Voici la première partie d'un très long Bixanna. J'espère que vous l'apprécierez, j'ai pris du temps à l'écrire et à le mettre en place. Bonne lecture !


Evergreen claqua son talon sur le sol et cessa brusquement de se déplacer. La jeune femme réajusta ses lunettes au bout de son nez avant de jeter un coup d'œil circulaire à l'endroit où elle se trouvait.

Le quai de gare était plein à craquer, elle étouffait, collée contre toute cette foule. La masse grouillante était comme un flot d'humains qui s'écoulait dans la gare. Tous voulaient monter dans le train qui attendait patiemment l'embarquement des passagers, et tous semblaient se presser contre elle pour lui faire perdre l'équilibre.

La jeune femme venait tout juste d'arriver ici et, pourtant, elle suffoquait, inspirant des bouffés irrégulières d'air moite et chaud. Tout cet amas de personnes qui se frottaient les unes contre les autres lui donnaient le tournis et, rapidement, elle ressentit le besoin de sortir son éventail de la poche de son manteau, afin de s'éclaircir les idées. Alors qu'elle se ventilait, ses yeux de rapace, eux, cherchaient toujours dans cette foule grouillante.

Trouvés !

Ils étaient immobiles à travers la fumée qu'exhalaient le train et la masse humaine. Adossés contre un haut pilier de pierres épaisses, les hommes semblaient parler en observant attentivement la foule.
Evergreen se précipita dans la direction de ses coéquipiers, d'un mouvement brusque et impatient, entraînant valise et juron dans son sillage. Un large sourire pointait sur ses lèvres peintes de rose afin de saluer ses partenaires.

« Quelqu'un a-t-il pris la peine de réveiller Luxus ? »

Bixlow et Freed conversaient activement, et la jeune femme déboula si rapidement dans leur échange qu'elle coupa l'épéiste dans une phrase. Un peu perturbé, le vert prit quelques secondes à reconnaître l'intruse avant de fermer davantage son visage déjà si sérieux.

« Oui, moi, mais il est passé à la guilde pour régler quelques détails... » Il fit une pause. « Ever... Es-tu prête ? »

L'intéressée souffla un grand coup.

« Bien sûr que oui. » Répondit-elle agacée. « Tu sais autant que moi que je ferrai tout pour Luxus... Même ce genre de chose. »

D'un mouvement de tête, elle envoya sa longue chevelure sur ses épaules en remontant une nouvelle fois ses lunettes.

« Et toi Bixlow ? »

L'homme ricana en tirant la langue mais n'ajouta rien. Evergreen prit cela pour un oui.


L'air glacial de la montagne glissait sur le mont immaculé. Ses pas s'enfonçaient dans l'épaisse couche de neige et les cristaux s'agglutinaient autour de ses grosses bottes fourrées.

Lissana était fatiguée. Epuisée.

« Mirajane... Je... J'ai besoin d'une... » Tenta-t-elle de dire, sans parvenir à finir sa phrase.

Seul son souffle saccadé et opaque s'échappait de sa bouche, et bien qu'elle se plaignait à sa sœur, celle-ci n'était pas en meilleur état qu'elle. Certes, Mirajane semblait un peu moins atteinte par l'effort, cependant, Lissana voyait clairement ses membres trembler sous les assauts du vent glacial que la vallée faisait siffler contre leurs chairs. Les lèvres gercées par le froid et les joues rouges, la plus jeune tendit sa main gantée vers celle de sa sœur dans l'espoir d'un peu de courage et de chaleur. Son aînée lui répondit d'un sourire affable avant de pointer du regard un point un peu plus haut sur la montagne.

« On y est presque. » Souffla-t-elle.

Une longue ligne d'humains était tracée sur le flanc du mont, déambulant à un rythme lent et fatigué. Avançant à la queue-le-le, les mages de Fairy Tail grimpaient jusqu'au sommet de cette montagne. Cela faisant une bonne demi heure qu'ils se traînaient sur cette pente froide dans le seul but d'atteindre un chalet accroché sur le sommet de cet obstacle.

Ils pouvaient remercier Elza pour cette torture ! Sans elle, ils seraient tous tranquillement chez eux, installés devant le lacrimavision, un chocolat brûlant entre les mains, au chaud. Mais non, à l'occasion de l'hiver, la rousse avait dégoté à bas coût par on-ne-savait-quel-moyen – d'ailleurs personne ne voulait vraiment savoir – des chalets en montagne. Ainsi, elle avait convié l'ensemble de la guilde à venir prendre quelques jours de repos dans l'air de la montagne (pour tout dire, elle s'était montrée si persuasive que personne n'avait voulu refuser).

Lissana inspira une grande bouffée froide qui eut le mérite de lui brûler le nez, avant de se remettre à marcher, les bras serrés contre les flancs, la main glissé dans celle de sa soeur. Son sac lui pesait affreusement, son dos était malmené par la masse qu'elle avait placée dessus. Heureusement, il ne neigeait pas encore, même si les gros nuages qui s'agrippaient aux sommets alentours ne lui disaient rien qui vaille.

Ce paysage n'était que pics gris sous neige blanche, quelques fois parsemé de sapins parés d'un vert forêt qui détonnait particulièrement sur ce paysage monochromatique. La vue de l'endroit était globalement étrange, mais gardait une certaine beauté dans ce côté totalement naturel et intouché par l'homme.

La jeune immaculée resserra son écharpe autour de sa gorge, les poumons en feu. Elle avait l'impression que chacun de ses pas était minuscule, qu'elle était incroyablement loin de leur but. La main toujours coincée dans celle de sa sœur, une pression exercée contre sa paume l'invita à relever la tête.

Les mages arrivaient dans une forêt de conifères. Lissana laissa échapper un sourire ravi à l'idée de pouvoir se mettre à l'abri du vent qui s'immisçait entre les différentes couches de vêtements qu'elle portait. La jeune femme serra brièvement la main de Mirajane avant de continuer avec espoir cette ascension à flanc de montagne.

Alors que la troupe évoluait sous les sapins depuis de longues minutes, la mage transformiste commençait à se demander s'ils ne s'étaient pas perdus. Elza menait l'expédition, et bien qu'elle ne doute pas des bonnes intentions de la rousse, elle avait une certaine réserve quant à la qualité de son sens de l'orientation. Après tout, elle était humaine et elle pouvait se tromper.

« On est presque arrivé, plus vite derrière ! On va finir par geler si vous continuez à traîner ! » tonna Elza de sa voix autoritaire.

Lissana traînait la patte malgré les ordres. Elle savait que derrière elle se trouvait encore Droy, Natsu, Happy et Lucy – celle-ci aidait le dragon à avancer puisqu'il était encore et toujours mal suite au voyage en train. Elle était fatiguée et frigorifiée, elle avait envie de tout sauf de se presser – surtout si elle n'avait pas l'assurance de trouver un endroit chaud suite à la traversée de ce bois.

Des sapins, encore des sapins et de la neige froide. Et cette interminable montée dont Lissana ne voyait pas le bout. Elle semblait prête à tout lâcher tant elle était éreintée...

