.

Charles, le petit ami de Jane, en était un. Charles était arrivé au lycée en plein janvier, sans que personne n'en ait entendu parler auparavant, sans que personne n'ait idée de qui il était à ce moment précis.

Cela n'avait pas duré. Charles faisait en fait partie d'une des familles les plus riches du pays, et son nom était plus célèbre que celui de l'inventeur de la voiture, ce qui ne manquait pas d'ironie puisque ses parents avaient fait fortune dans l'industrie automobile. Il avait donc été propulsé directement dans le plus populaire des groupes, bien loin du petit clan que nous formions avec Jane. Cela ne l'avait pas empêché de la repérer, puis de lui tourner autour, et enfin de sortir avec elle - depuis maintenant 6 mois. Ça avait bien sûr fait des envieux. Ça avait surtout propulsé Jane dans le monde cruel des reines de bal. Elle venait d'être élue Reine de la promo - Charles étant, sans surprise, le Roi, et si cela pouvait paraître une consécration aux yeux de tous, à ses yeux à elle c'était une difficile épreuve. Elle n'avait jamais aimé être au centre de l'attention, et cela se lisait plus particulièrement sur son visage ce soir.

"Bonsoir, Elizabeth."

Ces deux mots me firent l'effet d'un coup de fouet.

Comme je vous avais dit, deux nouveaux avaient débarqué l'année dernière. Will était le second. Je pris une grande inspiration, n'essayai même pas de plaquer un sourire poli sur mes lèvres, et me tournai vers lui.

"Bonsoir, Fitzwilliam."

Il grogna à l'entente de son prénom entier.

Fitwilliam Darcy Junior était le frère jumeau de Charles. Étonnant, quand on les voyait côte à côte, car leurs différences dépassaient la simple apparence physique - Charles était blond, fin et élancé, yeux bleus et visage doux là où Will était brun, plus grand et large d'épaules, yeux gris et visage dur. Will était sombre, voire austère, et secret quand Charles était le lycéen jovial et populaire typique. En fait, Will était un "jeune vieux". Le mec qui se prenait déjà pour un adulte responsable alors qu'il n'avait même pas soufflé sa 18ème bougie.

Cela dit, on me décrivait parfois un peu de la même manière. Je ne lui reprocherais donc pas ce point ; et puis, j'avais déjà bien assez de griefs à son égard. Le premier étant qu'il s'était toujours opposé au rapprochement de Charles et Jane, allant jusqu'à lui conseiller de rompre quand il avait appris qu'un premier baiser avait été échangé.

Peu amène, il avait eu cette discussion avec son frère devant Jane, après les avoir surpris se promenant dans le parc attenant au lycée.

"Il reste six mois avant les examens, Charles, et je te rappelle qu'ensuite on repart. Tu crois que c'est le moment de tomber là-dedans ?" avait-il notamment sorti.

Un jeune vieux, je vous l'avais dit.

Charles et Will avaient effectivement été envoyés passer la fin du lycée chez leur tante, leurs parents multipliant les déplacements à l'étranger pour le travail. C'était ainsi que ces deux frères se retrouvaient à finir leur scolarité dans un lycée tellement perdu qu'il n'apparaissait même pas dans les statistiques du pays, mais hey ! Ne vous en faites pas pour eux, une place dans les meilleures facs leur était déjà réservée. Aussi savait-on qu'à la fin du lycée, ils s'envoleraient à l'autre bout du pays.

Bien qu'ébranlé, Charles avait persisté à sortir avec Jane. Et malgré mes premières réticences, je devais bien reconnaître que non seulement ils formaient un magnifique couple, mais en plus Charles était adorable. Le contraire de son frère.

Charles avait d'ailleurs essayé de le décoincer, allant jusqu'à, un jour, lui lancer sur le ton de la plaisanterie "Je te verrais bien avec Lizzie, Will. Vous avez le même esprit critique, cela ferait des étincelles, vous deux".

Nous étions en cours de Lettres - seul cours que nous quatre avions en commun - et un débat animé s'était porté sur le poète et écrivain français Victor Hugo. Nos points de vue sur la personnalité de cet écrivain divergeaient alors que nous réalisions à quatre une critique de littérature. Le prof nous avait demandé de former des petits groupes pour ce devoir, et Charles sortant déjà avec Jane à l'époque, je m'étais retrouvée avec eux et Will.

Will avait alors levé les yeux sur moi une demi-seconde, avant de reporter son attention sur Charles. "Avoir un esprit critique c'est une chose, encore faut-il être intéressant.", avait-il répondu sèchement.

