N/A: Hello Hello ! Ça faisait un bail, n'est-ce pas ?

Je dois avouer que j'ai eu un peu de mal à concilier mon envie d'écrire avec mes responsabilités de la vie "réelle", du coup malgré l'inspiration et de nombreuses idées de fictions, j'avais décidé de me retirer un peu de l'univers pour me consacrer à la lecture.

Mais au moment où je m'y attendais le moins, j'ai eu cette idée qui m'a trotté dans la tête et qui ne me lâchait pas, au point que je ne trouve le repos qu'après avoir commencé à l'écrire. Heureusement, à cette même période, un cadeau fort pratique m'a donné le coup de pouce dont j'avais besoin pour continuer et j'ai réussi à me relancer avec un certain plaisir dans l'écriture solo, je dois l'avouer !

J'espère que cette fiction un peu différente de ce que j'ai l'habitude d'écrire vous plaira tout de même !

A très vite et bonne lecture !

Leilani.


– Encore un record de vente et d'abonnements cette semaine ! jubila le rédacteur en chef du Seattle Daily en entrant dans le bureau de sa chroniqueuse préférée. Et tout ça grâce à toi !

– Tu exagères, Uley, répliqua la jeune femme. Je ne suis pas la seule à faire mon boulot, ici. Et tu l'as dit toi-même au dernier débriefing, on est tous une grande famille.

– Oui, mais ça, je l'ai dit pour ne pas les vexer ! Voyons, Leah... Tout le monde sait que tu es le pilier de cette maison !

– Le pilier ? Rien que ça ? railla-t-elle en arborant un sourire narquois. Qu'est-ce que tu veux, Uley ?

– Un rédacteur en chef ne peut-il pas complimenter sa meilleure chroniqueuse sans pour autant avoir une idée derrière la tête ? minauda-t-il.

– Pas quand ce rédacteur s'appelle Sam Uley, non.

– Touché…

– Alors,qu'est-ce que tu veux ?

– Que tu donnes un petit coup de main à Angela sur le courrier du cœur...

La jeune femme ne put retenir une grimace de dégoût. S'il y avait une chose que Leah Clearwater détestait par dessus tout dans son métier, c'était de devoir répondre aux lettres d'amour qui lui étaient adressées.

Non pas qu'elle était harcelée, bien au contraire. Sa vie sentimentale était semblable à une mer calme, sans vague et elle ne s'en plaignait nullement.

Non, elle était bien trop directe pour ne pas faire mal aux personnes qui semblaient attendre d'elle une solution miracle à tous leurs problème.

Sa chronique au Seattle Daily faisait un carton. « La vérité selon L.C. » avait défrayé la chronique dès sa première sortie, et les lecteurs avaient tous adoré le vent de fraîcheur qu'elle avait apporté à ce journal, qui talonnait maintenant grâce à elle le Seattle Times.

Contrairement aux autres courriers des lecteurs, Leah n'édulcorait pas la vérité. Elle disait ce qu'elle pensait, se fichant éperdument de faire de la peine aux personnes à qui elle répondait, arguant qu'il n'était de toutes façons pas bon pour eux de vivre dans un monde qu'ils croiraient parfait, car les contes de fées et autre conneries du genre n'existaient pas. Les lecteurs semblaient adopter son point de vue, bien qu'elle ait reçu quelques lettres lui disant qu'elle était un individu sans cœur et qu'elle pourrirait en enfer un de ses jours la proportion de celles-ci était très faible comparés aux courriers lui disant de ne pas changer.

Elle s'était cependant fait un point d'honneur à ne jamais répondre à une lettre lui demandant des conseils en matière d'amour. Malgré son extrême franchise, elle préférait ne pas s'immiscer dans les affaires trop « privées ». Elle avait d'ailleurs une réponse type à ce genre de missives.

« Je ne suis ni conseillère matrimoniale, ni psychologue. Juste une femme qui parle avec ses tripes et pour qui l'amour n'existe pas. Voulez-vous réellement qu'une femme qui ne croit pas en l'amour vous dicte quoi faire ? »

Cela semblait contenter tout le monde, même si le nombre de courriers du cœur n'avait cessé d'augmenter, forçant alors l'équipe éditoriale à engager une nouvelle personne pour y répondre. Malheureusement pour la pauvre Angela Weber, pourtant habilitée à prodiguer ce genre de conseils de par sa formation, les gens ne semblaient pas se rendre compte de la nouvelle rubrique qu'elle tenait.

