Hello! ^^
Après plus d'un an d'absence dû à des raisons personnelles aussi bien que professionnelle, me voilà de retour, tout du moins je l'espère, avec une nouvelle fic, sur un nouveau manga, que j'ai découvert il y a peu de temps.
La fic telle que je l'imagine, va suivre la trame du manga, mais vu par un nouveau personnage de mon cru. J'espère qu'elle vous plaira. ^^
Avant de vous laisser lire, je tiens à préciser que je lis les scans en anglais, donc si les noms des persos ne collent pas avec la version française, c'est normal. J'essaie de vérifier le plus de choses possibles avant de publier, mais je vais probablement en laisser passer.
Bien entendu, Fairy Tail ne m'appartient pas, pas plus que ses personnages, je ne fais que les emprunter à Hiro Mashima pour mon plaisir personnel, et le votre j'espère.
Sur ce, bonne lecture.
Chapitre 1:
Welcome to Fairy Tail!
Une douce brise d'été soufflait calmement sur la ville tandis que le soleil couchant lançait des lueurs sanglantes sur toutes les façades alentours. Dans le ciel rougeoyant, quelques mouettes plainaient paresseusement en lançant des cris moqueurs. Des panaches de fumée montaient lascivement des cheminées et les premières lampes s'allumaient aux fenêtres des maisons. Tandis qu'elle remontait la longue rue, des groupes de badauds qui discutaient sur les pas de portes la suivirent du regard, visiblement étonnés par l'apparence de sa monture. Kirin n'en avait cure, elle était lasse et ne rêvait plus que d'une chose: prendre un bain et aller dormir. Elle n'irait pas à la guilde ce soir, ça attendrait le lendemain. Mais avant de gagner la douceur de son appartement, elle avait une dernière halte à faire. Ce n'était pas très loin, ça ne lui ferait pas faire un long détour.
Quittant la rue principale non loin de la cathédrale Kaldia, monture et cavalière empruntèrent une artère secondaire moins fréquentée. Les bâtiments à hautes façades cédèrent lentement leur place à des maisons plus basses. Des enseignes pendaient des façades, désignant des boutiques plus modestes que celles trônant dans la rue principale. C'est devant l'une de ces boutiques que le cheval noir s'arrêta. Un homme entre deux âges était justement en train de décrocher des bouquets de plantes séchées des murs entourant la vitrine poussiéreuse de son échoppe. Il se retourna lorsque la cavalière mit pied à terre près de lui. Son visage agacé s'éclaira d'un grand sourire dès qu'il la reconnue.
— Oh, c'est vous Miss Kirin! Je ne vous attendez pas avant deux ou trois jours.
— J'ai terminé plus tôt que prévu. Je vous ramène divers trouvailles.
— Entrez, entrez, Miss Kirin, fit le commerçant en lui désignant la porte d'un vaste geste de la main. Vous avez de la chance, j'allais fermer.
La boutique n'était pas très grande, mais elle était agréable. Les murs étaient couverts d'étagères de bois brut croulant sous les pots. De toutes les tailles, de toutes les formes, en verre, en faïence, en céramique, en terre, décorés ou non, ils trônaient partout dans la boutique. Du plafond pendaient des dizaines de bouquets de plantes séchées. Derrière le massif comptoir, placé le long du mur de droite, une petite femme replète s'activait à fermer d'énormes jarres à l'aide de morceaux de toile de jute qu'elle tendait au travers de leur ouverture et liait avec une cordelette. Une odeur indéfinissable d'herbe et de fleurs sèches, de bois, d'épices et de cire emplissait la pièce.
— Que nous ramenez vous, cette fois? Demanda l'herboriste en passant derrière le comptoir.
Kirin déposa le sac qu'elle portait à l'épaule sur le meuble et fouilla à la recherche de son butin. Elle sortit alors de la besace un paquet soigneusement enroulé de drap. Elle écarta les morceaux de tissus pour révéler un généreux tas de plantes.
— Oh, fit l'herboriste en tendant la main vers l'une d'elle. Des chardons des marais? On en trouve pas facilement par ici.
Il tourna entre ses doigts la tige épaisse, hérissée d'épines d'un gris argenté et surmontée par une fleur pourpre, elle aussi hérissée d'épines. Il tria les plantes pour rassembler les chardons et regarder ce qu'il y avait d'autre. Un tas de petites fleurs d'un jaune doré attendait dans un autre colis de drap. L'herboriste sembla aussi intéressé.
— Les Larmes solaire, plus communes mais non moins utiles, excellentes pour apaiser les migraine et les insomnies, n'est-ce pas?
— Tout à fait.
Il mit également ce colis de coté. En tout, il récupéra cinq types de plantes différentes qu'il pesa soigneusement avant de faire de savants calculs à l'aide d'un boulier.
— Voilà, fit-il en se redressant pour regarder la jeune femme qui lui faisait face. Je vous fais le tout à ... disons quatre mille cinq cent joyaux.
Kirin se contenta de hausser un sourcil d'un air incrédule et le commerçant se racla la gorge.
— Bon d'accord, cinq mille joyaux, mais c'est bien parce que c'est vous, Miss Kirin.
Un sourire, une poignée de main et l'accord fut conclu. Kirin rangea les morceaux de toile dans son sac tandis que l'herboriste comptait les billets et que son épouse rangeait soigneusement les plantes nouvellement acquises.
Quand elle quitta la boutique, le fruit de la vente en poche, elle retrouva son cheval qui attendait sagement devant la boutique, sous les regards effarés de quelques enfants qui le fixaient avec curiosité. Tandis qu'elle se hissait sur son dos en s'aidant d'un muret tout proche, l'herboriste qui l'avait raccompagné à la porte la salua chaleureusement avant de finir de remballer la marchandise exposée devant sa boutique.
La cavalière s'éloigna tranquillement, suivant les ruelles en ligne droite vers les berges du lac Scilliora. Le soleil touchait presque l'horizon, à présent, peignant la ville de lueurs sanglantes. Les eaux du lac scintillaient comme une étendu de rubis. Les rues étaient presque désertes, les dernières mères de famille appelaient leurs enfants retardataires sur le seuil de leur maison, le repas attendant déjà sur la table familiale. C'était l'heure où la ville commençait à se calmer avant la nuit. Un petit vent frais se leva, soufflant du lac. Kirin s'enroula dans sa cape de voyage et serra les genoux sur les flancs de sa monture. Celle-ci comprit le message et pressa l'allure, passant du pas à un petit trot rapide.
Il faisait complètement nuit, quand elle arriva au pied de la colline sur laquelle s'élevait le bâtiment où elle habitait. Une lumière dorée et accueillante coulait des fenêtres du rez-de-chaussé mais la plupart des fenêtres des étages étaient sombres. Il était encore tôt, la plupart des résidentes étaient certainement encore à la guilde, ou parties en mission. Ce qui signifiait qu'elle allait avoir la salle d'eau pour elle seule. Chose rare! Tandis qu'elle faisait des plans pour sa soirée, son cheval chemina le longs des pentes, s'arrêtant devant la porte d'entrée du bâtiment. Kirin mit pied à terre avant de se tourner vers son cheval.
— Merci pour ton aide, Fear. Repose toi bien!
— Toi de même, répondit-il simplement.
Puis, comme si rien n'était plus normal qu'un cheval parlant, Kirin exécuta un geste de la main, et sa monture disparut en volutes de fumée blanchâtre.
Assurant son sac sur son épaule, la jeune femme gravit les marches et poussa la porte. Le salon commun était vide, ce qui lui évitait d'avoir à passer un moment à discuter de tout et de rien avec les locataires des lieux. Kirin se sentait lasse et épuisée, une discussion avec les autres filles n'était pas sa priorité pour le moment. Bien qu'elle essayait de toujours se montrer sympathique, elle n'était pas des plus sociable. Ce qui ne voulait pas dire qu'elle n'aimait pas ses compagnons, loin de là, mais elle appréciait une certaine liberté, raison pour laquelle, elle partait souvent seule en mission, malgré les dangers que ça impliquait.
Elle traversa le salon et gagna les escaliers, puis monta au premier étage où elle se dirigea vers sa chambre. Après avoir déverrouillé la porte à l'aide de sa clé, elle entra et referma derrière elle avant de s'adosser au panneau de bois. Chez elle, enfin! Après six jours à courir les routes et chasser les détrousseurs de grands chemins, il faisait bon d'être enfin de retour. Elle prit une profonde inspiration et inhala les senteurs de plantes séchées et de fleurs coupés.
Se détachant enfin de la porte elle progressa jusqu'à son petit bureau et alluma une lampe. Elle se retourna et déposa son sac au pied du lit avant d'aller jeter machinalement un coup d'oeil par la fenêtre. La lune se levait, tintant le paysage et les eaux du lacs de lueurs fantomatiques diaphanes. Se retournant, Kirin retira sa cape de voyage et l'abandonna sur une chaise avant de se diriger vers l'un de ses placards. Sa chambre n'était pas très spacieuse mais elle était confortable et c'est tout ce que la jeune fille demandait.
