Note de la traductrice : Il s'agit d'un slash K/S assez long qui sera posté en 4 ou 5 parties.
Et merci à l'auteur de m'avoir donné la permission de traduire sa magnifique fanfiction ^_^

J'espère que vous apprécierez tout autant que moi le talent de l'auteur et que ma traduction vous plaira ;)

Fic originale écrite par Sylvia Bond accessible ici : h t t p : / / w w w . ksarchive . com / viewstory . php ? sid = 661


The Flavor of Gold

De

Sylvia Bond

Spock marchait dans les rues de Tantris, la principale ville de la planète Delta 9, se protégeant de la pluie. Il n'avait pas connu cet élément étant enfant, l'avait rarement rencontré en tant qu'adulte, et les quelques fois où il avait connu des précipitations, cela n'avait jamais été comme cela. Quand la capuche de sa cape était suffisamment rabaissée pour le protéger entièrement de la pluie, il perdait tout son champ périphérique et la plus grande partie de sa vision également. Mais lorsque qu'il relevait la capuche pour voir, presque tout son visage était assez exposé. L'eau atteignant sa tête créait de minuscules points de froid sans danger mais néanmoins désagréables.

De là, l'eau coulait le long de son arcade sourcilière, ce qui était totalement inadéquat et rendait totalement vain l'idée d'arrêter l'eau et de la guider loin de ses yeux. Elle glissait le long de son nez, dans sa bouche, suivant la courbe de ses oreilles jusqu'à son canal externe, et faisait son chemin jusqu'aux côtés de sa nuque. En quelques minutes, il avait été aussi mouillé que s'il avait immergé tout son corps.

Il marcha vivement à travers le labyrinthe de rues, et essaya de se couper du grondement de la ville, du bruit des voix, du bruit des pas, et du son omniprésent, haut perché et un peu décalé, de la pluie crépitant contre une centaine de milliers de mètres carré d'aluminium transparent, d'acier et de béton.

Il ne lui avait pas fallu longtemps pour déduire où le Capitaine Kirk était allé une fois qu'il avait parlé au Dr. McCoy.

« On l'a mis au courant de certaines choses le premier jour de nos congés à terre, mon garçon, » avait dit McCoy, semblant à peine tenter d'insinuer quelque chose au ton de sa voix. C'était le quatrième jour de congé et McCoy n'allait jamais loin sans ses pilules de désintoxication. « A la façon dont il me l'a dit, je crois qu'il a été envoyé sur une quelconque mission. »

Mission ? C'était hautement inhabituel de la part du Capitaine d'entreprendre une mission en solitaire, surtout lorsqu'il y avait deux longues semaines de temps libre si longtemps attendues devant lui, surtout en ayant insisté pour que chaque membre d'équipage prenne ce congé, et qu'il l'ait dit de cette façon, souriant, la peau s'étirant autour de ses yeux.

« Vous et Scotty en particulier, » avait-il dit, tentant de paraître sévère et échouant. « Deux humanoïde acharnés du travail. C'est un congé à terre, chaque membre de notre équipage doit se reposer et récupérer. Deux semaines complètes. Le navire est mis à quai, c'est un secteur aux patrouilles régulières. Il n'y rien d'autre que nous devons faire si ce n'est nous détendre. Entendu, Mr. Spock ? »

« Je ne crois guère qu'il y ait quelque chose que je peux faire sur cette base stellaire qui ne peut pas être fait plus commodément, à moindre coût, dans une plus grande intimité- »

Les sourcils de Kirk s'étaient froncés à ce point. Il avait levé les mains, les paumes tournées en direction de Spock.

« Ecoutez, ne serait-ce que pour changer de décor, vous irez sur la base stellaire 11 et vous amuserez. Un changement est aussi bon que du repos, vous savez. »

Spock avait considéré ce concept clairement humain. Il s'était souvent senti revigoré en détournant simplement son siège de son poste de travail pour poser son regard sur la passerelle. Ou en jouant aux échecs avec quelqu'un d'autre que l'ordinateur, ou dans les quartiers de quelqu'un d'autre.

« J'en conviens, » avait-il dit et il avait fait des démarches pour assister à un séminaire sur les formes de musique anciennes.

Ainsi, quand Spock avait entendu parler de ce brusque changement de plan de la part de Kirk, il s'en était préoccupé. Et ce n'était pas uniquement dû au fait qu'il avait planifié quelques éventuelles parties d'échecs avec le Capitaine ; être déçu n'était pas dans son caractère. L'enchaînement des évènements avait été d'un genre sans précédent. Suivre la trace de l'humain était devenu un intrigant puzzle tandis qu'il voyageait entre les départements de sécurité, de réquisition et de fournitures de la base.

« Il a pris les transports publics ? » avait demandé Spock à l'agent chargé des voyages dans l'espace. « En êtes-vous tout à fait certain ? »

L'agent avait été poli mais ferme.

« Tout à fait certain. Ecoutez, je ne devrais même pas vous le dire mais puisque vous êtes un Vulcain… et je vous assure que Mr. Kirk a pris une navette pour Delta 9 il y quatre jours. »

L'idée de son Capitaine dans une navette publique était incongrue ; il avait réalisé qu'il ne pouvait même pas l'imaginer. Et voyager incognito l'était tout autant. Fascinant.

Il lui avait fallu presque une journée solaire pour arriver sur les quais de Delta 9 et encore 45,8 minutes pour atteindre le centre de Tantris. Tantris qui était humide et pluvieuse, au ciel grisâtre, couverte de bêton. Et au milieu de toute cette pluie et cette humidité, se trouvait une mégalopole florissante, quelque peu détrempée et grouillant de tout et n'importe qui, et qui cherchaient tous à échapper à la pluie. Spock retint un soupir alors qu'une autre masse humide le bousculait.

