En partant se coucher ce soir-là, Dean pensait se jeter dans son lit, enfoncer sa tête dans les coussins et dormir ses quatre heures d'une traite. Il était crevé et n'avait rien d'autre en tête sinon fermer les yeux et s'écrouler. Alors trouver une femme nue sur son plumard, ça ne faisait pas parti de ses plans. Le blond ne pouvait pourtant pas l'ignorer : sitôt la porte ouverte, il n'avait pas d'autres choix que de poser les yeux sur cette inconnue sans aucune notion de pudeur, assise dos contre le mur et les jambes étalées sur le matelas -sur son matelas. Un instant, il s'était demandé s'il ne dormait pas déjà, mais si c'était le cas la jeune femme ne serait pas si petite et aurait une taille plus fine. Ce n'était pas vraiment son type. Il commença à envisager de quitter la pièce et de trouver un lit disponible, résoudre cette histoire d'intrusion sur son territoire le lendemain, mais la brune mit fin à ses réflexions.

«Salut, Dean !»

Là, ça devenait encore plus confus. Le plus étrange -mais qui ne dérangeait pas vraiment le chasseur- c'était sa présence : personne n'entrait dans le bunker comme ça. Il fallait faire parti de la famille, et il ne connaissait pas cette fille. S'il avait eu l'esprit plus vif , soit, s'il n'était pas 5h42, il aurait attrapé un revolver et l'aurait pointé sur l'intruse. Mais il était tard et il se contenta d'une simple question.

«T'es qui ?»

Et voilà qu'elle faisait la moue, maintenant. Elle se prenait pour qui ? Esméralda ? Avec ses cheveux en bordel, elle aurait pu être gitane, mais ses mèches étaient courtes, rien à voir avec la chevelure séduisante de la danseuse parisienne.

«Je pensais que tu me reconnaîtrais quand même. Mais c'est vrai que je ne ressemble à rien comme ça, pas vrai ?»

Bien qu'interloqué, l'aîné Winchester ne se priva pas de cette invitation à la détailler. Elle n'était toujours pas son style, mais elle était jolie. Sa peau était très pâle, ce qui contrastait avec ses cheveux. Sa poitrine était bien dessinée, s'accordait avec les courbes de ses hanches et son visage arrondi. Ses jambes, par contre, étaient plus minces, et semblaient lui procurer toute sa hauteur -bien qu'à vue de nez, elles ne lui procuraient pas grand chose. Les cicatrices sur son torse étaient flagrantes, et sur une de ses cuisses il lui semblait reconnaître un tatouage. Comme si la jeune femme avait déjà bien vécu, alors qu'elle semblait plutôt jeune.

«Bah tu ressembles à une femme, quoi.

-Exactement !»

Alors qu'elle s'indignait contre peu-importe-quoi, Dean examina la situation. Il y avait une femme dans son lit. Jusque là, rien de bien nouveau, même si celle-ci semblait tomber du ciel. Plus que ça : il y avait une femme nue dans son lit. Là encore, il pouvait gérer cette situation. Il avait vu des films qui commençaient comme ça. Mais il y avait une femme nue folle dans son lit. Il savait s'occuper des monstres, mais il ne savait pas s'occuper des folles. C'était le boulot de Sammy, de leur parler avec ses yeux de chiots et tout ça. Lui, il ne savait pas faire ça. Il ne savait pas comment la jarter de son lit sans qu'elle ne se sente attaquée. Et il avait besoin de son lit. C'était le sien, bordel. Qu'elle aille squatter ailleurs, c'était pas les pièces qui manquaient ici.

«Bon. Ravi de faire ta connaissance, mais je voudrais dormir. Au revoir.»

En lui montrant la porte avec un sourire -plutôt un rictus, quelque chose qui devait paraître bienveillant-, le blond la voyait déjà se lever et déguerpir. Au pire, elle irait voir Sammy, peu importait. Lui, il voulait juste dormir avant que Castiel ne se pointe le lendemain.

«Non, non, non, non, non ! Non ! Tu ne peux pas me laisser !»

La brune s'était effectivement levée, mais vivement affolée, et au lieu de quitter la pièce elle s'était plantée juste devant le chasseur.

«Qu'est-ce que je fais, moi ? Qu'est-ce que ça fait, les femmes ?

-Les femmes, ça me laisse dormir.»

Sauf celle-ci, puisqu'elle se mit à éclater de rire, comme les gens le font dans les dessins animés : en penchant la tête en arrière et en fermant les yeux. Puis quand elle se calma, elle essuya une larme au coin de son oeil. Qu'est-ce que c'était que cette fille ? Un sketch ?

«Vraiment, Dean ?»

Elle s'était rapprochée, un peu trop, et son regard était bien trop suggestif. Le Winchester n'aurait pas été plus étonné que ça si elle s'était mise à hausser les sourcils. C'était une blague, hein ?

«T'es qui ?

-Tu ne sais vraiment pas ?»