Les murs, peints en bleu, étaient couverts de sortes d'espaliers auxquels divers bouquets de plantes avaient été mis à sécher. Une large bibliothèque coupait la salle en deux délimitant l'espace de travail où Kirin s'occupait de ses concoctions et de ses remèdes, et l'espace de repos occupé par le lit. À gauche, juste à l'entrée, se trouvait un établi pourvu de divers outils où la jeune fille travaillait quand elle en avait le temps. Au dessus, divers placard muraux servaient à ranger le matériel. A la droite de l'entrée, une haute armoire contenait tous les vêtements que possédait la jeune femme. Une autre armoire, servant de fourre-tout, était adossé au mur, formant presque un angle droit avec la première. Dans ce petit coin avaient été installés deux petits canapés et une table basse afin de faire office de salon. Dans le coin opposé de la pièce, face au lit, se trouvait un bureau couverts de livres et de papiers, ainsi qu'une chaise. Des rideaux de coton bleu voilaient à demi les deux fenêtres. C'était tout. Il n'y avait ni cuisine ni salle de bain, les locataires devaient partager les parties communes en essayant de ne pas se disputer.
D'ailleurs, c'est justement à la salle de bain que Kirin voulait se rendre. Elle rassembla rapidement des serviettes de bain, un pyjama propre et sa trousse de toilette avant de ressortir de la chambre. Les couloirs étaient toujours vides, cependant des rayons de lumière filtrant sous les portes indiquaient que quelques unes des filles étaient rentrées. Kirin continua son chemin vers la salle d'eau et poussa la porte de la main. Personne! Refermant la porte derrière elle, sans la verrouiller, au cas où l'une des autres locataires voudrait venir se baigner, Kirin s'avança dans la pièce. Il y faisait bon, ni trop chaud, ni trop froid, les sols étaient humides et de la vapeur flottait encore dans l'air, signe que quelqu'un venait de sortir.
Se postant devant l'une des vasques surmontée d'un miroir embué, Kirin jeta un coup d'oeil à son apparence. Ses longs cheveux noirs, habituellement noués sur sa nuque, étaient emmêlés et ternes, des feuilles mortes et des boules de bardane s'accrochaient aux mèches qui s'étaient échappés de son ruban. Ce dernier avait d'ailleurs perdu sa couleur rouge pour une teinte indéfinissable. D'un geste, Kirin le dénoua et le laissa tomber dans la vasque vide en vu de le laver plus tard. S'emparant de sa trousse de toilette, elle en sortit un peigne avec lequel elle entreprit de débarrasser ses cheveux des brindilles et autres résidus végétaux qui s'y étaient accrochés.
Après quelques minutes de peignage intensif, ses cheveux était à nouveaux lisses et raides comme ils l'avaient toujours été. Elle les torsada et les noua rapidement en un chignon qu'elle fixa à l'aide de baguettes. Posant son peigne et son ruban près de la vasque, elle sortit de sa trousse une brosse à dents et un pot de pâte dentifrice. Tandis qu'elle se brossait les dents, elle jeta un nouveau regard à son reflet dans le miroir. Elle avait l'air fatigué, les traits tirés, même ses yeux d'émeraude avaient perdu de leur éclat. Soupirant avec lassitude, elle cracha le dentifrice dans la vasque et se rinça la bouche. Après avoir rincé et bouché la vasque elle y fit couler un peu d'eau pour y faire tremper son ruban. Enfin elle se détourna du miroir et se débarrassa de ses vêtements abîmés par les affrontements et le voyage.
Avant de rentrer dans le bassin plein d'eau fumante, elle s'arrêta devant l'un des boxes de douche et déposa par terre savon et shampooing. Ouvrant le robinet à fond, elle attendit un instant avant de se placer en dessous. Le jet d'eau chaude sur ses épaules fatiguées lui fit un bien fou. Elle resta un instant sans bouger, profitant de ses premières minutes de détente depuis plusieurs jours. Les missions épuisantes n'étaient pas rares dans son boulot, mais cette fois, elle se sentait particulièrement lessivée. Mais au moins la paie avait été bonne, elle pouvait se permettre de prendre quelques jours de détente avant de devoir chercher une autre mission.
Une fois qu'elle se sentit plus détendue, elle se lava et lava ses cheveux avant de se rincer soigneusement. Elle enroula ses cheveux dans une serviette sèche, alla reposer savon et shampooing près de la vasque dans laquelle trempait son ruban puis se dirigea vers le large bassin, une serviette sous le bras. Elle l'accrocha à la cloison avant d'entrer dans le bain. S'asseyant simplement sur le fond carrelé, elle posa la nuque sur le bord et soupira d'aise.
Même si c'était parfois difficile, la jeune femme n'allait sûrement pas se plaindre, c'était la vie qu'elle avait choisi, si difficile soit-elle. Oh, elle aurait pu être une femme banale dans un village de province avec pour seul avenir épouser le type désigné par son père et faire un tas de mouflets braillards. Mais elle savait que sa vie n'était pas là. Elle savait depuis toujours qu'elle n'était pas comme les autres. Pas comme ses parents. Elle avait la magie en elle et n'avait pas l'intention de laisser ce don se perdre parce que ses parents refusaient d'ouvrir les yeux. Oh non alors, elle avait perdu assez de temps comme ça, seule, isolée, perdue au milieu d'une foule de gens incapables de la comprendre.
Une porte claqua dans les étages supérieurs, faisant sursauter Kirin. La jeune fille se redressa dans le bassin, un peu groggy. Elle avait certainement dû s'endormir et pendant un bon moment, vu l'état fripé et flasque de ses doigts. Réprimant un bâillement, elle se leva et s'enroula dans sa serviette avant de sortir de l'eau qui commençait refroidir. Elle se sécha rapidement, libéra ses cheveux de la serviette qui les entourait encore puis les frotta énergiquement pour les sécher après quoi, elle entreprit de les peigner à nouveau. Après avoir enfilé son pyjama et rassemblé ses affaires, elle regagna sa chambre.
La lampe était toujours allumée sur son bureau. Elle abandonna les serviettes humides, la trousse de toilette et les vêtements sales sur le dossier d'un fauteuil et s'installa derrière le bureau. Tout était tel qu'elle l'avait laissé en partant. Ouvrant un tiroir, elle en tira une chemise de carton vert, fermée par une sangle à boucle de métal. Une étiquette vierge et deux grosses taches d'encre étaient visibles sur le dessus de la chemise qui avait, visiblement, connu des jours meilleurs. La couleur un peu passée, les coins abîmés et la sangle effilochée témoignaient d'un usage long et régulier. Kirin déboucla la sangle et ouvrit la chemise pour dévoiler un tas de feuillets manuscrits, couvert d'une petite écriture nette et précise. La couleur de l'encre variait imperceptiblement d'un feuillet à l'autre, restant toujours dans les ton bleu-noir, marquant probablement les changements d'encriers. Les feuillets étaient parfois attachés par groupe de deux ou trois à l'aide d'agrafes, tandis que d'autres étaient solitaires. Chaque groupe de feuillets commençait par la mention "Ma très chère Kim" et se poursuivait en de longs paragraphes nets et bien rangés, comme des lettres qu'on aurait jamais envoyées.
Il s'agissait en réalité d'un journal, un journal que Kirin n'avait pas eu l'intention de tenir au début mais qui, le temps faisant, était devenu une habitude bien réglée. Elle se souvenait parfaitement quand elle avait commencé ce journal. C'était peu de temps après son arrivée à Magnolia, peu de temps après son entrée dans la guilde. C'était à cause de lui. C'était toujours à cause de lui. La jeune femme était certaine que si elle prenait une lettre au hasard, elle y trouverait probablement une longue diatribe contre cet homme. Plus de la moitié de son journal était consacrée à ses coup de gueule contre lui, comme s'il était le seul capable à la mettre dans cet état de colère furieuse. L'autre moitié se consacrait à sa vie quotidienne au sein de la guilde et au déroulement de ses missions.
Elle se souvenait parfaitement de ce jour là. De la première fois où elle l'avait croisé. Son attitude méprisante avait provoqué une telle colère en elle qu'elle s'était mise inscrire furieusement sur le papier tout ce qu'elle n'avait pas osé lui cracher à la face. C'était ça ou casser quelque chose, mais casser quelque chose quand on vient juste d'entrer dans une guilde pouvait être très mal vu, et Kirin n'avait pas voulu se faire remarquer dès son arrivée. Elle était encore intimidée par le monde qu'elle découvrait et les mages qu'elle rencontrait. Alors plutôt que se mettre à hurler comme une furieuse, elle s'était mise à écrire, là, sur une table, dans la salle commune du bâtiment de la guilde. Et ça lui avait fait tellement de bien qu'elle l'avait fait à chaque fois que quelque chose provoquait en elle une réaction violente.
D'ailleurs, elle aimait écrire, et dessiner, elle avait pris l'habitude d'écrire toutes les idées qui lui passaient par la tête, que ce soit pour un nouveau remède ou pour la création complexe d'un de ses Rêves. Minutieuse, elle prenait des notes sur ses expériences, réussies ou non, apprenait de ses échecs et essayait de toujours améliorer son travail. Le carnet qu'elle gardait précieusement dans son sac réunissait tous les croquis, notes, idées, remarques, théories et formes finalisées de ses Rêves. La complexité de son don et sa propre exigence la poussait à noter soigneusement tout ce qui lui passait par la tête, afin de ne pas faire d'erreur qui pourrait s'avérer fatale.
