Bonjour et bienvenu !

Ceci est une fiction qui était en pause depuis quelques mois, mais que je n'avais pas envie de laisser comme ça. Je compte sur vos avis et réactions pour l'améliorer. (Sachant que moi même je trouve mon style d'écriture simple et peu travaillé dans cette fiction...)

L'univers des Hunger Games me plait depuis que j'ai commencé à les lire. Forcément, j'ai eu envie d'écrire dessus. Mais les fictions post-Hunger Games sont nombreuses et je n'avais pas tellement d'inspiration pour ce sujet.

Puis je me suis dit qu'avant Katniss, 73 Hunger Games avaient eu lieux. Certains ne sont même pas évoqués dans le livres, et j'ai trouvé ça intéressant. Pourquoi ne pas écrire sur des Hunger Games dont on ne connait ni l'issue ni le vainqueur ?

Sur cette petite introduction, je n'ai plus qu'à vous souhaiter bonne lecture !


Les croquis sont époustouflant. A la lumière de la lampe de poche callée entre mes dents, je tourne les pages du carnet avec lenteur, fascinée par les délicats traits de crayons et les couleurs chamarrées. Je me sentirais presque mal de les voler. Presque.

J'ouvre ma sacoche pour y glisser les dessins, et reprend ma lampe torche en main. J'aimerai rester encore un peu pour étudier de plus près ce travail d'artiste, mais mon client attend, et je ne veux pas courir le risque qu'il facture mon retard.

Des bruits de pas s'élèvent dans le couloir, me donnant une nouvelle raison pour déguerpir d'ici. Aussitôt, je rabat ma capuche devant mes yeux et j'éteins ma lampe, puis je recule vers la fenêtre. Peut-être que l'individu -un vigile probablement- ne va faire que passer.

La poignée de la porte s'abaisse. Aussitôt, je fais volte-face et bondis sur la balustrade.

- Eh, toi ! S'écrie une voix dans mon dos.

Trop tard. Je me jette dans le vide. Le vent m'arrache ma capuche tandis que j'exécute un retournement. J'ai tout juste le temps de me protéger le visage de mes bras avant de retomber dans la haie qui encadre le siège des Concepteurs. Les branches et brindilles cèdent en craquant sous moi. Je lâche un soupir et rejette la tête en arrière. Trois étages, ce n'est pas rien.

Je m'empresse de m'extirper de la haie. Je balaye la rue du regard, mais à cette heure de la nuit, elle est déserte. Alors je me remet sur pied, j'ôte quelques feuilles de mes cheveux puis rajuste la bandoulière de mon sac sur mon épaule avant de m'éloigner silencieusement.

Alors que je m'engage dans une rue adjacente, une main m'empoigne solidement par le col. Je tourne la tête et mon regard se heurte à la visière noire d'un pacificateur. En un éclair, je me débarrasse de mon sweat pour lui échapper, mais je dois laisser tomber ma sacoche. Comme il est inenvisageable pour moi d'y renoncer, je plonge en avant pour tenter de la récupérer. Manœuvre vaine et dangereuse. Le pacificateur déploie sa matraque et m'en assène un coup sur le ventre. La décharge d'électricité embrase douloureusement jusqu'à la moindre de mes fibres. Assommée, je laisse échapper un grommellement de douleur avant que mes jambes ne se dérobent sous moi.

Je ne suis qu'à demi-consciente quand le pacificateur passe mon bras sur son épaule et m'entraîne vers le bloc militaire. La partie résidentielle est à l'écart des autres bâtiments, et consiste en une série de lotissements rectangulaires fais de béton brute, érigés à un même intervalle les uns des autres, entre lesquels coure une allée gravillonnée. Laquelle crisse sous les bottes du soldats alors qu'il se dirige vers le baraquement qui lui est attribué.

Je reprend mes esprits alors qu'il pousse la porte, et porte la main à mon ventre en grimaçant. Je fais quelques pas dans l'habitat, tandis que le pacificateur donne un tour de clef dans la serrure.

- Aïe, me plaignis-je, Sean ! Tu étais obligé de me mettre un coup de taser ?

En réalité je n'ai déjà plus mal, mais je lui fais la remarque par pur esprit de contradiction.

- Tu le méritais, rétorque Sean en ôtant son casque.

