Ce soir, je recevrai en le modeste manoir qu'est le mien des invités de marque. Je pourrai accueillir un certain Caleb Stonewall, réputé pour sa marque de parfums lancée i peine six mois, et ayant fait pencher la balance de l'économie de la haute couture de son côté. Il est paraît-il très sobre et peu bavard, mais possèderait un sens de la mode très aiguisé et serait pointilleux sur les bords. "Une personne élégante qui aime les belles choses" m'avait-on dit à son sujet. On m'avait beaucoup tarit ses éloges, et surtout en matière vestimentaire, il n'y avait eu que très peu de critiques. C'est vrai que j'ai hâte de le rencontrer et de pouvoir enfin voir ce "sens absolu du style" qui est sensé le caractériser. Avec lui, la soirée risque d'être très amusante, je le sens déjà. Sans compter Byron Love, qui lui a fait office de mannequin pour une célèbre marque française. Celui-ci ayant fait la couverture de plusieurs magazines et enchainé les podiums et les interviews, sa réputation a augmenté du jour au lendemain, et j'ai décidé de le convier aussi. Il paraissait original et d'une très grande classe, difficile à égaler. Et puis pourquoi pas nous rapporter des échantillons de produits qu'il représente, si ça pouvait pimenter la fête, ni moi ni même les autres invités ne s'en plaindrait. Mais c'est vrai que je n'ai pas seulement convié les hauts placés dans ce domaine-ci, le but était de varier les thèmes. C'est pour cela que Xavier Foster nous rejoindra à 20h30, plus tard que les autres, puisqu'il vient de New York. Celui-ci est très précis sur ses horaires, et même s'il est en retard, il préviendra toujours le concerné. Foster est un business-man qui fait d'énormes chiffres d'affaires aux États-Unis et qui -disons le franchement- s'enrichit sur le dos des autres sans aucune scrupule. Depuis aussi loin que je le connais, il a toujours été aussi hautain envers ses prochains, si bien que même avec les personnes avec qui il entretient une relation amicale, les hostilités ne sont jamais loin. Il aime la concurrence, et dans certains cas il est prêt à tout pour être au sommet du podium, quitte à trahir, désobéir ou manipuler. Prétentieux et radin sont deux objectifs qui le qualifieraient parfaitement. Et lui même convenait parfaitement, même plus que les autres à cette soirée. Une telle personnalité était avantageuse, Foster voudra toujours dominer, et n'acceptera pas l'échec ; Une belle façon de semer la zizanie, ajouter du piment et mettre les nerfs des autres à l'épreuve.
Déjà avec cette brochette là, c'était parfait, mais il manque un élément fondamental, sans qui la soirée ne pourra pas être réussie. Archer Hawkins, le total sous-compétent, vivant dans les bas-quartier de cette ville, fan de moto et de son peigne qu'il ne quitte jamais, au péril de de décoiffer à un quelquonque coup de vent.
Je ne le connais que par le biais de mon cousin, qui est ami avec son père. Donc nous ne sommes pas proches, et ce n'est pas son style, son charisme, ni même sa fortune qui m'a attiré, loin de là. Non, j'ai pensé à lui pour une seule raison : il a un sale caractère.
Mes critères changent en fonction de mes invités, et si je ne devais prendre que les plus chiqués, ce punk n'aurait même pas été parmi les vingt premiers.
Alors oui, j'ai dû lui prêter un costume pour qu'il n'ai pas l'air d'un clochard, mais cette vermine est un véritable bijou. Il fera toute la différence entre mes soirées et celles chez les autres aristocrates, où tout est parfait.
Ici, il y a une ombre au tableau. Un intrus. Mais pas une inutilité, au contraire. Si c'est moi qui l'ai choisi...
Le temps semble infini et les huit coups de l'horloge mirent du temps à se déclencher, tellement que je me suis demandé si elle n'était pas truquée. Mais la torture de l'attente pris fin et le premier invité sonna à la porte. Mon premier défi personnel était de deviner qui était derrière cette porte, à attendre que j'ouvre. Stonewall, Byron, Foster où Hawkings ?
