FullMetal Alchemist

The Alternative Chapter:

The Alchemy's Last Evolution

Cycle I: Surprenant Compatible

Rouge.

La pierre philosophale.

Elle brillait d'un intense éclat malgré le fait qu'il n'y ait que peu de lumière dans cette sombre cellule. Elle tournoyait entre des doigts experts qui avaient l'air de bien la connaître. Ces doigts étaient reliés à une main tatouée, menottée avec sa jumelle (également tatouée). L'homme, à qui appartenait ces mains, souriait rêveusement en fixant la petite pierre dont la couleur correspondait au surnom qu'on lui avait attribué.

L'écarlate.

Un nom plutôt approprié pour cet homme sans foi ni loi.

Il soupira et prit la pierre entre ses dents, avant de l'avaler tout rond. Ce geste incongru était devenu une habitude pour lui, depuis le temps qu'il la détenait à l'insu de tout le monde. Il décroisa ses jambes et s'allongea sur son lit. Il posa ses yeux dorés sur le plafond suintant et réfléchit à ce qui composerait sa journée.

Qu'est-ce que l'on s'ennuie ici.

Un constat qu'il faisait chaque jour depuis son arrivée à la prison de Central City.

Qu'est-ce que je fais là?

Une question qui revenait souvent. Lui qui aimait se sentir libre comme l'air, cela faisait sept ans qu'il croupissait au fond d'une geôle. Il aurait tout aussi bien pu s'enfuir après avoir tué ses supérieurs hiérarchiques; mais non, il était resté planter là à rire comme un dégénéré. Tiens, c'est vrai cela, il aurait pu plaider la folie lors de son procès. Mais là non plus cela n'aurait pas fonctionné, tout le monde savait qu'il était lui-même conscient de sa propre psychose. Et puis en fin de compte, il s'était convaincu que le fait d'avoir assassiner ses supérieurs ne pouvait qu'être bénéfique - autant pour lui que pour les autres.

Tout de même, qu'est-ce qu'il ne donnerait pas pour avoir quelque chose à faire, ou qu'un événement inattendu arrive.

Le destin semblait l'avoir entendu, car le verrou de sa porte cliqueta pour enfin laisser passer un peu de lumière. L'homme resta couché tandis qu'un gardien sacrément enrobé s'approcha de lui, en gardant quand même ses distances.

- Debout Kimblee.

Le dénommé Kimblee ne bougea pas un muscle, mais consentit toutefois à tourner la tête pour lorgner son geôlier.

- Que me vaut l'honneur de votre visite ? demanda-t-il.

- Tu vas être déporté ailleurs. Lève-toi.

- Où donc ?

- J'en sais rien et je m'en fous pas mal de le savoir. Du moment que j'ai plus ta belle petite gueule à supporter.

- Toujours aussi poli à ce je vois.

- Magne-toi le cul, j'ai pas que ça à foutre !

Finalement, Kimblee se leva et suivit le gardien dans le couloir. Ce dernier l'emmena en dehors du bâtiment, dans une cour entourée par de hauts murs qui se terminaient par des fils barbelés. Là, plusieurs autres prisonniers attendaient que l'on vienne les prendre en charge. En voyant ce rassemblement, Kimblee commença à s'interroger.

Pourquoi nous déportent-ils ? Il n'y a donc plus de place ici ?

Deux types portant des uniformes de l'armée s'approchèrent. L'un d'eux encadra le groupe de prisonniers et leur demanda de bien vouloir avancer vers le camion, dans lequel ils prendraient place. Le second s'avança auprès du gardien et de Kimblee.

- Faites gaffe avec lui capitaine, prévint le gardien en désignant le prisonnier qui l'accompagnait. C'est un vrai danger public.

- Merci pour le compliment, dit narquoisement l'intéressé.

- Ferme la !

- Le fameux alchimiste écarlate, fit le capitaine. Je vois.

