« Il comprendra. »
Abbott leva les yeux vers Jane. Ce dernier était debout et lui tournait le dos, le front posé contre la baie vitrée de la grande salle de conférence du quartier général du FBI à Austin, où ils se trouvaient. Même de là où il se tenait, Abbott pouvait lire l'inquiétude sur le reflet du visage de son collègue.
« Il comprendra. », répéta Jane d'une voix lente, « C'est ce qu'elle m'a dit, Dennis. Il comprendra. Et maintenant… »
« Jane, vous n'en savez rien, pour l'instant. »
Un mince sourire apparut sur le visage de Jane et il se retourna pour faire face à son interlocuteur.
« Si, je le sais. »
« D'accord. », concéda Abbott, voyant qu'il lui aurait été inutile d'insister.
Depuis Patrick Jane avait fait irruption au beau milieu d'une réunion, l'air paniqué, Dennis Abbott avait compris que quelque chose n'allait pas. Il avait demandé à ses collègues de l'excuser un instant et avait suivi Jane dans un lieu plus privé, à la demande de ce dernier. Une fois qu'il eut fermé la porte, Jane n'attendit guère pour aborder le problème et Abbott le laissa poursuivre jusqu'au bout. Teresa Lisbon avait disparu. Il n'avait pas eu de nouvelles d'elle depuis la veille : cela n'était pas normal. Quand Abbott lui avait demandé s'il pensait à quelqu'un qui pourrait lui en vouloir, la réponse avait fusé. Marcus Pike. Aux yeux de Jane, si quelque chose était arrivé à Lisbon, le responsable ne pouvait être que Marcus Pike.
« Vous pensez qu'il n'a pas compris le choix de Teresa ? », reprit Abbott.
« Bien sûr que non. Comment aurait-il pu ? »
« Cela ne veut pas dire qu'il ait été blessé au point de vouloir se venger. À moins que vous ayez oublié de me dire quelque chose ? »
« Je n'ai pas oublié, j'allais y venir. Depuis quelques jours, Teresa se sentait mal d'avoir annoncé par téléphone à Pike qu'elle ne viendrait finalement pas avec lui à Washington. Elle a décidé de s'y rendre. C'est justement le problème, Dennis. Elle est partie hier pour le week-end et devait m'appeler en arrivant. Elle ne l'a jamais fait. »
« Pourquoi n'êtes-vous pas parti avec elle ? »
« Je ne suis pas sûr que Pike aurait apprécié de voir arriver la femme qui l'a quitté pour un autre homme en compagnie de cet autre homme. », nota Jane.
« En effet. », admit Abbott d'un ton amusé, « Mais cela ne veut toujours pas dire qu'il lui ait fait quelque chose. »
Il se leva et posa une main sur l'épaule de Jane.
« Jane, je vous connais depuis un moment maintenant. Si votre instinct vous dit que quelque chose ne va pas… »
« C'est le cas. »
« Si votre instinct vous dit que quelque chose ne va pas », reprit Abbott, « je vais faire en sorte de vous aider. Je vais appeler un ami qui travaille à Washington, lui dire de garder un œil sur l'agent Pike et de retrouver l'agent Lisbon. En attendant, prenez le reste de la journée, rentrez chez vous et essayez de vous reposer un peu. Je suis sûr que vous vous inquiétez pour rien et qu'elle vous appellera d'ici peu. »
« Merci. », sourit Jane.
En montant dans sa voiture, les dernières paroles d'Abbott se mêlèrent à celles de Lisbon. « Ne t'en fais pas, tout va bien se passer. Je veux juste clarifier les choses en face à face. Cela fait un mois maintenant et je veux le faire avant qu'il ne soit trop tard. Je lui dois au moins ça. ». Il se revit la déposer à l'aéroport, l'embrasser une dernière fois avant qu'elle ne franchisse la porte d'embarquement. Il aurait sincèrement aimé pouvoir croire à ce que lui avait dit Abbott mais il ne parvenait pas à faire taire le terrible pressentiment qui s'était emparé de lui.
