Disclaimer : rien ne m'appartient, je fais seulement joujou.

Histoire longue et quasiment finie. Updates régulières, c'est promis.

Attention au rating ! L'histoire contient des descriptions de violence (c'est une guerre, après tout).


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Bilbon Sacquet fit avancer sa monture le long du lac. Voilà dix années qu'il n'était plus venu ! Cela lui aurait paru une éternité si les nains ne lui avaient pas rendu visite chaque année ou presque depuis lors. Dix ans depuis la fin de la bataille des cinq armées, depuis la mort de Thorïn, Fili et Kili et depuis le couronnement de Dain Pied d'Acier.

Le petit poney au pied sûr s'avança sur les pavés de la grande route. Les habitations en pierre de Dale s'élevaient vers le ciel. Aux larges fenêtres, des banderoles flamboyaient et ondulaient sous le vent. Aujourd'hui était un jour spécial : le Roi sous la Montagne se mariait, dix ans jour pour jour après son couronnement. Tous les puissants de cette partie des terres du milieu avaient été invités sans distinction de race, du semi-elfe Elrond au magicien Gandalf.

L'invitation de Bilbon lui avait été délivrée personnellement par Balin et Dwalin. C'est donc à trois qu'ils chevauchaient leurs poneys dans la paisible ville de Dale, remontant l'avenue principale en direction de la Montagne solitaire.

Les larges portes s'ouvrirent à leur arrivée, les cors retentirent et dix nains vêtus d'armures rutilantes surgirent de la montagne. Bilbon prit peur un instant avec de s'apercevoir que les armures étaient trop brillantes pour avoir servies récemment et que les armes restaient coincées dans les ceintures des nains. Un cor gronda longuement.

Le hobbit démonta. Avec ses deux acolytes, son paquet de gâteaux à l'anis fourré rapidement dans ses poches, il s'avança le long du pont séparant Dale et Erebor. Dain lui-même s'avança dans la lumière du jour, somptueusement vêtu d'un long manteau de fourrure et de cuir, un marteau attaché dans son dos, son visage reflétant la joie sincère de revoir deux de ses conseillers et un invité de marque. Sa couronne d'acier scintillait dans le matin glacial de l'hiver.

« Ah ! Le hobbit ! Vous êtes en avance, dis-donc ! »

L'humeur du Roi sous la Montagne ne s'était pas arrangée avec le temps, il était toujours aussi exubérant. Le nain prit Bilbon sous son bras et le traina presque littéralement à l'intérieur de son royaume.

« Nous vous avons réservé la meilleure des chambres des invités ! Je me doutais bien que vous arriveriez tôt ! Les autres ne viendront que la semaine prochaine pour le mariage. Enfin, c'est beaucoup mieux comme ça ! Je ne veux pas d'elfes dans mes pattes si je puis l'éviter. Sauf le Seigneur Elrond. Il a du chemin à faire, il viendra la veille mais ça va, ce n'est pas le pire. Mais vous, mon cher hobbit ! Nous vous devons ce royaume et nous vous devons un festin comme vous n'en avez encore jamais connu !

— Allons Dain, laisse-le donc respirer un peu ! le rabroua gentiment Balin avec l'assurance tranquille que donne le grand âge et le respect. Cela fait trois semaines que nous chevauchons !

— Oui, enfin, nous avons aussi fait quelques auberges, rappela Bilbon avec un sourire.

— Ca ne compte pas ! Y'a eu des orages ! »

L'objection de pure mauvaise foi de Dwalin amusa grandement ses compatriotes. Dain, bien assez sage pour savoir de quoi il en retournait, ne s'offusquait pas de leur apparent manque de respect. Ils étaient des nains, après tout. Leurs manières étaient extrêmement raffinées. Extrêmement ! Un nain débarrassa le hobbit de ses affaires, un autre conduisit les poneys à l'écurie.

Le hobbit, le Roi sous la Montagne, ses deux conseillers et les dix nains de la garde rapprochée s'enfoncèrent dans la montagne. Elle n'était plus silencieuse, sale et sombre comme la première fois que le Hobbit l'avait découverte. Elle n'était plus non plus couverte d'or fondu, de blocs de pierre détachés de la montagne et le sol jonché de tapisseries éventrées, comme lors du départ de Bilbon. Au contraire, le bruit de la mine était assourdissant, les joyaux installées sur les murs et les piliers scintillaient de mille feux et des tas de nains allaient et venaient. Les tapisseries restaurées pendaient le long des hauts murs de pierre. La principale montrait Thorin écu-de-Chêne dressé face à Azog le profanateur, son épée passée en travers du corps de son ennemi, couvert de blessures et la montagne en arrière-plan.