Jusqu'à ce que des exclamations enjouées lui firent soudainement relever la tête, alors qu'elle sentait sa sœur s'agiter à ses côtés.

« On est arrivé ! » cria l'impétueuse rousse.

Soudainement revigorée d'un espoir nouveau, Lissana pressa un peu le pas dans cette dernière montée pour arriver au sommet de cette si haute montagne. En tirant presque sur la main de sa sœur, elle dépassa la lisière des arbres et, enfin, arriva sur un grand plateau, là où se nichaient leurs habitations temporaires.

Des petits chalets en bois étaient plantés sur cette étendue blanche et sans défaut. Quelques sapins poussaient ici et là, perçant la neige entre les maisonnées. Et une allée sinueuse de pierre ocre serpentait entre les différentes habitations. Lissana trouva le cadre charmant et laissa un large sourire satisfait fendre ses lèvres. Enfin, leur calvaire était terminé ! Son regard se promena aux alentours et elle se rendit compte que l'endroit offrait une vue imprenable sur le reste de la vallée. La pointe des sapins lui cachait Shirotsume, la ville par laquelle ils étaient arrivés en train, mais ce simple désagrément n'enlevait rien à la féerie du panorama.

« Bonjour à tous. » Déclara une voix dans son dos, ce qui obligea Lissana à se retourner.

Une petite femme au visage plié par le temps, blottie dans un épais manteau de fourrure, faisait face à la troupe. Elle souriait aux mages avec beaucoup de bonhomie, les yeux brillants de chaleur.

« Je suis Rwanda, c'est un bonheur de vous accueillir ici ! » Annonça-t-elle sans se départir de son air affable. « Vous pouvez aller chercher vos clés par-là ! » Elle désigna le tout premier cabanon. « Le repas va être servi dans dix minutes dans le grand bâtiment juste ici ! » Finit-elle en s'effaçant du passage pour laisser avancer les plus affamés.

Lissana allait s'avancer pour prendre ses clés lorsque son frère, Elfman, posa sa grosse main sur son épaule en lui disant :

« Allez manger, je m'occupe des clés. Un homme doit prendre ses responsabilités ! »

Il la débarrassa des affaires qui encombraient son dos et celui de leur sœur avant de rejoindre ce qui semblait être l'accueil, les lourds sacs à bout de bras.
Mirajane tira donc sa cadette vers la plus grande bâtisse du petit village, indiqué par un panneau « Restaurant », en suivant la troupe affamée qui allait dans la même direction.


Les sœurs s'étaient installées au bout de la grande table qui occupait toute la salle et discutaient activement avec Lucy et Levy, à leurs côtés. Elles étaient ici depuis un long moment, et les femmes étaient si passionnées par leur papotage qu'elles ne voyaient pas la salle se vider lentement. Bientôt, ils ne restèrent qu'elles et Elfman, qui venait tout juste de les rejoindre après avoir posé leurs affaires dans le chalet que la fratrie allait partager.

Le dialogue se faisait sur les sources chaudes qui s'écoulaient contre l'autre flanc de la montagne, où divers bassins s'étalaient sur plusieurs niveaux.

« Nous pouvons y aller cet après-midi, non ? » s'écria Levy, toute excitée. « Il paraît que les changements de températures comme ça sont excellents pour la santé ! J'ai hâte d'y être !
- Je crains que ce ne soit pas possible mon enfant.
» Déclara la gérante du chalet alors qu'elle déposait un thé devant Lucy. « Une petite tempête se prépare cette après-midi, s'aventurer dehors avec ce temps est très dangereux. Il va falloir que vous restiez à l'intérieur. »

Levy accueillit ces informations d'une moue déçue et d'un soupir contrit. Alors qu'elle allait annoncer la remise à plus tard de son projet elle fut coupée par Luxus qui se laissait lourdement tomber à son côté, sur le banc. Lissana le regarda s'installer face à son aînée d'un air ébahi. Elle était si stupéfaite de voir Luxus ici qu'elle ne comprit pas tout de suite que le tapotement incessant sur son épaule depuis quelques secondes était simplement Bixlow qui souhaitait qu'elle se pousse, afin qu'il dispose d'un siège. Elle rougit de son étourderie avant de se décaler pour qu'il s'installe. Evergreen s'assit face à l'homme masqué, non sans donner un léger coup de tête pour dérouler sa chevelure brillante le long de son échine et Freed arriva ensuite, silencieux, enroulé dans un épais manteau noir. L'équipe Raijin au grand complet, un calme étrange engourdi les autres occupants.

Le silence qui accueillait cette partie de la tablée depuis plusieurs secondes tira Mirajane de ses rêveries et la poussa à relever la tête. La vision de Luxus face à elle la surprit tant qu'elle laissa retomber sa cuillère dans sa tasse de café.

Luxus ne lui parlait plus depuis quelques semaines déjà ; depuis le jour où elle avait tenté de le mettre en couple avec Fried à grand renfort d'alcool, de sous-entendus et d'une chambre d'hôtel bon marché. Bien entendu, cela n'avait pas marché, et lorsque le mage électrique s'était rendu compte du complot dressé contre lui, il s'était mis à bouder. L'incident aurait pu en rester là, si Mirajane n'avait pas pris et transmis des photos des deux hommes alcoolisés au Sorcerer Magsine. Face à une vie sexuelle factice totalement dévoilée, Luxus s'était muré dans un profond mutisme à l'égard de la principale coupable.
Et maintenant, ils se regardaient les yeux dans les yeux, en chien de faïence. Mirajane ne tenta aucune parole, pas plus que Luxus ; ils restèrent simplement à se fixer méchamment dans une atmosphère tendue pendant de longues minutes.

Au bout d'un temps excessivement long et froid, Levy se leva lentement en adressant un signe de tête aux attablés :

« Je crois que je vais rentrer avant que la tempête ne me barre le chemin... Tu... Tu viens Lucy ?
- Oui, tout de suite.
» Répondit la concernée en se redressant tel un ressort.

Les jeunes femmes quittèrent la salle d'un pas précipité sans échanger aucun autre mot, fuyant rapidement cette atmosphère peu amène. Lissana se sentait de plus en plus mal à l'aise dans cette salle silencieuse où seuls les ricanements grinçants de la bande à Fufu se faisaient entendre. Pourquoi Levy et Lucy ne l'avaient-elles pas invité à se joindre à elles ?
L'immaculée jeta un coup d'œil rapide à Elfman, au-dessus du crâne de sa sœur. L'homme observait leur aînée, la mine affolée, alors que Mirajane était toujours immobile, circonspecte quant à la façon de réagir. Ainsi, elle ne dit rien, laissant cette atmosphère froide telle qu'elle était.

« Tiens, le fiancé d'Ever est ici ! Je ne t'avais pas vu ! » S'enchanta Bixlow sur un ton faussement surpris, en se penchant sur la table pour fixer le cadet des Strauss.

