Ce dimanche après-midi était plutôt calme dans ce petit appartement du chemin de traverse. Il pleuvait paresseusement sur la petite rue pavée et grisonnante, tandis qu'un corbeau survolait le ciel.
L'oiseau fondit l'air et se stoppait net juste à notre fenêtre, lettre au bec. Nous l'attendions cette missive. Si bien, ma mère fit un bon en voyant la bestiole, s'empressant d'ouvrir toute grande la fenêtre. Je la suivis de près, observant avec intrigue l'enveloppe qu'elle tenait déjà.
-Chéri! Notre fille entre à Poudlard!- Lançait ma mère sans prendre la peine d'en lire le contenu. J'avais quelques réserves pour ma part.
Mon père quittait son siège, glissant ses lunettes sur l'arrête de son nez et somma d'un geste de la main d'avoir la sacre sainte lettre. C'est ainsi que mon paternel s'attabla et pu enfin en lire le message.
-Chère mademoiselle Cavalieri... -il se raclait la gorge avant de boire un verre d'eau, profitant pour survoler du regard les prochaines lignes.- Non sans grand plaisir, nous vous annonçons que nous serons heureux de vous compter parmi nos élèves... -encore un temps, et le sourcil désapprobateur de monsieur Cavalieri senior s'assombrit encore- Toute fois à titre provisoire. Ici, à Poudlard, nous voulons croire que vous pourrez progresser favorablement et obtenir de bien meilleurs résultats que dans votre ancien établissement scolaire. Cela dit, et étant donné vos notes passées, il vous faudra faire preuve d'un comportement exemplaire et d'une attention toute rigoureuse. Dans le cas contraire, nous nous verrons dans l'obligation de poursuivre cette année et celles à venir sans vous. Severus Rogue.
L'air renfrogné de mon père ne faisait que masquer son inquiétude au sujet d'un avenir plus qu'incertain pour moi, mais enfin je récupérais cette lettre avec entrain avant d'assurer qu'être admise était une bonne chose, un bon début.
-Va préparer tes affaires ma chérie, on verra bien pour le reste.- Ajoutait ma mère comme pour clore la discussion avec davantage de douceur et d'aplomb.
Je laissais derrière moi mes parents discuter sur un ton à couteau tendu, il ne s'agissait pas d'une dispute à proprement parler, plus... d'un débat, et j'en étais le centre d'attention.
Ma lettre de quasi admission était accompagnée d'une liste de fournitures à apporter. J'en possédais déjà la plus grande partie mais certains objets m'étaient parfaitement inédits.
-MAMAN! QU'EST-CE QUE C'EST UN RÉTICULE?
Cette dernière accourait à mon secours en examinant la liste avec moi. Elle prit d'ailleurs les commandes du paquetage de valise, tandis que je suivais ces instructions avec la discipline d'un bon matelot. Cela prit une bonne heure, et il manquait quelques affaires qu'il faudrait impérativement acheter dès demain et me faire envoyer au plus vite. Je ne pouvais plus m'en occuper, je devais partir demain à la première heure.
Le problème qui avait soulevé une telle situation, n'était autre que Poudlard et son administration douteuse. Ils ne m'avaient pas jugée prioritaire avec mes notes tellement en deçà de la moyenne, et ne prirent donc aucun empressement à répondre à ma demande de transfert d'école. En conséquences, j'allais débuter les cours avec pas moins de deux semaines de retard.
Ce genre d'événements avaient le don de m'empêcher de dormir, je songeais maintes et maintes fois à ce qui m'attendrais dans ce nouveau pensionnat. Il m'était difficile dans cette obscurité et sans la moindre distraction pour les écarter, de m'épargner mes craintes. Être acceptée n'était pas une garantie, ni sur un plan scolaire, ni sur un plan plus personnel. Et bien sur, ce qui devait arriver, arriva. Le matin pointait trop vite le bout de son nez et moi, je n'étais pas franchement enchantée de quitter le confort de mon lit. Je poussais tant bien que mal mes affaires jusque la porte après m'être préparée sommairement et me laissait conduire jusqu'à la gare.
Mes parents jetaient des œillades répétés sur la passagère étourdit que je faisais à l'arrière de leur confortable 4x4. Je percevais encore leur inquiétude à mon égard.
-Léo? -j'écoutais mon père en sourcillant.- Je voudrais que tu saches que je suis fière de toi, et qu'on sera toujours là en cas de besoins.