Derrière la visière noire se cachent des yeux perçant d'un gris d'acier qui luisent dans la pénombre. La faible clarté m'empêche de le distinguer nettement, mais je connais par cœur ce nez aquilin, cette cicatrice qui tranche l'extérieur de son sourcil, et ces cheveux bruns coupés raz.

- Eh ! Depuis quand est-ce que tu envoies des décharges pour une simple infraction au couvre-feu ?

Le pacificateur brandit ma sacoche.

- Je parlais de ça.

- Mh. Et qu'a fais mon pauvre sac qui puisse me valoir de me faire électrocuter ?

- Électrisée. Et arrête de faire l'idiote. Qu'y-a-t'il là-dedans ?

- C'est privé, répliqué-je instantanément.

- Dite-moi que je rêve. Qu'est-ce que tu as encore volé ?

Sans attendre ma réponse, il soulève le rabat et y plonge la main pour en tirer le carnet. Un seul coup d'œil lui suffit à comprendre.

- Tu te moques de moi ? Heather ! La veille de la Moisson !

- Techniquement parlant, le jour de la Moisson. Etant donné qu'il est plus de minuit.

Sean se pince l'arrête du nez, exaspéré.

- Justement, grogne-t-il, tu devrais être en train de dormir au foyer, au lieu de voler des gribouillages.

- Des croquis. Ecoute, toi tu es payé pour électrocuter des gens, et moi pour voler des stylistes et revendre à d'autres.

- Tu comptes rester longtemps sur cette histoire de taser ?

Je souris sans répondre, et me laisse tomber dans le canapé qui meuble la pièce. Je dévisage effrontément Sean en balançant les jambes comme une gamine, sachant très bien que cette attitude l'exaspère autant qu'elle l'attendrie. Il finit par soupirer.

- Très bien, tu peux dormir ici cette nuit. Mais demain, réveil à l'aube.

Je hausse les épaules.

- Je ne me lève jamais tard de toute façon.

- Surtout ne me remercie pas.

- Pourquoi ? M'avoir taser et fait perdre ma prime du mois ?

- Un des ces jours, je vais vraiment finir par te jeter en prison.

La remarque me fait sourire de plus belle.

- Tu ne l'as jamais fait et tu ne le feras jamais. Lieutenant McCoy.

Sean me pointe du doigt.

- Suffit. Dort.

Puis il disparaît dans la pièce adjacente et ferme la porte derrière lui. Je m'étend sur le canapé, la tête dans le bras, heureuse d'être là plutôt qu'au foyer, où je déteste dormir. Au foyer, il y a toujours un enfant qui pleure ou un autre qui est malade. Je partage ma chambre avec cinq autres filles et il s'en trouve toujours une qui décrète qu'elle n'a pas sommeil et cherche à entraîner les autres dans une nuit blanche. Je peux comprendre les insomnies, je ne compte même plus les miennes. Mais moi au moins je les fais seule.

Parce que je ne me voile pas la face. Je suis seule. Depuis mes onze ans. Déjà orpheline, je vivais au foyer avec ma sœur Caith. Puis, le jour de la Moisson, son nom a été tiré au sort. Elle est morte le premier jour des jeux, tué par un type du Un. Le plus étrange, c'est que je ne me souvient pas vraiment d'elle au moment de sa mort. Tout ce dont je me rappelle, c'est l'expression du Carrière. Il souriait en plongeant sa hache dans le dos de ma sœur.

J'ai rencontré Sean peu après.

J'étais plus mal que je ne l'avais jamais été. Parce que j'éprouvai pour la première fois une douleur mental. La blessure, incurable, me lancinait sans pitié, m'arrachant des crises de folie furieuses. Au foyer, j'étais devenue la petite furie. La gamine qui hurlait sans cesse mais ne versait jamais une larme.

Ne supportant plus la promiscuité des autres, je n'arrêtais pas de fuguer du foyer. Je fuyais le monde pour me réfugier dans des coins improbables, encore incapable, à l'époque de comprendre que je ne cherchais qu'a fuir ma propre souffrance. Mais les pacificateurs me retrouvaient toujours et me ramenaient, non s'en m'asséner des coups au passage. Je pouvais m'estimer heureuse quand je tombais sur un pacificateur plus doux, qui se contentait de me ramener en me jetant sur son épaule.