Au moment où il montait les escaliers vers la chambre au troisième étage de Kirk (l'homme à la réception s'était montré serviable), Spock était réellement préoccupé. Dire que la pension était vieille et sale était un euphémisme. Les rampes étaient noires, et il supposait que cela n'était pas parce qu'elles étaient peintes de cette couleur. L'humidité envahissait les escaliers, décollant la peinture. Les fenêtres de chaque palier avaient pris une teinte permanente d'un jaune passé. Au second étage, il trouva un tas de déchets fumant. Les lumières du plafond clignotaient continuellement. Diverses odeurs l'atteignirent en même temps, aucune d'elles n'étant plaisante. Même si Kirk était sous couverture, comme Spock le présumait, cela n'avait pas de précédent. Il frappa à la porte (la sonnette ne fonctionnait pas) et attendit. Il n'entendit aucun son provenant de l'intérieur, et puis un méfiant, « Qui est-ce ? »

« Spock, » répondit-il. Il pouvait presque sentir l'étonnement de l'autre côté de la porte.

« Pouvez-vous me donner une preuve ? »

Le vulcain laissa son sourcil s'arquer. « Capitaine, » dit-il sèchement, « quand j'informerai le bon docteur de l'insalubrité de votre résidence actuelle, je crois que sa réaction franche sera une preuve suffisante. »

« Vous ne l'avez pas amené avec vous, n'est-ce pas ? »

« Je vous assure que seuls moi et l'agence de voyage de la base stellaire connaissent notre localisation actuelle. »

La porte s'ouvrit subitement, une main se tendit et s'agrippa aux plis de sa cape. Il fut tiré à l'intérieur de la chambre puis la porte fut refermée et verrouillée derrière lui.

« Que DIABLE faites-vous ici ? » dit Kirk, cassant.

Spock sut que la surprise s'afficha sur son visage avant qu'il ne soit capable de la masquer.

Kirk se détourna, recouvrant ses yeux de sa main.

Durant la seconde où Kirk lui tourna le dos, Spock enregistra les caractéristiques de la pièce. Sur la droite de la porte il y avait un lit et un petit oreiller, le long du mur une commode légèrement penchée, face au mur le plus éloigné une table et deux chaises ; dans le coin suivant se trouvait une petite cuisine avec un assortiment d'appareils et à sa gauche une porte qu'il présuma mener à une salle de bain. Au milieu de la pièce, sur le sol, gisaient les morceaux épars de ce qui semblait être un chauffage très désordonné. Autour de lui, il y avait des outils éparpillés, incluant une ceinture de phaser antique, et une tasse renversée de laquelle coulait un liquide de refroidissement rapide, présuma-t-il. C'est à ce moment-là qu'il réalisa que la chambre n'était pas beaucoup plus chaude que la rue en dessous, avec une quantité excessive d'humidité.

A l'extérieur, il commençait à pleuvoir abondamment, et une rafale de vent frais poussa une autre vague de froid humide dans la pièce.

Kirk se tourna résigné vers le chauffage, ses premières paroles dures oubliées.

« Si je pouvais réparer cette foutue chose, ça ne serait pas si mal ici. »

Spock l'observa silencieusement, remarquant la ligne tendu de sa mâchoire, la raideur dans ses épaules. Il semblait que les choses ne se passaient pas bien, du moins pas selon les standards du capitaine. Il songea intérieurement à offrir son assistance, sachant que le faire au mauvais moment pourrait amener à obtenir un exemple parlant du tempérament volatile de l'humain.

Kirk s'assit en face de la boîte maintenant glacée et commença à ajuster les composants internes de la jauge de température avec ce qui ressemblait à un très court couteau.

L'humain fit un vague mouvement de la main vers lui.

« C'est la conception de cette planète d'un vieux tournevis. » Puis il leva les yeux, un très petit sourire apparaissant dans ses yeux. « Eh bien, Spock, allez-vous rester là toute la nuit, ou allez-vous m'aider avec cette chose ? »

Le vulcain s'assit près de l'humain les jambes croisées et examina la situation. Les composants du chauffage avaient été rafistolés d'une manière très approximative ; un capitaine, de par sa nature même, devait être touche-à-tout, et n'était maître dans aucun domaine. Kirk était au mieux un électricien amateur mais, en même temps, il y avait quelques endroits où les fils étaient attachés de manière incorrecte.

« Il y a cette jauge ici, » dit Kirk, comme s'il se parlait à lui-même. « J'ai mis un morceau de caoutchouc ici pour la maintenir en hauteur mais je n'arrive pas à comprendre où cette pièce doit se placer. »

Il fit un signe de la main ; Spock se pencha.

« Cela semble n'être rien de plus qu'un fil de terre, Capitaine. »

« Ca ne ressemble pas à un fil de terre. »

« Cependant, » répondit Spock, comme s'ils étaient sur le pont et qu'il faisait un rapport sur le statut des équipements du vaisseau, « ça ne peut rien être d'autre. »

Kirk lui jeta l'outil. « Tenez, faites-le alors. »

Spock ignora cet éclat inhabituel de mauvaise humeur, réagissant comme il le faisait toujours, avec un soupir et en secouant très légèrement la tête.

Tandis qu'il fixait la prise de terre et branchait les différentes connexions, il entendait Kirk derrière lui, bougeant plusieurs objets, transférant le liquide d'un récipient à un autre.

« Du café, Spock ? » L'offre avait été faite simplement, comme si tout allait bien. « C'est de l'instantané, je ne parviens pas à faire fonctionner ce foutu percolateur, mais au moins c'est chaud. »

« N'y a-t-il pas de thé ? » demanda Spock, refermant le couvercle du radiateur sur la boîte et se levant.

« Du thé ? »

Spock se tourna pour observer l'humain, tentant de comprendre l'origine de la colère dans son ton. Kirk était debout, tasse en main, buvant de petites gorgées, son autre main restant raidie sur sa hanche, les doigts à peine rentrés dans une poche. Ses pieds étaient nus, ses orteils se courbant sur le sol froid. Il portait un jean indigo, un jean bleu, se corrigea Spock, et un sweat-shirt gris excessivement grand, dont le col s'ouvrait de sa nuque à ses clavicules.