La pression baissa d'un cran dans le rang des spectateurs alors que la figure d'Evergreen blêmissait. Elfman s'était figé, le visage attaqué par un afflux de sang important.

« Fiancé ! Fiancé ! Fiancé ! Fiancé ! Fiancé ! » Reprirent les poupées en chœur.

Un cri de rage s'échappa de la gorge d'Evergreen alors qu'elle lançait son éventail au visage du blagueur ; l'arme fut contrée par Fofo en un tour de main et l'objet retomba sur la table sous le rire railleur du marionnettiste.

« Combien de fois devrai-je te dire que je ne veux rien avoir à faire avec Elfman ? » S'écria la fée, les joues finalement cramoisies, en tapant du poing contre la table. « Tu m'épuises ! »

L'homme tira la langue vers sa camarade en croisant ses bras contre son torse.

Evergreen semblait prête à fondre sur lui. Elle le toisait d'un regard haineux alors qu'il lui servait un large sourire satisfait. La châtaigne avait envie de lui griffer cet air satisfait qui perçait sur son visage. Elle n'aimait pas Elfman, nom de Dieu ! Finalement, après de longues secondes à tergiverser pour savoir si oui ou non elle allait pouvoir le frapper, la prétendante au titre de Titania se leva d'un bond en lui hurlant :

« Je te hais ! »

Puis elle partit d'une démarche sèche et militaire, les joues incendiées. Le rire nasillard de Bixlow et de ses poupées poursuivit la fée jusqu'à la porte.

Ainsi, un calme glacial écrasa l'assemblée. Les deux mages de rang S se toisaient méchamment et le reste des membres présents ne faisait que frémir d'appréhension et espérer en silence. Lissana jetait régulièrement des coups d'œil inquiets à sa sœur. Elle et Luxus étaient toujours en face l'un de l'autre, immobiles et graves. Leurs mines sombres n'inspiraient rien de bon à Lissana, si bien qu'elle ne souhait plus qu'une chose : s'en aller aussi rapidement que possible.

« On ferrai bien d'aller au chalet, non ? » Hasarda Elfman qui semblait sur la même longueur d'onde que Lissana. « On y va, Mirajane ?
- Mirajane reste ici.
» Siffla Luxus sans se détacher des iris cyans de la demoiselle.

Les sourcils de l'immaculée se froncèrent indubitablement. Elle était prête à jeter une réplique cinglante au visage du blond lorsque Lissana posa sa main sur son avant-bras dans le but de l'apaiser. Lissana dit :

« Elfman, défait nos valises, s'il te plaît. On va rester ici, on arrive très bientôt... » Devant la mine déconfite de son frère, la plus jeune ajouta : « On en aura pas pour longtemps. Dépêche toi. »

Après un long regard appuyé de la part de sa cadette, l'homme se souleva lourdement et sortit de la salle de son pas lourd et lent. La jeune femme préférait qu'Elfman s'occupe plutôt qu'il assiste à cette réunion à l'ambiance tendue et maussade. Elle espérait ainsi qu'elle puisse trouver une solution rapide et facile afin de pouvoir s'éclipser. Lissana souffla discrètement, il fallait que cette affaire soit rapidement réglée et qu'elles puissent rentrer sans problème. La cadette devait absolument trouver quelque chose.

« Tu étais lente, Strauss. »

Silence. Finalement, la jeune mage n'avait peut-être pas à provoquer la discussion entre eux deux.

Mirajane sembla surprise une seconde, avant de comprendre qu'il parlait de l'ascension qui les avait mené ici. Piquée au vif, elle répondit sans trop tarder :

« Je soutenais ma famille, Dreyer. Chose que tu ne sembles pas comprendre. »

L'homme pinça les lèvres.

« Au contraire Mirajane, je comprends très bien la place que tu accordes à ta famille... Toi, par contre, tu ne comprends pas la place que j'accorde à mes coéquipiers !
- Tu parles encore de cette vieille histoire avec Fried ?
»

La mâchoire contractée, il siffla rapidement :

« Vieille histoire ? Tu as tenté de... » Ses poings se resserrèrent. « Fried est mon coéquipier, au même titre que Bixlow et Evergreen. Ce que tu as tenté est dégradant. »

Mirajane ne dit rien. Elle fixa simplement Luxus d'un regard désabusé.

« Excuse toi. »

La jeune femme continua à se murer dans un mutisme complet, avec l'intention délibérée de ne pas répondre.

« Mirajane... » Grogna Luxus.

Le blond semblait au bord de la crise de rage. Si l'aînée des Strauss continuait ainsi, il était certain qu'un combat allait commencer. Lissana regardait avec effroi l'ensemble de la tablée, qui ne semblait pas réagir à l'affrontement qui se préparait à mesure que le silence s'épaississait. Fried regardait face à lui sans qu'aucune expression n'apparaisse à l'intérieur de ses traits sérieux. Bixlow, quant à lui, regardait la table avec un sourire moqueur incurvé au coin des lèvres.

« Je ne m'excuserai pas. Je ne regrette rien de mes petites manipulations. »

Lissana crût que Luxus allait gifler sa sœur. Et il était bien parti pour, si Fried ne l'avait pas arrêté en posant une main calme sur son avant-bras. Les traits crispés, Luxus toisa son coéquipier d'un air peu amène. Le mage runique lui sourit doucement en se levant.

« Je suis désolé Luxus, mais c'est pour le bien de tout le monde. » Déclara l'escrimeur. « Bixlow, s'il te plaît. »

L'intéressé sourit de toutes ses dents en se redressant. Il adressa un bref « Pardon » à Luxus et se leva. Puis, subitement et sans que personne ne le comprenne vraiment, il attrapa le bras de Lissana avant de la tirer vers lui. La jeune femme poussa un hoquet de surprise alors qu'elle était jetée sur l'épaule du mage et que le monde lui apparut retourné.

« Bixlow ? Qu'est-ce que tu... » Suffoqua Lissana. « Bixlow ! »

Il partait déjà d'une démarche souple et rapide sans que personne n'ait eu le temps de réagir. Mirajane réalisa soudainement que sa sœur se faisait emmener de force par le marionnettiste. Elle se leva d'un bond pour partir à sa poursuite mais s'empêtra les pieds dans la banc et tomba à la renverse.

« Lissana ! »

L'immaculée se dégagea du meuble d'un mouvement brusque et sauta sur ses pieds, sans manquer d'insulter le siège qui lui avait servi d'obstacle. Elle entendit vaguement Luxus crier quelque chose à Fried avant de se ruer vers la sortie, où venait de s'éclipser le mage des mots, Lissana et son ravisseur. Avec une rage brusque, elle bondit à la suite de sa sœur et... buta contre un mur invisible.

« Quoi ? » S'écria l'immaculée.

Mirajane toucha sa figure là où elle avait été bloquée. Sa pommette lui faisait mal mais la douleur n'était rien comparée à l'angoisse qu'elle ressentait en ce moment.

Des lettres violettes apparurent dans le vide, face à la jeune femme.