« C'est magnifique ! » s'exclama Bilbon.

Dain s'enorgueillit. S'il y avait bien une personne qu'il souhaitait impressionner aujourd'hui, c'était bien Bilbon Sacquet, seul hobbit connu dans cette partie du monde et membre de la compagnie de Thorin.

La visite se poursuivit jusqu'à la découverte d'un petit salon cosy aux meubles bas, taillés tantôt à même la roche et tantôt dans un bois sombre, couverts de coussins et de couvertures épaisses.

« Votre chambre est à côté, Maître Sacquet, indiqua le Roi sous la Montagne. Le déjeuner sera servi dans deux heures mais les cuisines vont sont ouvertes n'importe quand.

— Mais nous laissons toujours de la bière ici ! nuança Balin en servant quatre choppes.

— N'hésitez pas à vous promener où vous le désirez. Vous être ici chez vous ! Le roi Bard réside à Dale. Il sera heureux de vous revoir également. »

Tous assis sur les sièges, leur choppe dans la main, il y eut un moment de flottement. Chacun resta les yeux dans le vague. Les souvenirs de Thorin restaient vivaces. Chacun d'entre eux en gardaient de lui et chacun d'entre eux ressentait cruellement sa perte.

Bilbon leva sa choppe.

« A Thorin ! A Dain, Roi sous la Montagne, et sa future épouse, puissent leur règne et leurs vies rester sous de bons auspices et la fortune leur sourire ! »

Balin et Dwalin suivirent son exemple. Dain s'inclina respectueusement.

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Les jours passèrent et furent aussi doux pour Bilbon que ceux passés dans la maison d'Elrond. La vie auprès des nains était grossière, sans délicatesse et merveilleusement plaisante. Leurs ouvrages garnissaient les tables, leurs pierres précieuses s'amoncelaient sur leurs habits et pourtant leurs cœurs restaient aimables, sincères et francs. Ils étaient colériques et prompt à boire une pinte avec l'ami qu'ils insultaient deux minutes auparavant, pour se disputer deux minutes ensuite.

Maintenant que Bilbon n'avait pas à faire la vaisselle des nains après leurs repas, il profitait pleinement de leur bonne chère et de leurs chansons gutturales. La nourriture était excellente, variée et contentait largement un bon hobbit.

Il racontait aux jeunes nains son aventure et s'amusait de leurs regards émerveillés. Il se promenait le long de la ville de Dale, saluait Bard et ses enfants devenus adultes, la joie au cœur.

Les préparatifs du mariage s'achevèrent la veille de l'anniversaire des dix ans de la bataille des cinq armées. Ce jour-là, le regret prit le meilleur de Bilbon. Le hobbit passa de nombreuses heures au plus profond de la montagne, à côté des trois tombes de ses amis. L'arkenstone brillait toujours autant sur la poitrine du premier Roi sous la Montagne depuis la chute de Smaug et illuminait à elle seul la grande caverne.

Il fut rejoint là par tous les membres survivant de leur compagnie. Le tour de taille de Bombur avait augmenté. Comment il trouvait encore des pantalons à sa taille, Bilbon l'ignorait.

La compagnie n'avait pas tellement changé en dix ans. Tout au plus Balin avait-il les cheveux encore plus gris et les nains arboraient-ils une barbe encore plus longue. Leurs vêtements, en revanche, n'avaient plus rien à voir avec les manteaux fatigués et les bottes usées. L'or, l'argent et les pierres précieuses brillaient sur leurs tenues. Des chapeaux gigantesques aux couleurs vives donnaient l'impression qu'ils étaient encore plus grands et imposants –ce qui dans le cas de Bombur était tout à fait inapproprié.

Les dix nains et le hobbit firent un cercle autour de la tombe de Thorin. Demain serait un jour de fête. Aujourd'hui serait un jour de souvenir et de nostalgie.

Ils restèrent près des tombeaux toute la journée, racontant l'un après l'autre un moment de la vie de Thorin. Les nains écoutèrent Bilbon avec attention. Ils connaissaient tous son histoire pour l'avoir vécue également, mais le hobbit parvenait à la raconter d'une façon telle qu'elle en devenait magnifique. Ils pourraient passer leurs vies à écouter le récit des aventures de Bilbon.

« C'était ma première aventure, déclara Bilbon ce soir-là. J'étais un piètre cambrioleur, un très mauvais menteur et ma maison m'a manqué dès que nous avons dépassé les frontières de la Comté ! Si je devais le refaire, je signerais le contrat sans hésiter.