J'aimais profondément mes deux parents, mais l'exigence de monsieur Manolo Cavalieri rendait parfois la communication moins évidente, je suppose. Je souris en guise de réponse.
-J'essayerais de ne pas te décevoir dans ce cas.
Le reste du chemin se fit dans le silence, qui fut seulement rompu par le brouhaha constant des voyageurs une fois à quai. Nous nous tenions là, prêts à nous quitter à nouveau.
Ma mère m'attirait doucement contre son corps, et me serrait aussi fort dans ces bras que possible, je ne voulais pas les quitter trop vite. Ces moments devenaient trop rares pour chaque sorcier, voué à des années de pensionnat et de dévouement scolaire.
-Vous allez me manquer.
Mon père ajustait encore ces lunettes, s'était un homme pensif et silencieux quand il ne se montrait pas sélectif. Sa femme, elle, me poussait lentement jusqu'au mur ensorcelé, puis elle le regagnait en cherchant du réconfort, il le lui prodigua entourant ses frêles épaules du bras.
-Tu as encore trop traîné au lit, ma chérie. Tu risques de rater le train, si tu ne traverses pas.
A contre cœur, je cédais à sa dernière recommandation. J'agitais ma main et traversait, pour entendre mon train siffler en guise d'avertissement. J'empoignais solidement la cage de mon corbeau et ma valise avant de sauter à l'intérieur du véhicule.
Le wagon était rempli de premières années qui allaient et venaient dans les couloirs, et je songeais soudainement au faite que le voyage risquait d'être long. Comble de la malchance, ma cabine ne faisait certainement pas exception. J'éprouvais toute fois une pointe de nostalgie en voyant ces enfants s'émerveiller devant l'un de leurs amis qui avait débarqué les bras chargés de bonbons Bertie Crochue. Cette courte magie fut effacée par leur vague de "wesh ferme ta gueule" et "nique ta mère". Les temps avaient bien changés.
Une fois installés, l'un d'eux commençait à m'observer, avant de déclarer:
"-Vous en voulez un madame?"
Évidement , c'était celui qui était venu les bras chargés de trésors sucrés. Je l'observais à mon tours avec méfiance, avant de lui piquer une grenouille en chocolat, prenant soin de lui rendre la carte de collection qu'elle contenait.
-Woaaaaah! Lady Lili! Elle tombe jamais celle là! Qu'est-ce qu'elle est belle!
-Moi un jour, je me marierais avec elle!
Ajoutait un autre en reluquant la carte, Lili le graciait d'un sourire coquin. C'était presque dérangeant, cette sorcière était réputée pour ses effeuillages sensuels, mais il était vrai que sa carte était rare.
-T'es une sacrée chanceuse! Ouvre en un autre.
Je n'eus pas le temps de m'ennuyer après ce petit coup de chance, et comme ces enfants avaient vraiment acheté un paquet de grenouilles, quelques autres bonnes cartes tombèrent dans le lot. J'en ressortais avec celles qu'ils avaient au quintuple, voire d'avantage. J'étais plutôt satisfaite de moi-même avec ma chance et ces cartes.
-Mademoiselle Cavalieri! C'est donc cela le sourire de l'insouciance d'être tellement mauvaise sorcière qu'un établissement aussi prestigieux que St George s'est vu dans l'obligation d'interrompre votre scolarité. Comme j'aimerais que la médiocrité puisse me paraître aussi bienveillante.
Je venais à peine d'entrer dans le hall principale et probablement sourire au lèvre que ces paroles m'avaient stoppée net. Là du haut des escaliers se tenait une silhouette froide enveloppé dans une tenue de sorcier qui semblait faire pâle figure.
Mais je n'eus pas le temps de faire plus ample connaissance, trop inquiétée par un aspect nouveau de mon apparence, mon bras s'était littéralement transformé en une espèce de tentacule baveux, suivit rapidement par le second, et il n'en fallut pas beaucoup plus pour que je m'écrase au sol sans que je comprenne exactement ce qu'il m'arrivait. Tout le monde autours de moi s'était arrêté pour contempler et s'esclaffer.
-Lève-toi espèce de sale limace!
Avait lancé le petit qui m'avait proposé les bonbons tout à l'heure, tandis que je comprenais lentement mais surement que j'allais lui en faire baver. Enfin, après que j'eus moi-même arrêté de baver sous le contre sort du professeur Rogue -dont la sympathie devait être inversement proportionnelle à son cynisme-. Je lui devais au moins la pudeur, il avait prit soin de couvrir ma limace de corps d'une cape avant de me rendre mon apparence normale.