Soupirant de lassitude, Kirin posa la chemise sur le bord de son bureau, au pied de sa lampe et plaça une feuille vierge devant elle. Elle déboucha son encrier en faisant attention à ne pas renverser l'encre et le replaça dans son plumier d'où elle tira une longue plume blanche au bout soigneusement taillé. Après l'avoir trempé dans l'encre, elle réfléchit un instant, jetant un coup d'oeil par la fenêtre puis se mit à écrire.
Ma très chère Kim,
Je viens à peine de rentrer, et je suis complètement claquée. Je n'ai qu'une hâte, c'est d'aller me coucher et de dormir jusqu'à midi. La mission s'est bien passée. J'ai pu rendre le médaillon dérobé à son propriétaire légitime et botter les fesses de quelques imbéciles au passage. Enfin, Sil leur a botté les fesses pour moi. Et tu sais le comble dans tout ça? Le médaillon était sensé être la clé d'un coffre contenant un trésor fabuleux, oui, oui comme dans les livres. Sauf que le coffre en question ... était complètement vide. Si tu avais vu la tronche du proprio, j'ai dû me mordre pour ne pas éclater de rire. Enfin, bien fait, ce type n'était qu'un dandy pompeux et arrogant, le genre de type à qui tu veux plonger la tête dans sa morve, quoi. Un peu comme Lui, d'ailleurs.
Bref, malgré sa déconfiture ce type à quand même accepté de me payer. Enfin, il a fallu que Sil le menace un peu, mais j'avais la loi de mon coté, après tout ma mission était de ramener le médaillon, que le coffre soit vide n'était pas de ma faute. J'ai même pu me faire un petit bonus en ramenant quelques plantes à Monsieur Jimaji, l'herboriste de Apple Street. Le voyage était épuisant, mais s'aventurer loin de Magnolia permet de trouver des plantes qui ne sont pas courantes dans les environs de la ville.
En parlant de ça, je dois renouveler mon stock de baume de fleurlys, il ne m'en reste plus qu'un pot. J'en fais une telle consommation que ça me démoralise presque. Ça prouve que je ne suis pas encore assez forte, sinon, je ne récolterais pas tant de coup et de bosses. Heureusement, ça va aller vite, j'ai même pas besoin d'emprunter la cuisine de la pension. Je pense que je vais rester à Magnolia quelques jours avant de repartir en mission. Il faut que je fasse l'inventaire de ma trousse de secours et que je remplace ce qui me manque. Entre mes propres mésaventures et l'état dans lequel les autres reviennent parfois, je me demande encore comment je fais pour avoir du temps pour m'occuper de la pharmacie de la guilde. Heureusement que Polyussica est là, je pourrais jamais tout faire toute seule. Un drôle de personnage, d'ailleurs, cette Polyussica, mais il me semble t'en avoir déjà parlé.
Mes travaux avancent bien, je suis assez contente de moi. J'ai maintenant une idée si précise de ma nouvelle création que je peux la voir quand je ferme les yeux. Je pense que je pourrais bientôt passer à la phase supérieure et lancer la première invocation. Je me souviens quand j'étais gamine et que j'avais besoin d'un support pour invoquer mes Rêves. Ça me fait rire maintenant, même si j'ai gardé les statuettes et les cartes que j'avais dessiné. A présent, il me suffit de voir ma créature en pensée et je peux l'invoquer sans aide. Quand Hama me racontait ça, je me disais qu'elle était folle et que c'était impossible d'en arriver là, mais finalement tu vois c'est moi la folle de ne pas l'avoir crue. Un élève ne devrait jamais douter de son mentor.
En parlant de Hama ... Je me demande comment vont les choses là-bas? Parfois, j'ai un pincement au coeur quand j'y pense. Mais j'en ai un encore plus gros quand je réalise que partir et tout quitter n'a pas été aussi difficile que ce que j'avais toujours cru. Ça va bientôt faire deux ans, déjà. Deux ans sans les voir, sans même leur écrire. Je me souviens encore de la tête de papa quand je lui ai dit que je voulais quitter le village pour devenir mage et qu'il pouvait faire une croix sur son stupide projet de mariage. Je me souviens aussi de ce qu'il m'a dit "Si tu pars ce sera définitif, je te considérerais comme morte, tu ne seras plus ma fille". Quand j'y pense ... Je n'éprouve pas le moindre regret. Juste de la colère. Quels parents renieraient leur enfant parce qu'il refuse de suivre la voie qu'ils ont décidés pour lui? A croire que le malheur de Rekka ne leur a pas suffit. Non vraiment, je ne regrette rien. Je suis peut-être morte pour mes parents, mais au moins je vis enfin pour moi seule.
Et ça, Kim, c'est la meilleure chose au monde. J'ai enfin trouvé un endroit ou je me sente à ma place, acceptée, appréciée. J'ai tellement attendu pour ça, tellement cherché, tellement pleuré.
Je ne veux plus me sentir seule!
La plume lui glissa des doigts, répandant de petites tâches d'encre dans le bas de la feuille. Bâillant à s'en décrocher la mâchoire, Kirin se dit qu'il était vraiment temps d'aller dormir. Elle évalua les dégâts sur sa lettre puis épongea l'encre encore humide à l'aide d'un buvard avant de glisser la feuille dans la chemise de carton, en dessous de toutes les autres. Après avoir refermé la chemise, elle la remit dans le tiroir et reboucha l'encrier. Sans attendre plus longtemps, elle éteignit la lampe et se glissa dans le lit froid.
Alors qu'elle se calait confortablement sur le matelas, des bruits de pas et des voix lui parvinrent depuis le couloir, signe que ses voisines rentraient chez elle. Elle envisagea un instant aller leur dire bonsoir, puis décida qu'elle était trop bien installée pour bouger. Elle ferma les yeux, cependant, le sommeil tarda à venir, occupée qu'elle était à dresser mentalement la liste de tout ce qu'elle aurait à faire dans les prochains jours. L'esprit de Kirin était toujours occupé à penser, créer, imaginer, à telle point qu'elle avait parfois du mal à lâcher prise et se reposer. Il n'était pas rare qu'elle se relève en pleine nuit pour noter dans son carnet une idée qui venait de surgir dans sa tête. Parfois, c'était épuisant.
Après quelques minutes les voix se turent, chacune rentrant dans sa chambre, et le silence revint sur la bâtisse. Kirin bâilla une nouvelle fois puis tira la couette par dessus sa tête. Elle aimait par dessus tout faire de son lit un nid confortable dans lequel elle s'enfonçait jusqu'aux oreilles, en position foetale, la plupart du temps. Sa mère lui avait déjà dit qu'elle avait toujours fait ça, et que, petite fille déjà, elle aimait à se nicher de la sorte dans ses couvertures. Ça au moins ça n'avait pas changé depuis cette époque. Elle ne pouvait pas en dire autant du reste.
Mais elle ne pouvait pas se plaindre, cependant. Il était vrai que sa nouvelle vie n'était pas tout à fait comme elle l'avait imaginé, mais elle avait du travail, une jolie chambre où dormir, une guilde pleine de fous furieux où elle pouvait passer la journée quand elle le voulait et, avant tout, elle pouvait enfin être elle-même sans qu'on vienne l'abreuver de reproches. Même s'il était vrai qu'elle n'avait pas vraiment d'amis à Fairy Tail, elle y était au moins acceptée pour ce qu'elle était et elle était libre d'y travailler sa magie sans risquer d'être punie. Elle avait même un tas de mages chevronnés autour d'elle, toujours prêt à donner un coup de main en cas de besoin. C'était plus qu'elle en avait eu avant d'arriver. Bien plus que sa famille lui ait accordé.
Elle était chez elle, enfin!
* * * One of Us * * *
La matinée touchait déjà à sa fin quand Kirin passa les portes largement ouvertes du quartier général de la guilde. Le bâtiment, étrange mélange de style oriental et de références occidentales plus modernes, était probablement l'un des plus étrange, les plus facilement reconnaissable mais surtout l'un de plus agité de la ville. Il n'était pas rare que des clients, intimidés par l'agitation régnant sur place, restent plantés à la porte sans oser rentrer. Kirin se souvenait parfaitement la première fois ou elle avait elle-même franchi ces portes, deux ans plus tôt.
C'était le plein été, il faisait une chaleur à mourir. La ville pliait sous le poids de la plus grosse canicule vue depuis plus de vingt ans. Les canaux étaient complètement à sec, et même le niveau du lac avait baissé d'une dizaine de centimètres. Les rues surchauffées étaient quasiment vides, les gens, préférant de loin rester dans la fraîcheur de leurs maisons, ne sortaient que pour le stricte nécessaire. Pour Kirin, fraîchement descendue d'un train en provenance d'une région montagneuse, le choc thermique avait été encore plus difficile à supporter que le choc de culture. Bien qu'appartenant tous deux au royaume de Fiore, Magnolia et Hinioki, son village natale, étaient aussi différents que le jour et la nuit. La jeune femme se souvenait avoir longtemps déambulé dans les rues, traînant ses maigres possessions dans sa grosse valise, examinant les hauts bâtiments et les façades de pierre, admirant les vitrines colorées présentant des marchandises qu'elle ne connaissait pas, observant les rares passants vaquer à leurs occupations quotidiennes, éberluée par tout ce qu'elle voyait. Elle n'avait jamais mis les pieds dans une aussi grande ville jusque là.
