_LUCIUS !

Le nom avait retenti, plus comme une menace que comme une demande. Lucius Malefoy sentit son visage se décomposer sous l'injonction qui lui était destinée. Il se leva d'un bond et reconstitua rapidement un visage impassible, il avait une réputation à faire perdurer. Même si l'angoisse le rongeait.

Le Seigneur des Ténèbres venait de l'appeler.

Merlin, que se passait-il cette fois ? Ses méninges tournant à plein régime, il essaya en vain de se souvenir de la faute qu'il avait dû commettre. Car pour que le Seigneur des Ténèbres utilise sa précieuse voix, c'est qu'il avait fait quelque chose.

Il arriva enfin devant la salle où se trouvait le Maître. Il était seul, dans le couloir sombre qu'il avait parcouru au pas de charge.

Soudain la porte s'ouvrit pour laisser place à un puissant mage noir hurlant à pleins poumons.

_LUCIUUS ! Ramène ton c... Oh ! Eh bien entre vermisseau. Au lieu de faire attendre ta Ténébreuse Autorité... Tu sais ce que tu risques en t'attardant de la sorte. Continua notre puissant mégalomane avec un sourire mesquin.

Lucius emboîta le pas du Seigneur des Ténèbres pour se retrouver au centre d'une salle circulaire surchargées de lourdes tentures sombres. La pièce était éclairée par des chandeliers bas donnant à l'ensemble une ambiance étouffante et lugubre. Le but du Lord sans aucun doute. Le mage noir devait pourtant se douter qu'Il n'avait pas besoin d'en rajouter côté décoration pour que ses fidèles mangemorts tremblent devant Lui. Enfin... Si ça pouvait l'occuper... Pendant que le Maître arrangeait la déco, personne ne se faisait torturer. C'était toujours ça de gagné...

Malefoy hésitait à lever les yeux vers le Seigneur des Ténèbres, se demandant encore la raison de sa convocation.

Il entendit le froufrou des tissus et n'y tenant plus, la curiosité prenant le pas sur sa peur, il darda son regard vers l'obscur puissant qui avait profité de l'hésitation de son bras droit pour s'avachir sur le trône majestueux qui Lui servait de fauteuil lors des réunions.

Le mage noir était visiblement amusé par un Lucius Malefoy très mal à l'aise. Reprenant son sérieux, Il croisa le regard de son Mangemort.

_Vous allez m'accompagnez, Malefoy. Jeta le Lord tout à trac. Je sors.

Aucune sentence n'aurait pu mieux assommer le mangemort.

_ Mais... Maître... Vous... Vous...

_Oh, cesse donc de bégayer par pitié.

_ Vous ne vouliez pas passer inaperçu...Euh, il est évident que vous ne pouvez pas passer inaperçu. Bafouilla Lucius. Mais vous ne vouliez pas vous faire discret, le temps que Potter passe pour un fabulateur ? Se reprit Malefoy abasourdi.

_Si. Répondis le mage noir avec un geste dédaigneux de la main. Mais je n'ai plus rien à me mettre.

Il existait donc bien une sentence capable d'assommer Lucius plus que ne l'avait fait la précédente.

_ Euh.. Je... Pardon ?

Notre grand blond au regard gris habituellement impassible aurait été moins stupéfait si son Maître lui avait jeté un doloris. En présence de Lord Voldemort, on mérite toujours un doloris.

_Referme la bouche par les cornes de Merlin. On dirait que tu as le cerveau d'un veracrasse quand tu fais cette tête là.

Malefoy recouvra son air stoïque aussi vite que s'il venait de se brûler la main. Lord Voldemort se mit à parcourir la salle en grandes enjambées.

_Regarde ! S'exclama le mage noir. Mais regarde ! Je porte des loques ! Des loques ! Miteuses ! Comment puis-je étendre mon autorité si mon charisme est étouffé par ces haillons ?