« Suite au passage de Lissana Strauss, personne ne pourra sortir de cette pièce et y utiliser la magie jusqu'à son retour. » Lut Mirajane alors qu'un frisson d'horreur remontait le long de son échine.

Elle se retourna promptement vers le Dreyer, la mine rougie de rage.

« Qu'est-ce qu'il se passe ? » Cracha la jeune femme.

Le blond était resté assis et avait assisté à la scène dans le plus grand état d'hébétude. Il fixait Mirajane avec un mélange de rage à moitié dissipée et une incompréhension totale.


Lissana cria à s'enrayer les cordes vocales. Elle frappa son ravisseur d'un puissant coup de poing. Ses petites mains pâles rougissaient sous la force de ses chocs alors qu'elle martelait le dos de son porteur.

Elle avait froid.

Bixlow avançait sans se soucier de sa passagère qui, pourtant, se débattait comme un beau diable. L'immaculée n'avait jamais pensé que Bixlow serait si fort physiquement. Elle avait beau frapper, s'agiter, crier, rien ne semblait attendre le mage, toujours suivi par ses poupées.

Elle avait très froid.

Il neigeait. Lissana ne portait rien d'autre que son pull en laine, et l'hiver mordait sa peau. Les cristaux glacés glissaient contre sa nuque et s'accrochaient sans réserve à sa courte chevelure blanche. En relevant la tête, elle ne voyait que le ciel s'abattre sur la terre en virevoltant sous les assauts du vent. Enfermée dans ce monde opalin, perchée sur l'épaule de Bixlow, la jeune femme ne savait plus vraiment où elle en était.


Fried était forcément impliqué dans ce complot, il s'agissait de ses runes. Luxus soupira en posant son front contre cette frontière invisible qui le séparait de la sortie.

« Fais nous sortir de là, tu dois bien savoir comment réécrire cet enchantement, non ? » Piqua une voix sèche.

L'homme se retourna lentement vers Mirajane. Elle lui accordait un regard mauvais et profondément mécontent, adossée à une fenêtre. La jeune femme avait vérifié chacune des sorties de la pièce et n'avait réussi qu'à affirmer une chose : ils étaient bel et bien enfermés. Rien qui les avançait, en somme.

« Non, je ne sais pas. Ça n'a jamais été mon truc, l'écriture.
- Et tu veux me faire croire que ce sont tes coéquipiers ? Tu ne sais même pas ce qu'il se passe !
- Tais toi Mirajane. Fried doit avoir une bonne raison.
»

Mirajane souffla lourdement, particulièrement agacée par cette déclaration. Ils étaient toujours ensemble à veiller l'un sur l'autre, pourquoi Luxus n'était-il pas capable de défaire un sortilège lancé par son coéquipier ? Pourquoi n'était-il pas au courant des agissements de ses partenaires ?

Mirajane avait peur. Lissana n'avait ni manteau, ni écharpe, elle était quelque part dehors, dans le froid. Elle était presque persuadée – bien qu'avec un peu de réserve – que Bixlow ne ferait aucun mal à sa jeune sœur...
Depuis la bataille de Fairy Tail, les membres de l'équipe n'avaient pas montré un quelconque signe de cruauté, ils tentaient même de se faire plus familiers avec le reste de la guilde. Cependant, et c'est ce point là qui l'inquiétait, Bixlow restait un mystère à part entière. Il avait clairement exprimé sa barbarie et se fourberie face à Grey, alors Mirajane craignait qu'il ne restait un peu de cet homme là. Ses pensées s'égarèrent alors qu'elle tentait d'imaginer ce qui était en train d'arriver à sa sœur. Elle devait avoir froid, sûrement devait elle trembler... Ne pas savoir la tuait. Qu'arrivait-il à Elfman ? L'immaculée espérait fortement qu'il soit rentré au chalet, bien au chaud. Qu'arrivait-il à Lissana ? Une image furtive passa dans son esprit et une pensée particulièrement douloureuse traversa son esprit : Et si le marionnettiste lui faisait des choses indécentes ?
Mirajane posa son front contre le verre glacé de la fenêtre et donna un petit coup avec son front, les mâchoires contractées. Pourquoi pensait-elle cela ? Lissana ne se laisserait jamais faire, quand bien même Bixlow tenterait ! Pourtant, elle ne pouvait s'empêcher d'être anxieuse et en colère. Il fallait que quelqu'un arrive rapidement pour lever le sortilège.

« Fried ? Fait nous sortir d'ici ! »

La voix de son compagnon de cellule avait résonné dans la pièce comme une délivrance.

L'immaculée tourna immédiatement la tête en se redressant, comme si elle était montée sur des ressorts. Elle aperçut tout juste la crinière de Fried qu'elle se précipita déjà contre la barrière, au plus proche de lui.

« Fried, lève le sort immédiatement ! Où est Lissana ? Libère la !
- Je regrette, mais Lissana est la clé de l'enchantement. Je ne peux pas vous libérer sans elle et il est hors de question de le faire.
- Pourquoi ?
» Beugla Mirajane.

L'énergie du mur invisible palpitait sous ses doigts, l'empêchant de pousser davantage sa physionomie. Ses doigts se contractaient dans des spasmes agacés alors que ses yeux fusillaient le geôlier du regard.

« Pourquoi ? » Reprit Luxus, le ton ferme et neutre. « Qu'est-ce que signifie toute cette mascarade ? »

Fried s'inclina respectueusement face à lui, la main sur le pommeau de sa rapière.

« Je m'excuse encore une fois, mais la situation devenait critique. Vos différents n'épargnent pas la guilde, par conséquent, nous avons décidé de régler cette affaire. Il vous suffit simplement d'avouer vos tords de façon sincère et Lissana reviendra. » Il jeta un coup d'œil à Mirajane. « Lissana reviendra saine et sauve. Bixlow ne fera rien qu'elle ne veuille pas, ne t'inquiète pas. »

La colère de Mirajane ne se calma pas pour autant. Il avait osé l'enfermer avec Luxus, alors que sa sœur était mise en détention par un homme dont elle ne savait rien à part son prénom ! Et ce, pour des raisons aussi futiles ! L'immaculée frappa la barrière avec son poing gauche.

« Raconte pas de conneries Fried ! Sors nous de là ! »

L'épéiste resta de marbre. La jeune femme était tant énervée qu'elle sentait les insultes venir poindre leurs nez. D'une certaine façon, elle sentait que l'ancienne Mirajane revenait lui livrer ses fantômes.

« Mirajane, excuse toi et c'est fini. » Déclara Luxus.

La jeune femme grinça des dents et serra les poings. Cette petite histoire de mise en couple n'avait été qu'une plaisanterie, une occupation pour tromper l'ennui. Un défi aussi, elle voulait voir ce que cela faisait de manipuler une victime aussi difficile que Luxus Dreyer. En somme, elle avait souhaité ajouter un peu de piquant à son existence d'entremetteuse aux plans burlesques. Mirajane n'avait encore jamais tenté de fonder des couples homosexuelles, et elle n'avait pas eu la moindre idée de comment s'y prendre, aussi la tentation n'avait été que plus grande ! La jeune femme n'avait pas pu y résister et devait maintenant admettre une erreur qu'elle n'avait pas commise.

