Bonjour à tous !
Après des années sans vraiment écrire, je m'attaque à ce fandom afin de me remettre le pied à l'étrier. Cette fic de passe plusieurs moi après la saison 4, en espérant que vous aimerez. Quoi qu'il en soit, n'hésitez pas à partager vos impressions ! Bonne lecture !
Pacte avec le Diable
Prologue
Ses souvenirs étaient flous, Tess ne se souvenait pas de grand chose …
Après plusieurs semaines à écumer les auditions dans l'espoir de décrocher le rôle de sa vie, elle avait finalement revu ses ambitions à la baisse, et elle avait été embauchée dans un bar louche qui engageait à tour de bras. Des videurs, des serveuses, des barmans ou des danseuses. Tous susceptibles de s'effeuiller pour le bon vouloir des clients de passage ou des habitués. Retirer son bustier lui offrait directement dix dollars, sa jupe en valait bien vingt, et ses sous-vêtements pouvaient faire décoller la note. Pour quatre-vingt dollars, la demoiselle s'offrait ainsi nue à la vue de celui ou celle qui acceptait de lâcher ces quelques billets, et le bougre pouvait même s'octroyer le droit de toucher. Rien de très poussé toutefois – l'endroit n'était pas une maison close et interdisait plus ou moins la prostitution en son sein – mais les caresses et autres consœurs étaient tolérées et permettaient même d'arrondir des fins de mois difficiles.
Tess n'était pas une pute, mais il fallait toutefois bien avouer qu'elle n'en était pas loin …
En un soir, elle pouvait ainsi engranger cent voire deux cent dollars, et c'était à ce moment là que la demoiselle avait déconné. L'argent, la fête , l'alcool, la drogue … autant de vices qui étaient venus s'ajouter à ses mœurs déjà légères, et elle avait commencé à aimer ça. La Cité des Anges pourvoyait à tous ses désirs, et Tess se fourvoyait dans tous ces plaisirs. Un par un, ou tous en même temps. Les limites tombaient petit à petit, et elle n'était pas femme à vouloir rebâtir ces murs qu'elle détruisait elle-même, pas lorsqu'elle prenait son pied à ce point !
Jusqu'à ce soir en tout cas. Parce que ce soir, elle avait tué un homme.
Ivre au volant de la voiture de son mec du moment, elle avait débuté un rodéo sauvage pour éviter la bagnole de flics qui la poursuivait, et sa course chancelante s'était terminée dans un pressing. Mais littéralement dans un pressing. Lancé à tombeau ouvert, le véhicule avait fait voler la vitrine en éclat – fauchant et tuant au passage le SDF qui squattait là – puis il était venu s'encastrer dans le mur qui séparait la réception de la salle de lavage principale. Pluie de briques qui avait tout détruit sur son passage, le choc défonçant le crâne de Tess pour la laissait à peine vivante et couverte de sang, le tout dans le hurlement strident de l'airbag sans doute défectueux. Le contrôle technique était un luxe qu'elle avait refusé de s'offrir pour lui préférer deux bouteilles de tequila, de cet alcool qui était venu lui vicier le sang, lui vriller le cerveau, la crasher contre un mur. Dommage pour elle, dommage pour le clodo dont la dépouille n'avait plus rien d'humaine après un tel choc.
Et depuis, la demoiselle errait, sans but ni objectif. Elle errait dans un paysage noir, aride et froid, une gigantesque lande désertique semblable à un désert plongé dans la nuit. Vaste étendue de caillasses d'où émergeait parfois un rocher, parfois un arbre mort et tordu, mais jamais nulle trace de vie. Depuis des heures et des heures qu'elle était là, elle n'avait encore croisé personne, et à bien y regarder, même son corps lui semblait étrange. Inconstant. Flou. Presque intangible. Et là, juste là, l'angoisse qui lui étreignait la poitrine et laissait place à une sensation de malaise, d'oppression, de peur.
« Il y a quelqu'un ?! »
Même sa voix semblait étouffée tandis qu'elle criait sa question pour la quarantième fois au moins, mais personne ne paraissait vouloir lui répondre. Rien que le silence que rien ne venait troubler. Pas même un souffle de vent pour agiter cette plaine insipide. Glauque. Mortuaire …
« S'il-vous-plaît ! »
Le calme lui claquait les tympans, autant que ses dents qui venaient s'entrechoquer nerveusement à cause du stress. Elle n'avait absolument aucune idée de ce qui était en train de se passer, mais elle aurait donné tout son salaire gagné à la cambrure de ses reins pour que quelqu'un daignât lui répondre. Daignât lui …
« S'il me plaît, hein … ? »
Surprise, sursaut. Tess ne s'y attendait tellement plus qu'elle effectua un véritable saut de carpe, se retournant pour découvrir une silhouette qui traînait des pieds dans sa direction. Un homme grand et fin, cheveux sombres en bataille, visage mangé par une barbe mal entretenue depuis plusieurs jours déjà. Si son costume trois pièces avait sans doute été élégant dans une autre vie, là le tissu affichait de nombreux accrocs et déchirures, et il flottait littéralement autour d'un corps bien trop maigre pour lui. Créature émaciée aux prunelles presque luisantes, tandis que sa main droite et décharnée tenait une bouteille dont il porta le goulot à ses lèvres craquelées pour avaler une longue gorgée … et tousser furieusement sous le goût infecte. L'homme paraissait malade.