- Emmenez-le, je veux plus jamais le revoir.

- Vous êtes si désobligeant, jugea utile d'ajouter Kimblee.

- Tu vas la boucler, oui ?!

- Bon heu… Allons-y, annonça le capitaine avant que le gardien n'exprime plus clairement sa haine envers l'alchimiste déchu.

Sur l'ordre du capitaine, Kimblee partit rejoindre les autres détenus qui étaient, pour la plupart, déjà installés dans le large véhicule. Il négocia sa montée du mieux qu'il put et s'assit à côté d'un jeune homme blond qui lui jeta un regard en biais. L'ex-alchimiste d'état ne s'en préoccupa pas et ferma les yeux. Le moteur du camion vrombit et commença la longue route qui mènerait ces détenus, tout droit en Enfer.

Deux mois.

Cela faisait plus de deux mois que Kimblee croupissait au fond de cette cellule aux murs couverts de carreaux blancs. Il y avait là le strict nécessaire: un lit, un lavabo et des W.C; l'ensemble de la pièce n'était plus tout récent, plusieurs carreaux étaient ébréchés et de couleur terne. Mais ce qui avait frappé l'alchimiste, quand il avait fait connaissance avec sa nouvelle geôle, ce sont les vieilles taches rouge sombres qui maculaient une bonne partie des murs et du sol, et que l'on avait essayé d'effacer.

Du sang.

Qu'avait-on bien pu faire dans cette pièce, devenue tout à coup lugubre pour Kimblee? Il avait posé la question au capitaine qui l'avait emmené jusqu'ici, mais celui-ci était resté de marbre et ne lui avait rien répondu.

Lorsque les prisonniers étaient arrivés dans l'enceinte du bâtiment où on les avait amené, ils n'avaient même pas pu savoir où ils se trouvaient en Amestris. Etaient-ils, cependant, toujours en Amestris? Cette question, parmi tant d'autres, resta inrésolue par l'alchimiste écarlate; toutefois, il avait constaté un changement de température caractéristique en arrivant. Ils devaient donc se trouver au Nord, mais où? Quand il avait traversé les couloirs, tellement blancs qu'ils en étaient lumineux, en compagnie du capitaine, il avait pu apercevoir, à travers une porte enrebaillée, une vaste salle où étaient entreposés toutes sortes d'instruments ainsi que des paillasses dont se servent habituellement les scientifiques. Parmi ces outils, il put reconnaître, à sa grande surprise, de quoi faire des expériences alchimiques de toutes sortes, mais aussi de quoi torturer des êtres humains.

Etrange...

Les scientifiques n'ont pas leur place dans une prison d'après ce qu'en savait Kimblee. A moins que ce ne soit les prisonniers qui n'y aient pas vraiment leur place...

Un autre fait étrange, lorsque l'alchimiste s'était retrouvé en face de la porte de sa cellule, il avait reconnu le tracé d'un cercle alchimique au-dessus du numéro de cette dernière. Une fois dans la pièce, le capitaine avait débarrassé Kimblee de ses menottes, qui lui demanda pourquoi il agissait ainsi. Son nouveau gardien avait émis un sourire énigmatique et lui avait dit qu'il n'en aurait pas besoin pour être aussi inoffensif qu'un agneau. Quand la porte eut été fermée à double tour, l'alchimiste s'était précipité vers la porte, avait claqué ses mains l'une contre l'autre et les avait apposées sur le métal froid qui le séparait encore de la liberté. Il avait attendu, mais rien ne s'était passé. Il avait repris son sang-froid et réessayé... Mais le résultat avait été le même. Il s'était alors souvenu du cercle alchimique gravé sur sa porte: elle servait en fait à l'empêcher de faire usage de son alchimie.

Impossible. Il ne se trouvait pas dans une prison. Cela n'avait pas de sens...