La voix teintée d'amertume, Mirajane prononça à mi-voix :

« Je suis désolée d'avoir heurté ton ego et tout ce qui va avec. »

Silence.

Rien ne se passa. Au bout de quelques secondes, Mirajane se tourna vers Luxus dans l'espoir de comprendre quelque chose à cette situation restée inchangée. Il observait la barrière avec attention, sans rien montrer d'un quelconque signe de discernement. L'immaculée fixa ensuite Fried, qui semblait se concentrer. Au bout d'un moment qui parut être une éternité à Mirajane, il déclara placidement :

« Ce n'est pas bon. » Et ajouta avant qu'on ne lui coupe la parole : « Ce n'est ni sincère, ni complet. Il reste de nombreux points à discuter... Et je ne dis pas cela pour Mirajane, tu as aussi des tords à reconnaître, Luxus... »

Luxus allait parler lorsque Fried lui fit signe de garder le silence. Il saisit le pommeau de sa rapière et tira l'arme de son fourreau avec souplesse. L'épée en main, il posa la pointe de celle-ci contre le sol, à l'endroit où s'élevait l'obstacle qui retenait les mages prisonniers. Un sursaut d'espoir secoua Mirajane qui sentit sa peau frémir alors que le mage runique traçait des écriteaux invisibles à l'aide de son arme. Au bout d'un temps, Fried se redressa, rangea son arme et se détourna en lâchant avec désinvolture :

« Je repasserai pour voir comment vous avancez. »

Mirajane se figea d'effroi alors que de nouvelles instructions s'ajoutaient face à son visage.

« Les personnes enfermées à l'intérieur de cette barrière doivent se réconcilier de façon sincère afin d'activer la clé du sortilège : Lissana Strauss. »


Lissana quitta subitement la froideur brute de l'hiver pour un cadre bien plus chaud. Un peu abasourdie, elle se retrouva assise sur un fauteuil de cuir, surprise et trempée.

En levant la tête, elle vit Bixlow fermer la porte par laquelle ils venaient de passer. Les deux mages se trouvaient dans une chambre modérément spacieuse, avec un large lit double, une commode poussée dans un coin et le fauteuil dans lequel elle avait été lâchée – puisque c'était bien le terme à employer.

La neige fondait le long de sa physionomie, gouttait sur la pointe de ses cheveux et sillonnait sa peau glacée par la saison. En quelques secondes, les cristaux avaient perdu leur beauté et avait fini en liquide froid et inamical.
Lissana frissonna en s'entourant de ses bras ; elle lâcha sur un ton froid, comme l'eau qui gouttait contre sa nuque :

« Qu'est-ce que je fais ici ? »

Bixlow et ses poupées se tournèrent vers elle. L'homme croisa les bras contre son poitrail en tirant la langue.

« Tu es un otage. » Il avait dit ça sans réfléchir. « La clé qui libère Mirajane et Luxus. »

Lissana le regarda avec des yeux ébahis. Elle ne comprenait absolument rien à ce charabia.

« Quoi ? La clé de quoi ? »

Bixlow déforma ses lèvres dans un large sourire, amusé par l'incompréhension de la jeune femme.

« Fried a lancé un sortilège dont tu es la clé. » Dit-il. « Il n'y a que toi qui peux le briser. » Finit-il en ponctuant sa phrase d'un grand rire.
« Briser ! Briser ! Briser ! Briser ! Briser ! » Reprirent Fifi et ses comparses.

La jeune immaculée se tassa sur elle-même, la bouche entrouverte. Un brin de lucidité venait titiller son esprit.

« Mira est enfermée ? Avec Luxus ? » Demanda-t-elle en blêmissant, l'air penaud.

Le casqué répondit d'un grand signe de tête affirmatif et gloussa.

« C'est une idée de Fried ! Il a pensé que les faire parler pendant quelques temps adoucirait leurs rapports... Si tu veux mon avis, ta sœur est bien trop têtue pour que ça s'arrange aussi simplement !
- Luxus n'est pas mieux !
» S'exaspéra Lissana. « Ma sœur n'est pas la seule tête de mule dans cette guilde !
- Ne parle pas de Luxus comme ça.
» tonna-t-il, l'air soudainement sérieux.

Ils se turent tout les deux. Lissana détourna le regard, tentant de faire abstraction du gazouillis et des ronronnements incessants de ses poupées. Elle frissonna, ses vêtements mouillés et froids collaient désagréablement à sa peau et la jeune femme n'osait pas enlever son pull trempé face à Bixlow. Un nouveau tremblement la secoua alors qu'elle enlaçait ses épaules pour se réchauffer.

Au bout d'un temps, l'homme déclara :

« Bon, on va rester un long moment ensemble, on va pas attendre sans rien faire. » Il s'approcha à sa hauteur et dit à l'immaculée. « Déshabille toi. »

Lissana lui servit un air abasourdi alors que les mains de l'homme effleuraient ses hanches pour se saisir du tissu. La jeune femme n'osa tout d'abord pas croire à sa déclaration et aux sous-entendus plus qu'indécents que le marionnettiste avait prononcés, puis elle changea radicalement d'avis lorsque son ventre se retrouva à l'air libre.

La gifle partit toute seule, par instinct.

Lissana se redressa vivement en remettant son habit en place. Elle poussa Bixlow de ses deux mains, l'envoyant tituber sur quelques pas, puis se précipita sur la porte. Avec une rage non contenue, elle tira sur la poignée qui resta bien en place, malgré un assaut brutal.

Il osait lui faire des avances ! Alors qu'ils se connaissaient à peine et que, quand bien même, aucune femme au monde ne voulait être traitée de cette façon ! Cette pensée était celle d'un goujat, d'un homme sans aucune estime pour le sexe opposé ! Vexée et hors d'elle, Lissana s'acharnait sur cette simple cloison de bois, crachant à Bixlow les pires insultes qu'elle connaissait.

Le marionnettiste, quant à lui, recula ; effleura sa joue ; regarda Lissana ; puis, enfin, percuta.

« Ah. » Dit-il doucement.

Il prit encore quelques secondes avant de comprendre plus clairement la situation puis sursauta et s'avança brusquement vers la jeune femme.

« Attends baby, on s'est mal compris !
- Mal compris ?! Mais bien sûr ! Sale... Sale... Sale homme !
» Cria-t-elle.

Bixlow n'en montra rien mais cette insulte l'amusait beaucoup. Il devait garder son sérieux face à cette situation délicate.