Pendant que le mage noir continuait à fulminer, Lucius Malefoy obéi à son Maître et étudia la tenue du Seigneur des Ténèbres. Son regard glissa sur la soie noire finement brodée par des elfes de maison qui constituait la robe du Lord, ses chaussures, faites dans le meilleur cuir de dragon actuellement sur le marché, aurait fait pâlir plus d'un milliardaire.

_Ne vous inquiétez pas Maître, aucun vêtement ne saurait étouffer votre fabuleux charisme. Répondit très diplomatiquement Lucius Malefoy, masquant ses pensées.

Le Seigneur Noir qui avait continué à pester pendant le bref examen du mangemort, le fixa de ses étranges prunelles. Il parut réfléchir à ces paroles, cherchant sans doute un moyen de retourner cette affirmation contre lui. Mais bien fort serait celui qui saurait ce qui se passait dans la tête de Lord Voldemort.

_De toute façon, ça ne change rien. Ma décision est prise. Je sors et tu m'accompagnes.

OoOoOoOo

Le Seigneur des Ténèbres et Lucius Malefoy arrivèrent devant une boutique des Champs Elysées Magique à Paris, lieu de LA mode par excellence. D'un pas conquérant, le Seigneur des Ténèbres franchit la porte de la plus fameuse boutique de haute couture du monde sorcier.

À peine eurent ils passé le seuil qu'une jeune femme enjouée se précipita sur eux.

_Bonjour, bienvenue à L'Aiguille Dorée. Je m'appelle Justine, c'est moi qui vais m'occuper de vous aujourd'hui. Si vous avez le moindre problème ou la moindre question, je serais ravie de vous aider. Est-ce que vous recherchez quelque chose de particulier ?

En retrait du Lord, Malefoy observait la volubile vendeuse papillonner autour de son Maître. Elle était petite, les cheveux clairs attachés par un ruban, son innocence plaquée sur le visage. Elle était pleine d'entrain et beaucoup devait succomber à son charme. Le Maître des Ténèbres la regardait glacialement. Sans un mot Il se détourna et entrepris de regarder les magnifiques vêtements présents dans la boutique. Son comportement surpris tellement la jeune vendeuse que Lucius ne put s'empêcher de s'avancer vers elle pour lui chuchoter des explications.

_Ne vous inquiétez pas mon... Maître est toujours comme ça. Nous vous appellerons si nous avons besoin de votre aide.

Elle considéra le « serviteur » qui venait de lui adresser la parole. Une certaine aura se dégageait de sa personne, comme s'il lui faisait un immense honneur en s'adressant à elle. Et il était vêtu avec classe également, ce qui comptait beaucoup dans une boutique de haute couture.

_Oh... Bien... Les cabines d'essayages sont de ce côté. Lui indiqua t-elle d'un geste de la main vers l'escalier. À l'étage, précisa t-elle.

Lord Voldemort déambulait calmement entre des rangées de vêtements, tous plus sublimes les uns que les autres. Il avait l'air particulièrement intéressé par les couleurs sombres mais cela ne surpris guère Lucius. Ce qui l'étonna en revanche fut l'intérêt que le Seigneur des Ténèbres portait pour les broderies. Lorsque celui-ci passa son doigt sur l'une d'elle, la jeune vendeuse qui ne L'avait pas quitté du regard fondit sur le Mage Noir.

_Oh! Je vois que Monsieur a très bon goût ! Outre l'excellente qualité de l'étoffe, celle-ci a été brodée par les meilleurs magiciens couturiers. Ils sont capables de fabriquer un charme et de l'intégrer au vêtement. Le charme se déroule ainsi au fil de l'aiguille, dit-elle en caressant la soierie. Il faut beaucoup de temps et d'efforts pour parvenir à ce résultat et chaque broderie est unique.

Ce travail-là, insista Justine en désignant la broderie auquel le Maître paraissait s'intéresser, confère à celui qui le porte une véritable aura de gentillesse, les gens qui vous regardent se sentent tout de suite à l'aise.