« Auriez-vous envie de me faire plaisir, mademoiselle ? »
Même sa voix était désagréable – rauque et sèche – et le sourire qui ne tarda pas à apparaître n'avait rien de bien engageant non plus. Rictus menaçant et un peu fou, qui poussa Tess à reculer tandis qu'elle fixait cet inconnu avec un mélange détonnant de méfiance et de crainte.
« Je … où on est … ? »
Silence. Gorgée. Toux douloureuse.
Une bague portée au majeur vint tinter contre le verre de la bouteille dans un son désagréable qui lui rappela aussitôt le hululement de l'airbag défectueux, et un long frisson agita la jeune femme qui reculait encore. Qui reculait toujours. Agressée par ce silence ignoble qui dévorait ses nerfs. Elle voulait savoir. Elle devait savoir. Et après un soupir heurté, elle s'apprêtait à reprendre la parole pour réitérer sa question, mais elle n'eut pas l'occasion d'ouvrir la bouche qu'il l'interrompait déjà.
« Vous êtes aux Portes de l'Enfer, dans ce qu'on appelle vulgairement la Lande des Charognards. C'est ici qu'errent les âmes en attente de la mort … ou du retour à leur corps, même si c'est plus rare.
- En attente de la mort ? Je ne comprends pas … je …
- Dans le coma, si vous préférez. »
Aucune pincette de prise, l'inconnu venait de préciser ses explications de sa voix monocorde et fatiguée, et il s'octroya une nouvelle gorgée comme pour se redonner des forces après ces quelques mots. Ses yeux cernés détaillant à présent Tess qui s'était figée dans une perception douloureuse de la réalité : elle était dans le coma, et elle ne le quitterait sans doute que pour terminer son voyage en Enfer. Mon Dieu mais … pourquoi … pourquoi ?! Pourquoi elle ?! Pourquoi si jeune ?! Pourquoi ?! Pourquoi ?! POURQUOI ?!
Telle une voiture coincée dans les embouteillages, son esprit semblait avoir déraillé tandis que les larmes coulaient le long de ses joues, et un lourd sanglot s'échappa bientôt de sa gorge pour augurer le début des pleurs. Choqués. Désespérés.
« Ah non, vous allez pas vous mettre à pleurer en plus ! »
Cette fois-ci, c'était un ordre vif qui venait de claquer dans le silence, et Tess en avait arrêté de respirer sous le coup de la peur. N'émettant plus aucun bruit malgré sa respiration sifflante.
« J'ai dit que c'était rare, pas que ça n'arrivait jamais, et je pourrais peut-être vous aider à sortir de votre coma si tant est que vous acceptiez de me rendre un petit service. Une sorte de pacte avec le Diable, si vous préférez … »
Un pacte avec le Diable ? Était-ce donc le Diable en personne qu'elle avait devant elle ? Cet homme maigre et maladif était-il le Maître des Enfers, ou un simple démon s'amusant à la torturer pour lui faire expier ses pêchés ? La demoiselle était si choquée qu'elle n'en savait strictement rien, et qu'elle ne parvenait même plus à réfléchir à vrai dire. Statue d'angoisse personnifiée qui se recroquevilla sur elle-même lorsque son interlocuteur se racla la gorge comme pour l'inviter à répondre à sa proposition.
« Qu'est-ce que je devrais faire pour ça ?
- Oh pas grand chose mademoiselle, pas grand chose … »
Posant la bouteille à ses pieds, l'homme s'approcha alors afin de combler les quelques mètres qui les séparaient, et il retira doucement sa chevalière afin de la déposer dans la paume de Tess. Ses doigts s'emparant des siens non sans une certaine délicatesse, afin de refermer son poing autour de ce bijou.
« Vous allez devoir porter cette bague à quelqu'un, alors je vous conseille d'y veiller comme sur la prunelle de vos yeux si vous ne voulez pas qu'il vous arrive malheur. »
Face à cette menace plus que claire, Tess referma plus fermement sa poigne sur l'anneau froid, hochant bientôt la tête afin de signifier qu'elle attendait le nom du destinataire de ce cadeau.
« Chloé Decker. Remettez-lui simplement ceci et dites-lui que je pense à elle. Elle comprendra. »
Oh oui, le Lieutenant comprendrait. Elle reconnaîtrait sa chevalière et elle comprendrait.
Elle comprendrait que Lucifer était en train de crever d'Amour pour elle aux Enfers.