Bonjour à tous ! Voilà la reprise de la fic initialement publiée sur ce site sous le titre "Deux Étoiles Jumelles". Elle a été interrompue par le temps, la vie, les obligations diverses... ce qui m'a laissé le temps de perdre mes codes d'accès à ffnet. Qu'importe ! C'est l'occasion de repartir du début, en vous racontant cette fois l'origine de cette histoire. Tout commence donc ci-dessous, plus de dix siècles avant l'arrivée à Hogwarth des Maraudeurs...

Bonne lecture !

Violette.


Prélude

C'était un matin de février. Sous le ciel d'un bleu éclatant, dont aucun nuage ne troublait la pureté, s'étendait une forêt sans âge de sapins emmitouflés de glace. Les bois s'incurvaient autour d'un loch écossais, perdu dans les montagnes. Surplombant l'étendue d'eau gelée, un immense château semblait somnoler sous une couverture de neige. Il paraissait bâti de la veille. Ses façades n'avaient pas une tache, les cuivres de ses portes rutilaient. Malgré un aspect hétéroclite dans la juxtaposition des différents corps du bâtiment, il respirait la perfection. Pourtant, la mort rôdait dans ses murs.

Dans la plus haute chambre de la plus haute tour du château, une femme émaciée gisait sur une couche recouverte de peaux de loups. Ses somptueux cheveux noirs, qui lui valaient son nom* et s'étalaient tout autour d'elle comme de grandes ailes blessées, accentuaient la pâleur maladive de son visage marqué par l'agonie. Dans un coin, perché sur l'accoudoir d'une cathèdre, un corbeau semblait veiller la mourante.

La porte de la chambre s'ouvrit pour laisser passage à une jolie matrone blonde qui portait avec précaution une petite coupe dorée. Elle en fit boire le contenu à la malade, puis elle s'assit sur un tabouret à côté du lit et prit sa main entre les siennes. Le silence s'installa dans la chambre, rythmé par une respiration irrégulière.

Après un long moment, la guérisseuse prit la parole.
- "Aucun de mes remèdes, aucun de mes sorts, aucun de mes pouvoirs ne te rend la santé. Tu es en train de mourir, Rowena. Et ce n'est certainement pas à cause de la fuite de ta fille."

Rowena Ravenclaw ouvrit les yeux avec difficulté.

- "Tu as toujours si bien lu en moi, Helga" répondit-elle lentement.

Helga Hufflepuff secoua la tête d'un air abattu.
- "Tu as lancé une malédiction, n'est-ce pas ?" demanda-t-elle tristement. "Et ce sortilège est en train de prendre ta vie."
- "Oui," répondit Rowena.
- "Contre qui ? Slytherin, qui t'a abandonné ? Ou contre vos enfants, qui ont préféré son camp ?"
- "Non, pas les enfants," répondit Rowena avec agitation."Je ne voulais pas... qu'il arrive du mal à Owein ou à Héléna... Mais Salazar..." poursuivit-elle dans un grondement.
- "Cela fait des années que lui et Owein sont partis," dit doucement Helga. "Pourquoi vouloir te venger maintenant ?"
- "Il a... emmené mon fils... et il a... tué ma fille !" cracha Rowena Ravenclaw, tandis que ses yeux s'embuaient.
- "Par la Terre !" s'écria Helga Hufflepuff.
- "Ce matin..." souffla Rowena, les yeux pleins de larmes. "J'ai senti sa vie... s'éteindre..."

La sorcière blonde détourna les yeux de son amie, pour ne pas la regarder pleurer.

- "Le Baron... est pourtant un ancien... élève de Salazar," continua douloureusement Rowena, "je croyais qu'il saurait... la soustraire... à son influence. Je ne sais pas... ce qui s'est passé... Je n'ai rien... pressenti..."
- "Rowena, tu es une sorcière," dit Helga avec émotion, "pas un démiurge. Tu ne peux pas tout prédire ! Te rappelles-tu des mots que Merlin a prononcé juste avant de disparaître ?"
Rowena ne répondit pas.
- "C'était son dernier enseignement, souviens-toi," insista Helga. "Le jour du solstice d'été, il y a soixante-et-onze-ans. Godric avait demandé ce qu'il voulait nous montrer. Il a souri, en répondant..."
- "..."Nous ne sommes que des hommes", continua douloureusement Rowena.
- "Même toi, tu ne peux pas tout prévoir," dit doucement Helga.

Le silence revint.

- "Mon amie," reprit finalement la guérisseuse, "je ne peux même pas imaginer ta peine. Mais il te reste un fils. Ne veux-tu pas lever ta malédiction ?"
- "Non," répondit Rowena avec lenteur et fermeté. "Merlin avait raison... Je... ne suis qu'humaine... Salazar... paiera."
- "Lui aussi est humain," glissa Helga.
- "Plus...maintenant" la contredit Rowena. "Avant son départ... j'ai surpris une... de ses "expérimentations" secrètes... celles dont il ne... voulait pas nous parler."
Elle ferma les yeux et repris d'une voix rauque.
- "Il cherche à se... rendre immortel."
- "Alors Godric avait raison..." murmura Helga, choquée. "Mais c'est quasiment impossible... Pas à moins de se transformer en monstre. A moins que..."
Helga pâlit brusquement. Rowena, visiblement exténuée, ferma les yeux.
- "A moins qu'il n'utilise la vie d'un de ses descendants. Héléna..."
- "Ce démon... en est capable..." répondit Rowena.
- "Il aurait... assassiné... sa propre fille ?" interrogea Helga, incrédule.

Rowena ne répondit pas. Des sanglots secs la secouaient. Le corbeau poussa un bref croassement. Rowena Ravenclaw serra brutalement la main de son amie. Helga Hufflepuff eut un sursaut de surprise : le corps de la mourante s'était soudain tendu comme un arc. Ses yeux écarquillés brillaient tels des saphirs plongés dans un bain de lumière.

- "Owein arrive..." murmura-t-elle d'une voix redevenue claire.
- "Owein..." répéta Helga, hypnotisée.

Et Rowena Ravenclaw, la sorcière la plus lettrée et la plus inventive de son époque, s'éteignit en délivrant sa dernière prophétie.

"Salut à toi, fruit du mélange de nos âmes,
Toi par qui vint ma vengeance de femme,
Dont le sang maudit engendre les flammes
Qui dévorent notre héritage infâme.

Mes pleurs ne peuvent rattraper ma haine,
Et jamais le Destin ne te sera amène ;
Il plongera ton esprit dans la Géhenne
Jusqu'à le brûler à tant et tant de peines."


* Rowena signifie "aux cheveux blonds" en gaélique ancien, mais on peut aussi le traduire par "aux beaux cheveux".