Après avoir longtemps tourné dans le quartier, elle s'était finalement décidée à se diriger vers le bâtiment de la guilde. Au début, elle ne pensait pas qu'elle pourrait entrer. Jamais elle n'aurait imaginé que le quartier général d'une guilde aussi connue que Fairy Tail puisse être ouvert à tous vents. Elle pensait que les guildes étaient trop jalouses de leurs secrets pour oser laisser entrer les étrangers dans leur bâtiment principal. Oh, elle se doutait bien que les visiteurs ne pouvaient pas aller fourrer leur nez partout, bien entendu, mais voir les portes grandes ouvertes devant elle lui avait donné un étrange sentiment de surprise et de chaleur. Là d'où elle venait, jamais on aurait osé garder sa porte grande ouverte, même celle d'une auberge ou d'une taverne.
Elle était restée longtemps à la porte, n'osant pas entrer, se contentant d'observer en silence ce qui se passait à l'intérieur. Vraiment, elle ne s'attendait pas à ça. Elle avait toujours imaginé une guilde de mages comme un endroit calme et sérieux ou on pouvait aussi bien étudier que travailler et gagner de l'argent. Ce qu'elle avait sous les yeux ressemblait d'avantage à un joyeux bordel qu'à une salle d'étude. Le rez-de-chaussée du bâtiment avait tout d'une salle d'auberge tout à fait banale avec ses rangées de tables, ses bancs et son bar, à la différence qu'au beau milieu de la pièce, un gamin aux cheveux rose se roulait par terre, aux prises avec un autre garçon de son âge qui ne portait qu'un caleçon en guise de vêtement. Plusieurs tables avaient été renversées autour d'eux. Au lieu d'essayer de les séparer, les personnes présentes dans la salle s'amusaient à les encourager à grands cris, riant et pariant sur l'issue de la rixe.
Kirin avait observé la scène pendant quelques minutes avant de se demander ce qu'elle faisait là. Cet endroit n'était certes pas ce qu'elle imaginait, mais la bagarre, et les rires qu'elle provoquait, l'intimidaient bien moins que l'impression de force et de confiance en soit que dégageaient les deux ados en train de se battre. Ils étaient plus jeunes qu'elle, ou tout du moins en avaient l'air, mais il ne faisait aucun doute pour elle qu'elle ne leur arrivait pas à la cheville. Que pouvait-elle attendre d'une guilde où même les jeunes mages étaient bien plus puissants qu'elle. Elle allait se faire jeter dehors sans avoir eu le temps de prononcer le moindre mot. Pourtant la décontraction et l'ambiance presque familiale qui émanaient de cet endroit semblaient la retenir, l'invitant même à entrer pour tenter sa chance.
C'est là, alors qu'elle hésitait encore, que le destin décida de lui donner un coup de main. Tandis que les deux ados continuaient à se rouler au sol en échangeant coups et menaces qui ne paraissaient pas bien sérieux, sous les yeux et les rires des autres mages, la jeune fille sentit soudain un regard posé sur elle, ce qui parvint à la tirer de sa transe. Baisant les yeux, elle vit devant elle un petit homme qui semblait assez âgé pour être son grand-père. Son épaisse moustache blanche contrastait étrangement avec son crâne presque chauve simplement encadré d'une couronne de cheveux aussi blancs que sa moustache. Il portait des vêtements colorés qui semblaient avoir été empruntés à un jeune enfant. Il ne payait pas de mine mais Kirin sentait la force incroyable qui se cachait derrière son sourire aimable. Cet homme n'était pas le premier venu.
— Hello, jeune fille, accueillit-il simplement sans perdre son sourire. C'est la première fois que je te vois ici.
— Euh ... hum ... bonjour, marmonna-t-elle, intimidée. Je viens d'arriver en ville.
— Oh? Et ta première destination est notre bonne vieille guilde?
Elle hocha timidement la tête sans le quitter des yeux.
— En quelque sorte.
Et elle réalisa à ce moment qu'il avait raison. Mis à part une petite visite dans les rues de la ville, Fairy Tail avait été sa première destination, avant même d'essayer de se trouver un endroit où dormir ou un restaurant où déjeuner.
— As-tu une mission si importante à nous confier qu'elle passe avant même ton estomac?
Lequel venait de lancer une plainte sonore à la plus grande honte de la jeune fille.
— Euh ... pas vraiment.
— Tu viens te joindre à nous, alors?
C'était venu tellement naturellement, et avec un sourire si confiant, que Kirin en était restée muette quelques secondes.
— Je crains n'avoir pas ma place ici, murmura-t-elle en baissant la tête.
— Balivernes, répliqua le petit homme. Tu es une mage, oui ou non?
— Oui ... enfin, je le croyais.
Son regard glissa à nouveau vers les deux ados. La bagarre avait pris fin et à présent le jeune aux cheveux roses courrait dans tous les sens en brandissant au dessus de sa tête un caleçon noir, tandis que son adversaire le poursuivait en l'insultant ... nu comme un ver. Kirin le suivit un instant des yeux, guère effarouchée. Elle était guérisseuse et avait déjà eu l'occasion de voir des hommes dans le plus simple appareil. Et même des hommes bien moins agréables à regarder que ce jeune là.
— Alors entre, fit son interlocuteur en lui faisant signe de le suivre.
Un peut hésitante, Kirin le suivit dans la vaste salle, traînant sa lourde valise derrière elle.
La bagarre finie, les autres mages présents eurent donc tout le loisir de s'intéresser à elle. Intimidée, elle se sentit rougir sous tous ces regards posés sur elle. Elle se serait probablement enfuie en courant pour se cacher dans un trou, très loin de là, si une jeune fille, plus grande qu'elle, pourvu d'une magnifique chevelure flamboyante n'avait pas surgi derrière elle, comme pour lui barrer la route.
— Qui nous ramenez vous là, Maître?
Le vieil homme se retourna et lança un regard vers la rouquine.
— Oh c'est toi, Erza? Tu es revenue plus vite que je le pensais.
Entendant le nom de la rouquine, les deux ados qui se poursuivaient toujours se figèrent d'un coup, comme si on leur avait lancé un sort.
— Tu es déjà revenue Erza? Ta mission c'est bien passée? Lança celui aux cheveux rose avec un sourire forcé, essayant de cacher le caleçon qu'il tenait toujours à la main.
La rouquine leur lança à tous les deux un regard acéré qui sembla les transpercer d'horreur.
— Grey, où sont passés tes vêtements? Demanda-t-elle un dangereux accent dans la voix.
— Il fait chaud, pas vrai, répondit le brun, une grosse goutte de sueur coulant sur sa tempe.
Difficile de dire si c'était effectivement la chaleur ou le regard perçant que lui lançait la dénommée Erza qui lui faisait tant d'effet.
— Et toi, Natsu, rien à dire? Fit-elle d'une voix accusatrice.
L'ado aux cheveux roses déglutit difficilement, camouflant toujours le caleçon dérobé dans son dos.
— Belle journée, n'est-ce pas? Tenta-t-il avec un sourire qui sonnait faux.
Elle se planta devant eux et les couva d'un regard acéré, puis sans crier gare, elle leur flanqua à tout les deux un tel coup sur la tête qu'ils en tombèrent au sol, presque assommés.
— Encore en train de vous battre? Rugit-elle. Qu'est-ce que je vous ai dit?
Et tandis qu'elle les admonestait, Kirin ne pouvait s'empêcher de regarder, les yeux ronds.
— Amusant, n'est-ce pas, fit le petit homme avec un sourire confiant.
— Je dirais plutôt terrifiant, couina la brune d'une petite voix, qui tremblait presque autant que les deux ados aux pieds de la rouquine.
Ça fit rire le petit homme qui s'éloigna sans rien ajouter.
Il sauta sur un tabouret puis s'assit en tailleur sur le bar, comme si rien n'était plus naturel. Un peu décontenancée, Kirin abandonna sa valise et prit place sur un tabouret près de lui. Il resta muet un moment, occupé à allumer une étrange pipe à deux foyers. Il tira une longue bouffée avant de souffler lentement la fumée.
— Alors, que pouvons nous faire pour toi, jeune fille? Demanda-t-il en fixant sur Kirin un regard brillant de malice.
Avant qu'elle ai eu le temps de répondre, cependant, son estomac lança une plainte sonore qu'il fut difficile d'ignorer.
— Ça, c'est une sacrée réponse, fit un homme en s'asseyant près d'elle.
Il avait des cheveux châtains, coiffés en une sorte de banane, et un cigare fumant vissé au coin des lèvres.
— Je suis désolée, marmonna Kirin, horriblement gênée.
