Chapitre 1 :
La première intuition est toujours la bonne.
-Zinnia ! c'est l'heure !
-Hum…quoi ?
Je sors une tête ébouriffée de sous ma couverture. Huit heures du matin ?
Il serait vraiment temps que je me débarrasse de cette fichue horloge. Avec toute la volonté dont je suis capable sans avoir préalablement bu un jus de citrouille, je réponds à ma mère en m'extirpant dans le froid glacial de ma chambre. Oui, bon, d'accord, il fait plus chaud que prévu mais j'ai appris à toujours dramatiser des petits riens sans importance.
Il y a des grands riens qui paraissent alors un tout petit moins drama…
-Zinnia !
-Oui ! J'arrive ! Pas besoin d'en faire une crise de bulbose !
Je ne suis pas sûre que cette maladie existe mais j'imagine bien ma mère recouverte de boutons verdâtres pour le simple fait que je ne sois pas encore prête. J'arrête là mes réflexions sadiques pour enfiler un jean et une chemise en liberty bleu ciel avant de me mettre laborieusement une once de mascara puisque, à seize ans,je n'ai pas encore le droit de mettre fin aux souffrances de mon miroir avec ma baguette. La vie est injuste.
Je descends dans la cuisine, avale (voir « gobe » mais je ne tiens pas tellement à ce que vous me visualisez en mouche dès la première rencontre) deux toasts à la confiture de sureau et bois cul sec un verre de jus de citrouille. Puis, échappant aux vociférations de ma chère maman sur mon « manque d'organisation chronique et destructif », je file dans ma chambre mettre la touche finale à ma valise déjà prête depuis deux jours (vous appelez ça « manque d'organisation », vous ?! je renonce à comprendre.), cette touche finale vitale étant mon plus joli haut noir bordé de dentelle et mon dentifrice Matt Sham le Sorcier qui fait des dents éclatantes( malheureusement, l'effet ne dure qu'une heure, à réserver donc aux rendez-vous galants destinés à s'abréger vite par l'obscurité et la bieuraubeurre. Ou, comme souvent, par le devoir de constater que finalement Adonis n'est pas aussi beau de près qu'il en a l'air.)Oui, je sais, je suis superficielle mais que voulez-vous, on ne se refait pas !
La malle en cuir bouclée, je la traîne jusqu'au rez-de-chaussée, j'embrasse rapidement mon père et prends place dans le taxi que maman a appelé il y a trois jours déjà (ça c'est de l'organisation !) pour qu'il nous emmène à la gare. Ma sœur Calliope n'a pas l'air enchantée de retourner à Poudlard pour sa troisième année et Nathaniel,mon frère adoré, est bêtement en train de jouer avec un frisbee à dents de serpent qui semble avoir dépassé la date limite d'utilisation. A lire cette phrase, on pourrait croire que je n'aime pas mon frère. Si c'était aussi simple que ça…Nath est définitivement puéril et railleur, et il semble faire tout son possible pour que ma vie à Poudlard soit un désastre. En particulier ma vie sentimentale. En effet, Nathaniel est en septième année et comme tout enquiquineur qui se respecte, il est assez populaire et trouve toujours le moyen de me mettre dans des situations délicates en compagnie des objets de convoitise féminins.
Malheureusement pour moi, étant donné que nous sommes tous les trois à Serpentard, le seul objet de ma convoitise reste inaccessible.
Ma petite sœur, elle, n'est pas aussi démonstrative dans son amour familial que Nathaniel. Elle passe son temps à venir me demander des conseils sur tel ou tel garçon surtout depuis l'année dernière. Ah, la jeunesse, ce n'est vraiment plus ce que c'était.
-Zinnia ! Espèce de morue (souvenir ému rapporté par le frère d'un voyage au Portugal il y a deux ans) ! Qu'est-ce que tu attends pour sortir ? Tu crois peut-être quetu vas embellir en restant moisir toute la journée dans cette voiture ?