Si McCoy avait été là, il saurait, de par ses expériences passées, ce qu'il faudrait dire pour faire disparaître la tension de la mâchoire de Kirk, une quelconque réplique bien pensée pour briser le silence grandissant entre eux. Et se débarrasser de l'agacement entraîné par une remarque que Spock n'avait pas considérée comme provocante.

« Du thé ? » demanda une nouvelle fois Kirk. Il prit une longue gorgée puis posa sa tasse sur le comptoir en métal.

Spock soupçonnait que seule une grande retenue l'empêcha de la claquer sur la surface.

« Si j'avais su que vous viendriez, j'en aurais mis de côté, Mr Spock, peut-être même votre favori, s'il avait été disponible sur morceau de béton détrempé. » Même Spock pouvait reconnaître le sarcasme. « Mais je n'en ai pas. Pas plus que je n'ai de soupe Plumeek lyophilisée, ou du pain complet. Si j'avais su que vous viendriez, je me serais préparé assez différemment. »

« Dans quels domaines ? »

Kirk fit un geste englobant la pièce. « Un endroit plus sec, un lit plus grand, ou deux lits, plus de couvertures, de la nourriture végétarienne, un ordinateur… »

Spock observa la pièce à cette réponse, n'ayant pas réalisé que Kirk le considérant comme si difficile à entretenir et nécessitant tant d'équipements. Alors que pour l'humain et son confort, Spock ne remarquait aucune de ces choses, si ce n'était deux livres sur la petite table à côté du lit.

« Il n'est pas nécessaire de- »

« Oh, mon œil que ça n'est pas nécessaire, Spock, ce qui m'amène à vous demander, que diable faites-vous ici ? »

Pourquoi était-il là ? Jusque-là, il avait suivi la trace de Kirk avec l'avidité d'un limier terrien, ou d'un leehsaht andorien, ne se demandant à aucun moment pourquoi il le faisait, sachant seulement qu'il était impératif qu'il le trouve. Il ne s'était pas demandé pourquoi la conviction qu'il était urgent qu'il localise Kirk avait surpassé tout le reste ; c'était déjà arrivé avant. Ce n'était pas nouveau. Quand Kirk avait été porté disparu, comme sur Triskelion, ou perdu dans l'espace Tholien, il ne s'était jamais posé la question, pas plus que Kirk ne le lui avait posé – pourquoi étiez-vous à ma recherche ?

Et même si la question, à présent posée avec une bonne dose d'hostilité était en fait, Pourquoi êtes-vous là ? Spock la traduisait mentalement comme Pourquoi êtes-vous venu me retrouver ? Il cligna des yeux lentement et essaya de s'empêcher de déglutir. Il tenta de former sa réponse avec prudence.

« Pourquoi êtes-vous ici ? »

Cela prit Kirk de court.

« Quoi ? »

« J'ai demandé, pourquoi êtes-vous ici ? »

L'humain semblait perplexe. « Je suis ici sur une mission sous couverture pour retrouver des schémas volés. » Il regardait Spock droit dans les yeux, semblant réaliser qu'il pouvait faire confiance au vulcain avec des informations requérant un haut niveau d'autorisation.

Spock acquiesça. « Mais pourquoi vous ? »

Kirk fronça les sourcils.

« Pourquoi, » continua Spock, « vous êtes-vous porté volontaire pour une mission de ce type le premier jour d'un congé à terre attendu depuis longtemps ? Un congé que, je dois ajouter, chaque officier a été forcé de prendre. Pourquoi cette soudaine décision de partir ? Et pourquoi ne m'avez-vous pas informé de vos intentions ? »

« Je l'ai dit à McCoy, » répondit l'humain, concis.

Un silence court et épais s'installa entre eux, et Spock réalisa qu'il ne percevait pas les implications cachées derrière la réponse de Kirk. Quelque chose de sombre et brûlant se logea dans sa gorge et il y reconnu l'augmentation de l'adrénaline dans son système. Il se souvenait avoir expérimenté le même phénomène au moment où McCoy avait lâché : Vous voulez dire que Jim ne vous l'a pas dit ? Ca c'est une première.

Il y avait un nom pour cette émotion, n'est-ce pas ?

Il déglutit, ignorant ce souvenir, se concentrant uniquement sur le fait que Kirk n'avait pas encore répondu à sa première question.

« Pourquoi êtes-vous ici ? » répéta-t-il.

« La mission, je vous l'ai dit. J'étais le meilleur choix pour ce travail. »

« Pardonnez-moi, mais vous ne l'êtes pas, » répliqua Spock avec certitude. « La Fédération a, à ce moment précis, 143 hommes et femmes qui s'adapteraient plus facilement à cette planète que vous pour travailler sous couverture. Je le demande encore une fois, pourquoi êtes-vous en charge de cette mission ? »

La bouche de l'humain était fermée mais Spock pouvait voir les muscles tendus tandis qu'il cherchait à contenir une explosion d'émotions. La chair autour des yeux habituellement souriants était tirée, et une de ses mains se leva dans un geste qui aurait pu paraître vide de sens pour n'importe quelle autre personne. Mais pour Spock cela signifiait que son Capitaine voulait communiquer quelque chose, voulait expliquer ses actions, sa colère, et tout le reste.

« Jim… » Le nom sortit de sa bouche comme il le faisait toujours, poussé de l'intérieur par ce qui pouvait seulement être défini comme une petite éruption d'émotion. Il ne pourrait jamais admettre cela à quiconque, et moins encore à Kirk. Mais le Capitaine semblait si… perdu. McCoy aurait pu dire que Kirk était en colère, et offrir une réponse tout faite sur ce qui en était la cause. Kirk semblait plutôt incapable de franchir un certain pont qui lui aurait permis de faire comprendre aux autres par quoi il passait. Spock connaissait très bien ce pont en particulier pour avoir était celui debout à son extrémité de nombreuses fois.

Finalement, l'humain se détourna et Spock le vit presser la fin de la paume de ses mains sur ses yeux.

« Pas maintenant, Spock » vint la voix étouffée.

