GAMEBOOK

Disclaimer : Fringe est la propriété de Warner Bros Television, Bad Robot et Fringe Element Films. Tous droits réservés.
Spoilers : Saison 1, Saison 2 jusqu'à The Bishop Revival.
Résumé : Les failles se multiplient entre les deux mondes. Pour contrer l'invasion, la Division Fringe se voit confier par Broyles une enquête particulière. Les investigations de Peter et Olivia les emmènent de l'autre côté de cette réalité…
Keywords : Enquête, Fringe Division, mythologie, univers multiples, P/O

Immenses remerciements à Lunastelle qui n'a pas hésité à prendre du temps pour me relire, me corriger et me conseiller ! Merci pour tout ce que tu m'as apporté. Tu n'imagines pas :) !!
Et merci à Xeen de m'avoir redonné envie d'écrire des fics !


Première partie : La Route Obscure

La nuit était tombée et le froid se faisait plus vif. Les rues étaient désertes. La lumière neutre des lampadaires se reflétait à intervalles réguliers sur le trottoir mouillé. Olivia serra son trench-coat contre elle et accéléra le pas pour regagner son appartement. Elle en était à mi-chemin lorsqu'elle aperçut du coin de l'œil une vibration déchirer l'air.
La peur fondit sur elle subitement, enveloppant sa poitrine d'une chape glacée. L'univers allait s'ouvrir comme un cocon mûr et…
Tout devint rouge sang. Elle s'éveilla brusquement.
Elle se redressa dans son lit, légèrement tremblante. L'appartement était plongé dans le silence et l'obscurité. Le ronronnement entêtant du réfrigérateur parvint jusqu'à elle. Elle relâcha son souffle dans un soupir de soulagement.
Ce n'était qu'un mauvais rêve.
Les cauchemars se faisaient plus nombreux, ces derniers temps. Ils revenaient la hanter régulièrement. Ce n'était pas bon signe. Elle croyait avoir pris l'habitude de cette nouvelle réalité. Elle pensait avoir accepté l'idée de cet abîme empli d'univers tous plus effrayants les uns que les autres. Mais en réalité, son esprit luttait encore pour comprendre. Et l'instinct avait pris le dessus. Les peurs ancestrales revenaient. Une terreur venue du fond des âges.
Elle se leva, repoussant les couvertures. Impossible de se rendormir. Elle ne comptait pas même essayer. Elle se dirigea vers le salon, alluma la télévision, se mit à zapper machinalement. Elle arrêta son choix sur un épisode de Mister Bean. Il ne parvint pas à lui arracher l'ombre d'un sourire. L'angoisse la tenaillait. Mister Bean, en dépit de ses grimaces, était transparent. Un autre spectacle se déroulait derrière les yeux hagards d'Olivia, encore emplis de sommeil. Un spectacle intérieur effrayant.
Elle s'arracha avec effort à ses pensées. Il fallait qu'elle abrutisse ses sens pour occuper son esprit.
Elle prit son iPod et mit le volume à fond. Faire souffrir quelques moments ses tympans était un moindre mal. Elle avait pensé à se détendre dans un bon bain chaud, mais elle répugnait à se déshabiller maintenant. Elle détestait se sentir vulnérable dans ces instants. Si l'univers basculait...
Mais la musique ne parvenait pas à la distraire. Le cauchemar était prégnant. Elle soupira en éteignant le lecteur. Il ne lui restait qu'une seule chose à faire.

Il n'était que quatre heures du matin lorsque le téléphone de Broyles se mit à sonner. La main du Directeur de la Fringe Division émergea des couvertures et tâtonna sur la table de chevet pour trouver le combiné. Elle finit par le saisir et le ramena sous le drap.
— Allô ?
Il se passa quelques instants de silence absolu. Lentement, la main réapparut et reposa le combiné sur son support. Puis brusquement la couverture fut projetée en l'air et Broyles bondit hors de son lit, vêtu seulement d'un caleçon.
Il était athlétique, et les muscles jouaient nerveusement sous sa peau. Son visage était grave et la nouvelle reçue par téléphone paraissait l'avoir définitivement tiré du sommeil.
Il enfila rapidement une chemise posée négligemment sur une chaise et attrapa son cellulaire. Il composa un numéro et la voix de Nina Sharp se fit entendre à son oreille :
— Phillip ? J'attendais ton appel.
— C'est arrivé quand, exactement ?
— Il y a une heure. Ça s'accélère, Phillip. Il va falloir agir et vite.
— On se retrouve au QG dans vingt minutes.
— Je pense que tu devrais l'appeler.
Broyles éluda la remarque :
— A tout de suite.
Il termina de s'habiller à la hâte, glissa le Browning dans son holster et sortit vivement de l'appartement.