Le Seigneur des Ténèbres lâcha l'étoffe comme si celle-ci avait été infectée par un nid de doxis. Il sortit sa baguette d'un mouvement fluide et commença fébrilement à mi-voix une incantation en fixant le bout de tissu d'un regard dégoûté, glacé, déterminé.

Lucius réussit à reconnaître quelques mots dans le marmonnement ininterrompu de son Maître et en conclu avec horreur que la malédiction qu'il était en train d'invoquer pourrait brûler non seulement le vêtement mais aurait aussi assez de puissance pour carboniser toute la boutique tant l'exécration de Lord Voldemort était palpable.

Lucius, téméraire, se précipite et se place entre le Mage Noir et le vêtement, rompant ainsi le contact visuel nécessaire au Seigneur des Ténèbres pour lâcher son dégoût sous la forme d'un puissant sort de magie noire.

Le marmonnement furieux s'interrompt. Le silence se fait oppressant.

Lord Voldemort, les yeux à demi fermés, remonte lentement son visage vers le mangemort qui s'est interposé entre l'objet de son courroux et Lui.

Lucius Malefoy, de plus en plus nerveux se balance d'un pied sur l'autre. Enfin, après une éternité, le regard du Seigneur de Ténèbres s'ancre dans celui de son bras droit. Et l'emprisonne.

Figé, Lucius Malefoy attend sa punition. Il aimerait bien se justifier, dire qu'il n'a fait ça que pour aider son Maître, Lui éviter une confrontation prématurée avec le Ministère de la Magie. Mais le regard prisonnier par les pupilles rouges de son Maître, les mots ne franchissent pas le barrage de ses lèvres. Il sait bien que quoi qu'il puisse dire de toute façon, il ne ferait qu'attiser la colère de son Maître et qu'il ne ferait qu'avancer l'heure de sa mort. Mort qui ne tarderait plus d'ailleurs, à en juger par le regard que lui jetait le Maître.

Malefoy est pétrifié, emprisonné dans son esprit par la volonté inébranlable de Lord Voldemort. Il reste là, alors que le bon sens lui souffle, lui hurle de fuir. Et quand bien même il aurait la possibilité de fuir, il ne le ferait pas. Il reste là, car son rôle est de protéger le Maître. Même de lui-même. Rogue le lui avait bien dit que sa fidélité causerait sa perte. Sur le moment, il n'avait pas comprit. Il reste là.

À côté du Lord, Justine est prise de tremblements incontrôlables, sans vraiment savoir pourquoi. Elle n'ose plus parler, remarque Lucius du coin de l'oeil et il se prend à être désolé pour elle. Elle n'a pas réellement mérité de mourir ici, maintenant.

Soudain, au contraire de la lenteur que le Lord avait prise pour le transpercer du regard, Il se détourna. Libérant Malefoy qui repris péniblement sa respiration en haletant sans pouvoir s'en empêcher. Il ne s'était pas rendu compte qu'il avait retenu sa respiration.

Le tas froissé et informe qui se trouvait derrière Lucius laissa échapper une mince volute de fumée. Mais personne ne remarqua ce détail. Trop occupés à se remettre de leurs émotions.

Justine s'ébroua en reprenant ses esprit et en se demandant pourquoi elle s'était sentie à la fois si glacé en ayant si chaud.

Le temps que Lucius et Justine se soient repris, Le Seigneur des Ténèbres avait recommencé à déambuler dans les allées du magasin.

Lucius Malefoy remis son masque de fierté et s'avança vers son Maître. Celui-ci se tourna vers lui dès qu'il fut à une distance suffisante, pour lui siffler, en colère que dans son intérêt, il ne devrait même pas penser à recommencer.

_ Je te pardonne pour cette fois, conclu t-il grand seigneur.

Malefoy s'inclina, soulagé, devant la générosité du Maître en le remerciant de sa clémence. Il n'avait pas faillit à sa tâche. Le Maître l'avait compris.

Maître qui s'était d'ailleurs détourné sans un regard de trop pour son serviteur. Il semblait encore fasciné par les vêtements brodés. Bien qu'Il se montre plus circonspect à présent.