Spock réprima l'envie de sortir lentement de la pièce. Les émotions de Kirk finissaient toujours par lui faire souhaiter être un mur solide, une chose contre quoi Kirk pourrait se cogner la tête mais qui n'aurait pas à formuler de réponse.

« Capitaine, » dit Spock à la place, « je ne voulais pas empiéter sur votre espace. Je vais trouver un autre endroit où rester et retourner à la Base Stellaire 11 demain. »

Les mains se baissèrent, s'agitèrent. Kirk se tourna, le visage tendu et courba la tête. « Spock, vous ne pouvez aller nulle part, il tombe des chats et des chiens dehors. » Il tourna la tête vers la fenêtre devenue noire. « A cette heure tardive, vous ne trouverez jamais une chambre. »

Spock arqua un sourcil. « Des chats et des chiens, Capitaine ? »

Le sourire apparut, comme Spock savait que ça se produirait.

« Une vieille expression terrienne, indiquant qu'il pleut très très fort. »

« Je ne vois pas pourquoi une énorme quantité de pluie devrait être décrite comme une chute de canidés et félidés. »

Il y eut presque un rire à ce moment-là ; Spock pouvait voir l'éclat dans les yeux de son Capitaine. Mais cela disparu rapidement et il réprima son sentiment de défaite. Il réalisa qu'il avait avancé vers l'humain lorsque l'autre homme leva les mains.

« Demain, Spock, demain. Nous parlerons à ce moment-là, mais pour l'instant, ça m'intéresse plus de savoir si ce chauffage fonctionne ou pas. »

« Mr Scott aurait sans aucun doute était capable de le réparer s'il avait été ici. »

Kirk fit une pause et le regarda. « Mr Scott, dit-il, secouant la tête, « aurait probablement été, à ce moment-ci, trop ivre pour ressentir le froid. »

00000

Kirk se retourna pour ce qu'il devait être la millième fois. La forme figée à côté de lui sur le lit trop petit aurait probablement calculé un nombre plus proche de 15 ou pas loin, même si le vulcain n'avait pas bougé depuis son respectueux « Bonne nuit, Capitaine. »

Kirk avait essayé de laisser la chaleur de la forme à côté lui le relaxer. Essayé d'imaginer Spock pensant Capitaine, c'est la 128ème fois que vous avait bougé votre jambe mais en vain Il n'était pas sûr si son agitation dérangeait Spock mais, plus il essayait de rester immobile, plus il était difficile de ne pas bouger.

En plus, c'était un fait que la mission ne se passait pas bien, qu'il n'avait pas de chaussettes sèches, et que Spock allait vouloir une réponse, une vraie réponse, à sa question le lendemain.

Il ne savait pas s'il pouvait se l'expliquer à lui-même, encore moins à Spock.

Oh, c'est un mensonge éhonté. Il savait pourquoi il était là. Révéler de vive voix ses raisons à Spock, de tous, était une histoire complètement différente.

Kirk bougea à nouveau sa jambe, et puis réalisa qu'un bord dur des draps était pressé contre sa cheville. Rien de large, mais définitivement là. Il essaya de ne pas y penser, essaya de ne pas…

Un très petit soupir s'éleva de la forme à côté de lui.

« Capitaine, si vous vous permettiez simplement de vous relaxer, vous seriez capable de dormir. »

Kirk pressa à nouveau sa tête contre l'oreiller.

« Je suis désolé, Spock, je ne voulais pas vous déranger. »

« Peut-être que quelques exercices de respiration pourraient vous aider. »

« Ce n'est pas ça… Je n'ai juste pas l'habitude de dormir avec quelqu'un. »

Il y eut un court silence dans le noir tandis que le vulcain sembla prendre cela en considération. « Je trouve cela hautement improbable. »

Kirk fronça les sourcils. « Qu'est-ce que vous voulez dire ? »

« Je trouve improbable que vous ne soyez pas habitué à dormir avec quelqu'un. »

Il fallut un moment pour que l'humain réalise ce que sous entendait son compagnon. « Vous voulez parler de toutes ces femmes ? »

« C'est précisément de cela que je parle. »

« Nous n'avons jamais dormi ensemble… après…après, nous allions chacun de notre côté. »

« Et qu'en est-il de Miramanee, votre femme ? »

« Je dormais dans la tente du côté destiné à l'homme, » répondit Kirk, surpris que Spock puisse y référer. Il se retourna et enfonça son oreiller avec son poing. « Bon sang, Spock, ce ne sont pas vos affaires de toute façon. »

« Elles le sont si cela m'empêche d'obtenir un repos nécessaire. »

Kirk se renfrogna, sachant que seules les ténèbres pourraient le voir, sentant le froid de la nuit s'intensifier.

« Bien, » dit-il sèchement, « alors je vais vous laisser et dormir sur la table ou autre part. »

Alors qu'il s'asseyait, il sentit la main de Spock se refermer sur son coude.

« Capitaine, » vint la voix calme. « Jim, essayez de dormir. »

Kirk libéra son bras d'un coup sec. Il resta assis là sur le bord du lit durant un moment, sentant le sol froid en-dessous de ses orteils, sentant la chaleur se répandant depuis le dessous de la couverture. Cette colère de minuit était inutile. Il retourna en-dessous des couvertures, et reposa sa tête sur l'oreiller. Pour la première fois de la semaine, il se sentit confiant, en sécurité, presque réchauffé.

Tout ça parce que Spock était là. Et c'était ça le problème.

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Pour Kirk, le premier jour de congé à terre était comme le premier jour de vacances lorsqu'il était écolier. Le premier jour de permission était une vraie libération. Durant ce congé en particulier sur la Base Stellaire 11, il avait planifié avec soin de faire tout ce qui était agréable et rien de trop difficile. En plus des différents restaurants et bars, il avait réservé du temps pour un certain nombre de parties d'échecs avec Spock. C'était convenu, bien qu'ils n'en aient jamais parlé l'un à l'autre, que les deux hommes voulaient partager au moins une partie d'échecs sans les urgences du vaisseau, le devoir envers la Fédération, ou d'autres situations irritantes qui viendraient les interrompre.