Il n'en avait vraiment aucune idée. Il pensait à un démon, puisqu'elle connaissait son nom et lui parlait comme à un vieil ami. Mais un démon ne pouvait pas rentrer ici. Il en avait vu, des choses, des gens, mais elle, il était certain de ne l'avoir jamais croisé. Elle n'attendait aucune réponse, cette question était une façon d'exprimer qu'elle était un peu blessée. Un de ses pics qu'on reçoit dans le cœur, ceux qui laissent un poids. Ils blessent, et même lorsque la raison est avec nous, qu'elle nous explique qu'on a pas à se sentir si mal, on n'arrive pas à l'enlever. Ils partent après quelques jours, non sans laisser leur marque. Elle se retourna, dos au chasseur, pour lui montrer ce qu'elle avait ressentit un peu plus tôt, juste avant qu'il arrive. C'était tout en bas de sa colonne vertébrale, comme gravé au fer rouge. Elle l'avait lu du bout des doigts. Sans un mot de plus, elle laissa les yeux verts glisser jusqu'à ce qu'ils rencontrent son identité : KAZ 2Y5.

«B...Baby ?»

Oui, c'était bien elle. Quelques heures plus tôt elle était au garage sur ses quatre pneus. Puis elle s'était retrouvée là, avec des bras, des jambes, et un cœur qui battait dans la poitrine. Mais c'était dingue. Trop dingue, même pour un Winchester. On pourrait croire qu'à force, plus rien ne pouvait l'étonner, qu'il s'était fait une raison comme quoi n'importe quoi était possible puisque n'importe quoi lui arrivait. Mais ce n'était pas le cas. Encore aujourd'hui, après toutes ces années à s'occuper de merdier en tout genre, se trouver face à sa Baby en chair et en os le laissait sur le cul. Sa Baby était au garage, c'était une Chevrolet Impala de 1967, pas une petite jeune femme comme celle qu'il avait devant lui. Celle-ci s'était retournée et laissait du temps au jeune homme pour digérer l'information.

«Je sais que c'est fou, mais c'est vrai. Enfin, ça a l'air vrai, ce n'est pas un rêve, hein ? Qu'est-ce que je raconte ? Les voitures ne rêvent pas.»

Bien qu'elle esquisse quelques sourires et qu'elle se donne un air assuré, elle était aussi troublée que Dean. C'était n'importe quoi, cette situation. Elle avait espéré que lorsque le blond la verrait, il pourrait lui donner une explication et remettre les choses en ordre rapidement. Mais elle pouvait faire une croix dessus. Elle était faite d'os, de muscles. Des nerfs parcouraient tout son corps et elle se sentait faible. Marcher était compliqué et pas si instinctif que ça. Elle avait vraiment cru s'écrouler lorsqu'elle avait quitter le lit. Plus elle y pensait, et plus elle se sentait mal, comme si quelque chose appuyait sur sa poitrine et remontait dans sa gorge. Heureusement, le blond retrouvait les pieds sur terre.

«Il te faut des vêtements, déjà. Ensuite, on dort, et on arrange ça demain. Ok ?»

Il n'y avait plus une once de sourire sur le visage neuf de Baby mais plutôt ce manque d'éclat qu'ont les personnes malades. Elle hocha doucement la tête et suivit Dean du regard alors qu'il lui dénichait une chemise et un sous-vêtement. Aucun jean ne serait à sa taille, il faudra faire avec. Il se retourna pour lui laisser de l'intimité car bien que, de toute évidence, elle s'en fiche, lui, ça le dérangeait. Depuis qu'il savait de quoi il en retournait -même s'il ne voyait pas comment c'était possible- il était mal à l'aise. Ce n'était pas n'importe qui, c'était... c'était sa Baby. Et malgré le temps qui passait, il ne se retourna que lorsqu'elle prit la parole.

«Euh, Dean ? Je crois que je me suis trompée.»

En effet. S'habiller, ça lui posait problème. Elle avait réussi à enfiler une manche, ce qui était bien même si ce n'était pas celle qui correspondait. Pour une raison obscure, elle avait ensuite passé le dos contre sa poitrine et avait... probablement tenté d'utiliser l'autre manche pour bloquer le tout, peut-être. Au moins, elle avait enfilé correctement le boxer. Il soupira, et face à la triste mine de la jeune femme il se contenta de défaire le bordel et de l'aider à enfiler et boutonner correctement la chemise de chasseur.

«Maintenant, on dort.»

Il la guida jusqu'au lit et la laissa s'allonger à côté de lui -apeurée comme elle était, il ne pouvait pas l'envoyer se perdre dans le bunker. Puis il ferma les yeux en espérant qu'au réveil, il se rendrait compte que cette situation n'était pas réelle et qu'il ne devait absolument pas s'occuper d'une voiture devenue humaine.


Voilà le premier chapitre d'une mini fiction qui devrait en avoir trois ~
Eh oui, eh oui, j'aime le Deampala.
Ce serait adorable de laisser une review si ça vous a plu :3

- Karten