_J'aimerais vraiment que tu te montres utile pour changer, Malefoy. Déclara sans ambages le Mage Noir. Premièrement, je veux que cette fille reste loin de moi. Son babillage incessant est énervant. Deuxièmement, prend ça et suit moi.

Le lord désigna plusieurs articles du doigt et repartit de sa démarche impérieuse vers les escaliers menant aux cabines d'essayage. D'un coup de baguette, Malefoy rassembla les vêtements désirés et le suivi.

Justine observa les vêtements s'envoler et se dirigea vers une partie de la boutique qui avait échappé au regard de Lord Voldemort.

OooOoOoOoOo

Cela faisait maintenant plus de deux heures que le Lord essayait vêtement sur vêtement sans pouvoir trouver LE vêtement qui mettrait en valeur, sa silhouette, son charisme, sa beauté transcendante, tout ce qui faisait qu'il était LA personne la plus importante du monde.

Les cabines d'essayages de la boutique de luxe avaient des proportions stupéfiantes, la décoration, l'éclairage, les miroirs, tout était fait pour que le client se sente à l'aise, détendu.

Pourtant à l'heure actuelle, l'agréable salle était quelque peu défigurée par les monstrueux tas de tissus disséminés dans toute la pièce. Des pièces de vêtements jonchaient le sol, tels des cadavres, abandonnés.

Lucius Malefoy jetait un regard inexpressif autour de lui en remarquant malgré lui combien le talent de son Maître était inné quand il s'agissait de rendre lugubre une pièce à l'origine agréable. Le Seigneur avait tiré le rideau pour passer une autre robe et Lucius en profitait pour faire un bilan rapide. Il était tout de même assez étonné de la capacité de son Maître à transformer une pièce en champ de bataille sanguinolent, pour un peu la chambre de Drago l'égalerait.

Lucius sortit sa baguette dans un vain espoir de ramener un peu d'ordre dans cette pièce, il avait l'impression que tous les articles de la boutiques avaient élus domicile dans l'alcôve. Il eut à peine le temps de créer un nouveau tas gigantesque afin de déblayer le sol et permettre ainsi aux occupants de la salle de marcher sans sautiller pour éviter de marcher sur les somptueux vêtements, débris de la funeste guerre que menait Lord Voldemort pour s'habiller avant que celui-ci ne sorte de la cabine. Il se planta devant le miroir. S'observa. Tourna sur lui-même. Pris une pause avantageuse. Et se déshabilla avec rage.

_C'est trop demandé que d'avoir des fringues POTABLES ? hurla le mage noir, au bord de la crise de nerf. La première n'avait pas assez de classe, la deuxième n'aurait pas réussit à avantager un moldu, la troisième était tout simplement horrible, la quatrième...

Lucius grinça des dents, s'Il décidait de faire l'inventaire de tout ce qu'Il avait essayé avec la liste de leur défaut, on était reparti pour encore deux bonnes heures. Lui aussi était au bord de la crise de nerf, cela faisait près de deux heures que le Lord essayait vêtement sur vêtement, trouvant toujours le petit défaut qui faisait qu'il ne convenait pas. Deux heures à regarder le Seigneur des Ténèbres rejeter dédaigneusement chaque étoffe, chaque merveilleuse et chatoyante soierie. Deux heures à supporter les crises du plus puissant mage noir, deux heures à essayer de ne pas mourir étouffé sous les piles de vêtements instables, deux heures à cacher ses pensées au Maître pour qu'Il ne découvre pas à quelle point cette entreprise lui semblait futile. Deux heures à rester stoïque alors qu'il bouillait intérieurement. Deux longues heures.

Un discret raclement de gorge le fit se retourner. La jeune vendeuse qui s'était éclipsée depuis le début des essayages, se tenait à l'entrée de l'alcôve. Elle tenait précautionneusement une petite pile de tissu.