La nuit de ma rencontre avec Sean, j'étais déterminée à ne pas me laisser faire. J'avais dérobé un couteau dans les cuisines du foyer, et quand j'ai été débusquée, j'ai tenté de l'utiliser contre le pacificateur venue m'arrêter. Mais il m'en a désarmé en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. La colère qui couvait en moi a resurgi, je me suis mise à hurler et à l'agonir inoffensifs coups de pieds. Alors qu'un autre m'aurait déjà frappé sans retenue, lui n'a pas bougé. Son absence de réaction a finit par faire retomber ma colère. Haletante, encore tremblante, je me suis figée. Quelque chose de nouveau venait de naître en moi. Un calme froid qui me dotait d'une lucidité sans pareille. Je lui ai filé entre les jambes, et je me suis mise à courir.

Le pacificateur m'a contrainte à m'arrêter en lançant le couteau dérobé dans ma direction. Celui-ci s'est fiché dans le mur à quelques centimètres de mon nez.

Je l'ai fixé. Un tir un tantinet mieux ajusté, et je serais morte. Tuée par un lancé de couteau. J'ai pensé à Caith. Si elle avait eu un couteau, si elle avait apprit à s'en servir, si elle l'avait lancé droit dans la tête du tribut du Un... Il n'aurait jamais sourit comme il l'avait fait.

Je n'avais soudain plus aucune envie de fuir. C'était encore vague et indécis dans ma tête, mais un objectif se profilait. Un objectif qui allait redonner son sens à ma vie.

Le pacificateur est arrivé dans mon dos et m'a demandé mon nom. J'ai été étonnée qu'il le fasse, ils ne prenaient jamais cette peine d'habitude. Par rancune pour les autres, j'ai refusé de le lui donné. En revanche, je n'ai pas hésité à lui demander le siens.

Il s'appelait Sean McCoy.


Je me lève avant l'aube. La nuit se retire à peine du district, tout est encore gris. Sans un bruit, je me glisse dehors. Je regagne le foyer silencieux. Dans ma chambre, les cinq filles dorment encore. Je prend mes affaires et me dirige vers les douches. L'eau froid achève de dissiper les brumes comateuses du sommeil. J'attache mes cheveux châtains en un chignon, mais comme je n'aime pas l'air sage et innocent qu'il me confère, je dégage quelques mèches sur mes tempes et mon front. J'enfile ensuite une jupe qui me tombe au dessus des genoux et un chemisier que je ferme jusqu'aux deux premiers boutons. J'observe dans le miroir qu'il est un peu tendu au niveau de la poitrine. Forcément, il a un peu rétréci depuis le temps que je l'ai. J'ouvre un troisième bouton. Je passe mes habituelles bottines de cuir noire, usées par le temps. Me voilà prête. Je jauge une dernière fois mon reflet. Non, non, ma tête ne va pas du tout. J'arrache l'élastique qui retient mes cheveux et les laisse cascader dans mon dos.

Bien, il me reste une demi-douzaine d'heures avant la moisson. Je décide de les passer à la Tache. La Tache, c'est un vieux hangar désaffecté où l'en entreposait autrefois le textile, avant qu'un nouveau ne soit construit plus proche de la gare. Le hangar est tombé en ruine, mais n'a jamais été démolit, faute de temps et de moyen. Il tient son nom des habitants du quartier des Concepteurs, les stylistes, tailleurs et autres, qui trouvaient que le vieux bâtiment faisait tâche par contraste avec les leurs, propres et épurés.

J'enfile ma vieille veste noire et mes mitaines pour me protéger de la fraicheur de l'air matinale, et je me retrouve dehors une nouvelle fois.

Les premiers rayons du soleil, encore tous pâles à cette heure, se glissent par l'ouverture béante dans le toit du hangar. Il n'en reste pratiquement que la charpente, qui sert de tuteur aux mauvaises herbes. Je récupère les trois couteaux de lancer laissés à mon attention par Sean dans une cache, et vais me positionner face aux cibles tracées à la peinture sur l'un des murs.

