« Regarde-moi ces petites fefesses trop mignonnes ! »
Je poussai un long, très long soupir. Le trentième au moins depuis le début du cours. Celui-ci avait d'ailleurs commencé il y a… dix minutes exactement, notai-je mentalement en regardant ma montre. Notre professeur adoré aux cheveux gras, j'ai nommé Rogue, s'approchait dangereusement de moi à la façon d'un serpent. Je commençai à tirer mentalement la sonnette d'alarme quand je me rendis compte qu'il me toisait déjà d'un air mauvais. Mes reflexes m'avaient évidement abandonnés dès la première minute de cours et je soupirai de nouveau avant d'entendre la voix grinçante de mon bourreau.
« Mademoiselle Smith, vous serez collée demain matin à l'aube. Nous verrons bien si à cette heure matinale, vous serez plus disposée à écouter mon cours sans soupirer à chacune de mes paroles »
Soupir ? Matin ? De quoi voulait-t-il parler ? J'ordonnai à mon cerveau d'éclaircir ce mystère mais celui-ci s'était fait la malle en même temps que mes reflexes. J'avais miraculeusement compris un mot dans le discours de Rogue et ce mot n'était pas pour me plaire : collée demain. Je sentis vaguement les rouages s'activer dans mon esprit brumeux ( enfin ce qu'il en restait) et levai un œil endormi et vitreux vers mon professeur, croisant son regard d'acier. Ce qui ne laissait rien envisager de bon, bien entendu. Je tentai tout de même de défendre ma cause ( cause noble quoique perdue d'avance) et bredouillai quelque chose qui devait ressembler à « mais s'il vous plait Monsieur… » Raté. Le Monsieur en question restait insensible à mon charme (inexistant je vous l'accorde). Je pestai contre les profs sans cœur et sans pitié quand une voix m'interrompit. Je poussai une nouvelle fois un soupir, mais de soulagement, quand je reconnus la voix de ma voisine et amie et non celle de mon professeur sadique. Je ne devrais pas dire « amie » mais plutôt « ex-amie-nouvelle-ennemie ». En effet, tout était de sa faute : mon manque d'enthousiasme en cours de DFCFM, mes soupirs indénombrables et enfin ma colle. Oulala je commence à m'embrouiller les pinceaux, vous ne devez plus rien comprendre. Il est temps de commencer cette histoire par le commencement , c'est-à-dire une présentation en bonne et due forme.
Je me prénomme Mary, Mary Smith. Je sais ce que vous pensez et rassurez-vous je suis d'accord avec le fait que mon prénom n'a absolument rien d'original. Mes parents auraient aussi bien pu m'appeler Fille 1 ou ne pas m'appeler du tout, ils se seraient encore moins cassés la tête. Physiquement, je suis à l'image de mon nom, commune. J'ai des cheveux d'un blond terne, lisses et filasses, les yeux bruns et je suis de petite, très petite taille. Autant vous dire tout de suite que personne ne fait vraiment attention à moi. Je suis en revanche dotée d'une très forte poitrine. Enfin, ça c'est ce que j'aimerai vous dire. La réalité est loin d'être aussi belle, j'ai écopé d'un petit bonnet A dans la répartition universelle des seins. Vous avez également pu remarquer que j'ai beaucoup d'estime pour ma grandiose personne.
Mon amie s'appelle Opale Gladwyn. Elle est plutôt jolie, blonde avec de grands yeux bleus et un corps parfait à faire pâlir d'envie toutes les autres filles. Beurk, je suis en train de lui faire des compliments… il faudra que je pense à cacher ce cahier au risque de voir ses chevilles enfler. Je pense que ce sera tout pour la description, je n'ai pas l'habitude de faire l'éloge de quelqu'un. Elle est à Gryffondor, comme presque toutes les personnes qui valent la peine dans cette école, par exemple Potter et sa clique ou notre amie Ginny Weasley, d'un an de moins que nous.
Les raisons pour lesquelles je déteste le cours de DFCFM sont très simples. Imaginez-vous une matière soporifique, enseignée par un professeur psychopathe sur les bords (et qui ne se lave jamais les cheveux), à la première heure du jour un lundi matin et vous comprendrez mon malheur. Nous avions en plus la chance de partager ce cours avec les Serpentards, êtres vils, fourbes, laids, arrogants , puants, insupportables, méchants, imbéciles, etc.… Et c'est là que nous en arrivons à la remarque de mon amie/ennemie depuis peu. Devant nous, assis sur la deuxième table se trouvait l'un de ces êtres ( que je ne qualifierai jamais « d'humains ») et … ses fesses. Oui , je vous l'accorde, cette remarque fait assez vulgaire si on l'annonce ainsi, mais que voulez-vous ? Il n'y a pas que les garçons qui regardent les filles ! Opale et moi étions donc soigneusement assises, depuis la rentrée, sur la troisième table, juste derrière le ssserpent ( NOTE : prononcez ce mot en accentuant le « s »). Cette place de choix avait été choisie par mon amie blonde afin d'avoir le nommé Théodore dans sa ligne de mire.
Et voici donc la dernière et surement la plus importante des raisons pour lesquelles je déteste ce cours : la présence de Théodore. Enfin pas vraiment sa présence, il n'y était pour rien le pauvre, mais plutôt parce qu'il avait le don de transformer mon amie en une groupie écervelée dont le quotient intellectuel dépassait à peine celui d'une poule. Il faudra que je pense à lui demander sa recette miracle, faire baver les filles en un sourcillement était surement un talent précieux. Cela faisait exactement cinq mois, vingt jours, huit heures et cinquante seconde qu'Opale me parlait de lui à longueur de journée et surtout pendant les cours de DFCFM, là où elle pouvait l'admirer à loisir. Je me contentais jusque-là d'écouter son charabia amoureux d'une oreille inattentive ou d'hocher la tête en cadence en prenant un air follement intéressé. Seulement aujourd'hui n'était pas mon jour de chance : le maudit Serpentard avait eu la mauvaise idée de porter une chemise blanche. Vous ne voyez pas le rapport avec mon malheur mais je vous assure qu'il y en a un : Opale adore les chemises blanches. Au bout du cinquantième compliment dans la première minute de cours, n'y tenant plus,je lâchai un profond soupir. Et ce fut ce fameux soupir qui provoqua mon heure de colle.
La voix d'Opale, plus insistante, me tira une nouvelle fois de ma rêverie :
« Je suis désolée, désolée, désolée je ne voulais pas que tu sois punie par ma faute ! Mais quand même, tu ne trouves pas qu'il a un arrière popotin trop mignon ? me dit-elle avec un sourire mi- contrit mi- amusé
Je ne pus retenir un gloussement. Je ne parvenais jamais à rester fâchée plus de deux minutes contre elle. Elle finissait toujours pas gagner la partie en glissant une remarque amusante, comme la précédente. Je venais de retrouver la vraie Opale, la timide et la prude. Alors que les élèves de 6ème année enchainait les termes vulgaires, la blonde affectionnait les termes vieillots et défraichis comme par exemple le mot « arrière-popotin » , qui avaient le mérite de me faire rire. Je lui fis part de mes pensées et n'y tenant plus, nous nous mirent à pouffer.
Nous serons finalement deux à être collées demain matin.