Désormais, depuis deux mois, Kimblee était là, à tourner en rond dans sa geôle, attendant le jour où il voudrait bien se passer quelque chose qui pourrait lui expliquer où il se trouvait et pourquoi il était là. Il s'adossa contre un mur et se laissa glisser par terre, exténué. Il grelottait, la température de cette pièce devait vraiment être très basse, et ce devait être le cas pour quasiment tout le complexe. Il ramena ses jambes contre son torse et les serra de ses bras, afin de conserver le maximum de chaleur que produisait son corps.

Un bruit de serrure qui s'ouvre. On venait enfin s'occuper de lui. Un homme en blouse blanche, pas plus âgé que lui, s'avança et lui demanda de se lever. Kimblee s'exécuta et chercha à savoir ce qu'il faisait là; le soit-disant scientifique ne répondit pas à sa question et passa à un autre sujet.

- Vous êtes celui que l'on appelle l'alchimiste écarlate, je me trompe? fit-il dédaigneusement.

- En effet, approuva Kimblee.

- Franchement, cela m'étonnerait vraiment qu'il s'avère que vous soyez celui que l'on attend.

- De quoi parlez-vous?

- Peu importe. De toute façon cela ne vous servirait à rien de le savoir. Capitaine! Emmenez-le au bloc six.

L'officier voulut passer les menottes à l'ex-alchimiste d'état, mais ce dernier lui décocha un crochet du droit par surprise. Pendant que le capitaine s'affalait par terre, le nez en sang, Kimblee se précipita vers la seule sortie de la pièce dans laquelle il avait été confiné. S'il arrivait à sortir de ce périmètre, il pourrait réutiliser son alchimie et ainsi faire face à ceux qui tenterait de lui barrer le chemin. Le sceintifique tenta de s'interposer mais il fut vite remis à sa place. Kimblee passa le pas de la porte en jubilant et continua de courir dans le couloir, essayant de se repérer du mieux qu'il pouvait avec les souvenirs qu'il avait de son arrivée. Seulement, lorsqu'on l'avait fait descendre du camion, il se trouvait déjà à l'intérieur de l'enceinte du bâtiment. Tant pis! Il verrait sur place en temps voulu. Une alarme assourdissante se mit à retentir. Au détour d'un couloir, il dut s'adosser précipitamment au mur pour ne pas être découvert par des soldats et des scientifiques, qui commençaient sérieusement à s'agiter - pour ne pas dire paniquer. Il en profita pour reprendre sa respiration, qui était un peu trop accélérée à son goût (quoique, c'était normal après avoir passé sept années enfermé sans qu'il y est la moindre agitation). Ensuite, il reprit sa course et évita autant qu'il put les hommes qui étaient à sa recherche. Il monta quatre à quatre des escaliers qui n'en finissaient pas, pour enfin pousser une porte qui donna sur une vaste salle où la lumière était tamisée. Il referma la porte le plus silencieusement possible et la première chose qu'il remarqua, ce fut une odeur âcre et pestilentielle qui lui retourna l'estomac. Il retint sa nausée et plaqua une main sur sa bouche et son nez. Il fit quelques pas en avant afin de savoir à quoi correspondait la masse sombre qu'il distinguait au loin, l'odeur n'en devenant que plus forte et insupportable.

Lorsqu'il comprit à quoi était due cette odeur infecte, il stoppa ses pas et contempla le spectacle, comme hypnotisé. Il y avait là un gigantesque charnier humain; des corps s'entassaient pelle-mêle jusqu'à former une macabre petite colline qui reposait dans une mare de sang collante. Des mouches voletaient un peu partout, attirées par l'odeur des corps en décomposition. Une chose en particulier frappa l'alchimiste: les corps étaient tous ceux d'enfants qui n'avaient pas encore atteint l'adolescence.

Bordel, mais que s'est-il passé ici?!

Alerté par des bruits de pas qui venaient par ici, Kimblee remit cette interrogation à plus tard et chercha une issue qui lui permettrait de sortir à l'air libre.