A regret, je m'extrais du taxi et m'empare de ma malle et de la cage de mon hibou, Guimauve. J'avance dans la gare de Kings Cross encombrée à la suite de ma petite famille. J'aperçois Cléo, qui n'est autre que ma meilleure amie depuis notre première année à Poudlard ainsi que ma charmante colocataire de dortoir.
Je hâte le pas vers elle, m'approche sans qu'elle me voie et dit :
- Salut, Nefertiti, tu pourrais m'attendre quand même !( oui, oui, vous avez bien entendu, Nefertiti, surnom mystérieux parce qu'inventé en première année lors d'une crise de bêtise immature).
- Zin' ! Tu vas me faire le coup de la surprise tous les ans ?!
Comme il se doit, en tant que meilleures amies, nous nous enlaçons comme si nous ne nous étions pas vues depuis des années alors qu'en fait, ça ne fait qu'une semaine. Même les moins niaises n'y échappent pas.
Nous passons la barrière vers la voie 9 3 /4 ensemble, j'embrasse ma mère qui a perdu sa colère pour la remplacer par une forme d'inquiétude qui s'apparente étrangement à la maladie incurable. Puis, nous avançons d'un pas décidé vers la belle locomotive rouge vermillon, Néfertiti devant, moi derrière. Quand soudain…
-Regarde qui est là…me souffle celle qui est sensée garder le silence dans ce genre d'instant.
Avant même d'avoir eu besoin de jeter un coup d'œil devant elle pour savoir qui est la mystérieuse personne qui se trouve là, je sais de qui il s'agit. Voyez-vous, les meilleures amies parlent entre elles la langue du non-dit. Un rire plus fort que les autres vient confirmer l'implacable intuition.
Sirius. Si il y a une chose bien plus importante que le fait que je m'appelle Zinnia Sullivan que j'ai oublié de préciser, c'est celle-ci : je suis amoureuse de Sirius Black. Ça fait cinq ans maintenant que cela dure et c'est comme si j'avais attrapé une bactérie particulièrement tenace dès mon arrivée à Poudlard. Sirius est partout, dans ma tête, sur mes cours, dans ma penderie, dans mon bol de céréales le matin et surtout…derrière moi.
-Cornedrue ! Attends- moi, espèce d'imbécile ! dit-il en riant.
« Ecarte toi, pauvre cruche, sinon il va te tomber dessus. » Finalement, ça me plairait bien. Je vais peut-être rester là, à lui bloquer le passage avec ma valise, en fin de compte.
Mais un coup de coude salvateur de Cléo me fait revenir à la réalité et je m'écarte pour laisser passer les Maraudeurs.
James Potter marche devant, le regard déterminé fixé sur une silhouette aux longs cheveux aubrun devant lui, ses cheveux ébouriffés et ses lunettes sur le bout de son nez. Nada a signalar. Vient ensuite Rémus Lupin, qui affiche une mine plutôt réveillée par rapport à d'habitude. Le pauvre, il a toujours l'air fatigué comme si il avait passé sa nuit à regarder la télévision au lieu de dormir (toute ressemblance avec des personnes existantes serait fortuite). Ses cheveux chatain sont un peu plus longs que l'année dernière et ça lui va nettement mieux. C'est vrai qu'ils sont mignons, lui et Potter. Je ne m'avancerai pas à en dire autant de Pettigrow. Il marche haletant derrière ses amis, et il me fait penser à un animal pris en chasse par un moldu ayant sorti son fusil après avoir abusé du whisky( un chasseur,quoi !).
Enfin, le meilleur pour la fin, Sirius avance élégamment derrière, en remettant toutes les cinq secondes ses belles mèches de cheveux noires derrière ses oreilles non moins belles. Il n'est pas plus halé qu'en juin, ses yeux sont toujours aussi noirs, sa bouche toujours aussi sensuelle et sa démarche toujours aussi sûre. Il est beau, il est grand, il est fort. C'est le Prince Charmant. Cléo toussote avec insistance et je referme ma bouche : le Prince Charmant vient de passer à côté de moi sans m'accorder un regard et il serait fâcheux qu'il s'aperçoive que je commence tout juste à baver.