Vous ne me connaissez pas encore, mais sachez que j'ai beaucoup de caractère. Cela étant, la réplique fut si violente que sur le coup, je n'avais pas été capable de répondre quoi que ce soit. Des centaines de réponses m'étaient venues par la suite, mais bien entendu, comme toujours dans ce genre de cas, il était trop tard. Cela dit, j'avais juré de garder une éternelle rancune envers ce garçon qui m'avait blessée (bien malgré moi) dans ma fierté.

Un raclement de gorge me ramena d'un coup au présent, et je sursautai légèrement, désorientée. Oh, oui. Le bal de promo. Fitwilliam Darcy qui, allez comprendre pourquoi, était venu me saluer. De quoi faire neiger sous les tropiques.

"Félicitations pour ton diplôme. J'imagine que tu as pu avoir une bonne fac, avec tes notes ?" me lança-t-il, se balançant d'un pied sur l'autre, le regard au loin.

Je fronçai les sourcils. Sérieux ? Quel lycéen normal parlait comme ça de nos jours ?

"Merci", répondis-je d'une voix plus hésitante que je ne l'aurais voulu. "Je peux savoir ce que tu fais, au juste ?" ajoutai-je plus sèchement.

Il se tourna vers moi, le regard surpris, et ses yeux se plantèrent dans les miens pour de bon cette fois.

Mon cœur tressauta dans ma poitrine. Il fallait que je sois honnête, j'avais beau le haïr profondément depuis ce fameux cours de Lettres, Will avait vraiment de beaux yeux. Peut-être d'ailleurs que si ma rancœur était si profonde, c'était parce qu'une part de moi l'admirait et... le trouvait beau. Je n'avais partagé que deux cours avec lui au long de ma scolarité, Lettres et Histoire, et force m'avait été de constater qu'il était brillant. Cela faisait d'autant plus mal, d'être méprisée par lui.

"Je sais que nous ne sommes pas partis sur de bonnes bases. Je m'en excuse, Elizabeth."

Je piaffai d'impatience. Tout le monde savait que je déteste qu'on m'appelle Elizabeth. Tout le monde m'appelait Lizzie. Sauf lui. C'est pourquoi moi-même je m'escrimais à l'appeler Fitzwilliam, alors que son surnom Will lui convenait tellement mieux.

"Pincez-moi je rêve. Le punch est alcoolisé ?" demandai-je en désignant le verre vide qu'il tenait à la main.

Il leva les yeux au ciel.

"Je ne sais pas pourquoi tu cherches à faire bonne figure ce soir. On ne se reverra pas, tu sais ? ajoutai-je sèchement.

- Je sais que j'ai mal agi, d'accord ? Je me suis montré blessant, sans raison. J'aimerais m'en excuser."

Je levai un sourcil sarcastique, cherchant à toute vitesse une réponse à lui balancer. Je n'en eus pas le temps ; un bras atterrit sur mes épaules, et je me tournai pour regarder l'assaillant ; James. "On danse, cavalière ?" me cria-t-il dans l'oreille.

Le temps que je me retourne vers Will, celui-ci avait disparu. Je haussai les épaules, et partis danser avec James.

Quatre heures du matin, le bal se terminait.

La lumière était tamisée, le DJ annonça la clôture du bal sur un dernier slow. Les couples se formèrent, mais James avait fini plus ou moins ivre -un des punchs avait effectivement été alcoolisé- et était déjà parti une heure plus tôt.

Charles et Jane étaient pendus l'un à l'autre avec toute la force du désespoir - je sais qu'ils avaient envisagé de poursuivre leurs études dans la même ville, mais les choses en avaient décidé autrement. Si Charles partait étudier à New York, Jane, elle, avait été reçue dans des facs à un minimum de deux heures de route de là. Pas insurmontable, mais dur à supporter.

Je me levai et m'étirai ; je m'apprêtais à partir, quand une main posée sur mon épaule -si légèrement que je doutai avoir senti un contact- me fit me retourner.

Will.

Sans un mot, il m'invita à le suivre sur la piste de danse.

Fatiguée et interloquée, je n'eus pas la présence d'esprit de refuser.

La danse dura quoi ? Trois minutes ? Trois heures ? Je suis bien incapable de le dire.

Mon tout dernier souvenir du lycée, ce fut les lèvres de Will à mon oreille, qui me murmurèrent "Au revoir, Lizzie" avant de quitter la salle.

Je ne lui répondis pas à haute voix.

Adieu, Will...