Allez... je vais dire... Stonewall !
Pas de chance, quand j'ouvris brutalement la porte, ce fut Hawkins qui m'attendait sur le perron. Il portait ce fameux costume noir avec cette cravate assortie et des mocassins à lacets de très bon goût puisqu'ils m'appartenaient. Il parut surpris de la façon dont j'avais ouvert la porte, donc je fit un sourire, de manière à lui faire comprendre que ce n'était qu'une farce et qu'il fallait qu'il oublie ça.
- Entre, mon cher, ne te fais pas prier !
Je m'écarte pour le laisser passer et referme la porte derrière, plus doucement que tout à l'heure cependant. Il ne doit pas avoir l'image de moi d'une grosse brute.
- C'est un honneur de pouvoir passer le pas de la porte de votre maison, messire Zabel.
- Voyons, n'en faîtes pas trop, mon cher Hawkins ! Je sais que vous ne pensez pas la moindre de vos paroles.
Il ne savait plus quoi dire, exactement comme je l'avais espéré. Vu qu'il était d'une classe moins élevé et que lui-même se posait des questions sur sa présence ici, je pouvais facilement me servir de lui. Je pouvais déjà apercevoir les fils de la marionnette au dessus de lui.
- Non, je suis sincère ! Ce manoir est magnifique, et vous êtes une personne d'exception !
- Tu veux quoi, ma confiance ?! Si tu es là, ce n'est pas pour rien alors dis les choses franchement.
- D'accord. Alors sincèrement, je trouve que votre décoration est juste... horrible !
- Et bien voilà, ce n'est pas si dur ! Par contre, je t'interdis de critiquer mes goûts, compris ?!
- Vous venez de me dire de vous parler franchement.
- J'avais tort, je préfère que vous mentez finalement. Ce soir, Je décide de tout et mes invités n'auront aucune objection a faire.
- Et vous croyez que l'on va vous obéir aveuglément ?
- Je suis l'empereur de la puissante organisation du Fifth sector, et ma place dans le monde devient de plus en plus importante. Donc je vous déconseille fortement de me désobéir.
Il ouvre la bouche pour répliquer, mais elle fut refermée aussitôt. Il a sûrement enfin compris que c'était une mauvaise idée de me désobéir. Seul un grognement sortit de sa bouche, un son plus proche d'un homme cro-magnon que d'une personne civilisée cependant. Il n'osait plus rien dire. Maintenant que je lui avait rabattu
son caquet et mis les choses au clair, j'étais tranquille.
Driiiing
Tiens, serait-un nouvel invité ?
Mais lequel ?
Trop d'impatience, je ne fais pas de pari et file lui ouvrir.
- Bonsoir Messire Zabel.
Ah, Byron ! Et avec seulement cinq minutes de retard !
- Bonsoir, cher ami. Vous êtes Mr. Love, je suppose ?
- En personne. Mais vous pouvez m'appeler "Aphrodite", car tel est mon pseudonyme. Vous ne lisez pas la presse féminine ?
- Ça m'est arrivé de feuilleter un 'Elle" ou un "Cosmopolitan", mais je ne me suis jamais arrêté sur un article. Je vous connais grâce à ce que l'on appelle le "bouche à oreille".
- Oui, je suis sur toutes les bouches en ce moment. Pas étonnant, remarquez.
Un vantard. Pourquoi ça ne m'étonne pas ? En plus, il secoue ses cheveux telle une diva d'un air un peu trop modeste, ce qui a le don de m'énerver. Remarque, s'il aime tant que ça ses cheveux, il s'entendra bien avec Hawkings. Et avec un peu de chance, il lui prêtera peut-être même son peigne. À moins que cette babiole achetée 2€ au vide grenier ne lui suffise pas.
