Bonjour ! Je me lance dans une nouvelle traduction. Pour l'instant, c'est juste un enfer de style et de vocabulaire. Enfin une bouche de l'enfer.
Mais tout de même, je l'ai trouvée sympa dans le genre court et tentable... Toutes les idées sont à l'auteur, les personnages sont à qui de droit, seule cette mauvaise traduction est à moi finalement. J'espère que vous aimerez vous aussi ce "POV" Giles (dans tous les sens du terme).

A priori, cette histoire s'insère après l'épisode 3 de la saison 7 (Vice versa).


RUPERT, J'AI RÉTRÉCI LES GOSSES [Drink me]

Traduction de la fanfiction de Treacle-antlers

Résumé de l'auteur : Un sort initialement destiné à frapper Giles laisse tout le Scooby Gang passablement « incapacité ». Giles, Anya et Spike doivent faire de leur mieux pour gérer la situation, et essayer de trouver ensemble une solution pour les sortir de là.

* Amis québécois, ne riez pas. La fic ne parle pas du tout de ça… :-D


Chapitre 1 : Bois-moi

La sonnerie du réveil n'avait pas fonctionné. En cherchant l'affichage à LED, ses yeux lourds de sommeil tentèrent péniblement d'accommoder sur les chiffres clignotants :

00.00 ampm
00.00 ampm
00.00 ampm

Bon, manifestement, il avait dû y avoir une coupure de courant pendant la nuit. Il passa une main pensive pour masser ses paupières. Cela n'avait rien de tellement surprenant parce qu'après tout… Oh seigneur ! Il était de retour à Sunnydale.

Sunnydale, Californie. Sunnydale et sa bouche de l'Enfer, Capitale Occidentale et Sponsor Officiel Mondial du Bizarre et de la Terreur… Et accessoirement une ville dont les services publics sont en perpétuel dérangement, à cause du nombre considérable de démons qui fourmillent dans ses sous-sols…

Continuant à masser doucement ses tempes, il fit un effort pour tenter de se rappeler quelle affaire terriblement cruciale avait requis – encore une fois – sa présence ici, et l'avait arraché à sa retraite merveilleusement paisible de la campagne de Bath, au prix d'un voyage bien trop long et trop épuisant. De nouveaux soucis avec Dawn ? Une incontrôlable « rechute Rosenberg » ? Sûrement quelque chose d'envergure apocalyptique en tous cas, mais alors pourquoi avait-il tant de mal à retrouver ce que c'était ?

Et puis soudain, tout lui revint d'un coup. L'échine parcourue d'un irrépressible frisson glacial, ses yeux s'écarquillèrent d'horreur dans la faible lumière de sa chambre d'hôtel. Oh non. Faites que ce ne soit qu'un simple cauchemar… Mais le costume de soirée noir, suspendu au dos de sa porte, ne faisait qu'apporter sa sinistre confirmation.

Seigneur ! Le mariage !

Pas moyen d'endiguer le terrible sentiment de catastrophe imminente qui venait de déferler sur lui.

D'ailleurs c'était bien simple, à la minute où ils l'avaient appelé, son estomac s'était retourné. Bien sûr, il supposait qu'il avait évidemment dû dire tout ce qui convenait en la circonstance car Anya avait ri et pleuré, puis l'avait remercié abondamment, et poliment, avant qu'Alex ne lui reprenne le téléphone pour dire presque exactement la même chose qu'elle. A ce détail près que sa voix avait été considérablement moins perçante et plus facile à supporter.

Avant même de réaliser ce qu'il était en train de faire, il s'était entendu lui tenir – leur tenir – d'invraisemblables promesses. Oui évidemment qu'il allait pouvoir revenir. Et repayer pour les fleurs. Et qu'il serait heureux et fier donner le bras à Anya pour la conduire jusqu'à l'autel…

Avec le recul, c'était peut-être ça qui lui avait causé le plus gros choc et il ne pouvait toujours pas se résoudre à croire qu'il avait accepté une chose pareille. Bon à la limite, ça aurait pu être flatteur si elle n'avait pas cru bon de faire suivre sa requête d'un très joyeux : « Apparemment, il faut que ce soit quelqu'un de vieux. Et un homme. Et comme vous êtes le seul vieillard que nous connaissons… C'est si typiquement humain comme coutume ! ».

Oui.