Ces mouches doivent bien venir de quelque part!

Il fouilla de fond en comble la salle et aperçut enfin un conduit de ventilation assez large pour laisser passer un homme. Il s'y infiltra et entreprit de ramper vers l'air frais qui frôlait son visage. Le souffle qu'il sentait se faisait plus fort et plus froid à mesure qu'il avançait; encore un effort et il serait libre. Finalement, il arriva devant une grille qui donnait sur le dehors. Il plissa les yeux pour voir quelque chose mais tout ce qu'il réussit à distinguer ce fut de la neige qui tombait à flot, tandis qu'un vent glacial soufflait en rafale, frigorifiant ainsi son corps. Il claqua les paumes de ses mains et les plaqua sur cette barrière qui le retenait encore prisonnier. Elle explosa dans une gerbe d'étincelles et il put se glisser à l'extérieur. Une fois dehors, il ressentit encore plus le froid mordant de ce blizzard qu'il n'avait pas prévu. Il croisa ses bras pour avoir un peu plus chaud et combattit le vent qui tentait tant bien que mal de le repousser. Il marchait lentement afin d'assurer chacun de ses pas; il avait une visibilité presque nulle et ne pouvait prévoir sur quoi il tomberait à un mètre devant lui. Tout à coup, il ne sentit plus rien sous le pied qu'il croyait poser et il sentit son corps tomber. Il fit une chute d'environ deux mètres et atterrit sur un épais manteau de neige, qui amortit sa chute. Toutefois, il remarqua bien vite qu'il ne pourrait pas se relever tout de suite, ses membres endoloris et frigorifiés l'en empêchaient; mais il ne pouvait pas rester comme cela sans bouger, sinon c'était la mort assurée pour lui. Il prit donc sur lui et força son corps à bien vouloir bouger. Il se remit debout difficilement et continua son aveugle marche dans cette tempête de neige perpétuelle. Au bout d'un temps, il constata que ses idées n'étaient plus très claires, il n'arrivait même plus à savoir ce qu'il faisait là et d'où il venait; la seule chose qui subsistait c'est qu'il avait du mal à sentir l'extrémité de ses doigts. Comme si ce blizzard ne suffisait pas, sa vue se brouillait de plus en plus. Il n'avait plus aucun repère et son corps ne lui obéissait plus. Il s'effondra dans la neige et ses paupières se fermèrent d'elles-même sur ce paysage blanc.

Bon sang! Je ne vais quand même pas mourir comme ça?!

Trou noir.

Peu à peu ses cinq sens revinrent. Il avait encore froid mais moins qu'avant. Allongé sur le sol, il se roula sur le dos et ouvrit ses yeux avec peine. Tout ce qu'il vit ce sont des formes floues qui se penchaient sur lui.

- Alors ça y est, on émerge? ironisa l'une d'entre elles.

- Croyais-tu vraiment que tu allais t'en sortir sans dommage dans ce blizzard? demanda une autre.

Il mit longtemps à comprendre ce qu'on lui disait; sa mémoire lui faisait défaut mais tout revint à la surface. Il était l'un des détenus d'une prison louche, de laquelle il avait tenté de s'évader... sans succès. Terrassé par le froid et la neige, il n'avait pu continuer et avait perdu connaissance.

Sa vue commençait à revenir et il reconnut le scientifique et le capitaine qui étaient venus le chercher dans sa cellule. Il soupira profondément. Cette tentative d'évasion avait été un échec, bien qu'il avait eu la possibilité de faire usage de son alchimie. Mais que pouvait sa science contre le froid? Ses geôliers avait décidémment bien choisi leur lieu de travail; qui irait fouiner dans un endroit pareil? Et impossible de sortir par ce froid sans y être préparé. Pour qu'il y ait de telles tempêtes de neige, le complexe devait forcément se trouver dans le Nord. Mais où exactement, cela restait un mystère.