— Ainsi a parlé le hobbit, au cœur plus grand que cette montagne elle-même ! »

Les nains hochèrent la tête, approuvant les paroles de Balin, puis ils quittèrent la crypte.

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Le jour du mariage de Dain, Roi sous la Montagne, Erebor et Dale arboraient leurs plus beaux atours. Les fenêtres débordaient de fleurs et de banderoles. Les habitants tant nains qu'hommes s'étaient parés de leurs plus beaux atours.

Des poupées en paille à l'effigie de Smaug, de gobelins et d'orques étaient empilées à l'écart à proximité des réserves de nourriture. Ce soir, la population y mettrait le feu et y ferait griller la viande pendant la réception.

Dans la salle du trône, Dain attendait ses invités. Seul Elrond était arrivé la veille et patientait sur un côté de la grande salle entouré de ses fils et de trente de ses guerriers. Ils avaient troqué les armures et les armes pour des tenues de cérémonie richement tissées aux couleurs vives. Elladan et Elrohir portaient chacun un coffre.

Très tôt, les invités arrivèrent. Bard, Roi du Val, arriva en premier avec cent hommes qui avaient combattus à la Bataille des cinq armées. Ses rapports avec Erebor étaient excellent, les hommes du Val cultivant les terres et les nains leur achetant leurs productions. Bard avait installé son palais à Dale. La ville reconstruite possédait donc à la fois l'influence architecturale des nains et des hommes et les deux races y résidaient. Elle était unique en son genre et ses fontaines brillantes faisaient leur fierté.

Apparurent ensuite des elfes de la Lothlorien, menés par Haldir. Celeborn et Galadriel étaient absent, ne pouvant pas quitter leur royaume en ces temps troublés, et aucun nain n'en fut surpris.

Une centaine de nains s'avança sur le chemin de la montagne. Ils venaient des Monts de Fer, ancien Royaume de Dain. En armure ou en simple manteau de cuir, un bouclier sur le dos, montés sur des poneys et des bouquetins, ils traversèrent la rue au son d'une vieille chanson naine. Bientôt, ce fut tout Dale qui en reprit les paroles. Ceux qui les ignoraient suivaient la mélodie. Ils saluèrent le Roi Dain et s'installèrent à proximité de lui, restant à bonne distance des elfes d'Elrond et de la Lothlorien.

Saroumane vint ensuite, seul sur son cheval, sa longue barbe blanche ondulant dans le vent froid, son manteau blanc volant derrière lui.

Vêtue d'une cape étincelante et d'un collier de gemmes bleues par-dessus une tunique plus simple et plus adaptée aux longs voyages, verte et marron, Tauriel s'avança fièrement devant Dain. Elle s'inclina devant le roi sous la Montagne avec un pincement au cœur, ses longs cheveux roux s'étalant dans son dos. Elle se tint ensuite à l'écart tant des nains que des autres elfes, attendant les siens qui devaient arriver bientôt, mais elle adressa un signe de tête poli vers eux.

Le roi Thranduil avait commué son exil en une mise à l'épreuve : pendant cinq années entières, elle avait dû accompagner Legolas dans les terres du Nord, loin de sa famille et des forêts, protégeant le prince sans relâche. C'était une peine clémente : à l'issue des cinq années, elle avait pu rentrer à la Forêt Noire. Si elle avait perdu son poste de capitaine de la garde royale, elle en avait obtenu un nouveau qui la satisfaisait pleinement : messagère entre Thranduil, les autres elfes, les nains et les hommes. Elle voyageait sans cesse, voyait le monde et pouvait tenir son roi informé de ce qui se passait en dehors de leurs frontières. Régulièrement, elle passait par la Montagne solitaire et se rendait sur la tombe de Kili. Elle entretenait de bons rapports avec les nains, sans toutefois être familier avec eux. Les voir était à la fois merveilleux et douloureux.

Un magicien sur une vieille charrette s'avança tout à la fin de la matinée, à peine une heure avant le début de la cérémonie. Son chapeau gris masquait son visage mais nul ne se mépris sur son identité. Il délaissa la carriole à Dale et, simplement muni de son manteau gris et de son bâton, s'avança vers Erebor. Gandalf fut accueilli en héros et en ami. Après les salutations d'usage au roi sous la Montagne sur son trône de fer, d'argent et d'or, le magicien disparu parmi les nombreux invités du grand Hall. Il se glissa entre les nains et arriva derrière le hobbit.

« Mon cher Gandalf ! s'exclama Bilbon.

— Mon ami, vous avez une bien bonne mine. N'avez-vous pas l'air un peu à l'étroit dans votre veston ?