Le Maître continuait d'égrener la liste des défauts des vêtements qu'il avait eu la bonté d'âme d'enfiler. Il ne s'était pas encore rendu compte de la présence de la jeune femme. Cela ne tarda pas cependant puisque qu'arrivé au point culminant de ses récriminations, il se tourna vers Lucius et aperçu à cette occasion Justine. Le mage noir interrompit son petit discours brusquement, en plein milieu d'une phrase. Torse nu, il se tourna face à elle. L'assassinant de ses yeux. Lucius, une fois n'est pas coutume, ne savait pas comment réagir. Le Maître lui avait expressément demandé de ne pas la laisser approcher mais ce n'était pas aussi simple. Elle pouvait tout de même être utile, la preuve : elle amenait de nouveaux vêtements. Un espoir fou empêchait Lucius de l'envoyer balader, peut être que les vêtements qu'elle apportait serait les bons, peut être.

Justine ouvrit la bouche timidement mais avant qu'elle n'ait pu prononcer un seul mot, Lucius la coupa. Il ne fallait pas tenter le diable non plus, la laisser parler serait la condamner à mort.

La plupart des gens qui la voit pour la première fois ne peuvent s'empêcher de la trouver charmante, d'une agréable fraîcheur, et surtout le premier qualificatif qui leur vient à l'esprit est « innocente ». Qualificatif renforcé par ses grands yeux marrons, ses cheveux clairs et son volubile babillage. Pourtant la jeune avait plus d'un tour dans son sac. Et cette fausse innocence en faisait partie. C'est ce qui lui permettait d'embobiner facilement les clients de l'Aiguille Dorée, qui ne peuvent s'empêcher de lui faire confiance. Quand elle avait accueilli les deux hommes, elle avait rapidement pris la mesure de celui qui « apparemment » désirait refaire sa garde-robe. Et elle avait également vite jaugé le blond qui l'accompagnait. Elle avait cerné ses goûts et s'était arrangée pour qu'il ne découvre que des articles sans intérêt. La plupart des clients qui viennent ici, désirent être accompagnés, complimentés, ce n'était pas le cas avec celui là. Il fallait donc un peu plus de subtilité pour arriver à ses fins.

Elle s'était éclipsée depuis plus de deux heures, attendant qu'il craque. C'est un client taciturne, vraiment peu loquace, quand elle l'avait entendu commencer à hurler elle n'avait pu empêcher un sourire triomphant de s'étaler sur son visage. Elle avait attrapé les vêtements qu'elle avait mis de côté et s'était dirigée vers leur alcôve en remettant son masque de timidité.

Comme prévu, avant de pouvoir émettre un son elle fut interrompue par l'homme blond. Elle retint un sourire quand elle perçut son exaspération mêlée d'espoir derrière son masque de froideur.

_C'est pour quoi ?

Elle fut légèrement peinée qu'il n'ait pas trouvé autre chose à dire. Elle répondit néanmoins de bonne grâce ayant le triomphe discret.

_Je voulais, pardonnez moi, je... bafouilla t-elle fort à propos. J'ai remarqué la prestance de Monsieur et...

Elle ne s'adressait qu'à Lucius mais ses mots étaient destinés au Lord, ainsi que son humilité mais également ses compliments.

_... et je me suis souvenue que nous possédions une pièce unique. Un véritable chef-d'oeuvre, le... le Patron m'a bien dit de ne le montrer qu'aux personnes qui auraient cette classe naturelle, vous savez, ce je-ne-sais-quoi qui... Alors voilà, je l'ai amené...

Lucius baissa les yeux sur la fine étoffe qu'elle portait délicatement dans les bras. Il sembla alors complètement subjugué. Le tissu était noir mais semblait piqueté d'étoiles. Des milliers de petits points dorés. Étrangement, il était impossible de réussir à en fixer une seule. Il brillait c'est vrai, mais plutôt faiblement, non, le fait est que les « étoiles » semblaient... bouger. Une voix le sortit de sa contemplation.

_Et bien Lucius, ne me fais pas attendre. Apporte moi cette merveille.