Il parvint moins d'un quart d'heure plus tard au lieu du rendez-vous, au dernier étage d'un immeuble anonyme. Au fond d'un couloir faiblement éclairé se trouvait une pièce plongée dans une semi-obscurité. Et au centre de la pièce, des hommes en costumes gris s'étaient rassemblés autour d'une table, leurs visages indistincts dans le clair-obscur. Parmi eux se tenait Nina, vêtue d'une longue robe pourpre, un châle sur les épaules. Elle accueillit Broyles d'un sourire poli. Ses yeux n'avaient aucune expression. D'un geste mécanique, elle fit signe à Phillip de se joindre au groupe. Elle avait l'air fatiguée et son bras robotique luisait dans la pénombre.
— A combien en sommes-nous ? lança Broyles en s'asseyant en face d'elle.
— Six. Et il semblerait que trois autres se soient ouvertes depuis le premier appel, répondit-elle lentement.
Broyles la regarda fixement.
— Ils sont nombreux à être passés ?
Nina se tourna vers l'un des individus présents et l'interrogea du regard. L'homme croisa les mains sur la table :
— Une vingtaine, tout au plus. Mais nous avons du nouveau.
Il se pencha et saisit un attaché-case posé près de sa chaise. Il l'ouvrit et en sortit une série de clichés de médiocre qualité. On y voyait les contours flous d'une créature indéterminée.
« Ils ont amené ça avec eux.
Broyles prit l'une des photos et l'étudia longuement.
— Et ces brèches ? Où se sont-elles ouvertes, exactement ? A-t-on défini un périmètre ?
— Pas encore. Il semblerait que leurs positions soient aléatoires, fit Nina sans cesser de fixer Broyles. Elle reprit : « Phillip, je pense que tu devrais l'appeler.
Il détourna le regard et serra les mâchoires. Il paraissait ennuyé. Nina posa sa main sur son bras :
— Elle pourrait nous aider.
Il finit par se retourner vers elle et planta ses yeux noirs dans les siens :
— Je vais voir ce que je peux faire.

Ce n'est qu'au bout d'une heure d'exercices intenses qu'Olivia décida qu'elle pouvait s'arrêter. Elle était en sueur mais au moins le cauchemar s'était dissipé. Rien de tel que l'exercice physique pour se nettoyer l'esprit. Elle se dirigea vers la salle de bains et prit une longue douche, fraîche et stimulante. Elle se sentait bien mieux à présent. Le cauchemar avait été bref mais intense. Les sensations avaient été si puissantes qu'elles l'avaient complètement destabilisée. Il faudrait qu'elle apprenne à maîtriser davantage ses émotions. Elles commençaient à prendre le pas sur son sang-froid et cela l'inquiétait.
Elle sortit de la douche, enfila un peignoir et entreprit de se préparer un café. La lumière du jour commençait à filtrer par les persiennes. Il y avait du soleil et cela acheva de lui redonner le moral. Une dure journée s'annonçait. Elle n'aurait pas le temps de s'attarder sur ses frayeurs nocturnes.

Lorsqu'elle arriva au labo, Walter était en train de déjeuner. C'était un spectacle à la fois comique et consternant. Walter était capable d'absorber des portions gargantuesques, mais il se salissait comme un enfant. Pour l'instant, il était en train d'émietter un biscuit dans un récipient d'un air concentré.
— Bonjour, Walter, fit Olivia en entrant.
Il releva la tête et lui sourit.
— Bonjour Olivia. Vous avez bien dormi ?
La question à ne pas poser, se dit Olivia.
— Très bien, mentit-elle. Et vous ?
— Oh, moi… fut la seule réponse qu'il lui donna.
Elle se dirigea vers lui et observa son manège.
— Qu'est-ce que vous faites, Walter ?
Il ne releva pas les yeux pour lui répondre.
— Je vérifie une théorie sur les miettes.
Elle hocha la tête, bien décidée à ne pas en savoir davantage.
— Hum. Où est Peter ?
— Il est allé acheter quelques pancakes.
— Pour votre théorie ?
— Non, pour Astrid, fit Walter avec un grand sourire. La pauvre n'a rien mangé depuis hier soir.
— Oh, je vois. Le petit déjeuner au labo va devenir une tradition, alors ?
— Et vous Olivia ? Je parie que vous avez le ventre vide.
Olivia lui sourit sans répondre. Elle jeta un rapide coup d'œil au labo, cherchant Astrid du regard. Elle allait poser la question à Walter lorsque son cellulaire se mit à biper. C'était Astrid.
— Olivia, l'agent Broyles cherche à vous joindre. Il vous attend. C'est urgent.
— OK, Astrid, j'arrive. Où êtes-vous ? Walter déjeune seul au labo.
— J'ai été appelée tôt ce matin par la Division. Je serai au labo d'ici une demi-heure. Peter n'est pas avec lui ?
— Pas pour le moment. Okay, dites à Broyles que j'arrive. Merci.
Walter mouilla le bout de son index et commença à collecter les miettes qui constellaient sa blouse. Il leva son doigt humide vers Olivia :
— Ne vous inquiétez pas, Olivia. Peter ne va plus tarder maintenant. Vous vouliez le voir ?
— Non… ça attendra. Merci Walter. A tout-à-l'heure… et bon appétit.
— Marchi, répondit Walter, la bouche pleine.