– Tu sais que je ne suis pas faite pour ça, Sam, reprit Leah sans se départir de sa grimace.

– Je sais, mais j'ai eu une idée et je suis sûr et certain que ça pourra marcher…

– Sam…

– On a vraiment besoin de toi sur ce coup là, LeeLee ! insista Sam en lui lançant un regard implorant tout en comblant la distance qui les séparait.

La jeune femme sentit ses résolutions faiblir, comme à chaque fois qu'il était trop près d'elle, et fut soulagée d'entendre la voix de sa collègue retentir et briser la petite bulle qui s'était créée entre elle et lui.

– J'en ai marre ! Il y a encore deux cent courriers du cœur qui te sont adressés ! soupira lourdement Angela en les déversant sur le bureau de sa collègue.

Leah arqua un sourcil, surprise par le coup d'éclat de sa nouvelle amie.

– Eh bien tu n'as qu'à y répondre ! C'est ton boulot, non ?

– Oui, mais c'est TON avis qu'ils veulent ! rétorqua Angela.

– Peut-être, mais la psy, c'est toi. Je suis journaliste et chroniqueuse, rien de plus. Tous ces trucs pour reconquérir l'être aimé, c'est pas pour moi ! claqua fermement Leah.

– Ces gens-là pensent que tu peux vraiment les aider, Leah. Quel mal y a-t-il à répondre à leurs attentes ?

– Tu te rends compte que si je me mets à le faire, tu perds ton boulot ? sourcilla l'intéressée.

Angela déglutit péniblement et blêmit en réalisant que sa nouvelle amie avait raison.

– En fait, non ! intervint le rédacteur en chef. Compte tenu de la forte demande de nos lecteurs, nous avons prévu un nouveau concept.

– Un nouveau concept ? répéta Leah, méfiante face à l'attitude de Sam, qui semblait avoir changé du tout au tout. Et de quel genre de concept s'agit-il ?

– Nous voulons opposer l'avis de la psychologue et celui de la chroniqueuse préférée des lecteurs, une fois par semaine, concernant les courriers du cœur. Les lecteurs seront ensuite invités à voter sur notre site internet pour celui qui leur semble le plus pertinent et les résultats seront publiés la semaine d'après.

– Vous... Vous voulez organiser... Une sorte de battle entre nous ? bredouilla Angela, décontenancée.

– C'est une très mauvaise idée, Sam, ajouta Leah.

– Et moi je trouve au contraire que c'en est une excellente ! rétorqua ce dernier. De toutes manières, je ne reviendrai pas sur ma décision. Je veux votre première chronique commune sur mon bureau après-demain, sinon…

– Sinon quoi ? Tu vas me virer ? pouffa Leah. Parce que si c'est ce que tu pensais dire pour me faire peur, je te signale que je n'aurai aucun mal à trouver un autre job une fois que tu m'auras libérée !

– J'en suis conscient, concéda Sam. C'est pour cette raison que je pensais renvoyer Angela si tu n'acceptais pas. Tu penses que tu arriveras à vivre avec ça ?

– Quoi ? Vous...Vous n'êtes pas sérieux ? balbutia Angela, sous le choc, tandis que Sam quittait les locaux sans lui répondre. Il n'est pas sérieux, hein ?

Leah serra les poings, les yeux rivés sur son ordinateur. Elle connaissait Sam Uley aussi bien que lui la connaissait, et elle savait qu'il n'hésiterait pas à mettre sa menace à exécution, tout comme il savait qu'elle se sentirait atrocement coupable d'avoir fait perdre son travail à Angela.

Jusque là, travailler avec son plan cul régulier ne lui avait pas semblé être un problème, mais la terrible envie de meurtre qui l'envahit à mesure que la dernière phrase de Sam repassait dans son esprit lui fit réaliser qu'elle s'était fait avoir en beauté.

Il y en a un qui va se retrouver les couilles pleines pendant quelques semaines ! songea-t-elle avant de soupirer lourdement et de se tourner vers Angela, qui commençait à lui taper sur le système à force de tourner en rond.