Il n'y avait que peu de raisons pour lesquelles le Maître l'aurait appelé par son prénom et cette liste se réduisait considérablement quand cela se produisait en public. Lucius les passa rapidement en revu pendant qu'il apportait respectueusement le précieux trésor au Seigneur des Ténèbres. La colère ? Non , cette lueur dans ses yeux, ça ne pouvait être ça. Quoi d'autre ? L'excitation ? Probable quand on sentait la texture ce joyau et le Seigneur avait seulement les yeux fixés sur l'étoffe. La joie ? La joie ? Par Merlin, il devait absolument arrêter de divaguer, cela devenait vital.

Doucement Lucius tendit la robe. C'est tout aussi délicatement que son Maître en prit possession. Comme si l'apparition de ce simple bout de tissu avait figé la scène, tout semblait se passer au ralenti. Lord Voldemort tira les rideaux pour enfiler paisiblement la robe fabuleuse. Lorsqu'Il ressortit, toujours avec cette lenteur fascinante, Il se détailla. Ses yeux avaient un éclat que Lucius lui voyait rarement. À des occasions comme la découverte d'un nouveau maléfice ou sort de magie noire ou quand l'espace de quelques heures, il avait tenu en son pouvoir le jeune Potter à l'issu du tournoi des Trois Sorciers.

La robe était longue mais ne traînait pas par terre, Lucius se rendit compte que les « broderies » bougeaient réellement et qu'il était vraiment difficile d'attacher son regard sur celle-ci aussi bien que sur le Maître. Un sentiment d'infinité se dégageait de tout cela, comme si l'Univers était représenté par cette robe.

_ Je la prends. Siffla Lord Voldemort, le regard plongé dans l'illimité de la robe.

_Oh Monsieur, je suis si heureuse qu'elle vous plaise ! Je vais immédiatement préparer de quoi l'emballer.

Et elle disparue dans un froissement de tissu, un sourire ravi aux lèvres.

_Lucius, prépare aussi les tenues quatre, dix-huit, vingt-six et cinquante trois. Je les prends aussi.

_Bien Maître.

OoOoOoOoO

Lord Voldemort et Lucius Malefoy apparurent dans un crac sonore dans la salle de réunion du QG du Maître. Malefoy portant plusieurs paquets assez encombrants s'agenouilla devant le trône pendant que le Seigneur des Ténèbres s'installait sur celui-ci.

Un sourire sadique étirait ses lèvres fines pendant qu'il observait son mangemort.

_Laisse les sacs ici. Un elfe de maison s'en chargera. Dit-il en direction de l'homme agenouillé. Et relève toi ! Continua t-il agacé. Je ne vois pas comment tu pourrais me remercier si tu restes prostré !

Lucius obéi à l'ordre avec une promptitude dû à l'habitude, tout en essayant de cacher sa surprise. Cherchant à toute vitesse pour quoi il pourrait le remercier sincèrement. Il en était à échafauder un mensonge convaincant quand le Lord repris la parole sans remarquer le trouble de son fidèle mangemort.

_Il est vrai que tu as fait preuve d'une excessive audace en prétendant t'opposer à ma volonté néanmoins je ne suis pas mécontent de toi, Lucius. Pour cette raison je vais me montrer clément et ne pas te punir pour cette faute.

_Merci Maître, je...

_... Mais que ceci ne se reproduise en aucun cas, est-ce clair ? Lorsque Lucius eut acquiescé brièvement, le Lord continua. Je ne serais pas aussi généreux la prochaine fois.

Le Seigneur des Ténèbres se leva et descendit de son « trône ». Lucius n'avait pas bougé et attendait patiemment lorsque Sa voix retentit dans son dos.

_Cela dit, je suis satisfait. Je n'ai pas totalement perdu mon temps, bien que ce ne soit pas grâce à toi... Maintenant débarrasse moi le plancher. Finit-il abruptement.