Pourtant, à bien y réfléchir, ils ne lui avaient pas exactement vendu la chose comme un honneur mais bien comme une tâche herculéenne. Ils lui assignaient la mission d'être leur homme-orchestre, le factotum polyvalent qui s'assurerait que tout se passerait comme sur des roulettes, cette fois-ci. Ils lui avaient confié absolument toute l'organisation du mariage, depuis la décoration jusqu'à la vérification de la bonne arrivée du notaire en temps et en heure… Officiellement, les autres Scoobies étaient hors du coup car bien entendu la cérémonie et la petite fête méticuleusement planifiée qui se tiendrait ensuite se devaient d'être une complète surprise pour eux tous.

C'était certes là une décision importante pour eux deux, l'une de celles qu'ils ne pouvaient pas prendre à la légère. Le couple s'était donné tout le temps de la réflexion avec un maximum de sérieux et de gravité avant de s'engager pour une seconde – et espérons-le définitive – cérémonie. Car comme l'avait si éloquemment formulé Alex : « Si celle-là on la foire une seconde fois, on sera tous bons pour ramasser nos entrailles à la petite cuiller ! ».

Oui, demain serait un jour de célébration. Le coup d'envoi du bonheur futur de deux merveilleuses et très méritantes personnes. Un futur pour lequel ils avaient dû parcourir un très long chemin, tant émotionnellement que spirituellement. Et il était vraiment content pour eux. C'était juste pour lui-même qu'il se sentait désolé.

Se glissant hors du lit, il s'étira avec un brin de raideur et une fois debout, contempla son reflet dans le miroir en pied. Rentrant presque inconsciemment sa bedaine naissante, il passa une main dans ses cheveux grisonnants et pencha la tête de côté pour faire saillir ses pommettes bien dessinées. Un vieillard, très clairement.

Des coups frappés à la porte par la femme de chambre interrompirent le fil de ses pensées et l'informèrent qu'il était au moins dix heures. Il grogna intérieurement en se rappelant que le couple lui avait prévu un programme au timing très précis… qui partait déjà en quenouille. En théorie, il aurait dû avoir porté son chèque au traiteur à neuf heures et demie, puis les retrouver à la Boutique de Magie vers onze heures pour régler les derniers détails de leur surprise… Enfilant rapidement son peignoir de bain pour aller ouvrir la porte à la femme de chambre, il récupéra ses serviettes propres et se hâta d'aller prendre une douche fatalement rapide et froide. Il ouvrit en grand le robinet d'un geste agacé.

A peine revenu depuis un jour à Sunnydale et c'était déjà le rush.

oOo

Les réjouissances continuèrent de plus belle. Et plutôt deux fois qu'une. D'abord, sa voiture était une boîte automatique, ensuite elle se parait d'un éclatant et lumineux… rose fuchsia.

— Et vous n'avez rien d'autre à me proposer ? interrogea-t-il.

Derrière son comptoir, le sourire de son interlocutrice était si surdimensionné qu'il lui rappelait étrangement celui de la plus mauvaise statue de cire de la Princesse Diana qu'il avait jamais vue. Pendant une brève seconde, il évalua la possibilité qu'elle fut un démon quelconque, tant sa malfaisance était indéniable.

— Je suis désolée monsieur, mais votre e-mail spécifiait bien que vous vouliez une « voiture compacte ».

Il serra les dents pendant que le baromètre de son humeur dérivait lentement de mauvaise vers massacrante

— J'avais téléphoné. Et je pense que si j'avais demandé une cochonnerie de 4x4 Barbie, je m'en serais souvenu, vous ne croyez pas ?

Il n'y avait aucune chance qu'elle y fasse quoi que ce soit. Il avait déjà vu à l'œuvre ce genre de « service client » un million de fois dans ce pays abandonné de Dieu. Avec un sourire plus blanc que blanc et un silencieux « Allez vous faire foutre, monsieur », les yeux dans les yeux. L'Amérique : le pays où le client est roi !…

Il attrapa les clés sur le comptoir et tourna les talons sans rien dire, avec un petit reniflement de mépris. Et un londonien mal embouché de remis à sa place, un.

oOo

Et ça n'était que le début. A son tour, le traiteur avait pris son chèque sans un merci et n'avait pas tardé à expliquer que le gâteau aurait peut-être un peu de retard. Combien exactement, il n'était pas en mesure de le dire, mais il y avait tout de même une chance pour qu'il soit là à temps pour la petite fête (une chance, une seule ?). Évidemment, c'était ce qui se passerait dans le pire des cas, car tout irait sans doute très bien. Mais le cas échéant, il rajouterait à la dernière minute et gratuitement, des amuse-gueules au crabe, ça allait sans dire.