– Assieds-toi et choisis une maudite lettre avant de nous faire un claquage neuronal !

Angela s'arrêta net et la dévisagea longuement, les yeux emplis de larmes.

– Ça... Ça veut dire que...

– J'ai pas vraiment le choix, je crois ! J'ai pas envie qu'Uley l'enfoiré te vire à cause de moi.

– Oh, merci merci merci ! exulta Angela. Je te revaudrai ça !

– Ouais, ouais. T'as intérêt… grommela Leah, sentant déjà une énorme migraine pointer le bout de son nez.

...

« Très chère L.C.,

Mon nom est Helen, j'ai 40 ans, mon mari rentre de plus en plus tard et cela fait des mois que nous n'avons pas eu un moment à nous. On ne se parle quasiment plus et il trouve toujours un prétexte pour qu'on ne fasse pas l'amour et je commence à être sérieusement en manque…

Je crois qu'il me trompe et je ne sais plus quoi faire. Aidez-moi, s'il vous plaît. »

– Contactez un avocat et achetez-vous un vibromasseur, chère Helen !

– Leah !

– Quoi ? C'est moins chiant à entretenir qu'un homme, et ça donne plus de sensations aussi !

– Cette femme est désespérée !

– Ouais, ben sans sexe, c'est compréhensible, mais on n'est pas des bonnes fées capables de rallumer la flamme entre elle et son mari ! se défendit Leah. S'il ne veut plus coucher avec elle, leur mariage est fini et puis c'est tout !

– C'est faux ! Ils peuvent encore en discuter et comprendre ce qui les empêchent de retrouvent un semblant de communication dans leur couple...

– Tu l'as dit toi-même, « un semblant de communication ». Ce ne sera que pour un temps ! Ça se trouve, il a trouvé mieux ailleurs ! Peut-être même que c'est sa secrétaire qui a probablement dix ans de moins que sa femme qu'il se tape tous les soirs et qu'il invite au restaurant ! Autant qu'elle prenne les devants et qu'elle demande le divorce. S'il ne veut vraiment pas la quitter, là, au moins, ça lui secouera les puces et il fera des efforts pour la contenter. Sinon, dans les deux cas, elle sera fixée.

– Tu es impossible... se désola Angela.

– Je suis réaliste, nuance, rectifia Leah.

– OK, OK... Je suppose que tu vas rester sur ton point de vue ?

– Tu supposes bien !

– Bon. Essayons de trouver une autre lettre.

– Pourquoi ? Elle est parfaite, celle-là !

– Parce que je ne peux pas te laisser conseiller à une jeune femme de demander le divorce, voyons ! s'exclama Angela.

– Et tu te demandais pourquoi je ne voulais pas répondre à ces maudits courriers ? grogna Leah, exaspérée. Ça fait dix lettres qu'on épluche et à chaque fois, tu trouves mes réponses trop déplacées, ou pas assez nuancées. Je suis comme je suis, Angela, et je ne changerai pas pour faire plaisir à des gens que je ne connais pas !

– Écoute, Leah. Je sais que sentimentalement parlant, tu n'as pas…

– Épargne-moi ton analyse sur ma vie sentimentale, Weber, et pioche une autre lettre, qu'on en finisse ! s'impatienta la chroniqueuse avant de se reprendre en voyant la tête de sa collègue. Je te promets de faire un effort sur celle-ci. Ça te va ?

– Très bien, céda Angela en saisissant une autre lettre. Elle vient d'un dénommé… Red Wolf…

– Pas mal, le pseudo ! ricana Leah en s'imaginant un biker tatoué jusqu'aux yeux. Et qu'est-ce qu'il dit, ce Red Wolf ?

– Chère L.C., commença Angela. Je ne sais pas du tout ce qui m'a poussé à vous écrire, mais je le fais quand même. Ça doit sans doute être le désespoir et le fait que d'après ma meilleure amie, vous soyez aussi directe qu'un avion sans escale dont les hôtesses ne prennent pas le temps de cacher leur envie de rentrer chez elles se reposer un bon coup et oublier les effroyables passagers qu'ils auraient dû se coltiner... Prenez-le comme un compliment, surtout, n'oubliez pas que j'ai besoin de vous pour m'empêcher de paniquer quand je me crasherai lamentablement.