Et je m'attelle à mes lancers. De la main gauche aussi bien que de la main droite, un par un ou tous en même temps. Chaque fois, je visualise le même visage souriant. Pas un couteau ne manque sa cible. Les cibles sont criblés d'entailles depuis le temps que je pratique, à l'instar d'une grande surface du mur, témoin de mes débuts.

Soudain, un autre couteau jaillit de nulle part et dévie la trajectoire du miens, qui vient rebondir en tintant sur le sol.

- Tu es irrattrapable, commente une voix dans mon dos.

Je me retourne pour découvrir Sean, qui s'avance de sa démarche marquée par ses années de services militaires.

- Il n'y a pas école aujourd'hui, répliqué-je, je m'occupe comme j'ai envie.

- Et tu étais justement si occupée que tu ne m'a pas vu arriver. Tu as fait la même erreur hier soir, soit plus sur tes gardes.

Je le dévisage. Il a raison, je suis trop confiante. Peut-être que depuis tout ce temps passé sous la protection du lieutenant pacificateur, j'ai finis par me reposer sur lui. Pire, par compter sur lui pour me tirer des situations délicates, comme il le fait toujours. Je hoche la tête.

- Tu penses que je pourrais y arriver ?

Sean choisit de ne pas comprendre.

- A être plus vigilante ? Certainement, si tu te montrais un peu moins présomptueuse.

- Je parlais des jeux. Tu pense que je suis capable de participer aux Hunger Games ?

Le pacificateur me scrute en silence un long moment. J'attend sa réponse, patiemment.

- Tu tiendrais peut-être quelques jours, décrète-t-il.

- Quelques jours, je n'ai pas besoin de plus.


A treize heure, je part pour la grand-place. Je repère des visages connus dans la foule qui se presse, nerveuse. Je salues d'un signe de tête quelques personnes. Il règne un silence presque mystique, que personne n'ose rompre. Les gens chuchotent entre eux. En me plaçant dans la queue pour signer le registre, je jette un regard aux caméras braquées sur nous depuis les toits. Je n'aime pas être observée. Une fois mon nom inscrit, je me dirige vers le secteur qui regroupe les enfants de mon âge. Ceux qui n'ont plus que deux Moissons à craindre, celle-ci inclue. Ils échangent des regards avec leurs parents agglutinés autours de cordons, avec des amis, des frères et sœurs. Je regarde droit devant moi. Sean doit être quelque part en train de donner des directives aux pacificateurs chargés d'encadrer l'événement. Je sais qu'il m'observe, comme il le fait toujours. J'ignore en revanche s'il s'inquiète pour moi. McCoy est un pacificateur, il étouffe ses sentiments, les compartimentalise, et ne les exprime jamais. Et il m'a apprit à en faire autant en cas de nécessité

La grand-place finit par être surchargée de monde. Les écrans géants s'allument, et la diffusion commence. Tous le monde se tourne vers l'estrade, laquelle se dresse devant l'hôtel de justice. Le maire Kinsveet, un vieil homme sec et sévère, s'avance sur le podium pour déclamer son discours. Que je n'écoute pas. Beaucoup le font, pour se distraire de leur angoisse, malgré qu'ils le connaissent au mot près. Je ne suis pas moins fébrile qu'eux, seulement je ne le suis pas pour la même raison. Chaque année depuis que Sean m'entraîne, je me demande si je suis prête. Et chaque fois j'estime ne pas l'être assez. Ne pas l'être du tout. Je laisse le tirage au sort se faire, je laisse la malheureuse monter sur l'estrade comme à l'échafaud - ce qui en un sens est le cas - et je la regarde partir sans bouger ni mot dire.

Le maire énonce la liste des vainqueurs du district. Elle est courte, je ne sais même pas si un seul nom suffit a constituer une liste. Jaden Wentworth, l'unique vainqueur que nous ayons connu depuis le début des jeux. Il a remporté la victoire trois ans auparavant. Je n'avais jamais fait attention à lui avant qu'il soit envoyé dans l'arène, et je ne l'ai vraiment remarqué que lorsque je me suis aperçue qu'il était encore en vie après quatre jours. Dès lors, j'ai éprouvé la plus grande difficulté à m'arracher à l'écran. Je m'attendais à ce qu'il meurt à tout moment, mais non. Il est resté. Jusqu'à la finale. Jusqu'à être le dernier debout.