Giles ne commenta pas celle-là. Parce que la simple menace de violences physiques parut produire l'effet escompté. Il quitta le petit homme tremblant de peur derrière ses paniers gourmands, se retirant dans un ténébreux et fort impressionnant envol de cachemire.

Il voulait croire que la crédibilité de sa sortie n'avait pas été trop entamée par la couleur de son moyen de transport. Rabattant sèchement le pommeau de sa bulle de chewing-gum rose sur la position « Drive », il quitta le bord du trottoir dans un crissement de pneus et rejoignit le trafic urbain matinal.

Seigneur, il détestait vraiment Sunnydale !

oOo

La Volkswagen Rabbit d'Anya était à sa place devant la Boutique et la nouvelle monstruosité argentée d'Alex occupait le seul parking visiteur disponible. Il maugréa un peu en silence en réalisant qu'il allait devoir se trouver une autre place dans la rue, comme un visiteur quelconque. Au moins, la Barbiemobile était simple à manœuvrer et il réussit à la caser relativement facilement.

Son pare-chocs arrière venait juste de s'effacer entre deux voitures quand un hurlement de freins aigu lui fit soudain tourner la tête. Abaissant la vitre en vitesse, il était déjà en train de préparer des excuses rien moins qu'amicales pour le conducteur du van noir :

— Euh… je suis vraiment navré… je n'avais pas vu votre voit…

L'incrédulité le figea net.

Un visage familier lui renvoyait son regard au travers des vitres teintées, répliquant presque exactement sa propre surprise, avant de lui adresser une petite grimace moqueuse. Les yeux écarquillés d'étonnement et d'inquiétude face à l'expression que venait d'arborer son vieil ami, Giles sentit pourtant une colère froide monter en lui. Ses lèvres incrédules formèrent toutes seules un nom, avant même que ses cordes vocales ne puissent lui donner corps.

Ethan.

Que diable faisait-il ici ?

Il tâtonna pour ouvrir la porte juste au moment où Ethan se remit à bouger. Tête baissée, ce dernier faisait marche arrière. Pendant que son van se retournait dans un tourbillon de fumée et un râle de moteur agonisant, Giles se mit à courir après lui. Mais en quelques secondes, le véhicule noir avait déjà atteint le bout de la rue et tourné pour se réinsérer dans la circulation – salué par un concert de klaxons frénétiques alors qu'il remontait la rue en sens inverse, jusqu'au prochain croisement.

oOo

Toussant un peu à cause des fumées d'échappement, Rupert regarda la voiture noire disparaître d'un air sombre, tandis qu'il cherchait vainement à comprendre ce qu'Ethan Rayne pouvait bien faire dans le coin. Déjà, comment pouvait-il être dehors ? La dernière fois qu'il avait entendu parler de lui, l'Armée le tenait en détention plus étroitement surveillé que les joyaux de la Couronne…

Il se recoiffa d'une main nerveuse, en commençant deviner d'où venait le mauvais pressentiment qui ne le quittait pas.

— Il a laissé un pet' sur votre carrosserie ?

Complètement pris par surprise, Giles sursauta de frayeur en entendant à côté de son épaule le son d'une voix pourtant très aisément reconnaissable. Le rictus assorti apparut hélas dans son champ de vision bien avant qu'il n'ait le temps de se redonner une contenance.

— Désolé vieux, je ne voulais pas vous refiler une crise cardiaque…

Spike.

Évidemment, il fallait qu'il soit toujours là, à rôder dans les environs. Pour être près de Buffy et près de ses amis, tout en ne se montrant jamais.

Étrécissant ses paupières, Giles étudia le visage du vampire avec une froide curiosité et nota qu'il passait de son habituel petit sourire supérieur à un étrange malaise. Baissant les yeux, ce dernier attrapa un paquet de cigarettes dans sa proche et s'en alluma une avant d'inhaler profondément.

— Ils vous l'ont dit, alors ?

Giles ne pouvait s'empêcher d'être tout de même étonné car la nervosité n'était pas une émotion qu'il avait l'habitude d'associer avec Spike. Mais à sa décharge, il fallait reconnaître que l'adjonction brutale d'une âme pouvait certes causer des répercussions bizarres sur la personnalité d'un vampire.

— Oui, ils me l'ont dit.