Il se redressa et fixa le capitaine dont le nez cassé saignait abondemment. Il sourit, fier de l'avoir aussi bien ammoché avec la seule force de son poing.

- Vous devriez consulter un médecin, dit Kimblee à l'intention de l'officier, votre nez pisse le sang.

Le capitaine, qui n'appréciait guère les insinuations de l'alchimiste, décocha un violent coup de pied dans le thorax de ce dernier, lui coupant littéralement le souffle.

- Cela suffit maintenant, annonça le scientifique. Je n'ai pas de temps à perdre avec ces idioties. Je le veux au bloc six immédiatement!

Tandis que Kimblee reprenait une respiration normale, le capitaine s'empressa de lui ligoter les mains dans le dos et de le relever sans ménagement. L'alchimiste fut bien forcé de le suivre et ils redescendirent dans les sous-sols sombres de la base. On le conduisit dans une pièce large au centre de laquelle trônait un cercle alchimique complexe. L'officier l'obligea à s'asseoir au centre du cercle puis, il sortit de la salle avec empressement. Malgré ses liens, Kimblee se mit sur ses jambes et fit le tour du bloc, comprenant de moins en moins ce que les scientifiques avaient l'intention de faire. Il jeta alors un coup d'oeil au cercle gravé sur le sol; bien qu'il ne soit pas un expert dans ce style d'alchimie, il y reconnut des inscriptions, utiles à une transmutation humaine, dont il n'arriva pas à déduire l'aboutissement.

Qu'ont-ils l'intention de faire?

Kimblee regarda en hauteur et aperçut plusieurs scientifiques derrière une large vitre, certainement à l'épreuve de l'alchimie. Au plus profond de lui-même il sut que quelque chose allait se passer, qui changerait peut-être le court de sa vie. Son coeur s'accéléra, tout comme sa respiration. Il rit. Il n'éprouvait quand même pas de la peur?! Pas lui... Et pourtant, l'adrénaline torturait ses veines, une goutte de sueur coula sur son visage. Il tomba à genoux au milieu du cercle. De toute façon, il n'y avait aucune issue, alors autant accepté dès maintenant ce qu'il allait se passer.

- Seriez-vous devenu fataliste, l'écarlate? demanda narquoisement le scientifique qui était venu le chercher.

L'alchimiste releva la tête et lorgna le scientifique d'un air hautain, pendant que ce dernier reprenait son speech.

- Je vous trouve incroyable! Vous êtes le premier à accepter sereinement votre sort. Tout les autres hurlaient à nous en briser les tympans, c'en étaient chiant à la longue. Vu que vous semblez prêt, je pense que nous pouvons commencer. Ne vous inquiétez pas, vous ne mourrez pas...

- Je ne sais pas ce qui va m'arriver, mais sachez que je n'ai pas peur de la mort.

Le scientifique esquissa un sourire et demanda à ses collaborateurs l'activation de l'"opération juvénile".

Kimblee vit les petites rigoles, entourant le cercle, se remplir d'une substance lumineuse et converger vers lui. Le cercle alchimique s'illumina, annonçant le commencement de la transmutation. Des éclairs de couleurs vives jaillirent et entourèrent l'alchimiste, l'électrocutant quelques fois. Il ne ferma pas les yeux, souhaitant voir en face ce qui lui arriverait. Il sentait des picotements dans tout son corps et des douleurs de plus en plus fortes dans ses entrailles, l'obligeant à contracter ses muscles. Il se mordit la lèvre inférieure pour éviter de crier, malgré cette douleur atroce. Tout à coup, il eut l'impression que sa tête se vidait, que tout ce qu'il avait vécu, tous ses souvenirs, partaient dans un grand siphon sans fin. A la fin, il lui sembla qu'il savait à peine qui il était réellement. Il avait l'étrange impression de flotter au milieu d'un épais brouillard. Il s'effondra sur le sol dur et perdit de nouveau connaissance.

La nuit, encore.