Kirk savourait l'idée d'installer un plateau de jeu 3D et de jouer un match entier, du début à la fin, imaginant les conversations qu'ils pourraient avoir, les silences qu'ils pourraient partager.

Il avait continué son chemin jusqu'à un bar après s'être séparé de McCoy et Scotty, qui avaient opté pour d'autres formes d'amusement, et choisi un lieu pour passer le temps jusqu'à ce qu'une maison close réputée n'ouvre. Les lieux haut de gamme n'ouvraient pas leurs portes avant midi, et il était déterminé à profiter durant son attente.

Le bar qu'il choisit était décoré comme un ancien pub. Il ne connaissait pas du tout l'endroit, et était étonné de voir une telle abondance de panneaux de bois et de sièges rembourrés. En plus de cela, il y avait un vrai barman derrière le bar, servant des boissons de ce qui ressemblait à de réels robinets. Il n'y avait pas de synthétiseur à portée de vue. Souriant, il s'installa sur un des tabourets à côté du bar.

« Quel est la meilleur boisson ici ? » demanda-t-il, réellement enchanté.

« Notre cidre est de renom de ce côté d'Andretta, » répondit l'homme.

« J'en prends un. »

La boisson fut servie rapidement et Kirk en avala une gorgée, agréablement surpris par sa douceur.

McCoy adorerait ça, pensa-t-il. C'est excellent !

« Eh bien, eh bien, » dit une voix traînante derrière lui. « si ce n'est pas le grand Capitaine Kirk que voilà. »

Kirk se tourna, gardant une main sur son verre.

Finnegan. Aussi bon qu'il l'avait toujours été, le visage jeune, mais avec une vieille colère marquée dans le regard.

« Comme ta vieille mère doit être fière », dit Finnegan comme s'ils se parlaient depuis un certain temps.

C'était comme autrefois, avec Finnegan commençant à lancer ses sarcasmes dans de vagues commentaires qui n'avaient apparemment pas de sens et Kirk ouvrant la bouche pour parler avant qu'il n'y pense. Seulement, à présent, des années plus tard, il ouvrit sa bouche et réprima les mots qui allaient suivre. McCoy avait une fois fait remarqué qu'il ressemblait à un poisson hors de l'eau comme ça, et Kirk avait répondu qu'il valait mieux avoir l'air légèrement idiot que de permettre à quelque remarque impardonnable et irréparable de s'échapper.

C'est là où je l'ai appris, pensa-t-il. Avec Finnegan. Il y a des années.

« Oui, » répondit-il évasivement, se demandant où cela allait mener. « Oui, elle l'est. »

« Mais ce qu'elle ne sait pas, » dit Finnegan, souriant après avoir avalé une gorgée de bière, « c'est que n'importe qui pourrait faire ton boulot s'ils avaient un vaisseau aussi performant que l'Enterprise et son Premier Officier. Ce que je me demande c'est, pourrais-tu faire aussi bien sans eux ? »

Le dos de Kirk se raidit, se rappelant à lui-même qu'essayer de rétorquer n'importe quelle remarque sarcastique pourrait seulement l'exposer à plus de remarques touchant trop bien ses points sensibles. L'ambiance chaleureuse de la taverne semblait vraiment froide à ce moment.

Il regarda la gorge de Finnegan tandis que l'autre homme avalait une autre gorgée.

« Oh, oui, Jimmy-boy, tu ne peux probablement même pas te l'avouer à toi-même, ne parlons même pas de l'avouer de ta vieille mère, que tu n'es qu'une extension de ton vaisseau, juste un autre bouton de destruction que la Féd' enfonce à son gré. »

S'il s'était s'agit de Scotty, Kirk aurait accepté cette dernière remarque pour excuser le premier coup de poing qui aurait lancé la bagarre. Les combats de bars étaient l'une des activités favorites inavouées de son ingénieur en chef. Kirk songea qu'il pourrait pardonner Scotty pour commencer ce combat, s'il avait été là. Mais il n'est plus une tête brûlée, un jeune enseigne hésitant, pas plus qu'il n'avait l'héritage d'un caractère passionnel comme Scotty pour excuser une telle façon de réagir. D'autre part, il avait une très agréable maison close à visiter ainsi qu'une longue partie d'échecs à partager avec Spock plus tard.

Kirk inspira pour relaxer ses épaules. Il sourit, uniquement avec sa bouche.

« Eh bien, Finnegan, » dit-il, « ça reste encore à voir. Au revoir. »

Sur ce, il avala une dernière gorgée de son excellent cidre, et se détourna pour quitter le bar. Il avança d'un pas destiné à apparaître tranquille, et non pas comme s'il s'efforçait de se faire un passage entre les sièges et les corps.

Il ne put pas avancer assez vite. De son dos vint la voix claire et chantante de Finnegan.

« Allez, Jimmy-boy, retourne vers cette belle grande machine de guerre. Tu es juste un autre maillon de la chaîne, juste un autre maillon… »

Ignore-le, se dit-il à lui-même. Va-t-en sans faire d'histoire.

Oublie ça.

La première chose et la seconde furent simples à faire. Il ne tremblait pas de colère en quittant le bar. Non, il n'avait pas heurté plusieurs personnes qu'il connaissait et ignorées totalement tandis qu'il se concentrait sur ses inspirations et expirations. Il était le meilleur terrien qu'il connaissait pour inspirer profondément mais, après avoir rencontré Finnegan, il avait dû l'être. La plupart de ses combats, spécialement ceux où il avait été sévèrement injurié, avaient été à cause de Finnegan.

Inspire, expire.

Il allait relativement bien au moment où deux immeubles les séparaient. Finnegan avait été ignoré ; pas de combat aujourd'hui.

Allez, Kirk !

Il n'avait pas à faire ses preuves, n'est-ce pas ? Pas devant la Fédération, pas face à lui-même, et certainement pas pour Finnegan. Et Spock ne serait certainement pas du tout d'accord avec Finnegan. Le serait-il ? Non, définitivement pas.