— Y'a pas de quoi l'être, fit un autre homme en s'asseyant près du premier.
Celui là avait des cheveux noir, plaqués en arrière, une ombre de barbe sur le menton et un drôle de collier en forme de S pendant sur son torse.
— Hé, Serra, apporte quelque chose pour la demoiselle! Lança-t-il.
La jeune fille qui s'activait derrière le bar se tourna vers eux.
— Ça marche!
— Non, non, ce n'est pas la peine, s'écria Kirin, de plus en plus gênée.
Mais son estomac ne semblait pas partager son avis.
— C'est que ... Je n'ai pas beaucoup d'argent, murmura-t-elle en baissant la tête.
— C'est pas un problème.
Les deux mains serrées l'une contre l'autre, posées sur ses cuisses, la jeune fille avait vraiment l'air d'une enfant prise en faute.
— Moi c'est Macao, fit le brun en se désignant du pouce. Et ce crétin là, c'est Wakaba.
Le vieil homme, quand à lui, souffla un nouveau nuage de fumée avant de sortir le bec de sa pipe de sa bouche.
— Je suis Makarov Dreyar, le maître de Fairy Tail.
— Le Maître? Bégaya Kirin, réalisant ce que ça impliquait.
Il approuva d'un signe de tête avant de lancer un nouveau nuage de fumée.
— Et toi, mon enfant, qui es-tu?
— Je m'appelle Rin...
Elle s'interrompit brusquement, son visage s'enflammant.
— Kirin, rectifia-t-elle. Kirin Yoren.
— Ce n'est pas ton véritable nom, je suppose, questionna Makarov sans la quitter des yeux.
— Non, c'est vrai, avoua la jeune fille en baissant la tête. Mais je vous jure que je ne suis pas une criminelle, ni rien dans le genre. C'est juste que ... j'ai dû abandonner mon nom derrière moi quand j'ai quitté ma famille.
Et avant de comprendre pourquoi, elle enchaîna:
— Mes parents n'étaient pas d'accord pour que je devienne mage. Mon père m'a renié. Tous les deux ne sont pas ce qu'on peut appeler des amis de la magie.
La serveuse déposa devant elle un bol généreusement rempli de soupe. Kirin la remercia avant de jeter un coup d'oeil au liquide clair dans lequel flottait nouilles, légumes et fruits de mer.
— Tu es mage? Interrogea le dénommé Macao.
— Oui ... enfin, théoriquement, je le suis.
Kirin ne put s'empêcher de jeter un coup d'oeil vers la rouquine qui continuait ses remontrances envers les deux ados mortifiés.
— Mais je suis loin de valoir ces deux là.
— Aucune importance, fit Makarov. La force ne veut rien dire. Une guilde est aussi un endroit ou tu apprendras à progresser et à dépasser tes limites.
Kirin plongea pensivement sa cuillère dans le bol, répétant mentalement les mots du vieux maître.
— Et quel genre de magie ce tu pratiques? Demanda l'homme au cigare, Wakaba.
— Oh! La Voie du Rêve.
Ce n'est qu'à ce moment que la jeune fille se rendit compte que la rouquine avait fini de remonter les bretelles de ses deux compagnons et que la salle était devenue silencieuse. Tellement silencieuse que tout le monde avait dû entendre sa réponse.
— La Voie du Rêve? Fit une voix. Je n'ai jamais entendu parler de ça.
C'était la rouquine, Erza, elle revenait vers eux.
— Ça ne m'étonne pas, fit Kirin en pêchant une grosse crevette dans son bol. Ce n'est pas très répandu. Je crois que mon mentor et moi sommes les seules à pratiquer ce type de magie.
Erza fit le tour du bar pour se poster face à elle.
— En quoi ça consiste? Tu peux réaliser tes rêves?
— En quelque sorte, oui.
Toutes la salle était tournée vers elle à présent.
— En fait ça concerne moins les rêves que l'imagination.
Makarov souffla une nouvelle bouffée de fumée.
— C'est la magie qui permet de faire apparaître des créatures issue de l'imagination.
— C'est bien ça, confirma Kirin en hochant la tête. Nous n'avons aucune prise sur les autres êtres vivants, mais nous pouvons invoquer les créatures telles que nous les imaginons, on les appelle les Rêves, ou parfois les Chimères.
Elle plongea la main dans sa veste et en tira un carnet à reliure de cuir noir.
— Tout est là. Si ça t'intéresse.
Elle tendit le carnet à la rouquine qui détacha l'élastique le maintenant fermé et l'ouvrit d'un air curieux.
Tandis que Erza jetait un coup d'oeil au contenu du carnet, l'ado aux cheveux roses s'approcha de la nouvelle venue. Il avait fini par rendre son caleçon au brun, ayant visiblement trouvé quelque chose de nouveau pour s'amuser.
— Eh, toi, la nouvelle, brailla-t-il, faisant sursauter Kirin. Bas-toi contre moi!
— Quoi? Fit-elle en se retournant sur son tabouret.
— Ça a l'air marrant, ton truc. Bas-toi contre moi!
Kirin lui lança un regard effaré, comme s'il venait de proférer la plus grosse bêtise qu'elle ait jamais entendu. Il se contenta de lui adresser un large sourire tout en dent.
— Non merci, répondit-elle après un instant. Je ne tiens pas à me faire humilier devant tout le monde.
— Oh allé, insista-t-il. On va bien s'amuser!
Kirin faillit lui dire que sa vision de l'amusement ne comprenait pas de bagarre et encore moins l'envie de se faire étaler devant tout le monde. Mais avant qu'elle ouvre la bouche, quelqu'un d'autre se fit entendre.
— Ce serait une occasion de nous montrer comment ça marche, remarqua Erza, l'air pensive.
— Il n'y a rien de très spectaculaire, vous savez.
Il y eut un instant de silence. Kirin sentait tous les regard posés sur elle. Elle se demandait ce qu'ils attendaient tous: l'opportunité de voir une forme de magie qu'ils ne connaissaient pas, ou la voir se faire écraser par le gamin qui lui faisait face.
— Bon d'accord, soupira-t-elle.
Elle descendit du tabouret et s'éloigna du bar.
— Mais je refuse de payer pour les dégâts, lança-t-elle en jetant un coup d'oeil vers les tables brisées par la rixe entre le bagarreur de service et son adversaires en caleçon.
Elle s'inclina devant son adversaire du moment.
— Je suis Kirin, annonça-t-elle. Ne soyez pas trop dur avec moi.
L'ado aux cheveux roses la regarda un instant avec des yeux ronds avant que son sourire reprenne sa place sur son visage.
— Moi c'est Natsu, annonça-t-il. Chasseur de dragons de feu.
— Chasseur de ... Kyaaaaaaaaaah!
Sans attendre qu'elle soit prête, l'ado s'était jeté sur elle, les poings auréolés de flammes.
— C'est quoi ce fou-furieux? s'écria la jeune fille en courant se réfugier à l'autre bout de la salle. T'es sûr que t'es un mage?
— Bah, ouais, répondit-il en revenant à la charge.
Kirin s'échappa une nouvelle fois, le coeur battant à tout rompre dans sa poitrine. Elle n'avait jamais vu une magie comme celle là.
— Feu! ... Feu! ... Feu! s'écria-t-elle en sautant au dessus du bar pour se camoufler derrière. Putain j'ai rien pour lutter contre ça!
Et même si elle avait eu un Rêve capable de neutraliser le feu de ce gamin, il était net qu'elle n'avait aucune chance de le vaincre. Tout ce qu'elle pouvait faire, c'était limiter les dégâts et essayer de ne pas se faire écraser comme un insecte.
— Bien, allons-y.
Se redressant, elle tendit la main gauche devant elle.
— Lève ta lame contre les ombres, Sil, Chevalier d'argent.
Un cercle magique apparu aussitôt sur le sol devant elle. Avant que Natsu ai pu comprendre ce qui se passait, le cercle s'éleva vers le plafond révélant l'imposante silhouette d'un homme caparaçonné dans une armure rutilante. Mais avant qu'il ai pu dégainer son épée, ou même de brandir son bouclier, un formidable coup de poing de son adversaire le jeta au sol, la visière de son casque déformée par l'impact, les plumes de son cimier dégageant de petites volutes de fumée.
— Tu m'a habitué à mieux, déplora Kirin, dépitée.
— Ce gamin frappe comme une brute, répondit simplement le chevalier.
Et, avec une souplesse étonnante pour quelqu'un portant une si lourde armure, il sauta sur ses pieds. Natsu se jeta à nouveau sur lui et cette fois, Sil eut le temps de lever le bouclier qu'il avait au bras gauche. Un son de gong raisonna dans la salle quand le poing du chasseur de dragons entra en contact avec la surface lisse du bouclier. Les flammes enrobant sa main vacillèrent comme une chandelle dans le vent avant de s'éteindre.
— Eh, c'est quoi ça?
— J'ai oublié de te dire, fit Kirin en s'accoudant contre le bar derrière lequel elle se tenait toujours. Le bouclier de Sil absorbe les sorts. Et son épée lui permet de les réutiliser à sa guise.