Lucius ne se le fit pas dire deux fois et se retrouva hors de la salle en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Rapidement il atteint le salon où se trouvait d'autres mangemorts à moitié avachi dans les fauteuils du salon. À son entrée, tout le monde se redressa brièvement avant de se détendre de nouveau en voyant que Malefoy ne venait as donner d'ordre. Un accord tacite faisait qu'en cette pièce, le rang que chacun possède en tant que mangemort ne comptait plus. Une pièce pour se détendre réellement en somme. Il faut avouer que de toute façon les rangs les plus bas n'ont accès à cette salle mais au moins les infimes différences dues aux préférences de la semaine du Seigneur des Ténèbres semblaient être oubliées. Même si nombres d'intrigues se nouaient et se dénouaient dans cette pièce pour qui était attentif. Attitude serpentarde dont on ne défaisait pas aisément.

Lucius se rapprocha de la cheminée, la fatigue se faisant sentir après cette longue journée riche en émotions. Alors qu'il attrapait la poudre de cheminée, pas assez concentré pour rentrer chez lui en transplanant en toute sécurité, l'homme assis dans le fauteuil derrière lui, l'interpella.

_ Alors Lucius, ta journée ?

_Fatiguante. Répondit-il sans se retourner.

_Fatiguante, vraiment ? J'espère pour toi que ce n'est pas ce que tu as dit au Maître, je doute qu'il goûte cette appréciation sachant que tu as passé la journée avec Lui.

Lucius bougea vivement et jeta un regard rempli d'éclairs à son interlocuteur.

_Quand j'aurais besoin de ton avis, je te le ferais savoir Severus.

Ni le regard ni le ton sur lequel lui parla Lucius n'impressionna Severus. Avec indifférence, il répondit.

_ Fais attention Lucius. Tu n'as pas que des amis dans cette pièce.

_ Et je suppose que tu en fais partie ?

Seul un haussement d'épaules lui répondis.

_ Au fait, comment va ce cher Dumbledore ces jours-ci ?

Un sourire narquois s'afficha sur le visage de Rogue.

_ Il a commandé une nouvelle caisse de suçacides et Dobby lui a offert une nouvelle paire de chaussettes. Non-assorties bien sûr. Le vieux fou les adore... Et le Maître ? Il est de bonne humeur ?

_ Je crois qu'on peut considérer que c'est le cas. Il a entièrement refait sa garde robe aujourd'hui.

Il est rare de pouvoir observer un quelconque signe d'étonnement dans l'attitude ou le visage de Severus Rogue et Lucius était assez content de son petit effet.

_Tu rigole ?

_ Comme toi et ta caisse de suçacide. Répondit-il ironiquement.

Il ne croyait qu'à moitié ce que lui confiait Rogue sur le directeur mais après cette journée il était enclin à croire les choses les plus invraisemblables. Severus se reprit bien qu'une lueur d'incertitude et d'interrogation brillent encore dans ses yeux. Changeant de sujet, pour leur bien à tous les deux, il continua poliment:

_ Comment vont Narcissa et Drago ?

Le regard de Lucius se fit légèrement plus lointain pendant qu'il réfléchissait à la réponse.

_ Ma femme va bien pour autant que je puisse en juger. Elle organise un gala dans quelques semaines et n'a plus un moment à consacrer à qui que ce soit qui ne soit de près ou de loin concerné par l'évènement. Mon fils est un adolescent rétif à qui on essaye de faire ranger sa chambre. J'imagine que cela veut dire qu'il va bien.

_ Alors tu as dû être heureux de passer ta journée loin du manoir. Je passerais voir mon filleul un de ces jours, je pourrais peut-être faire quelque chose à propos de sa chambre.

Un ricanement lui répondit.

_Si tu arrive à faire quelque chose à propos de la chambre de mon fils, je t'offre notre meilleure elfe de maison.

_ Je m'en souviendrais. Répondit-il avec un sourire. À bientôt Lucius.

Après un digne hochement de la tête en direction de Severus, Lucius rejoignit enfin la cheminée et après avoir distinctement énoncé l'adresse de son manoir, se retrouva dans son bureau.