- Mais on parle aussi beaucoup de vous. La politique que vous menez a fait polémique dans le monde entier et vous n'êtes inconnu pour personne.
- Je le sais bien.
Oui, je sais qu'on parle de moi, et souvent négativement. Tout ça parce que peu de gens adhérent à mes idées. Qu'essaie-t-il d'insinuer ? Que lui serait connu pour son "éblouissante beauté" et que moi, je serait critiqué dans tout les journaux mondiaux ? Je sais qu'il essaie déjà de me ridiculiser, mais je ne me laisserai pas faire. Lui n'est qu'une personne anodine qu'on a mis sur le devant du podium pour sa beauté qui soit dit en passant n'a rien d'exceptionnelle, alors que moi, je suis celui qui va révolutionner le monde. On ne m'oubliera pas au bout de 3 mois, comme cette pauvre personne qui a pris un peu trop la grosse tête.
- Trêve de mondanité, finis-je par articuler en sortant de mes pensées. Je ne veux mas parler de ça ce soir, voulez-vous ? Nous sommes là pour nous amuser !
- Ah ! Mais au fait, dites-moi pourquoi je suis là. Je ne vous connais pas...
- Et bien... vous m'aviez l'air de quelqu'un d'intéressant, et... entre vous et moi, j'ai l'étrange impression de vous connaître. Nous serions-nous déjà rencontrés auparavant ?
- Je n'en ai pas le souvenir.
- Mon imagination me jouerait des tours ? Mais bref, entrez, mon cher ami. Vous pourrez faire la connaissance d'une vermine qui partage votre amour de la coiffure.
- ...Comment vous savez ?
- Oh, ça me paraît évident que vous êtes coquet.
Il entra dans mon domicile fortuné. Et de deux. Maintenant qu'il est à l'intérieur, le piège de la porte peut s'activer. Peut-être ne pourra-t-il plus sortir ?
Le prochain invité sur la liste est arrivé peu après. C'était Stonewall, bien sûr. Et je dois avouer que son allure m'a tout de suite plu, un genre rockeur raffiné, avec des vêtements plutôt courts et bien coupés. Les motifs et les matières mélangées formaient un ensemble extraordinaire. Franchement, dès que je l'ai vu j'étais impressionné. Ce style était quand même beaucoup plus classe que l'autre diva de l'Antiquité venu dans ce qui semblait être une toge et une paire de spartiates aux pieds.
Et de plus, il est poli et respectueux. Il s'est d'abord présenté de façon très sobre, et c'est vrai qu'on pourrait croire d'après cette attitude lasse qu'il n'a pas beaucoup de personnalité et j'aurais pu regretter de l'avoir fait venir, mais je suis sûr que ce n'est qu'une impression de première vue et qu'il a beaucoup de choses sur lui a nous révéler.
Oui, je suis extrêmement confiant concernant mes choix. Il ne reste que Foster, qui doit arriver d'une minute à l'autre si son avion n'est pas en retard. Tout le monde l'attend, assis sagement sur la méridienne en velours dans le grand salon et sirotant du vin, rouge, voluptueux, celui que j'ai acheté spécialement pour cette attente.
De mon côté, je me prépare à l'arrivé du business-man venu de l'autre bout de la planète. Mentalement, parce que pour l'organisation, tout est déjà fait depuis un bon bout de temps.
L'attente semble interminable. Quand arrive-t-il, bon sang ?! Il est 21h03 et cet imbécile se permet un retard ? Où peut-être est-ce juste que je ne peux plus tenir en place.
La scène est mise en place et le maître du jeu est prêt, il ne manque plus que le dernier des pions.
À ce moment là le spectacle pourra commencer.
- Bonjour, je suis bien chez Mr. Zabel ?
- Oui, en effet. Vous êtes Mr. Foster ?
Suivez-moi, mon maître m'a dit de vous guider jusqu'à la salle de spectacle. Il n'attendait plus que vous.