Olivia quitta le labo vaguement déçue. Passer par Harvard avant de rejoindre les bureaux du FBI était toujours un moment plaisant. Elle avait appris à apprécier la compagnie fantasque de Walter et la bienveillance tranquille d'Astrid. Et surtout, la présence rassurante de Peter, toujours disponible et solide comme un roc au milieu d'un torrent impétueux. Il était brillant et un tantinet égocentrique, mais aussi capable de bravoure et d'une grande générosité. Elle aurait été heureuse de le croiser ce matin, avant de replonger dans les méandres habituels de ses enquêtes. Tant pis. Ce serait pour plus tard. Peut-être avant la fin de la journée, si elle avait de la chance. Pour le moment, le Devoir l'appelait. Et elle l'aurait bien envoyé sur les roses, mais elle était trop honnête pour faillir à ses obligations. Visiblement, Broyles avait besoin d'elle. Et bien que ce soit gratifiant, elle ne se sentait pas très à l'aise lorsqu'il s'agissait de monter au front. Le danger grandissait chaque jour et Olivia sentait ses défenses se déliter lentement. Il fallait qu'elle se ressaisisse. Sa confiance devenait ces jours-ci peau de chagrin.

Une fois arrivée au FBI, elle se dirigea immédiatement vers les quartiers de Broyles, sans prendre le temps de passer par son propre bureau. Astrid avait dit que c'était urgent et on ne faisait pas attendre Phillip Broyles.
Elle frappa deux coups brefs à la porte et attendit qu'il l'invite à entrer. Il était assis à son bureau lorsqu'elle pénétra dans la pièce.
— Bonjour Monsieur.
— Asseyez-vous, Dunham, fit-il en lui indiquant le siège face à lui.
Elle s'assit et attendit, les mains sur ses genoux.
— Vous vouliez me voir ? hasarda-t-elle, constatant qu'il tardait à entamer la conversation. Il la fixait d'un air absent, comme s'il ne parvenait pas à se décider. Puis tout à coup, il se lança.
— J'ai une mission à vous confier. Il y a quelques années, j'ai travaillé sur une enquête particulièrement difficile. J'ai eu recours aux services d'une personne… spéciale. J'ai besoin que vous la recontactiez.
Il lui tendit un épais dossier qu'elle compulsa d'un air concentré. Sur la première page, on y voyait l'image d'une jeune femme d'une vingtaine d'années, aux yeux pétillants.
— Soline Forrester, lut Olivia, adressant un regard interrogateur à son supérieur.
— La photo est ancienne. Elle doit avoir la trentaine bien sonnée aujourd'hui. D'après mes sources, elle est écrivain et habite dans le Maine. Je ne crois pas…
Il laissa sa phrase en suspens, puis reprit :
« Je ne crois pas qu'elle acceptera de revenir collaborer avec nous, mais tentez votre chance. Dans tous les cas, il faut absolument que vous récupériez l'un de ses manuscrits. Il peut nous aider.
— Vous parlez du Projet ? s'enquit Olivia, qui avait bien perçu la tension qui émanait de Broyles.
Il acquiesça lentement.
— D'autres brèches se sont ouvertes, confirma-t-il d'une voix grave. Ils commencent à traverser.
Un frisson parcourut l'échine d'Olivia. Même en ayant juste entr'aperçut la menace, elle savait instinctivement ce que cela signifiait. L'entraînement qu'elle suivait depuis quelques mois avec ses coéquipiers avait accéléré son immersion dans le monde inquiétant des réalités alternatives et des univers parallèles. Un monde en perpétuelle mouvance, aux contours instables, qui pouvait disparaître et se transformer à chaque seconde. Un monde où le combat essentiel était de rester sain d'esprit. Dans cette réalité improbable, Walter s'était curieusement épanoui. Il était dans cet univers changeant comme un poisson dans l'eau. A croire qu'il en connaissait la nature depuis des lustres.
— Comment s'appelle ce manuscrit ? demanda Olivia en feuilletant le dossier. C'est en rapport avec ZFT ?
— Non. Il s'agit d'un roman, qui s'intitule La Route Obscure.
— Un roman ? Olivia haussa un sourcil.
— Oui, mais ne vous méprenez pas. Ce n'est pas un roman ordinaire.
Un peu déroutée, Olivia se leva comme Broyles l'invitait à partir :
— Vous trouverez ses coordonnées dans le dossier. Dites-lui que vous venez de ma part. Je suis un peu resté comme… un ami, pour elle.