Ce n'était pas peu dire que d'affirmer qu'il avait été surpris par la nouvelle. Pour un vampire, rechercher volontairement la restitution de son âme, c'était du jamais vu. Il n'existait aucun précédent historique à la chose et il s'en était assuré en fouillant discrètement les archives du Conseil, quand Buffy lui avait parlé de la très récente « acquisition » de Spike. C'était d'une totale incongruité. Passé le premier choc et quand il avait pu y réfléchir à tête reposée, il avait pourtant réalisé s'il y avait un seul vampire au monde qui aurait pu vouloir une chose pareille, et ça ne pouvait être que Spike. Après tout, dogmatique était son deuxième prénom.

Pourtant, maintenant qu'il avait l'occasion de le revoir en face, Giles était surpris qu'il ne soit pas physiquement plus différent. Mais ses cheveux étaient toujours de ce même ridicule blond décoloré très eighties, ses vêtements toujours fauchés directement dans les surplus de Matrix, encore que son long manteau fétiche manquât visiblement à l'appel. Il était manifestement toujours fumeur, et Giles aurait parié à dix contre un, qu'il buvait toujours comme un trou. Et par-dessus tout ça, toujours désespérément amoureux de Buffy – une autre miette d'information dont elle avait daigné lui faire l'aumône.

Combattant silencieusement son ardent désir d'attraper cette créature par le col pour exiger de connaître l'honorabilité de ses intentions envers sa Tueuse, Rupert s'éloigna sans un mot pour se diriger vers l'entrée de service de la boutique de magie.

— Et… c'est tout ?

Giles leva les yeux au ciel.

— Je ne vois pas bien ce que tu attends que je dise…

Le vampire lui emboîta le pas mais s'arrêta subitement en comprenant où il se rendait. Sa voix s'éleva d'un demi ton sous l'effet de la colère.

— Oh d'accord ! J'y suis ! J'aurais dû m'en douter… L'âme ne fait pas plus de différence pour vous que ça n'en fait pour elle. Vampire un jour, vampire toujours ! Pas vrai, l'Observateur ?

Pendant un bref instant, son agacement surpassa le besoin de s'assurer que tout le monde allait bien à l'intérieur et Giles fit volte-face, les yeux plissés comme deux froides petites fentes grises. Le visage de Spike affichait une rébellion presque puérile, comme un masque douloureux et colérique qui figeait ses traits pendant qu'il restait là, les épaules voûtées par la déception, à l'abri d'un coin d'ombre de la rue.

— Tu es toujours un vampire. Mais pour répondre à ta question, si. Ton âme fait une différence. Elle signifie que dorénavant, tu as le choix entre un style de vie brutal, cruel, marginal et d'une violence inimaginable – ou bien tout le contraire. Mais pour l'instant, je n'ai pas le moindre indice d'un quelconque changement. Tout ce que je vois, c'est que tu cherches toujours un moyen d'accéder à Buffy.

Giles coupa d'un geste la réponse furieuse de Spike avant même qu'il ne puisse la formuler.

— Si tu veux que Buffy commence à te traiter comme une personne, je te suggère de commencer à te comporter comme tel.

Et sur ces mots, il ouvrit la porte de la Boutique de Magie pour y entrer.

oOo

Pendant un moment, il n'entendit qu'un épais silence et croyant qu'il était soudainement devenu sourd, il sentit la peur monter en lui comme un bain froid, grimpant rapidement depuis ses jambes pour l'engloutir. Ethan. Que leur avait-il fait ?

Puis un rire se mit à résonner. Celui de Buffy. Une sonorité brillante et heureuse qui envoya direct à son cerveau une bouffée de soulagement alors qu'il courait presque vers la salle d'entrainement pour la saluer.

Le nez au-dessus d'un énorme mug de café fumant qu'elle enveloppait de ses petites mains, elle avait tourné vers lui des yeux pleins de surprise d'abord, puis de ravissement étonné.

— Giles !

Et la voilà qui marchait vers lui, sans trop courir non plus, l'enveloppant dans une étreinte de bébé ours qui aurait pu lui rompre les côtes s'il n'y avait pas été préparé. En déposant un baiser sur sa tête, il sentit des larmes chaudes prêtes à jaillir de ses paupières, pendant qu'il contemplait la vision à la fois si familière et crève-cœur de la Boutique. Assise à la table de recherche, Dawn souriait, un livre largement ouvert devant elle, un mug de café chaud posé à sa droite. En face d'elle, Willow occupée à tremper un biscuit, avait l'air bien plus en forme et plus joyeuse que lorsqu'il l'avait quittée à l'aéroport deux mois plus tôt. Et puis le couple du bonheur : Alex dont le bras possessif enlaçait la taille fine d'Anya, tous deux souriant plus largement que le chat de Cheshire, et portant des mugs géants et fumants pleins de…

— Pourquoi tout le monde est-il en train de boire du café ?