- Dans la salle de spectacle ? Je ne suis pas sûr de bien comprendre...
- Suivez-moi, vous verrez bien par la suite de quoi il en retourne.
~Acte I~
Le commencement de la fin
- Bienvenue, mesdames et messieurs a mon show extraordinaire ! Je n'ai pas besoin de me présenter car vous me connaissez tous mais je vais tout de même le faire : Moi, Alex Zabel, suis le dirigeant du Fifth Sector, et suis promu a un avenir brillant. Vous n'êtes pas sans savoir que j'ai de grands projets pour le monde dans lequel nous vivons et que je ne reculerai devant aucun obstacle pour parvenir à mes fins !
Mais je ne suis pas ici pour un meeting politique comme aurait pu croire ce cher Foster ici présent ! Ni même une réunion marketing, je ne ferais la promo d'aucun produit.
Ils firent tous une expression ébahie face aux paroles de l'empereur. Aucun ne connaissait la raison de leur présence ici, mais ils s'étaient tous imaginé que c'était pour le travail. Sinon, pourquoi Zabel les aurait conviés ?
- Cessez d'exhorbiter vos yeux ainsi, on dirait des carpes dans un aquarium, repris Alex. Vous êtes surpris ? A quoi vous attendiez-vous ? A ce qu'on parle finances durant ces précieuses heures ? Si oui je risque d'en décevoir certains. Je voudrais que nous laissions tomber tous nos soucis personnels et que nous nous concentrons sur les belles choses qui nous entourent et que nous aimons !
Mais tout ça ne se passera pas au hasard : il faut que vous sachiez que tout a été organisé d'avance, et que c'est moi le metteur en scène qui contrôlerai le temps.
~Je peux le rallonger, ou le raccourcir
L'améliorer, ou l'anéantir...
Je serai le maître de votre destin.
Car ce soir, vous n'aurez plus aucun contrôle. Peut-être seriez-vous envahie par une frénésie meurtrière ? Où peut-être deviendrez-vous de créatures immortelles, vivant dans l'ombre de la nuit ?
~Personne ne le sait,
Car il y a beaucoup trop de possibilités...
Et ça ne sert à rien d'essayer de vous enfuir ; Aucune issue n'est possible. Toutes les portes de sortie sont verrouillées ou piégées.
Et oui, je vous ai pris au dépourvu sur ce coup-là. Dorénavant, vous êtes mes marionnettes que je contrôlerai à ma guise. Peu importe les conséquences, je ferai ce que l'envie me donne.
~ Mais cela ne doit pas entraver à votre bonne humeur
N'oubliez pas que le but est de s'amuser
Ne vous laissez surtout pas envahir par la peur
Même si à tout moment, l'un d'entre vous peux y passer !
•Fin de la tirade, éteignez les lumières•
- Maître, vous êtes sûr de ce que vous êtes en train de faire ? Les faire paniquer dès le début n'est peut-être pas une très bonne idée...
- Hobbes, venez ici, approchez-vous...
- Oui, maître ?
- Que voyez-vous là ?
- Heu... Vos invités sont en train de communiquer entre eux, et...
- Moi, je vois des gens mêlant l'expression de l'incompréhension et de la frayeur : ils ne comprennent pas ce qui leur arrive, mais ils commencent à s'inquiéter : où peuvent-ils être tombés ? Le propriétaire de ce manoir serait-il dans une folie incontrôlable ?
- A quoi cela vous servira-t-il de les plonger dans une telle peur ?
- Ce n'est que le début, donc certains sont encore sceptiques, mais... La frayeur mettra la pagaille dans le groupe s'ils ont peur d'y passer. Et cette peur leur fera faire des chose improbables ! Ils croiront que je les contrôle, mais je ne ferai qu'observer ! Ne suis-je pas brillant ?
- Vous êtes surtout un fin manipulateur !
- Là est ma nature. Et maintenant, ça vous dit si on se divertissait...?
