La dernière nuit
Les derniers rayons du soleil disparurent derrière les collines et le monde ne fut plus que ténèbres et silence. Pas le moindre signe de vie à l'horizon. Tel un désert aride, il n'y avait là qu'herbe noire et desséchée, comme si un récent incendie avait ravagé ces terres, ce qui au fond n'était guère loin de la vérité.
Deux ombres noires évoluaient dans ce paysage mort. Rapides et silencieuse, elles se dirigeaient vers une modeste colline dont la seule particularité était une petite grotte que cachait un buisson de ronce. Un homme en sortit maladroitement et d'un signe de la main invita les deux arrivants à le rejoindre.
A l'intérieur brûlait un petit feu à peine suffisamment grand pour éclairer cinq visages aux traits tirés. Un enfant et quatre homme : la dernière femme n'avait pas survécut à l'hiver. Ils remarquèrent à peine l'arrivé des deux voyageurs, et les présentations du guetteur n'étaient qu'un faible murmure à leurs oreilles.
Celui qui semblait être le plus jeune des deux nouveaux venus sortit de sa besace une petite pomme et le donna à l'enfant, un petit garçon d'une dizaine d'année. Seulement alors les habitants de la grotte prirent clairement conscience de la présence des étrangers. Un murmure intrigué parcourut l'assemblée et tous voulurent voir de plus près le fruit à la belle teinte rouge. Le second visiteur, un vieillard à la longue barbe blanche, sourit.
« Croque dans la pomme, petit homme, dit-il. C'est bon, sucrée et comestible »
Alors que le garçon s'exécutait, l'un des habitants demanda leur nom et la raison de leur visite.
« Appelez-moi Grand-pas, répondit le plus jeune, et mon compagnon répond au nom de Pèlerin-gris. Nous recherchons un toit pour la nuit, en échange duquel mon ami se fera un plaisir de vous rapporter quelques nouvelles de l'extérieur »
Et tandis qu'il parlait, tous remarquèrent son envoutante beauté que même la balafre qui lui parcourait le visage ne pouvait en atténuer l'éclat. Et c'est ainsi qu'ils se souvinrent des récits d'antan, fabuleuses histoires où elfes, nains et dragons se mêlaient. Comme dans un rêve, ils parcouraient les allées d'une belle et grande cité blanche, dansaient sous l'ombre des arbres d'une vaste forêt d'or et goutaient au simple plaisir d'une vie où la guerre n'existait pas.
Sans le savoir, ils étaient les derniers représentants de la race humaine. Ils ne se doutaient pas non plus que cette nuit serait leur dernière et qu'au lendemain tous périront, empoissonné par l'air déjà chargé de souffre.
Et lorsque que le soleil se lèvera pour la dernière fois, les deux voyageurs seront déjà loin, emportant avec eux la fin de l'histoire de l'anneau,et du bruit de leur pas sonnera les dernières notes du chant des Valars.