Peter serra le sac de viennoiseries contre sa poitrine et pressa le pas. Quelle idée stupide avait-il eu de se rendre dans une french bakery ! Il aurait dû se douter qu'il y aurait de l'affluence à cette heure-ci. Il fulminait en particulier contre la horde de mamies pimpantes qui étaient entrées dans la boulangerie juste avant lui. Elles avaient commencé à discuter avec la boulangère, à parler de la pluie et du beau temps. Puis du tour de taille des pigeons obèses qui pullulaient au bord de leurs fenêtres — Mon Dieu, avez-vous vu comme ils sont gros c'est tout à fait horrible pauvres bêtes. Et pendant ce temps, Peter attendait son tour. Comptant nerveusement les petits pains et les croissants qui s'amenuisaient dans les corbeilles en osier. Il avait perdu un temps fou dans cette boulangerie. Il avait pourtant pris soin de partir tôt, pour avoir une chance de voir Olivia au labo à son retour. Avant qu'elle ne parte au FBI. Il jeta un coup d'œil à sa montre. Il arriverait trop tard…

Il fit irruption dans le labo en coup de vent et découvrit que ses craintes étaient fondées. Pas de traces d'Olivia. Son père était attablé et grignotait des madeleines.
— Peter ! Tu en as mis du temps ! Astrid est affamée…
Peter soupira et déposa son précieux colis sur la table. Astrid vint à petites foulées humer l'odeur des pains au chocolat encore tièdes.
— Mmmmh merci Peter.
— Je suis désolé. La boulangerie a été prise en otage par une armée de petites mamies. On devrait leur interdire de sortir entre 7 et 20h.
Astrid pouffa en croquant dans une chouquette.
— Olivia est passée, fit Walter en s'essuyant la bouche. Je crois bien qu'elle voulait te voir…
— Ah oui ? Quelque chose d'urgent ?
Peter était soudainement devenu inquiet. Depuis quelques temps, Olivia passait beaucoup de temps à se préparer à visiter l'autre réalité. Et Peter avait bien l'intention de ne pas la laisser y aller sans lui. Il savait qu'elle ne voulait pas l'exposer et craignait qu'elle soit envoyée de l'autre côté sans qu'il en soit prévenu.
Walter s'approcha de son fils et le considéra longuement :
— Ne t'inquiètes pas. Ce n'est pas pour aujourd'hui, fils.
Peter regarda son père avec des sentiments mêlés. Walter était si surprenant. Il semblait vivre dans un autre monde et percevait pourtant des subtilités que les amis les plus proches de Peter ne savaient pas reconnaître.
Il ne répondit pas à Walter et s'éclipsa dans le bureau qu'occupait Olivia quand elle restait travailler parmi eux. Il saisit le téléphone et composa rapidement un numéro.
— Allô ? J'ai besoin de toi… Oui. Tout de suite, si tu veux bien. Je voudrais reprendre l'entraînement… Oui. Je pense que c'est pour bientôt… D'accord.
Il raccrocha, pensif. Son père était entré dans la pièce et le fixait sans parler. Lorsque Peter se retourna, il découvrit Walter et son regard incisif posé sur lui.
— Si Olivia le découvre… murmura Walter.
Peter soutint le regard de son père.
— Je ne fais rien d'illégal.
— Tu ne devrais pas le lui cacher.
Il s'approcha de son fils et posa une main sur son épaule.
« Je sais que tu veux la protéger. Je le comprends. Mais tu ne peux pas agir ainsi. Tu n'es pas supposé suivre cet entraînement. Tu n'es pas un agent spécial.
— Peu importe mon statut, Walter. Je suis le plus qualifié pour accompagner Olivia de l'autre côté. Je sais exactement à quoi m'attendre. Et je n'ai pas peur.
Walter serra l'épaule de son fils dans sa main.
— Je sais, fils. Mais… il faut que tu sois plus prudent. C'est extrêmement dangereux. Crois-moi. Tu ne dois pas aller là-bas.
Peter sourit à son père d'un air confiant, pour le rassurer. Mais Walter ne fut pas dupe. Il savait lire dans les yeux de son fils.