Et pour preuve, la lame de l'épée que le chevalier venait de dégainer s'auréola de flamme rouges. Le sourire du chasseur de dragons s'accentua.
— Mauvais, commenta Kirin, alarmée.
Une seconde plus tard, Sil était au sol, son bouclier portant l'emprunte bien nette du poing du jeune homme. En réponse, les flammes entourant sa lame dansèrent de plus belle. Sil se redressa vivement, le casque de travers, et attaqua son adversaire, le faisant reculer jusque dans les tables encore debout. Acculé, Natsu esquiva en sautant au dessus du chevalier dont la lame s'abattit avec fracas sur la pauvre table qui fut réduite à un tas de bois. Un coup dans le dos déstabilisa le chevalier mais pas suffisamment pour le faire tomber. Sa lame décrivit un large arc de cercle et la pointe enflammée frôla le visage de son adversaire. Natsu recula, permettant au chevalier de caser une nouvelle attaque. Cette fois la lame fendit l'air verticalement, s'abattant directement sur la tignasse rose de l'adolescent. Celui-ci stoppa net la lame en la coinçant entre ses paumes. Un véritable duel de force s'engagea entre le chevalier, qui pesait de tout son poids sur son arme pour la plonger dans le corps de son adversaire, et ce dernier qui résistait vaillamment. Un sourire assuré apparut sur le visage du jeune homme et les flammes qui jaillirent soudain de ses mains se mêlèrent à celles de l'épée en un brasier ardent. A la stupéfaction générale, l'acier commença à rougir et des gouttes de métal en fusion coulèrent le long de la lame.
— Je rêve, s'exclama Kirin, éberluée. Mais c'est quoi ce monstre?
La lame éprouvée se brisa entre les mains de Natsu, déséquilibrant le chevalier qui évita la chute de justesse. Mais juste comme il se redressait, son adversaire lui tomba dessus comme la foudre. La force du coup qu'il lui porta fut telle qu'il parvint à briser le bouclier et à envoyer voler le chevalier à travers la salle. Sil s'encastra dans un mur avant de basculer et de tomber en avant, face contre terre.
— Vaincue en deux minutes, c'est lamentable, déplora Kirin en secoua la tête d'un air dépité.
Elle quitta le couvert du bar et se dirigea vers son Rêve vaincu.
— Merci Sil, tu as été incroyable, comme toujours.
D'un geste de la main, elle le renvoya dans son monde imaginaire.
— C'est moi qui ne suis pas à la hauteur.
— C'est déjà fini, ronchonna Natsu. T'en as pas d'autres?
Kirin lui lança un coup d'oeil déprimé.
— Je préfère ne pas leur imposer ça.
Elle revint vers le bar et attrapa sa valise.
— Merci pour votre accueil, je suis désolée de vous avoir fait perdre votre temps.
Elle allait tourner les talons quand la voix de Makarov retentit dans la salle silencieuse.
— Quoi c'est tout? Une petite défaite et tu baisses déjà les bras? Quel genre de mage prétends tu être si tu recules ainsi à la moindre difficulté?
Kirin se tourna vers lui, mi agacée, mi démoralisée.
— Je ... Je ne m'attendais pas à trouver un endroit avec des mages aussi forts. Je ne suis clairement pas à la hauteur.
— Tu crois vraiment? Comment pourrais-tu le savoir, si tu ne restes pas? La force n'est qu'une question de point de vue. Ce qui te manque en puissance, tu le compenses certainement avec autre chose: ton intelligence, ton imagination, ta détermination... Il n'y a pas qu'une seule force, il y en a autant qu'il existe de mages. Nous sommes tous différents. Tu ne veux pas essayer de le découvrir par toi-même?
Elle hésita juste assez longtemps pour permettre au brun en caleçon de bondir sur Natsu.
— Tu vois ce que t'as fais, crétin de bouffeur de flammes? Tu lui a tellement foutu la trouille qu'elle ose même pas rester.
Et avant que l'autre ai eu le temps de répondre, il lui sauta dessus et tous deux roulèrent au sol pour un second round.
— Si je peux me permettre, intervint Erza. J'ai noté pas mal d'erreurs sur ton chevalier. Les armures magiques, ça me connaît, et avec mon aide, tu pourrais modifier certaines choses pour le rendre encore plus efficace.
Sans attendre de réponse, la rouquine attrapa la brune par le bras et l'entraîna vers la première table encore intacte pour discuter armures et armes magiques.
A la tombée de la nuit, quand la guilde commença à se vider, Kirin était toujours assise à la table, mais Erza n'était plus sa seule interlocutrice, un petit groupe s'était formé autour d'elle. Contre toute attente, la brune revint le lendemain, et le jour suivant, et le jour d'après encore. Et avant même s'en rendre compte, elle faisait partie de la guilde.
* * * One of Us * * *
— Hello, Mira! Lança-t-elle en saluant la barmaid aux cheveux blancs.
Celle-ci leva la tête avec un sourire.
— Bonjour Kirin, enfin de retour?
— Oui c'est pas trop tôt, répondit la brune en s'installant sur un tabouret devant le bar. Je suis tombée sur une espèce de rapiat, j'en ai la main qui me démange rien que d'y penser.
Elle leva les yeux au ciel en soupirant, se disant que parfois c'était les clients qui méritaient une bonne leçon.
— Comme d'habitude? Demanda la barmaid d'une voix douce, posant une tasse sur le bar.
La brune hocha simplement la tête, posa le menton sur son poing.
Tandis que Mirajane officiait derrière le bar, Kirin lança un coup d'oeil dans la salle. Une joyeuse ambiance régnait tandis que mages et magesses discutaient, regroupés autour de divers tables, buvant et mangeant en riant. Deux ou trois membres traînaient devant le panneau d'affichage des missions à la recherche de la perle rare. Quelques unes des figures incontournables de la guilde étaient absentes, parties en mission sans aucun doute, mais la plupart des mages se trouvait là.
— Il n'y a pas à dire, c'est beaucoup plus calme quand Natsu n'est pas là, remarqua la brunette tandis que la barmaid poussait devant elle une grande tasse de thé fumant.
— C'est vrai. C'est même franchement ennuyeux. A se demander si c'est un bien ou un mal.
Un instant, Kirin s'amusa à sortir la boule à thé de sa tasse pour l'y replonger aussitôt.
— Des nouvelles de Luxus? Demanda-t-elle sans quitter sa tasse des yeux.
— Il est revenu il y a deux jours, répondit Mirajane sans poser de questions. Il est reparti aussitôt sans parler à personne.
— Ce qui nous évite d'avoir à le supporter, grogna Kirin en lâchant d'un coup la boule dans sa tasse, répandant une part du liquide ambré dans la soucoupe et sur le bar.
Ce n'était un secret pour personne dans la guilde que ces deux là ne pouvaient pas se voir. Luxus ne supportait personne, ce n'était pas nouveau. Kirin quand à elle, faisait d'autant moins d'effort pour l'apprécier que le blond lui tapait prodigieusement sur les nerfs. Leur première rencontre lui avait laissé un goût amer qui s'accentuait à chaque fois qu'elle le voyait.
Tandis que qu'elle essuyait les dégâts avec l'éponge que Mirajane avait posé près d'elle, la barmaid s'éloigna, un plateau chargé sur les bras. La jeune femme alla de table en table déposant les commandes devant les convives, sans jamais perdre son doux sourire. Kirin ne put s'empêcher de penser que le prix à payer pour voir ce sourire sur les lèvres de la jeune femme avait été bien cruel pour tout le monde. Même pour elle qui n'avait eu le temps de connaître Lisanna que quelques semaines. Un sourire moqueur fleurit sur ses lèvres quand elle vit Mirajane repousser la tentative de flirt de Wakaba en prenant l'apparence de son épouse, ce qui eut le don de le refroidir instantanément, comme si Grey l'avait congelé sur place. Elle s'était toujours demandé si le fumeur en pinçait réellement pour la belle jeune femme ou si c'était simplement par jeu. Elle ne pouvait pas dire qu'elle comprenait, personne ne flirtait jamais avec elle.
Elle sortit la boule de sa tasse et la déposa dans la soucoupe en soupirant. Que pouvait-elle avoir de moins que les autres? Certes, elle n'était pas aussi douce et aimable que Mirajane l'était devenue. Elle avait mauvais caractère et, bien qu'elle s'efforça de le faire taire la plupart du temps, il avait tendance à resurgir avec rage dès qu'un certain blond se pointait. Peut-être qu'ils avaient peur d'elle. Elle comprenait parfaitement que les autres membres de la guilde puisse craindre Erza et essayer de l'éviter quand ils pouvaient, la rouquine possédait une force hors du commun. Elle intimidait souvent les autres, même sans le vouloir. Kirin n'avait même pas cette excuse. Loki avait bien essayé de l'approcher, mais lui ne comptait pas. Il flirtait avec tout ce qui porte une jupe.