La pièce était sombre, un bureau trônait fièrement au centre de la pièce couvert par divers parchemins. Des étagères de belles tailles étaient remplies de dossiers et de grimoires. Lucius se dirigea directement vers le petit meuble au fond de la pièce sur lequel était posé une carafe et un verre.

Lucius se sentit bien mieux dès qu'il eut dans les mains un verre rempli de whisky pur-feu. Il s'assit avec lassitude dans un fauteuil confortable proche de la source de chaleur de la pièce. Il ferma les yeux en sirotant sa boisson. Le feu de cheminée craquait dans l'âtre, rassurant. Une douce torpeur le gagna lentement. Le doux son du feu de bois le berçant, et un autre son régulier qui emplit peu à peu son rêve éveillé. Son qui devint de plus en plus fort, et sembla tambouriner allègrement contre ses tempes. Un son sec et clair. Qui se rapproche. Le bruit devient insupportable, il n'est plus seulement dans ses pensées, il envahit la pièce. Soudain le bruit n'existe plus. Lucius ouvrit les yeux brusquement. Pour faire face à une situation apocalyptique. De son point de vu, du moins. Narcissa se tenait devant lui, les mains sur les hanches, un regard empli de fureur. Celui de Lucius se teinta de terreur. Il se redressa lentement dans son fauteuil, sans geste brusque.

_ Cissa. Chérie. Que t'arrive t-il ? Demanda t-il inquiet, ayant perdu son éloquence.

_ Ce qui m'arrive ? répondit-elle d'un ton polaire. Ce qui m'arrive ? Sa voix monta de plusieurs octaves. Mais rien ! Absolument rien !

Narcissa fulminait maintenant. Jetant des regards dégoûtés à son mari. Semblant presque s'étouffer avec des mots qui refusaient de sortir.

_ Mais Cissa, quel est le problème alors ? Lucius a rarement regretté ses paroles mais deux minutes plus tard, il aurait préféré se couper la langue plutôt que de reposer cette question.

_ Il n'y a pas de problème ! Ce n'est pas comme si mon mari avait passé toute la journée dehors avec le Seigneur des Ténèbres et qu'il n'avait pas daigné me prévenir ! Ce n'est pas comme si je m'étais inquiétée toute la journée à imaginer tous les scénarios possibles en particulier les plus dangereux ! Non pas du tout ! Ce n'est pas comme si j'avais été incapable de me concentrer alors que tu te la coulais douce ! Tu n'es même pas venu me prévenir que tu étais rentré ! C'est un elfe de maison qui est venu me le dire !

Narcissa reprit enfin son souffle et Lucius profita de cette pause pour tenter de la calmer.

_ Cissa chérie, ce n'était pas ma faute, tout de même. Je t'aurais bien prévenue, tu le sais, mais j'ai été convoqué si soudainement. Et ensuite je ne pouvais tout simplement pas, j'étais avec le Seigneur des Ténèbres comme tu l'as si bien dit. Dit-il comme si il voulait apaiser un jeune enfant qui faisait un caprice. Et je ne prenais pas de bon temps, le maître voulait refaire sa garde-robe.

Mots n'eut pu être plus inappropriés pour calmer la fureur de sa femme.

_ Garde-robe ? Pas de bon temps ? Pas ta faute ? Garde-robe ? Vas tu me faire le plaisir de me dire tu étais ?

_ À Paris, l'Aiguille Dorée. Mais je te jure chérie, je...

_ Tu étais à l'Aiguille Dorée ? Et tu ne m'a rien rapporté ? Mais qu'est ce que j'ai fait pour mériter un mari qui se souci aussi peu de moi ? Et ton fils qui m'a encore fait tourner en bourrique ! Il est bien de toi, ça c'est sûr ! Tout ça c'est ta faute ! Merlin ! Si j'avais su, je ne t'aurais pas épousé !

Et avant qu'un Lucius ébahit puisse reprendre ses esprits, Narcissa était partie en claquant la porte derrière elle.

Le regard fixé sur la porte derrière laquelle sa femme avait disparut, Lucius se dit que vraiment la journée avait été longue.