Se réintéressant justement à sa tasse, Buffy relâcha un peu sa prise pour prendre une autre grande gorgée avant de le relâcher finalement.

— On aime le café !

Le ton haut-perché de sa voix lui parut étrange et Giles sentit soudain sa peau se hérisser pendant que son cerveau travaillait avec effort. Ethan Rayne. Ethan Rayne était là. Ethan Rayne était venu dans cette boutique. Et maintenant, Buffy se comportait bizarrement. Non minute… Ils avaient tous l'air bizarre, avec cette couleur rose sur leurs joues et leurs yeux plus brillants qu'à l'ordinaire. Qu'est-ce qui se tramait encore ici ? Bien sûr, ils pouvaient avoir pris beaucoup de retard dans leurs recherches mais ça n'expliquait pas…

— Mais Dawn aussi ? Depuis quand ?

Les regards surpris et confus convergeaient tous vers lui. Anya et Alex levèrent leurs mugs d'un bel ensemble pour les finir de concert. Dawn sourit, penchant la tête pendant qu'elle soufflait sur le sien.

— Hey, je ne suis plus une gamine vous savez ? Je peux boire du café.

Elle en prit aussi une grande goulée et fit claquer ses lèvres de satisfaction.

— En plus, il est délicieux !

Il y avait un truc de définitivement pas normal. En deux foulées, il fut près de la table et soulevait le filtre au-dessus de la cafetière qu'il n'avait jamais vue ici avant.

— D'où est-ce qu'elle vient ?

La voix d'Anya lui répondit, si aigue et tendue par la joie forcée qu'on aurait dit l'un des Chipmunks.

— Un homme l'a livrée ce matin. Il a dit que c'est vous qui l'aviez commandée.

— Quel homme ?

— Le livreur.

Il s'approcha d'elle en lui tendant le filtre, touillant son contenu d'un doigt pour qu'elle puisse bien voir la masse carbonisée d'herbes magiques qu'il y avait au fond. Alex se pencha pour y jeter un œil.

— C'est quoi ? Une nouvelle marque ?

Ethan Rayne. Ethan Rayne. Son nom tambourinait sous son crâne, pressant le sang jusqu'à ses tempes pour y drainer une migraine qui menaçait de le rendre aveugle.

— Anya, est-ce que tu as laissé ce livreur préparer le café ?

Sourcils légèrement froncés, elle lui sourit pourtant en essayant de lui reprendre gentiment la cafetière des mains.

— Oui, en fait. J'ai cru qu'il était comme ces vendeurs d'aspirateurs qui font toujours une démo. Il a dit qu'il voulait me montrer ce qu'on pouvait ressentir après une vraie bonne tasse de café.

La voix de Giles se fit coupante comme du silex quand il la força à le regarder et à arrêter d'essayer de lui reprendre le broc de café.

— Anya, est-ce que tu te rappelles s'il a dit quoi que ce soit d'autre ?

Elle fit la moue, hocha la tête et dit en se croisant les bras :

— Oui. Il a dit : c'est un mélange spécial rien que pour vous.

— Pour… vous ?

— Non pour vous. Il a dit qu'il vous connaissait et que vous apprécieriez sûrement de « retrouver un peu de ressort »…

Elle se mit à sourire, ravie d'avoir pu se souvenir de ses mots exacts.

— Maintenant Giles, arrêtez un peu de faire l'idiot… Est-ce qu'on peut en ravoir ?

Cette fois, il avait peur. Il détailla chaque visage pendant qu'il commençait à les voir tous muter. Dawn fut bien sûr la première. Elle tomba de sa chaise, les yeux arrondis comme des billes, le visage aplati, et ses cheveux raccourcis vertigineusement. Ses bras disparurent dans les manches de son sweatshirt.

Après un gémissement de banshee, Buffy se retrouva elle aussi par terre, les bras et les jambes pédalant vainement, la bouche ouverte en un cri silencieux.

— Giles ! Qu'est-ce qui se passe ?