Qui suis-je?

Dans le quartier général militaire de Central City, le lieutenant Riza Hawkeye venait d'être convoquée dans le bureau personnel du généralissime. Maintenant qu'elle était sous les ordres direct de celui-ci, elle connaissait le chemin par cœur. Pourtant, le matin il lui avait annoncé qu'elle pouvait prendre un jour de congé; elle s'était donc apprêtée à sortir en centre-ville, pour avoir l'occasion de rendre visite à son ancien chef, mais elle fut prise de court et dut revenir sur ses pas. Qu'est-ce que le généralissime pouvait bien lui vouloir? Avait-il découvert ce qu'ils mijotaient, elle et le colonel Roy Mustang? Non, impossible, ils avaient fait en sorte d'être discrets et rusés; comment, tout à coup, le président Bradley aurait-il eu accès à leur conversation? Et surtout comment aurait-il réussi à les déchiffrer? Il n'aurait rien compris à leur ragots sans aucune valeur, qui pourtant contenaient moult informations cruciales pour l'avancée de leur plan, concernant la chute des homonculus et de leur dirigeant.

Hawkeye arriva au niveau de la grande porte donnant sur le bureau de son supérieur; elle frappa trois coups et entra. King Bradley, le général en chef des armées d'Amestris, se tenait debout devant une large fenêtre, derrière son bureau. La jeune femme resta à une distance respectable de l'incarnation de la colère. Sachant qu'elle était là, il ne se retourna pas et lui raconta pourquoi il l'avait fait revenir.

- Je suis désolé d'avoir du annuler votre jour de permission, mais j'avais une bonne raison de faire cela. Lieutenant Hawkeye, je vais vous confier une mission.

- Quels sont vos ordres? demanda-t-elle, peu tranquille.

- Afin de mener à bien nos plans, moi-même et quelques autres généraux avions décider de libérer l'alchimiste écarlate.

- Vous voulez rendre la liberté à Kimblee? Pourtant, c'est lui qui à assassiner une partie des généraux connaissant votre secret. Pourquoi alors, vouloir le relâcher?

- Je vous l'ai dit, il nous sera utile dans peu de temps. Mais là n'est pas le sujet de notre conversation, lieutenant. Comme je le disais, nous avions décider de le faire sortir de prison, or le militaire que j'avais envoyé m'a rapporté que Kimblee n'y était plus.

- Il s'est évadé?

- Non, je ne crois pas. Les gardiens ont raconté que récemment, un capitaine était venu le chercher lui, ainsi que plusieurs autres détenus, puis tout ce petit monde serait parti dans le nord, sans préciser toutefois le lieu exact.

- Etait-ce un capitaine de notre corps armé?

- D'après les gardiens oui, car il portait l'uniforme réglementaire de l'armée d'Amestris. Cependant, nous n'avions envoyé aucun capitaine à cette date. Depuis, nous avons perdu la trace de l'alchimiste écarlate.

- Et que voulez-vous que je fasse, mon général?

- Votre mission, lieutenant Hawkeye, sera de retrouver Kimblee et de nous le ramener ici, vivant. Vous aurez bien entendu le droit d'avoir quelques hommes sous vos ordres, afin d'accomplir à bien votre devoir.

- ...

- J'espère avoir été clair, lieutenant?

- Ou... Oui, mon général.

Bradley se tourna vers elle et lui présenta une pochette qu'elle prit avec réticence.

- Vous trouverez dans ce dossier tous les documents nécessaires à votre mission, que ce soit concernant l'alchimiste écarlate, ou les premiers indices que nous avons pu relever et qui pourraient vous permettre de vous conduire jusqu'à lui.

- Puis-je vous poser une question?

- Allez-y.

- Pourquoi moi?

- ...

Le généralissime la jaugea de son regard perçant et lui somma finalement de commencer dès maintenant les recherches. Hawkeye se mit au garde-à-vous, puis se dirigea vers la porte, lorsque Bradley la retint un court instant avec ces paroles:

- Souvenez-vous lieutenant, je vous ai toujours à l'oeil.