« Attends, baby ! Tu ne peux pas sortir sans la clé, arrête de t'agiter comme ça ! » Il s'approcha d'elle. « Lâche cette porte ! »

Bixlow attrapa le bras de la jeune femme et la tira vers lui pour la décrocher de la poignée. Contre son torse, l'immaculée se figea une seconde avant de recommencer à se débattre activement, reprenant cris et injures. Elle usait de ses poings et de ses pieds comme elle le pouvait. Lissana n'avait aucune connaissance du combat sans magie et frapper un homme de cette stature était bien plus dur qu'elle ne l'avait prévu. Cependant, elle parvenait à placer quelques coups douloureux si elle pouvait en juger par les légères grimaces qui tordaient le visage de son ravisseur. Le marionnettiste faisait ce qu'il pouvait pour la maîtriser mais lorsqu'un coup particulièrement violent lui fût porté au poitrail, il céda à la tentation et arracha son casque d'une main.

Silence.

Lissana fit face à des yeux vert, brillants et puissants, qui semblèrent lui happer son âme au simple contact de ses pupilles avec ces iris étranges. Elle était incapable de bouger, incapable de faire le moindre mouvement, le moindre clignement de paupières. Perdue et impuissante face à ce nouveau visage, Lissana respirait à peine.

« Bon. Je ne veux rien faire avec toi. Calme toi. » Bixlow soupira doucement. « Je ne voulais pas utiliser ça, mais tu ne m'en as pas laissé le choix. »

Mirajane lui avait brièvement parlé de ce pouvoir que Bixlow semblait maîtriser jusqu'au bout des... cils. Il s'agissait d'une particularité propre à l'équipe Raijin, le groupe pouvait utiliser leurs yeux comme supplément de leurs pouvoirs et chaque capacité était différente d'un mage à l'autre. Celui du marionnettiste était justement de capturer l'âme de sa victime pour en faire un vulgaire pantin à sa botte.

L'homme relâcha son étreinte autour de la jeune femme, et une fois qu'il se fût assuré qu'elle ne bougeait plus, totalement sous son emprise, il s'écarta complètement. Toujours les yeux dans les yeux, il lui dit d'une voix calme et maîtrisé :

« Assieds toi là. » Tout en désignant le fauteuil qu'elle venait de quitter.

Poussée par une force inconnue, Lissana obéit sans broncher, alors que son être entier criait à l'injustice et à la haine. La jeune femme souhaitait le fusiller des yeux, mais pas un muscle, pas une parcelle de peau ne lui répondant, pas un cil ne lui appartenait. Entièrement sous le joug de Bixlow, elle se tenait droite, le visage inexpressif, la peau mordue par le froid mouillé de ses habits.

L'homme quant à lui, s'était mis à s'agiter dans la pièce, ouvrant un placard par-ci, un tiroir par-là. Il menait des recherches actives en tournoyant dans la pièce tel un ouragan, pestant de temps à autre alors qu'il ne trouvait rien qui lui convenait.

Lissana le regardait faire, criant à l'intérieur de son crâne, jurant de ne pas pouvoir s'exprimer. Elle ne supportait pas d'être privée de ses capacités, de sa parole, pliée au bon vouloir d'un homme en lequel elle n'avait aucune confiance. Son sang bouillait dans ses veines, la sensation d'être sous l'emprise d'une tierce personne était insoutenable, la colère cognait contre son cœur et, incapable de se résigner, Lissana fulminait. De plus, elle mourrait de froid. La neige fondue imbibait ses vêtements et se collait contre sa chair dans une sensation devenue bien trop désagréable.

Au bout d'un temps d'une longueur extrême, Bixlow trouva enfin ce qu'il souhaitait dans un tiroir, après avoir renversé son contenu entier sur le sol. Il tendit fièrement, et à bout de bras, l'ensemble violet qu'il avait dégoté.

Avec un sourire extasié, il le posa sur les genoux de la jeune femme qui fixait l'habit sans comprendre. La couleur familière, la texture chaleureuse, la coupe droite ; Lissana reconnu soudainement le vêtement.

« Mais c'est mon pyjama ! » Voulait-elle crier.

Oui, c'était clairement l'ensemble qu'elle avait emporté pour ces quelques jours de vacances ; même couleur, même forme, même texture. Que faisait son pyjama dans la chambre de Bixlow ? La jeune femme souhaitait relever la tête pour s'offusquer, ou au moins avoir des réponses concrètes ; mais rien, elle restait toujours la tête droite, les yeux baissés vers ses jambes où s'échouait son vêtement.

« Pour ce qui est des sous-vêtements... »

Lissana se tendit. Du moins, mentalement.

« C'est par là. D'après ce que m'a dit Evergreen. » Déclara Bixlow en lui désignant l'armoire derrière lui.

Seuls les yeux de Lissana parvenait à bouger et à le suivre du regard, mais malgré son faciès inexpressif, les pupilles de la jeune femme brûlaient d'une colère irrévocable.

Bixlow s'assit sur le lit, face à l'immaculée, ses mouvements suivis de près par les prunelles ardentes. Le marionnettiste était fixé continuellement, tant et si bien qu'il trouvait cela presque gênant. Au bout d'un temps dans un silence si épais que l'on pouvait le découper au couteau, l'homme souffla.

« Je t'ai dit qu'on allait passer beaucoup de temps ensemble. Evergreen a amené tes affaires pour que tu puisses te changer. » Il afficha un sourire lascif. « Je n'ai pas touché à tes petites culottes, rassure toi. »

Il semblait réellement s'amuser en se moquant ouvertement d'elle. Les yeux rieurs et la bouche déformée en un sourire étrange, Bixlow gloussait un peu bêtement à sa propre blague.
Lissana fulminait. L'esprit tendu et aux aguets, elle ne souhaitait qu'une chose : se remettre sur ses pieds et gifler cette homme horrible. La tête pleine de vengeance douloureuse, la jeune femme contrôlait difficilement ses pensées plus violentes les unes que les autres.

Bixlow se leva, dévisageant Lissana. Le corps de la jeune femme tressautait de temps à autre, lorsque une vague glacée parcourait sa peau, c'était là une réaction mécanique, une vague tentative pour son enveloppe de se réchauffer. Prit d'inquiétude, il dit à la Strauss, sur le ton de l'ordre :

« Tu devrais te changer. »

Lissana vit, avec horreur, son propre corps se relever tel un automate, guidé par la voix de son ravisseur. Elle n'allait tout de même pas se changer devant lui ? Une soudaine panique s'enflamma dans son ventre alors qu'elle se mettait debout d'une pas titubant. Ses mains se levèrent avec lenteur vers ses hanches et à mesure que celles-ci se rapprochaient de son pull, le sourire de l'homme grandissait.

L'étoffe s'accrocha, puis se décolla de sa peau dans un bruit de chuintement humide. Son pull tricoté atterrit au sol et Bixlow poussa un ricanement sordide. Le cœur de Lissana tambourinait dangereusement dans sa poitrine et les pulsations résonnaient jusque dans ses oreilles, lui embrouillant le cerveau et la dernière de ses pensées rationnelles. Elle était terrifiée. Elle était terrifiée par ce qu'il allait lui faire.

Il lui avait dit qu'il ne voulait rien d'elle à part sa présence ! Alors que se passait-il maintenant ?