Il savait qu'il était complètement stupide de s'énerver pour ça mais la troisième chose s'avérait impossible à faire.

Il fallut moins de 30 minutes à Kirk pour trouver le bureau du commandant de la base et moins de temps encore pour que le commandant comprenne ce que Kirk voulait.

« Dois-je vous rappeler, Kirk, que vous êtes un atout précieux pour la Fédération, je ne peux pas simplement vous envoyer sur une mission en solitaire juste comme ça. »

« Si, vous pouvez, » insista Kirk. « Il n'est pas nécessaire que ce soit une mission mettant ma vie en péril, simplement une mission en solitaire. »

« Eh bien, » hésita le commandant, « il y a celle-ci sur Delta 9 ; je veux dire, il y a des risques plutôt élevés dans certains aspects de cette mission mais pas pour cette partie-là. Quel est votre niveau d'autorisation ? »

« Q, » répondit Kirk. Il s'agissait toujours du plus haut niveau.

« D'accord. Je suppose que je ne pourrai pas vous faire changer d'avis et vous êtes en congé. Personne ne saura probablement où vous êtes parti et il est certain que de l'aide est la bienvenue. »

Après cela, le commandant de la base briefa Kirk sur la mission et le rôle qu'il y jouait. « Tout ce que vous avez besoin de faire, » termina-t-il, « c'est d'attendre pour un mot ou une autre évidence que les schémas volés refont surface et le signaler au Quartier Général de la Fédération. A ce moment-là, ils enverront leurs hommes. »

« Parfait, » dit Kirk, debout, tendant sa main.

Le commandant la serra. « Je pense toujours que vous devriez subir une évaluation psychologique avant comme le stipule les règlementations. »

Kirk prit le paquet contenant les informations sur la mission avant que le commandant ne puisse changer d'avis. « Je suis parfaitement capable de m'en sortir avec une mission de surveillance en solitaire. »

Il ne put pas localiser Spock mais il réalisa qu'il n'essayait pas vraiment. Franchement, il était beaucoup plus facile de faire face à un McCoy à moitié ivre et lui expliquer rapidement la situation puis de s'en aller tout aussi vite avant que le docteur ne puisse lui poser davantage de questions.

Plus tard, à bord du transport public cabossé et pas vraiment rapide, il réalisa qu'il devrait se soumettre à une évaluation psychologique ne serait-ce que pour comprendre la raison pour laquelle les mots de Finnegan avaient un impact si important sur lui. Et pas seulement pour lui mais aussi pour assurer la sécurité future de l'Enterprise.

Après la mission, se promit-il. Après mon retour, Bones et moi allons avoir une longue conversation à ce sujet.

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Lorsque Kirk se réveilla, ses mains étaient plongées sous l'oreiller, ses jambes repliées jusqu'à son torse et son dos pressé contre la paroi chaude d'un four en brique. Un cocon de paix l'enveloppait et il soupira. Mais pour une quelconque raison, il ne pouvait pas allonger ses jambes et les écarter jusqu'à ce que ses orteils dépassent de chaque côté du lit.

Il ouvrit lentement les yeux. Son dos était pressé contre celui de Spock, apparemment. Il respira lentement, sentant les côtes de son compagnon se lever et redescendre. C'était une sensation étrange et totalement nouvelle mais ils n'avaient aussi jamais dormis ensemble sur une planète si froide.

« Le chauffage a dû s'éteindre à un certain moment de la nuit pour conserver de l'énergie, » dit Spock, sentant qu'il était réveillé.

« Oui, » répondit Kirk. « Je suppose. »

Il se redressa d'un seul coup et rejoignit la salle de bain. Puis il resta sous la douche comme s'il souhaitait s'y noyer. Ils n'étaient pas en manque d'eau sur Delta 9 donc il s'avait qu'il pouvait y rester aussi longtemps qu'il le voulait mais, tandis qu'il levait le pommeau vers son visage, il savait que ce n'était pas juste de faire attendre Spock davantage avant de lui donner sa réponse.

Il coupa l'eau, se sécha avec une serviette et s'habilla aussi rapidement que le sol humide le permettait. Le miroir au-dessus de l'évier était trop embué pour lui permettre de voir à quoi ressemblaient ses cheveux alors il passa simplement vaguement ses deux mains dans ses cheveux et sortit de la salle de bain dans un nuage de vapeur.

« La douche est libre, Spock, » dit-il au vulcain assis à la petite table. Spock tenait dans ses longues mains une tasse qui semblait minuscule en comparaison. Quelque chose de chaud dans la tasse dégageait une traînée de vapeur dans l'air glacée. Kirk constat que le radiateur était allumé mais ne réchauffait que les alentours du lit.

« Je n'ai pas besoin d'une douche aujourd'hui, » répondit le vulcain. Puis il leva le regard. « Mais je suis parvenu à comprendre le fonctionnement du percolateur et je l'ai mis en route pour vous. »

Kirk s'empêcha de sourire. McCoy aurait simplement dit Le café est prêt, Jim, ou une expression du genre, et n'importe quelle autre personne aurait, tout simplement, dit Voulez-vous une tasse de café ?

Mais pas Spock.

Il se servit une tasse et s'assit en face de son premier officier.

« Du café, Spock ? » demanda-t-il, « vous ? »

Un sourcil sombre s'arqua légèrement.

« Tenant compte du fait qu'il n'y a rien d'autre de chaud à consommer et votre habituel ardent besoin de consommer ce breuvage à votre réveil, j'ai décidé d'essayer. »

Kirk se permit de sourire cette fois et le cacha derrière sa tasse. Il avala une gorgée ; c'était à la température idéale, et bien qu'un peu plus fort qu'il ne l'aimait, le goût en était boisé et profond. Ca le réveilla instantanément.

Spock sirota le sien et, au moment où le liquide atteint ses papilles, ses yeux s'étrécirent et il replaça la tasse sur la table.

« Vous n'aimez pas ? » Kirk observa Spock tandis qu'il examinait toutes les réponses possibles.