Les doigts d'Anya venaient de se crisper sur son bras avec angoisse, et ses yeux affolés contemplaient son mari devenu une petite créature brune et boulotte qui lui arrivait à peine à la taille, ouvrant grand les yeux sur eux.

— G… an…ya !

Sa voix était toute déformée, horriblement saccadée lorsqu'il essayait de parler, tout en tirant sur son chemisier avec sa pogne moite.

— Oh Seigneur ! Giles ! Enlevez-le ! Enlevez-le de moi !

La toute dernière à partir fut Willow, sans qu'il sache trop pourquoi. Soit elle en avait simplement moins bu que les autres, soit c'était en raison de sa force magique intérieure qui lui permettait de combattre l'enchantement. Il vit ses yeux briller quand la magie s'attaqua puissamment à elle, puis la paralyser en dépit de ses efforts pour lutter.

— Giles ! Aidez-m…

Sa voix s'éleva se perdit dans les aigus pendant qu'elle gisait elle aussi par terre, se tortillant et gigotant sous la douleur.

oOo

Encore sous le choc, il finit par réaliser qu'Anya pleurait la tête dans son épaule, étouffant des sanglots de détresse pendant qu'il la tenait serrée d'un bras tout en maintenant la créature Alex à distance grâce au broc de café chaud. A priori, elle n'avait pas été affectée par la potion et il tourna brièvement son visage sur le côté pour vérifier. Des larmes roulaient sur ses joues mais à part cela, elle n'avait pas changé. C'était toujours Anya.

— Est-ce que… c'est fini ?

Sa voix chevrotait et elle continuait à s'agripper à lui, même s'il l'avait relâchée, pour reculer d'un pas afin d'embrasser la scène qu'il avait sous les yeux. Le plancher était recouvert d'un tas de vêtements où de petites formes frissonnantes se serraient frileusement, toutes pas plus grandes qu'un chien de taille moyenne. Giles sentit sa mâchoire se décrocher pendant que ses sourcils se tordaient en un froncement horrifié.

— Oh mon Dieu !

Anya semblait à deux doigts de l'hystérie, et prête à remettre ça.

— Oh mon Dieu, Giles… Qu'est-ce qui leur est arrivé ? Oh… Giles… Qui a fait… ça ?

Ethan Rayne. Ethan Rayne. Rien que son nom empoisonnait tout son système, pulsant à travers lui comme un diesel qui n'attendrait que la mise à feu.

Alors comme ça son vieux camarade manquait à Ethan ? Avait-il cru pouvoir faire revenir le Ripper qu'il avait été, juste pour le plaisir de flanquer partout une joyeuse pagaille ensemble ? C'était quoi le plan, Ethan ? Tu ne pouvais pas vaincre Giles alors tu as pensé que tu pouvais élever Ripper ?

L'un d'entre eux se remit à pleurer et la culpabilité se mit à le tarauder. Mais ce n'était pas de sa faute. Absolument rien n'aurait pu lui permettre d'anticiper ça. Ethan Rayne était responsable. Et Ethan Rayne paierait, cette fois peut-être de sa vie.

Un bruit dans son dos le fit sursauter et il se retourna par réflexe, le pot à café menaçant.

— Hey, mais faites un peu gaffe ! Vous pourriez ébouillanter quelqu'un avec ça !

Spike se tenait dans le cadre de la porte, une cigarette toujours pendue aux lèvres et les mains profondément enfoncées dans les poches.

— Écoutez, je sais ce que vous allez me répondre mais j'ai quand même un truc à vous dire.

— Spike…

— Non, attendez. Vous avez peut-être raison à propos du fait que je voulais juste mon âme pour me rapprocher de Buffy et tout ça… mais… le truc c'est que…

Il s'arrêta net au beau milieu de sa phrase, frappé à la vue des créatures qui jonchaient le sol de la boutique de magie. De petites créatures mal peignées et nues, avec de grands yeux, des bouches ouvertes baveuses et de minuscules petits doigts. Il les considéra pendant un moment avec la mimique effarée la plus théâtrale que Giles ait jamais contemplée de toute sa vie.

— Par l'enfer !

Les sourcils du vampire s'étaient arqués dangereusement quand il avait reconnu tout d'abord la veste de Buffy, et étaient montés encore d'un cran avec plus d'incrédulité, en découvrant la version haute comme trois pommes et toute nue d'une Tueuse de deux ans qu'il avait juré d'aimer jusqu'à la mort.

— Non mais qui diable a eu l'idée de les faire tous redevenir gamins !