Spectatrice de sa propre enveloppe, Lissana regarda ses mains agripper l'ourlet de son haut, sans ne rien pouvoir faire. Elle tenta de bloquer le mouvement de ses bras ou de crier, de faire quelque chose pour stopper cette torture, mais rien ne fit. Incapable de se résigner, elle repoussait l'ordre de Bixlow comme elle le pouvait, imaginant ficher une méchante baffe à son ravisseur. Rien, de rien. Elle sentait simplement ses doigts accrochés au tissu et la peur qui gonflait ses veines.

Bixlow éclata de rire et Lissana se figea.

Son corps ne lui obéissait pas davantage, mais le mouvement qu'elle effectuait s'était subitement arrêté. Le marionnettiste ricana, puis se redressa avec lourdeur en affichant un sourire satisfait.

« Bon. Arrêtons de s'amuser. »

Le cœur de Lissana rata un battement. Qu'est-ce que ça voulait dire ? Paniquée, son esprit se fit cotonneux et flou, alors que Bixlow s'avançait vers elle d'une démarche bien trop nonchalante pour la gravité de ses actes. Lissana ne souhaitait même plus se venger ; elle voulait simplement fuir.

L'homme s'arrêta à un pas d'elle. Il leva sa main au niveau de son visage, une moue contrite sur les lèvres. La blanche le regardait, effrayée, dans l'attente de ce qu'il allait lui faire.

« Tu es paniquée. Ton âme s'agite. » Dit-il sur un ton très sérieux.

Il fixa Lissana dans les yeux, l'air grave. Ses iris ne recueillaient plus aucune once d'ironie ou d'amusement, pourtant, il gloussa étrangement, se pencha vers la jeune femme et lui dit :

« Je te l'ai dit, non ? Je ne te ferai aucun mal. »

Puis il pinça son nez avec son pouce et son index et se détourna.

« Bon, je vais te laisser te changer, je vais me faire couler un bain ! »

Il marcha lentement jusqu'à la salle de bains, sans ressentir le besoin de se presser. Sur le trajet, il attrapa quelques habits propres et de quoi se laver.
Lissana était toujours suspendue dans le temps, immobilisée alors qu'elle retirait son haut. Elle avait l'impression de ne plus être en possession d'elle-même depuis de longues heures tant cette condition était désagréable, et elle espérait de tout son être qu'elle pourrait bouger une fois son ravisseur dans la salle de bain.

« Ne fais pas de bêtises, mes babies te surveilles ! »

La porte claqua et, enfin, Lissana lâcha une longue expiration. Le poids qui enserrait son esprit s'allégea aussitôt et la jeune femme fut capable de baisser les bras et de se redresser. Un mélange d'émotions confuses émergeait dans sa tête et la jeune femme ne trouva rien d'autre à faire que se laisser tomber sur le canapé.

La peur refluait lentement alors que les battements effrénés de son cœur revenaient à un rythme décent. Le besoin de vengeance qu'elle avait ressenti tout à l'heure s'était tapi dans un coin sombre de sa tête et à présent elle avait l'étrange impression de se sentir vide et cotonneuse. Le contrecoup de toute cette surprise, certainement.

Lissana souffla péniblement en tentant de se reprendre. Elle avait affreusement froid, mais la fraîcheur n'était rien comparée au choc et à la panique qu'elle venait de vivre. Quel homme horrible ! Il avait osé se jouer d'elle, lui faire croire à des possibilités immondes et l'amener à se déshabiller (même partiellement) face à lui ! Elle avait du mal à trouver ça vrai. La jeune femme n'avait jamais connu Bixlow, mais tout de même, elle ne pensait pas qu'il puisse se divertir de jeux aussi peu conventionnels !

La jeune femme laissa tomber sa tête dans ses mains en gémissant.

Comment s'en sortait Mirajane ? Sa sœur était certainement en train de faire une scène pas possible suite à sa disparition, et elle le comprenait parfaitement. Lissana non plus ne supportait pas bien cette séparation brutale. Celui lui donnait la vague impression d'avoir été arrachée à sa famille une nouvelle fois.

Un gazouillis étrange flottait dans l'air, de temps à autre ponctué de petits ricanements mécaniques et froids. Tremblante, l'immaculée redressa la tête et sursauta brusquement.
Fifi et ses comparses voletaient face à elle, en exécutant des cabrioles de temps à autres. Ils la fixaient avec leurs grands yeux noirs en ronronnant étrangement et en flottant autour de sa tête comme une auréole. La jeune femme resta à fixer bêtement ces petites choses qui se mouvaient sans contraintes autour d'elle en lâchant des sons étranges et amusants. Cependant, lorsque Féfé attrapa une mèche de ses cheveux mouillés et tira dessus, Lissana poussa un glapissement en l'écartant d'un revers de la main, le crâne meurtri.
Le reste de l'équipe s'écarta en ricanant de cette bêtise taquine.

« Aïe ! »

Même ses poupées étaient d'une compagnie exécrable ! Lissana gonfla les joues en se relevant, son pyjama violet emprisonné dans sa main. D'un pas ferme et rageur, elle se dirigea vers la commode – encore ouverte – et y jeta son pyjama à l'intérieur.

Il n'était pas question de s'habiller ainsi.

Déjà puisque ce tissu était bien trop fin et soyeux pour être porté en de telles circonstances, ensuite parce qu'elle ne voulait pas suivre ce qu'il lui disait et, enfin, elle comptait bien s'en aller dans les plus brefs délais. Ainsi, Lissana plongea sa main dans un tiroir où semblait s'amonceler une bonne partie de ses vêtements et y ressortit un jean et un épais haut bien chaud. Ravie à l'idée de pouvoir ôter ses vêtements trempés, elle en oublia presque sa situation.
Cependant, lorsque Fufu arriva face à elle, portant aux bouts de ses ailettes, une culotte blanche qu'il avança jusqu'à son nez, l'élastique bruyant de la réalité claqua dans son esprit.

« Rends moi ça ! » Piailla-t-elle en sautant sur la marionnette de bois.

Les yeux écarquillés d'un mélange de colère et de honte, la jeune femme se précipita vers le rangement qui laissait déborder ses sous-vêtements. Elle intercepta Fofo est le petit vêtement qu'il avait chiper avant de jeter ce qu'elle avait pu récupérer dans le tiroir et de le fermer d'un coup sec et furieux.

Lorsqu'elle se retourna, la bande ne lui prêtait pas attention et continuait à voltiger sans plus se préoccuper de sa présence. A bout de nerf, Lissana se crispa en serrant les poings, prête à frapper n'importe laquelle de ses marionnettes de bois. N'ayant d'autre exutoire, elle donna un coup à la commode derrière elle en leur crachant :

« Ne vous approchez pas de moi, sales bestioles ! »

Lissana souffla, les poupées ne l'avaient même pas écoutée... Frustrée et en colère, la jeune femme attrapa ses vêtements et se blottit dans un coin de la chambre, surveillant les volatiles d'un œil mauvais.