« La douceur de l'odeur est trompeuse face à son goût acide. Je préfère…le thé. »

Kirk remarqua que Spock le regardait un peu dans l'expectative, une expression adoucie sur son visage. Il entoura la tasse de ses mains et fixa le liquide brun.

« J'imagine, » commença-t-il, ne levant pas le regard, « que vous voudriez savoir pourquoi je suis en charge de cette mission à la place d'un agent possédant bien plus de qualifications que moi. »

« C'est précisément ce que je voudrais savoir, » répondit Spock, acquiesçant.

Kirk débattit intérieurement avec lui-même. S'il s'était s'agit de McCoy ou même Scotty, il aurait parlé, ça n'aurait pas vraiment eu d'importance ; ils auraient compris. Mais il s'agissait de Spock et, d'une certaine façon, il était impératif qu'il n'ait pas l'air d'un idiot. Mais encore une fois, pourquoi cela devrait-il avoir de l'importance ?

Spock est mon ami, pensa-t-il, il comprendra. Il comprend toujours.

Pourtant, il se retrouva à reformuler son explication d'une manière très logique.

« Premièrement, j'étais plus que disponible pour ce qui est, somme toute, un boulot de surveillance de routine. »

« Et que surveillez-vous, exactement ? »

« Un certain nombres de schémas de vaisseaux de combat expérimentaux ont été volés des nouvelles archives de la Base Stellaire I. »

« N'ont-ils pas mis en place leurs propres systèmes de sécurité ? »

« Apparemment, ce n'est pas assez sécurisé. Quoiqu'il en soit, ils ont suivi la trace de ces plans de Tantris à Delta 9. Et à la place de gaspiller inutilement le temps d'un agent à le faire attendre ici sans raison, mon boulot est d'observer les endroits qui sont les plus susceptibles de servir de lieu d'échange d'informations ou autre détails concernant ces plans et d'informer les Grands Chefs. Ils arrivent et je m'en vais, mission accomplie. »

« Il semble que les risques sont peu élevés, » dit Spock, neutre, paraissant attendre davantage d'informations.

Kirk haussa les épaules. « Pensez-y juste comme une autre sorte de congé à terre. »

Finalement, il leva les yeux et les fixa sur ceux de Spock. Le calme qui se dégageait de leur couleur marron ne dévoilé pas grand-chose à ce moment, semblant enregistrer ce que Kirk disait. Mais Kirk avait le sentiment inconfortable que Spock comprenait qu'il y avait davantage qu'il ne disait pas.

« La mission, » dit lentement Spock, « et vos compétences pour l'accomplir semblent relativement clairs. »

Kirk sourit avec les coins de sa bouche.

« Cependant, » continua Spock, et la bouche de Kirk reprit sa position précédente, « je ne comprends pas pourquoi vous vous êtes porté volontaire pour l'accomplir à la place de profiter de votre congé comme vous l'aviez prévu. »

Kirk s'empêcha de frémir. Spock méritait au moins la vérité.

« Je suis venu ici parce que… parce que lors du premier jour de mon congé, j'ai rencontré Finnegan. »

Spock arqua un sourcil mais semblait à part cela aussi patient que la galaxie elle-même.

« Il a dit quelque chose qui m'a en quelque sorte ébranlé. J'ai peur d'avoir agi d'une manière très émotive. »

« Manifestement, » répondit Spock. « Mais que vous a-t-il dit ? »

Kirk reposa sa tête contre une main, enfonçant ses doigts dans ses cheveux. Il jeta un rapide coup d'œil à Spock qui attendait pour la suite, relativement calme. Puis il détourna les yeux.

« Il a dit que toute ma célébrité et ma gloire n'auraient pas pu être gagnées sans l'Enterprise, sans vous. Que je ne serais rien si je n'avais pas ces deux choses. »

« N'est-ce pas la vérité ? Ne sommes-nous pas une équipe ? »

« Si, mais… »

« Vous devez aussi considérer que l'inverse est vrai. L'Enterprise, l'esprit féminin que vous lui avez insufflé, serait un simple morceau de métal sans son capitaine à la barre. »

Spock observa son capitaine. Sa réaction à la remarque de Finnegan était compréhensible, du moins d'un point de vue théorique. Cela prouvait que le capitaine y voyait une part de vérité, vérité qui le mettait mal à l'aise, et aussi que Kirk considérait ce congé comme une parfaite occasion d'agir sur ces faits. Le vulcain calculait que les probabilités que son capitaine retrouve un statut optimal d'ici la fin de ce congé étaient relativement bonnes. Rester au chaud et au sec durant cette période serait un autre problème.

Aucun d'eux ne commenta le fait que Spock n'avait pas réellement expliqué l'autre moitié de l'équation.

« Pourquoi ne m'avez-vous pas informé de vos actions ? » questionna-t-il à la place, se demandant pourquoi il était impératif qu'il soit informé de tous les mouvements de son capitaine.

Kirk s'hérissa de colère tandis qu'il s'asseyait sur sa chaise.

« Je n'avais pas réalisé, » dit-il d'un ton que le vulcain ne pouvait définir que comme froid, « que vous étiez mon gardien, Spock. »

Le vulcain y réfléchit. « Une définition quelque peu simplifiée mais essentiellement correcte. »

L'humain se leva d'un mouvement brusque et se dirigea vers la cafetière. Il s'appliqua à remplir sa tasse presque entièrement, et resta debout en face de la fenêtre, fixant l'extérieur. Tout ce qu'il y avait dehors était un torrent de pluie mais ça n'empêcha pas ses yeux d'y rester accroché. Tandis que l'humain prenait une faible gorgée de sa tasse, Spock tenta une remarque.

« Capitaine… Jim… »

Kirk se retourna et s'adossa au métal du comptoir.