Leah ne put s'empêcher de rire à la comparaison.

– Un bon point pour Red Wolf, il a le sens de l'humour, même si c'est un peu pourri... concéda-t-elle. Alors, c'est quoi, son problème ?

Angela esquissa un sourire. C'était la première fois que Leah montrait un réel intérêt pour l'un des courriers qu'elles avaient lu.

« Alors voilà. Je suis amoureux. Ça doit vous sembler complètement inutile que je le précise, mais c'est là tout mon problème, voyez-vous. Cette fille m'obsède depuis qu'elle est revenue vivre près de chez nous. On se connaissait depuis l'enfance et je l'ai toujours trouvée jolie, mais là, j'ai vraiment du mal à me défaire des sentiments que j'éprouve pour elle. Pourtant, ce n'est pas faute d'essayer. Malheureusement, quand on passe toutes ses journées avec la personne en question et que cette dernière est qui plus est votre meilleure amie et associée, c'est pas très facile.

Elle est amoureuse d'un autre… »

– La garce ! s'écria Leah sans même s'en rendre compte.

Le sourire d'Angela s'élargit et elle reprit sa lecture.

« Elle est amoureuse d'un autre, qui l'a déjà abandonnée il y a quelques années. Elle était complètement anéantie et a fait une sérieuse dépression lorsqu'il a quitté la ville, 'Pour son bien' comme il aimait le dire. C'est vrai que leur relation était un peu malsaine, mais bon, c'est sa vie et ce sont ses choix, on ne peut pas faire grand chose dessus et puis j'imagine que je dois déjà assez vous ennuyer comme ça.

Bref. Pendant l'absence de son prince charmant, nous nous sommes rapprochés. J'ai passé tout mon temps libre à lui remonter le moral, en espérant secrètement qu'elle se rendrait compte qu'elle valait bien mieux qu'un type comme lui et qu'elle avait d'autres choix, bien plus sains et moins complexes *se pointe du doigt*. J'ai cru l'espace d'un instant que j'avais réussi, parce qu'elle avait retrouvé le sourire et qu'elle me disait qu'elle ne se voyait plus vivre sans moi… Jusqu'à ce qu'il revienne et que je me retrouve avec la queue entre les jambes. »

– Red Wolf, Red Wolf, Red Wolf... soupira lourdement Leah. Ça ne marche pas comme ça, les gonzesses ! Les gentils garçons ne servent que de bouche-trous, pas de petit-ami potentiel !

« Ce mec n'est pas fait pour elle, mais elle ne veut pas le voir. Elle vit LE rêve, comme elle dit. Il est attentionné, riche, avec une bonne situation… Enfin, tout ce que je n'ai pas, en gros. »

– Il ne perd pas au change. Une fille qui ne jure qu'à travers un mec comme ça ne mérite pas mieux ! gronda Leah.

« Vous devez sûrement recevoir des centaines de lettres dans mon genre, aussi je ne vous en voudrai pas de ne pas me répondre, mais j'espère sincèrement pouvoir bénéficier de vos conseils. Je ne vous demande pas comment faire pour l'avoir, je crois que j'ai compris cette fois que c'était peine perdue. Mais j'aimerais juste savoir comment faire pour ne plus penser à elle de cette manière, autre qu'en me jetant du haut d'une falaise, parce que c'est pas trop mon trip. »

Leah éclata de rire à nouveau en imaginant la scène, et secoua la tête en se rendant compte qu'Angela l'observait avec étonnement.

– Quoi ?

– Rien du tout ! mentit Angela. Alors ? Tu veux répondre à Red Wolf ou pas ?

Leah récupéra la lettre et la relut attentivement. Ses lèvres s'étirèrent en un léger sourire en notant la fébrilité dans les courbes d'écriture du jeune homme et les petits dessins qui égayaient la missive. Il semblait réellement prêt à tout pour obtenir son avis.

– Oui. Oui, essayons de sauver ce petit loup de son piège mortel… souffla-t-elle finalement.

Angela soupira de soulagement, certaine que cette fois, Leah s'impliquerait comme il le fallait dans leur nouvelle chronique.