Du reste, c'était bien beau mais avec qui accepterait-elle de sortir? Il y avait quelques beaux garçons dans sa tranche d'âge, et un peu plus jeunes, mais aucun ne l'intéressait. Grey était mignon, mais sa magie dégageait un tel froid que Kirin frissonnait dès qu'il s'approchait, et elle n'avait pas l'intention de passer son temps à ramasser ses fringues éparpillées aux quatre coins de la guilde. Natsu? Aucune chance, ce n'était qu'un gamin immature enfermé dans le corps d'un ado ... un ado aux cheveux roses qui plus est! Elfman? Même si elle devait avouer qu'il avait un certain charme, il était loin d'être son type. Son obsession à être un "homme" avait tendance à la faire rire plutôt qu'autre chose. Arzak? Complètement amoureux de la jolie Biska, même si aucun des deux ne l'avait encore compris.
Et les autres? Les deux ventouses collées au fesses de leur fabuleux dieux de la foudre, Fried et Bixlow? Pas la moindre chance. Kirin avait toujours pensé que le dandy aux cheveux verts était complètement homosexuel, constat que son admiration sans borne pour le blond de service semblait confirmer. Quand à l'autre, la seule partie de son visage qu'il semblait consentir à montrer était sa langue et, si ça faisait fantasmer certaines femmes, la brunette trouvait ça plutôt ridicule en réalité. Ça lui laissait quoi? Les deux équipier de la petite Reby, Jet et Droy? Ils étaient trop occupés à se disputer l'attention de leur partenaire pour s'intéresser à quoique ce soit d'autre. Max? Volen? Visitor? ... elle n'était pas désespéré à ce point là! Restait ...
Luxus!
— Rêve pas, ma petite! Celui-là, c'est un cas désespéré, se murmura-t-elle à elle même.
Oui, mais quel gâchis quand même!
— Qu'est-ce que tu disais?
Elle sursauta, surprise de trouver Mirajane occupée à essuyer des chopes, juste devant elle.
— Cette guilde est pleine de cas désespérés, mentit Kirin en posant le front sur le bar.
Le nez collé sur le bois, elle ne remarqua le petit sourire de connivence de la jolie barmaid.
Après un instant à se lamenter silencieusement sur la stupidité d'une certaine personne, Kirin leva la tête et sucra distraitement son thé qu'elle mélangea ensuite lentement avec sa cuillère. Mirajane posa la chope propre sur le bar avant d'en attraper une autre.
— Tu sais, je ne comprends pas non plus son attitude. Il n'était pas comme ça avant.
Kirin lui lança un regard interrogateur.
— Luxus, c'est de lui que tu parlais non?
La brune essaya de rester de marbre.
— Lui? Je suis trop tranquille quand il n'est pas là pour perdre mon temps à penser à lui, répondit-elle d'une voix qu'elle voulait détachée et indifférente.
Mirajane ne sembla pas dupe, mais elle ne poussa pas plus loin la conversation. Kirin déposa la cuillère dans sa soucoupe et porta la tasse à ses lèvres pour en boire une gorgée. A ce moment précis, une voix hurla dans la salle, la faisant presque tomber de son tabouret.
— JE SUIS RENTRÉ!
— Bienvenue Natsu, Happy, accueillit Mirajane.
Évidemment qui d'autre annoncerait son arrivée de cette manière.
Les différentes tables réagirent toutes au retour du chasseur de dragon, le saluant tout aussi bruyamment que lui. Sans attendre, Natsu se dirigea directement vers l'une d'elle, laissant tomber son sac sur le parquet.
— Eh, Natsu, fit l'un des occupant de la table, un type avec une face de rat et des grandes dents. Tu as encore fait des tiennes. J'ai lu ce qui c'est passé à Hargeon dans le jour...
Un magistral coup de pied en pleine face l'interrompit.
— Hargeon? Demanda Kirin à Mirajane tandis que le chasseur de dragon hurlait que le renseignement était faux.
— Oh tu n'as pas lu les journaux? Demanda Mirajane.
— On y trouve que des mauvaises nouvelles, répondit la brunette.
— Natsu y a provoqué de gros dégâts il y a deux jours.
— Je préfère ne pas savoir pourquoi, soupira Kirin en buvant une autre gorgée de thé.
Natsu provoquait toujours de gros dégâts, ou qu'il aille, quoi qu'il fasse. Pire qu'une malédiction.
Dans la salle la rixe s'étendait lentement à toute la guilde, comme souvent. Kirin s'était toujours demandé si c'était pareil partout ou si Fairy Tail était spécialement gâtée en bagarreurs. Elle se tourna à temps sur son tabouret pour voir Grey s'avancer dans la salle, en caleçon, clamant bien fort qu'il avait un compte a régler avec le dragon. Kanna se chargea de lui faire remarquer qu'il se baladait encore à moitié nu avant de descendre une barrique cul-sec. Sa tasse à la main, Kirin admira encore une fois la folie s'emparer de la guilde, comme à chaque fois que Natsu était dans le coin. Grey rejoignit la bagarre tandis qu'Elfman faisait encore une remarque sur la meilleur façon de se battre "comme un homme", ce qui lui valut de se faire mettre K-O. Bien entendu comme un problème n'arrive jamais seul c'est à ce moment que Loki entra dans le bâtiment, une fille sous chaque bras.
— Ah lala, il ne maquerait plus que l'autre blond se pointe pour que le fiasco soit complet!
Heureusement, Luxus était loin et pas prêt de rentrer.
Ce n'est qu'à ce moment que la brunette remarqua une autre chevelure blonde dans la salle, appartenant à une jeune fille qu'elle n'avait encore jamais vu et qui était étendue de tout son long sur le parquet. Mirajane semblait l'avoir remarqué elle aussi, car elle s'accroupit près d'elle. Posant sa tasse sur le bar, Kirin la rejoignit au cas ou la nouvelle venue aurait besoin d'aide. Elle arriva juste au moment où la blonde s'écria le prénom de la barmaid avec un air d'admiration sur le visage. Elle se reprit rapidement, cependant.
— Personne ne les arrête? s'inquiéta-t-elle en montrant la bagarre du doigt.
— C'est toujours comme ça, pas la peine de s'inquiéter, répondit la barmaid sans perdre son sourire. Et en plus ...
BAM! Une bouteille lancée l'atteignit en plein visage, l'assommant presque.
— Mirajane?! s'écria la blonde, horrifiée.
Mais la serveuse se redressa, son sourire toujours en place, malgré le sang coulant de son front.
— C'est plus drôle comme ça, acheva-t-elle.
— Drôle! Commenta Kirin d'une voix lugubre.
Elle s'agenouilla devant la barmaid et écarta d'une main ses cheveux blancs, maintenant teintés de rouge, de son front afin d'examiner la plaie.
— C'est presque rien, fit-elle, essentiellement pour rassurer la blonde qui semblait choquée. Juste une coupure qui ne laissera même pas de trace. Eh Happy, rends toi utile et apporte moi une serviette propre.
Le chat bleu arriva en planant et Kirin appliqua la serviette sur le front de la jeune femme. Un nouveau cri de la blonde la fit se retourner à temps pour la voir horrifiée devant un Grey dans le plus simple appareil. Toutefois, elle n'eut pas besoin de voler à son aide, la jeune fille répondit à la demande de l'exhibitionniste par un coup de poing en pleine face. Oh, le brun en avait vu de bien pire, mais pour une nouvelle venue, elle se débrouillait déjà bien.
Les bouteilles, les chopes et les chaises commençaient à voler dans tous les sens, signe qu'un repli stratégique était nécessaire. Plusieurs cercles magiques apparurent alors dans la salle, des esprits échauffés s'apprêtant à faire usage de la magie.
— Galère, commenta la Rêveuse hésitant entre invoquer quelque chose ou partir très vite.
Le sol trembla violemment et une ombre démesurée tomba sur la salle.
— Vous allez vous calmer bande de crétins, gronda une voix.
— AAAAAAAah, un géant, s'écria la blonde, épouvantée.
L'intervention eut le mérite de mettre un point final à la bagarre, tous les belligérants se calmant instantanément ... Enfin, presque tous!
— AAAAh, vous abandonnez tous! Claironna nul autre que le dragon aux cheveux roses. J'ai encore gag...
BAM! Un pied s'abattit sur lui, mettant un terme à sa fanfaronnade.
— Oh, vous étiez là, Maître, fit Mirajane comme si ce qui venait de se passer était tout à fait normal.
Et pour eux, ça l'était!
— Maître? Interrogea la blonde qui ne semblait pas en croire ses yeux.
Makarov la remarqua à ce moment.
— Oh, tu es nouvelle?
— Euh ... oui!
Le Maître s'approcha, reprenant sa taille normale sous les yeux éberlués de la blonde.
— Ça me rappelle des souvenirs, commenta Kirin à mi-voix avant de retourner à son thé.
Par chance, la tasse n'avait pas souffert de la rixe.
Elle s'assit à sa place et regarda Makarov sauter, avec quelques difficultés sur la rambarde du second étage, au dessus du bar. Agitant une liasse de papiers qu'il tenait à la main, il se lança dans ce qui ressemblait à des remontrances en bonne et due forme, mais qui se mua rapidement en une leçon dont il avait le secret. Rassurés par ses paroles les membres de la guilde, qui n'en menaient pas large, retrouvèrent aussitôt le sourire et reprirent leurs activités comme si rien ne s'était passé.