Doucement, et avec une lenteur démesurée, elle ôta son haut. Ainsi en sous-vêtements, elle zieutait tour à tour la porte de la salle de bain et les poupées qui flottaient, l'air de rien. Alors qu'elle allait enfiler son habit propre, elle se rendit compte que même son soutien-gorge était trempé et que si elle ne voulait pas attraper une angine, il allait falloir le changer.

Face à cette constatation, elle rougit jusqu'à la racine des cheveux. Si jamais Bixlow revenait avant qu'elle ait fini de se changer ? Qu'il la trouve en soutien-gorge c'était une chose, mais qu'il la voit seins nus, c'en était une autre.

Préoccupée par ce petit problème, Lissana se trémoussait dans le coin de la chambre, là où elle s'était réfugiée pour se changer. Elle toisa la porte avec un air gêné, puis, après de longues élucubrations avec elle-même, elle cria à travers la pièce :

« Tu n'as pas intérêt à sortir de là, Bixlow ! »

Le rire bizarre de l'homme fut sa seule réponse.


Mirajane poussa un gros soupir, allongée sur un banc. Les mains sur le ventre, elle jouait avec le tissu de son haut en ponctuant son occupation de souffles ennuyés et bruyants.

« Elfman va venir nous chercher. Il va se rendre compte de notre disparition. »

Luxus lâcha un ricanement amer.

« Compte sur l'équipe pour lui avoir trouvé une distraction. »

Mirajane grogna en se retournant avec difficulté sur son banc. Evidemment, Evergreen était de la partie. Et si elle mettait en avant ses charmes ainsi qu'un peu de bonne volonté, elle ne doutait absolument pas en ses capacités de persuasion. Elle ravala un grognement furieux.

« Si tu t'excusais on pourrait sortir.
- T'as bien vu que ça ne marchait pas.
»

Luxus n'eut rien à lui répondre et ils s'engouffrèrent dans un mutisme commun et tendu.


« Je croyais t'avoir dit de ne pas sortir de là, Bixlow ! »

L'homme ricana, la bande à Fufu jouant à tournoyer autour de lui. Pour une fois, il ne portait pas son espèce d'armure violette, mais bel et bien un sweat-shirt noir épais et un jogging mauve. Sa serviette de bain était encore à moitié sur ses cheveux d'un bleu ahurissant et trempés.

Rouge de honte, car elle s'était dépêchée d'enfiler son soutien-gorge en entendant la poignée grincer, Lissana lui balança à la figure la première chose qu'elle avait pu attraper en l'insultant. En l'occurrence, lui pull qu'elle comptait enfiler. Se rendant compte de sa mémorable bêtise, ses joues la brûlèrent plus fort et ses yeux s'écarquillèrent, alors que son ami ramassait le vêtement en riant.

« Très joli, baby !
- R-rends-le moi !
» Bafouilla l'immaculée, serrant à grand peine sa poitrine pour la cacher.
- Mais si tu veux le mettre, faudra venir le chercher ! Parce que je crois pas que traîner en soutif dans la même pièce qu'un homme, c'est une super idée, baby ! » Dit-il, hilare.
« Baby ! Baby ! Baby ! Baby ! Baby ! » S'exclamèrent les poupées en tournant plus vite.

Gênée à l'extrême, Lissana ne bougea pas d'un poil, recroquevillée contre la commode où étaient rangés ses sous-vêtements. La commode... Mais oui ! Il lui suffisait d'aller chercher un autre haut dans l'un des placards ! Pourquoi n'y avait-elle pas pensé ?

Elle se releva doucement, les yeux cachés derrière ses mèches blanches, la poitrine compressée par ses petits bras. Sans prêter attention au bruit de chute qu'elle venait d'entendre, elle fit un pas en direction d'une armoire. Vainement. Celle-ci fut rapidement entourée d'une aura verte et tous les tiroirs se fermèrent en un claquement sec.

Pof. Pof. Pof. Pof.

Mortifiée, Lissana se tourna vivement vers Bixlow, qui la regardait en souriant machiavéliquement. Evidemment. Elle était si bête. Fifi, Féfé, Fufu, Fafa et Fofo étaient tombés aux pieds du marionnettiste. Il avait transféré leurs âmes dans d'autres objets inanimés : les meubles.

« C'est de la triche ! » S'indigna-t-elle.
- Eh ! Toi aussi tu allais tricher, baby ! Tu n'as pas le droit d'aller chercher d'autre vêtement !
» S'esclaffa-t-il.

Elle fronça les sourcils. Pourquoi Diable s'acharnait-il à la garder trempée et frigorifiée ? Pour ponctuer ces pensées, une unique goutte plus glacée que jamais tomba sur sa nuque et glissa le long de sa colonne vertébrale. Un frisson la traversa, terminé par un petit éternuement aigu. Elle renifla en pensant qu'elle aimerait bien savoir ce qu'il advenait de sa sœur.


« Je comprend pas... » Soupira le mage blond. « Pourquoi t'as fait ça ?
- Parce que. Je n'ai pas à me justifier. Tu étais parfaitement au courant de mes petites manipulations, alors tu n'as pas vraiment d'excuses.
»

Le petit-fils de Makarov serra les mâchoires. Comment ça, pas d'excuse ? Elle avait tout de même cru qu'il était gay ! Si ça ce n'était pas insultant !

« Pas d'excuse ?! Tu as tout de même voulu me caser avec mon meilleur ami, imbécile ! Je suis pas Lucy, moi ! J'me rends pas forcément compte quand une peste me manipule pour me foutre en ménage ! » Cria-t-il, au bord de la crise de nerfs. « Faut être sacrément dérangée pour croire que j'étais homo !
- Ne m'insulte pas, se serait vraiment dommage de m'énerver. Ça, je peux te l'assurer.
» Siffla-t-elle, le regard noir. « Ce n'est tout de même pas ma faute si vous allez très bien ensemble en tant que couple !
- En tant que couple ?! » S'étouffa-t-il, rouge de colère. « On est une équipe ! Ne va pas croire qu'on a tous les idées aussi déplacées que toi ! »

Assise dans un coin de la pièce, à l'opposé de son compagnon de cellule, elle ricana, mauvaise. Ah oui, elle l'avait oubliée celle-là. La fois où, en échange de venir aider la guilde, il avait demandé à Lucy de sortir avec lui. Ce qu'il pouvait être pathétique...

« C'est toi qui fais du chantage à Lucy et c'est moi qui ai les idées déplacées ? Tu ne t'es jamais regardé en face, mon beau. Tu es pareil, voire pire, que moi. »

Elle sursauta à peine quand une table vint s'écraser sur le mur à côté d'elle. Il voulait la jouer comme ça ? Elle sourit et se leva. Attrapant un banc par le pied, elle le lança à la figure du combattant.

« C'est lâche de s'en prendre à une fille, tu sais. »


Voilà la première partie de ce two-shot ! Le second morceau de cet écrit est nettement plus imposant et comporte un lemon, vous êtes avertis ! Je pense d'ailleurs que celle-ci sera postée aux alentours du mois prochain, peut-être plus tôt si j'ai des retours favorables... Vous êtes maître de votre choix, à bientôt !