— J'en blâme les nains ! Je suis leur hôte depuis une semaine et je crains de prendre encore d'ici à mon départ ! »

Le soleil monta encore haut dans le ciel, dispersant les derniers bancs de brouillard de la ville de Dale. Dain, droit sur le trône, devint nerveux. La cérémonie commençait dans une demi-heure et le roi Thranduil n'était toujours pas arrivé.

Des murmures montèrent des invités, impatients et inquiets, qui attendaient en silence depuis plus d'une heure les derniers attendus. Les nains fronçaient les sourcils, marmonnaient et certains dévisageaient les elfes de la Lorien. Elrond lui-même ne semblait pas à son aise. Il échangea quelques mots avec ses fils et regardait tantôt la porte tantôt le visage de Dain qui s'empourprait au fur et à mesure que le temps passait, tantôt Tauriel, seule elfe de la Forêt Noire présente.

Tauriel elle-même s'inquiétait du retard de son roi. Elle s'efforçait de ne pas le montrer mais des rides d'expression au coin de ses yeux, ses sourcils légèrement froncés et son maintien un peu raide la trahissaient pour qui savait observer.

« Ce n'est pas bon, murmura Balin. Si Thranduil ne vient pas…

— Il peut simplement être en retard, argua Bilbon.

— Mon cher Bilbon, seul un magicien peut se permettre de faire attendre un roi ! lâcha Gloin avant d'ajouter à l'attention du magicien. Sans vouloir vous reprocher vos arrivées inopinées, Maître Gandalf. Vous arrivez juste à l'heure et pour un roi, c'est déjà presque trop tard.

— Vous n'avez pas à vous excuser, Gloin, répondit aimablement le magicien. Vous avez entièrement raison ! Le mariage est dans dix minutes. Thranduil aurait dû arriver voici deux heures au moins.

— Bah, il y a une journée à cheval entre la Forêt Noire et Erebor, il doit avoir eu un contretemps ! Ce n'est pas si grave !

— Bien sûr que si ! se récria Balin. Nous sommes en négociation avec eux pour des accords commerciaux et militaires. Son absence va considérablement les compliquer.

— Elrond et Haldir ne sont pas venu parce qu'ils apprécient les mariages ou les longs voyages, Bilbon, précisa Gandalf, mais parce qu'il est certaines occasions où l'absence d'un souverain serait une insulte. Le monde est rempli d'ennemis. C'est dans des rencontres comme celles-ci qu'un peuple peut renforcer ses alliances.

— Ou les défaire ? supposa le hobbit avec un frisson. Mais je croyais que les relations avec la Forêt Noire allaient mieux…

— Mieux, oui. Tauriel fait un travail formidable ! Ménager la susceptibilité des elfes et des nains est un travail d'équilibriste, j'en sais quelque chose ! »

A l'autre bout de la pièce, Elrond esquissa un sourire.

« Bien, cela reste à voir, poursuivit Gandalf. Il faut plus que quelques années pour réunir les elfes et les nains. Thranduil lui-même n'est pas venu à Erebor depuis la bataille d'il y a dix ans, il n'a envoyé que des émissaires et aucun de son sang ni de haut rang. Son absence sera perçue par tous les nains comme une insulte ! Maintenant, chut ! »

Ils attendirent. Assez sage pour laisser une dernière chance, Dain attendit une heure, puis deux et enfin trois. Finalement, se fut Tauriel qui sauva de justesse la situation. Elle quitta le recoin d'où elle attendait nerveusement et se tint devant le trône de Dain.

« Je représenterai mon peuple, les elfes de la Forêt Noire, et mon roi, déclara-t-elle en s'inclinant plus bas encore que quiconque ce jour-là. A ce titre je sollicite l'indulgence des nains pour l'absence du roi Thranduil et je vous supplie de ne pas lui en tenir rigueur. »

Le visage cramoisi devant l'affront, Dain fit un vague signe d'assentiment. Ce fut la dernière fois que le nom de Thranduil fut prononcé.

Le Roi sous la Montagne donna l'ordre de commencer la cérémonie, à la fois fête d'anniversaire de la reconquête de la montagne et de la victoire contre les armées de gobelin et d'orques et mariage du Roi sous la Montagne.

Les cadeaux des invités se révélèrent somptueux, à l'exception de celui de Bilbon mais les cartes d'Erebor qu'il avait réalisé lui-même et la meilleure herbe à pipe de la Comté touchèrent profondément Dain. Celui apporté par Tauriel était banal, bien insuffisant pour une offrande faite au nom de la Forêt Noire. Personne n'en parla : Dain l'accepta avec les formules de politesse d'usage chez les nains, le regard glacial.