Encore sous le choc de l'apparition divine, je monte dans le train avec à ma suite une Cléo qui se retient visiblement d'écrouler de rire. Retenue qui ne dure qu'un temps car à peine a-t-elle refermé derrière elle la porte du compartiment vide qu'elle a choisi qu'elle se met à ricaner, d'un gloussement digne de la plus quiche des glousseuses de Poudlard.
-Oh, ça va, c'est bon. Tu vas arrêter te foutre de moi ?
-Oh là là zinnia, ce que tu es susceptible. C'est juste …si t'avais vu ta tête quand il est passé… « oh Sirius, fais de moi ce que tu veux mais touche moi au moins une fois » !
-Va te faire cuire un gnome !
Elle se calme, notamment à cause de l'arrivée de notre Severus national qui entre dans le compartiment et nous demande :
- Ca ne vous dérange pas si je m'assoies là ?
Ca nous dérange juste un peu mais on ne refuse rien à quelqu'un de notre maison qui à priori nous a toujours traité correctement. Il s'installe, nous demande brièvement de nos nouvelles puis se plonge dans l'étude d'un livre en runes. Studieux, le Severus.
-Oh, mais Servilus drague ou je rêve ? c'est pas avec un bouquin qu'elle vous tomber dans tes bras !
La porte du compartiment s'est ouverte et dans l'encadrement se tiennent Potter, Lupin, Petigrow et- mon cœur chavire- Sirius.
Severus se lève et sort sa baguette de sa poche. Moi et Cléo bondissons également de nos sièges, mais sans penser à sortir une arme. Si seulement mes yeux me suffisaient.
-Va te faire foutre, Potter !
-Mais sois un peu plus poli, tu veux, Servilo ? ou j'ai bien peur d'être obligé de te laver les cheveux !
Oui, j'aime Sirius, j'aime même ce Sirius là. Perspective pathétique, n'est-ce pas ?
-Black, tiens toi tranquille, ça nous changerait. Déjà qu'il parait que tu t'es fait viré de chez toi alors si en plus, ils te virent de Poudlard, tu seras à la rue. Je me demande si tu pourrais survivre sans miroir…lui aboie Cléo.
Severus ricane, découvrant des dents qui n'ont pas l'air d'être habituées au dentifrice Matt Sham le sorcier, elles. Je lui en parlerai à l'occasion.
-Biggles. Je pensais que tu étais un peu moins stupide que ça. Tu vas voir ce qu'il en coute de défendre le nez de Servilus.
Avant même qu'il ait pu prononcer le sort qu'il voulait lancer à Cléo, j'extirpe ma baguette de ma poche et la lui pointe droit sur le visage.
-Black, si tu touches à un cheveu de mes amis, je te jure que j'écrase la citrouille pourrie qui te sert de tête sur la moquette et que j'en fais assez de quiches lorraines pour nourrir le Tiers- Monde !
Je m'attends à une riposte virulente du beau ténébreux mais il baisse sa baguette, m'observe un instant et fais signe à James de se taire alors que celui-ci allait répliquer. Puis, il quitte le compartiment suivi de ses amis, en me lançant un regard rempli de dégoût et d'amertume. Enfin, ça ce n'est que mon interprétation mélodramatique d'un regard que j'ai rarement vu sur son visage. Et pourtant, Dieu si je les connais tous, ça fait cinq ans que je passe mon temps à le détailler sous tous les angles.
Je n'y comprendrais jamais rien aux hommes, mais je m'inquiète car les Maraudeurs sont connus pour leurs farces de mauvais goût. Cléo affiche une mine intriguée pleine de respect envers moi et Rogue me sourit avec une sorte de délectation que je n'attribuerais pas à la lecture de son livre passionnant.