Et il a fini par revenir. Un tribut du district huit est revenu vainqueur. Ovationné par la foule comme jamais personne n'avait été ovationné auparavant, il est allé vivre dans le village désert des vainqueurs. Depuis, on ne le voit qu'occasionnellement. Il parait que Jaden était un garçon souriant qui ne se départissait jamais de son optimisme. Mais c'était avant les jeux. Les jeux vous changent, Jaden n'a pas fait exception à la règle. Les rares fois où je l'ai croisé, et celles, plus nombreuse, où ils apparaissaient aux écrans durant les tournées, je ne l'ai jamais vu sourire.

L'ancien vainqueur ne prend même pas la peine de s'avancer sur le podium, ni même de se lever de son fauteuil. Il fait un bref signe de la main aux caméras et au publique, auquel répondent quelques applaudissements polis, puis recroise les bras sur sa poitrine. Il a au moins fais l'effort de se soigner pour apparaître en public. Son costume cobalt met l'accent sur ses yeux ténébreux et ses cheveux bruns -qu'il ne semble jamais préoccupé de couper- sont coiffés en arrière pour dégager son visage.
Embarrassé par l'attitude de Jaden, le maire s'empresse d'introduire Holly Jeerey, l'hôtesse du district huit. Holly s'avance sur ses talons pailletés, toute mielleuse, toute souriante dans son tailleur violet. Le même violet que celui des mèches qui tranchent ses cheveux de jais relevés en un chignon sophistiqué. Elle lance d'une voix sucrée :

- Bienvenue aux quarantièmes Hunger Games ! Et puisse le sort vous être favorable !

Ce que je peux détester cette maxime. Le sort n'est jamais favorable. Ma chance, je la vole. Holly ignore les regards noirs de la foule et déclame un petit discours suintant d'hypocrisie, puis se décide à procéder au tirage au sort.

Alors, ma fameuse question annuelle s'impose à mon esprit. « Est-ce que je suis prête ? » me demandé-je en boucle tandis que l'hôtesse du Capitole s'avance vers la boule de verre qui contient les noms des filles. « Est-ce que je suis prête ? Un an d'entraînement supplémentaire ne serait-il pas préférable ? » Holly plonge la main dans le bocal, brasse les papiers. Le silence le plus lourd qui soit plombe la place. Elle retire sa main, un carré blanc entre les doigts, puis tourne un regard malicieux vers la foule et revient sur le podium. Le petit papier lui échappe malencontreusement des mains alors qu'elle le déplie, et elle le ramasse avec un petit gloussement. La foule grommelle, à bout de patiente. Holly consent enfin à lire le nom à haute voix :

- Violet Ramsey !

Un sanglot strident s'élève. Je ne sais pas qui est Violet. Je m'en fiche. Elle n'ira pas aux jeux. J'ai pris ma décision un instant avant que Holly ne lise le nom. Si je ne le fais-pas maintenant, je ne serais peut-être pas capable de le faire à la prochaine Moisson. Et ma chance s'envolerait à jamais.

La foule ouvre la voix à Violet, qui s'avance d'un pas raide. Elle est pâle et tremblante. Et soudain je me souvient d'elle. Violet, c'est la gamine de treize ans que tout le monde adore, parce qu'elle est toujours prête à rendre service et avec le sourire, parce qu'elle est généreuse et spontanée. Violet, c'est la fille qui dort avec moi au foyer, qui dégage une mignonne aura de fragilité telle qu'à son contact, on ne peut qu'avoir envie de la protéger.

« Allez, dépêche-toi de monter sur l'estrade », ai-je envie de lui enjoindre. « Tu n'as rien à craindre, tu n'iras pas aux jeux. »

Elle gagne le podium une éternité plus tard. Holly Jeerey présente la vainqueur de la Moisson d'un ton enjoué, puis demande sans conviction s'il y a des volontaires.

- Ecartez-vous, grogné-je à l'intention des enfants devant moi.

Ils obéissent, incertains, et par effet papillon le reste de la foule en fait autant. Je m'avance dans l'allée humaine. Je sais que les caméras se tournent vers moi, que je suis maintenant sur tous les écrans de Panem. Je peux presque entendre les murmures intrigués que j'y déclenche.

- Moi ! Clamai-je. Je me porte volontaire.