"Bienvenue à l'Académie Densetsu no Yuusha! Cet établissement sera votre demeure pour les trois prochaines années!"

Tous les nouveaux élèves, dans leurs uniformes neufs, écoutaient religieusement le directeur faire son discours. Tous? Que dis-je... Bien sûr que non. En retrait, sous un cerisier en fleur, flânait un beau brun. Quoique flâner n'est pas vraiment le mot juste... il était plutôt... en train de faire la sieste. Une nouvelle année, une nouvelle école... rien de bien impressionnant pour Ryner Lute, champion toutes catégories des siestes de l'après-midi à n'importe quelle heure de la journée depuis au moins une décade et demie, si ce n'est plus... Les écoles, c'était partout la même chose, de toute façon. N'arrive pas en retard, aie de bonnes notes, fait pas le con, cause pas de problèmes, fait les travaux, et les années scolaires passent lamentablement lentement comme sur un long fleuve tranquille. Même s'il savait tout ça par coeur pour l'avoir recopié bon nombre de fois dans sa jeunesse, Ryner n'en faisait toujours qu'à sa tête et ne respectait que trois de ces règles fondamentales: avoir de bonnes notes, pas faire le con et pas causer de problèmes. En fait, c'était plutôt les problèmes qui avaient tendance à le trouver, sans jamais qu'il les cherche. Comme en cette toute première matinée glorieusement ensoleillée où une jeune femme ne le vit pas, là, étalé de tout son long sous le cerisier, et trébucha sur lui dans une exclamation de surprise. Sa sieste bien méritée (selon lui, et elles l'étaient toujours) ainsi interrompue, il ouvrit un oeil pour voir ce qui l'avait dérangé, par simple curiosité. Plusieurs paires d'yeux de la foule d'élèves entousiastes étaient tournées vers eux, rien d'étonant. La jeune femme était étalée face contre terre, des livres, qu'elle avait sans doute eu dans les bras précédemment, étaient éparpillés autour d'elle. Elle émit un gémissement de douleur en se redressant difficilement en position assise et elle le fusilla du regard un moment. Il lui rendit bien, quoique bien plus paresseusement et plutôt pour dire "t'avais qu'à regarder où tu mettais les pieds". La jeune femme ferma les yeux en soupirant, rassembla ses livres en une pile et le regarda une seconde fois, cette fois-ci sans malice. Le regard inquisiteur se changea rapidement en regard appréciateur et Ryner sentit un de ses sourcils sur le point de tiquer. S'il avait bien appris quelque chose de l'orphelinat et des nombreuses familles d'accueil, c'était que lorsqu'il y avait une femme impliquée dans ta vie, y'a pas moyen de faire des siestes tranquille. Le petit hamster tourna rapidement dans sa tête, à la recherche d'une solution à un problème de ce genre qu'il sentait imminent (c'était peut-être son imagination, mais il aurait pu jurer que les yeux verts de la jeune femme s'étaient quelque peu attardés quelque part près de ses hanches). Ses sourcils se haussèrent un tantinet alors que la solution, d'une simplicité exemplaire, lui apparut soudain.

"N'y pense même pas, les femmes m'intéressent pas," dit-il, assez fort pour qu'elle puisse l'entendre mais pas assez pour en faire une annonce publique.

Les joues de la rouquine s'enflamèrent et ses yeux brun rougeâtre remontèrent instantanément à son visage alors qu'elle lui lança un regard d'indignation. Mais avant qu'elle puisse lui dire quoi que ce soit, le directeur annonça la fin de son discours et les applaudissements fusèrent du publique de jeunes adultes présents. Avec un soupire las, le brun se leva, comme si son corps pesait une tonne ou deux, et après un rapide signe d'au revoir à la rouquine, il suivit le flot d'élèves vers l'école elle-même pour se rendre à son premier cours. Il ne se doutait pas ce jour-là que deux paires d'yeux, une bleue et l'autre dorée, restèrent fixées sur son dos jusqu'à ce qu'il disparût dans la foule...


"Bienvenue à l'Académie Densetsu no Yuusha! Cet établissement sera votre demeure pour les trois prochaines années!"

Sion Astal coupa le discours du directeur de son champ d'attention et se concentra sur les élèves assemblés. Tous semblables, vraiment, d'où il se tenait, mais il y avait sans doute, dans cette foule de jeunes gens emplis de préjugés et de superficialité, quelques éléments dignes de son attention qui pourraient l'aider grandement. Son but? Que tout le monde soit traité de façon égale, évidemment. Du mouvement sur sa gauche attira son attention et il tourna la tête juste à temps pour assister à une magnifique chute pas du tout gracieuse d'une rouquine qui avait trébuché sur un brun qui roupillait sous un cerisier. Sion se retrouva comme transit alors que la rouquine s'étalait par terre, mais ses yeux dorés étaient vraiment fixés non sur la divine créature du sexe opposé, mais bien sur ce qui avait causé la chute de ladite créature. Le jeune homme restait bien détendu et n'ouvrit même qu'un seul oeil pour voir ce qui s'était passé. Tout autour de lui, les murmures fusèrent aussitôt et il en apprit un peu plus sur les deux. Alors il s'agissait de deux de ces gens qui arrivent aux études supérieures non pas grâce à leur argent, mais bien grâce à leurs talents, selon les sous-entendus, les regards et les commentaires désobligeants des richards assemblés, qui formaient en réalité environ 90% de la population étudiante de cette académie. 90% d'enfants trop gâtés, de râleurs infatigables et de jacasseurs inconditionnels. Sion fut distrait un moment par le mot de la fin du directeur et les applaudissements, mais lorsque le brun se leva, ses yeux dorés ne le quittèrent pas tant qu'il n'eut pas disparu dans la foule. Il ne savait pas exactement pourquoi, mais il sentait qu'il allait revoir ce beau brun. Et l'idée ne lui était pas du tout déplaisante, non plus... Une main se posa sur son épaule, le faisant sursauter. En se retournant, il vit que c'était un élève d'une année supérieure.

"Je suis Lucile Eris et je crois que nous devrions parler...", dit doucement le blond, un sourire indéchiffrable sur les lèvres.

Pour une certaine raison, Sion sentit à ce moment le besoin de déglutir. Il y avait quelque chose de dangereux à propos de cet homme. Malgré tout, la famille Eris était reconnue comme se mettant aux ordres de grands dirigeants et les protégeant en plus de les aider dans différentes tâches. Les détails étaient flous, mais si un Eris décidait de s'allier à quelqu'un, cette personne était certaine de réussir et de faire quelque chose de grand. Mais les Eris étaient également connus pour avoir anéanti des empires. Faire affaire avec un Eris était un pari risqué, mais qui en valait vraiment le coup. Sion n'y pensa pas à deux fois lorsque le blond le tira à l'écart et se dit qu'après tout, ce n'était que la première journée et qu'il n'aurait sans doute aucun mal à reprendre ce léger retard...