« Maintenant que nous avons mis ça au clair et que vous comprenez ce que je suis en train de faire… »

« Pas vraiment, non- »

Kirk l'interrompit. « Pourquoi ne parlons-nous pas, à la place, de pourquoi vous êtes ici. »

Il déposa sa tasse et avança vers l'endroit où Spock était assis. Son avancée lente et prudente rappelait à Spock un prédateur, un lion terrien peut-être, ou l'avancée nonchalante d'un jeune selaht vulcain. Il s'arrêta précisément à un pas de la chaise de Spock et baissa la tête jusqu'à ce que son menton touche son torse.

« Pourquoi m'avez-vous suivi, Spock ? Pourquoi avez-vous employé votre temps libre pour me suivre jusqu'ici, sur Delta 9 ? »

Le vulcain leva les yeux vers le visage de l'humain, vers l'expression amicale et perplexe qui s'y trouvait. Spock connaissait cette expression, il connaissait la lumière charmeuse dans ces yeux noisette. La légère courbe de sa bouche indiquait que Kirk écouterait la réponse de Spock, le petit pli entre ses sourcils lui indiquait que Kirk était un peu confus en songeant aux réponses possibles qu'il pourrait lui donner.

« Avez-vous pensé, » dit-il ensuite, « que j'avais besoin de protection ? »

L'une des mains de Kirk se leva et se posa gentiment sur l'avant bras de Spock. Le vulcain ne recula pas, bien que c'était ce qu'il voulait faire.

Spock réalisa que s'il disait oui, alors cela appuierait seulement les doutes de Kirk concernant son habilité à être capable de réussir uniquement grâce à ses propres talents. Ce qui était ridicule puisque Kirk, étant un leader, se devait d'agir par lui-même sans consulter qui que soit d'autre approximativement 87,9 % du temps. Cependant, s'il disait non, ce serait un mensonge. Il était venu parce qu'il pensait que Kirk avait effectivement besoin de lui. Il devait y avoir une façon de dire la vérité sans attiser une nouvelle fois la colère de Kirk.

« Ca dépend, » dit-il prudemment, « de la définition que l'on donne à protection. »

Kirk leva la tête et se réinstalla sur sa chaise. « Spock, ce n'est pas une réponse. »

C'était la bonne manière d'agir. Peut-être qu'il y avait un autre moyen. « Si vous voulez dire que je pense que vous êtes incapable de gérer cette mission, alors la réponse est non. Si vous voulez dire que votre départ inopiné de la Base Stellaire 11 était sans précédent et m'a préoccupé, alors la réponse est oui. »

« Donc la réponse est oui et non. »

« Je resterai ici seulement- » Quelque chose se bloqua dans la gorge de Spock et il déglutit. « Seulement si vous avez besoin de moi. »

Kirk se leva et lui lança un regard noir, et Spock lu très clairement dans ses yeux : Je n'ai besoin de personne.

Pourquoi l'ai-je suivi jusqu'ici, se demanda Spock, tandis qu'il observait l'humain debout devant lui. Pourquoi ai-je ressenti un tel besoin de le protéger ?

Et ce n'était pas comme si Kirk avait besoin de protection, pour ce qu'il en était, Spock avait vu l'humain s'extraire de situations difficiles avec ou sans le vaisseau, avec ou sans la moindre aide du vulcain. Spock avait vu de ses propres yeux Kirk affronter un Gorn, une créature physiquement plus forte que lui, en restant à égalité avec lui. Et il avait vu l'humain, tout un nombre d'autres fois, partir se battre et revenir en vainqueur. Et même si Kirk perdait, ses opposants étaient en si mauvais état qu'ils regrettaient même d'avoir gagné. Alors ce n'était pas comme s'il était physiquement incapable de prendre soin de lui. Sans même compter son entraînement pour devenir un commandant, Spock avait été témoin de la réalité et savait que ses capacités n'étaient pas à remettre en question.

Il est tout ce qu'il a besoin d'être. Comment ai-je pu imaginer qu'il avait même besoin ou désirait ma protection ?

Kirk ne désirait visiblement rien de la sorte, du moins pas en ce moment. Et il apparut à Spock combien ses actions avait été illogiques, et à quel point elles devaient paraître étranges aux yeux de son capitaine. Il se leva, sentant son visage se réchauffer et sachant que les humains pourraient appeler ça de l'embarras mais ne parvenant pas à relier ces deux faits. Tandis qu'il se levait il bouscula l'autre homme et s'écarta rapidement. Il se dirigea vers la penderie pour récupérer son manteau, ne comprenant pas comment un tel amas d'émotions conflictuelles pouvait être résumé en un seul mot.

« Je… » Il s'interrompit et déglutit, son dos se raidissant. « Je ne voulais pas déranger. »

Il plaça le vêtement sur ses épaules et le referma jusqu'à sa gorge. Levant les yeux, il découvrit que ceux de Kirk étaient rivés sur ses mains.

Les mains de Kirk étaient grandes ouvertes, et l'humain avança d'un seul pas en avant.

« Ne partez pas. »

Spock ne bougea pas. « Je ne comprends pas pourquoi je devrais rester lorsque vous désirez vous assurer de vos propres capacités. »

Et pourquoi je veux plus que jamais faire ce que vous demandez.

Ne parle pas, se dit-il. Ne dis pas un mot. Et il serra fermement les lèvres.

Kirk avança d'un mouvement vif et posa une main sur le bras de Spock. « Ne partez pas, » répéta-t-il. « Restez. »

C'était une supplique que Spock pouvait difficilement ignorer.

Et comme s'il n'avait pas eu conscience de l'acquiescement instantané de Spock, Kirk continua, « Je sais que je peux faire cette mission seul mais votre compagnie serait bienvenue. Ah, nous pourrions même chercher un jeu d'échecs quelque part et faire cette partie dont nous parlions. »

Spock tenta de paraître sérieux. « Si vous faîtes référence à cette partie durant laquelle il ne devait y avoir aucune interruption, alors la réponse est oui. »

La main sur son bras le pressa légèrement puis se détacha. Le sourire sur les lèvres de Kirk remonta jusqu'à ses yeux.

« Parfait, » dit-il. « Maintenant, nous allons aller dans un café bien chaud quelque part et trouver de la vraie nourriture. »