La petite blonde, qui s'avéra se nommer Lucy, confirma vouloir entrer dans la guilde et reçut sa marque, qu'elle avait choisit rose et sur le dos de la main droite, histoire que tout le monde la voit bien. Toute fière d'elle, elle alla la montrer à Natsu, qui ne sembla guère impressionné, pendant que divers pervers de service essayaient de l'inviter à rejoindre leur équipe.
— Les hommes, soupira Kirin en s'accoudant au bar.
— Ça ne va pas, Kirin-chan? Interrogea Mirajane qui passait avec un plateau chargé de chopes vide.
— Ça fait deux ans que je suis ici et je travaille toujours toute seule. Elle est là depuis deux heures et tout le monde est prêt à faire équipe avec elle.
Elle jeta un coup d'oeil vers Lucy par dessus son épaule.
— Enfin, c'est vrai qu'à coté d'elle, j'ai l'air d'un épouvantail!
— Ne dis pas ça.
Kirin se tourna à nouveau vers Mirajane qui plaçait les chopes dans un grand évier.
— Ah oui, je voulais te dire, fit la brune en se donnant une claque sur le front. Avec la dernière mission, j'ai assez d'argent pour tenir un moment. Si tu as besoin de mon aide au bar, ou à la cuisine, n'hésite pas.
— OK, fit simplement la barmaid.
La blonde s'assit soudain près de Kirin, l'air offensée.
— Alors, Lucy, quelles sont tes premières impressions sur la guilde? Interrogea Kirin en piochant une fraise bien rouge sur le sommet de la glace posées devant elle.
— C'est bruyant, répondit la blonde.
Ça fit rire Kirin.
— Oui ça, y'a pas photo.
— C'est la meilleure guilde de tout le pays, s'enthousiasma la jeune fille, des petites étoiles dans les yeux.
— Pour ça non plus y'a pas photo, commenta Kirin. Encore que les membres des autres guildes ne seraient certainement pas d'accord avec nous. Question de point de vue.
Il y eut un instant de silence puis:
— Tu es constellationiste, c'est ça?
La blonde se tourna vers la brune.
— Co ... Comment tu le sais?
D'un geste de la main, Kirin désigna le trousseau pendant à sa ceinture.
— Tes clés. J'en ai déjà vu dans les magasins de la ville. A combien d'esprits es-tu liée?
— Pour l'instant, à six. J'ai la clé de la Croix du Sud, celle de la Lyre, celle de l'horloge. Ce sont des clés d'argent. Et j'ai aussi trois clés d'or: celle du Taureau, celle du Cancer et celle du Verseau. Les clés d'or sont très rares, il n'en existe que douze.
Et tandis qu'elle citait ses possessions, elle les posait sur le bar pour les montrer à Kirin. La brune prit l'une des clés et la tourna un instant entre ses doigts. C'était un objet qui paraissait presque insignifiant mais elle dégageait une telle aura magique qu'il était difficile de la confondre avec une clé normale. Encore une raison de ne jamais se fier aux apparences.
— Et toi, quelle magie pratiques-tu?
— Moi? Celle du Rêve.
La blonde lui lança un regard incrédule.
— C'est presque la même chose que toi, expliqua Kirin. J'invoque des créatures oniriques, des créatures que j'ai créé. Mais je n'ai pas besoin de clé. Et contrairement à toi qui ne peux pas modifier tes esprits, je peux faire évoluer mes créatures comme je le veux.
— Et combien en as-tu?
— Sept, plus une en cours de création dont ne ne peux pas encore me servir.
Lucy fronça les sourcils.
— Et comment on crée un Rêve?
— C'est un peu compliqué, répondit Kirin avec un sourire. Il faut ...
Une voix plaintive l'interrompit:
— Papa n'est pas encore rentré?
Non loin d'elle, un petit garçon levait la tête vers Makarov, assit sur le bar.
— Non, répondit le maître. Tu es pénible, Roméo. Ton père est un mage, tu devrais avoir confiance en lui.
Kirin plongea sa cuillère dans la chantilly qui commençait à couler le long des bords de sa coupe. Lucy, quand à elle, ne quittait pas le petit Roméo des yeux. Le garçonnet insista, attirant l'attention d'autres de membres de la guilde, parmi lesquels, Natsu. Cependant, quand Makarov l'envoya durement promener, le gamin, furieux et désespéré, lui sauta au nez pour lui coller son poing en plein visage, avant de s'enfuir en pleurant.
— Ce petit a vraiment trop tendance à prendre Natsu pour un modèle, commenta Kirin en retournant à sa glace.
— Il est dur, constata Lucy.
— Ne crois pas ça, fit Mirajane en déposant une pile d'assiette dans l'évier. Le Maître aussi est très inquiet.
Un claquement les fit sursauter toutes les trois.
— Natsu, t'as bousillé le tableau, se plaignit un grand type habillé en indien, des crânes autour du cou et de la taille.
Mais le dragon s'éloigna sans répondre, un air à faire peur sur le visage. Sans un mot, il récupéra son sac, gisant toujours sur le sol là où il l'avait abandonné, et se dirigea vers les portes du bâtiment, Happy voletant derrière lui.
— Maître, s'écria l'indien. Natsu a l'air passablement énervé.
— Il va aller chercher Macao, fit un autre.
— Tout ça à cause de ce gamin.
— Il va froisser l'amour propre de Macao, présagea l'indien.
— Et qu'est-ce qu'il vaut mieux à ton avis? interrogea Kirin en plongeant sa cuillère dans sa glace. Un amour propre un peu blessé, ou un mage mort? On peu se remettre d'une blessure d'orgueil, mais c'est plus difficile de se rétablir de la mort.
L'autre ne trouva rien à redire. Makarov mit un terme définitif à la discussion en ordonnant aux bavards de laisser Natsu faire ce qu'il voulait.
— Qu'est-ce qui lui a pris? Interrogea Lucy, un peu inquiète.
— Natsu est comme Roméo, expliqua Mirajane en frottant un verre, le dos tourné. Il s'identifie à lui. Quand il était enfant, le père de Natsu aussi a disparu un jour sans laisser de traces. Enfin, son père adoptif je devrais plutôt dire. C'était un dragon!
Sous le coup de la surprise, Lucy en tomba de son tabouret.
— Un dragon? Mais c'est pas possible!
— Si, répondit Mirajane d'une voix à peine audible. Le dragon l'a trouvé quand il était petit. Il l'a adopté, l'a éduqué, lui a appris la magie. Mais un jour ce dragon a disparu, laissant Natsu seul au monde.
L'émotion faisait trembler Lucy.
— Je comprends. Ce dragon, c'est ce fameux Ignir qu'il cherche partout.
— Nous autres ... Ici à Fairy Tail ... Nous avons tous notre fardeau à porter, fit la barmaid d'une voix un peu tremblante. Une douleur, une blessure, une souffrance ... Même moi ...
Ces deux derniers mots avait été rajoutés à voix si basse que Lucy n'était pas certaine d'avoir bien entendu.
— Comment?
Mirajane semblait en proie à une vive émotion et ses lèvres tremblaient comme si elle allait pleurer. Cependant, au prix d'un gros effort, elle parvint à se reprendre et à esquisser un sourire triste.
— Non, rien!
Le moral proche du zéro absolu, Kirin fit tourner pensivement sa cuillère dans sa glace fondue.
Elle aussi avait son quota de souffrance à supporter. Autour des trois jeunes femmes l'ambiance festive avait repris ses droits dans la salle, mais aucune ne semblait encline à se laisser gagner par l'euphorie ambiante. Abandonnant sa glace maintenant complètement liquide, Kirin se laissa glisser de son tabouret.
— Je rentre, annonça-t-elle simplement. Demain, je m'occupe de la cuisine.
Mirajane répondit d'un hochement de tête, et Kirin se dirigea vers la porte sans prêter attention à la joyeuse ambiance.
La nuit était déjà tombée, et la rue paraissait sombre après la salle vivement éclairée de la guilde. Le silence l'enveloppa comme un linceul et elle se sentit frissonner malgré la chaleur estivale. Une souffrance, hein? ... Oui, on pouvait dire ça. Bon sang! Putain de blond, il réussissait à l'emmerder, même quand il n'était pas là. Si c'était pas de la torture, ça! Elle secoua la tête en se traitant mentalement d'idiote puis prit la direction de Fairy Hills. Elle avait à peine fait trois pas qu'une voix la fit sursauter. Se retournant, elle vit Lucy sortir de la guilde en courant, hurlant à Natsu de l'attendre. La pauvre, elle ne savait vraiment pas dans quoi elle s'embarquait!
— Et c'est toi qui ose dire ça? Se questionna-t-elle avec ironie.
Un sourire amer aux lèvres, la jeune femme se tourna à nouveau vers les ténèbres devant elle, et reprit son chemin.
Voilà pour le premier chapitre.
Peut-être que certaines choses vous paraissent un peu confuses, mais rassurez-vous, ça va s'éclaircir avec la progression de l'histoire.
Si vous avez des questions n'hésitez pas, j'essaierai d'y répondre dans la mesure du possible sans trop en dire. XD