La jeune femme déglutit et se dépêcha de sortir de cette pièce, qu'elle trouvait tout à coup très étouffante.

Qu'il fait froid dans cette région! Après avoir pistée pendant plus d'une semaine les "ravisseurs" de l'alchimiste écarlate, Riza se retrouvait dans le grand Nord à frotter ses mains engourdies par le froid, alors qu'elle observait un minuscule bâtiment, tout près des montagnes de Briggs. Il semblerait que c'est ici que l'on avait acheminer les prisonniers depuis Central. Toutefois, la taille de la bâtisse l'intriguait beaucoup; c'était bien trop étroit pour y caser tout ce petit monde. C'est pourquoi, Riza et quelques soldats empruntés à la garde rapprochée du fort de Briggs, s'étaient tenus là plusieurs jours afin d'étudier les allées et venues des personnes entrant et sortant du petit bunker. La journée d'hier, on avait prévenu Riza, qui était rentrée au fort, qu'il y avait pas mal de mouvement; elle était donc venue sur place et avait pu constater la chose. En effet, près de trois cent hommes se tenaient dans le blizzard devant le bunker et préparaient en hâte leur départ. Une fois qu'ils furent tous partis, Riza et son équipe avait attendu... longtemps. Mais ils ne revinrent pas.

Aujourd'hui, il était convenu que Riza allait devoir entrer dans le bunker afin d'en apprendre plus sur les agissements louches de ces types. Elle arma son fusil et se tourna vers son coéquipier le commandant Miles, un soldat de Briggs à la peau mâte, portant des lunettes teintées et aux cheveux mi-longs, d'un blond presque blanc, attachés en queue de cheval.

- Allons-y.

En compagnie de Miles, Riza ouvrit la marche et s'approcha du bunker d'un pas rapide, mais silencieux. Lorsqu'elle eut le dos collé au mur de béton, elle regarda minutieusement les environs et voyant qu'il n'y avait aucun danger en vue, elle fit signe à la troupe de les rejoindre. Le commandant ouvrit la porte en acier d'un coup de

pied et ils s'infiltrèrent à l'intérieur. Bien que la pièce dans laquelle ils se trouvaient soit peu spacieuse, ils gardèrent leurs armes au poing, méfiants. Au fond, ils découvrirent un ascenseur; Riza entra dedans avec Miles et quelques hommes, puis elle appuya sur le bouton utile à leur descente. En bas, il furent étonnés de découvrir une gigantesque base souterraine pouvant abriter toute l'armée de Briggs. Ils attendirent que le reste de l'équipe les rejoignent et se divisèrent en deux groupes afin de parfaire les recherches. Chaque commando s'équipa d'un appareil de communication pour s'avertir l'un et l'autre d'un potentiel danger ou d'une probable découverte intéressante.

Sa nausée commençait enfin à passer. Ce que Riza avait vu dans la vaste salle d'où ils venaient, l'avait fortement éprouvé. Elle n'avait plus vu ce genre de chose depuis Ishbal; des tas de cadavres... d'enfants, dans un état de décomposition avancé.

- Ca va aller, lieutenant? demanda un soldat portant l'uniforme de Briggs.

- Oui, ne vous en faîtes pas, répondit Riza avec applomb. Je me sens déjà beaucoup mieux.

- Tout de même, je me demande ce qui a bien pu se passer ici... C'est monstrueux.

Monstrueux, horrible. Des termes parfaits pour décrire ce qu'ils venaient de voir. Mais il ne fallait plus y penser, peut-être y avait-il encore des personnes en vie dans tout ce dédale de couloirs. Riza et son équipe arrivèrent dans une longue allée où s'enfilaient à la suite, des dizaines de portes identiques. Elle ordonna qu'on fouille toutes ces pièces et elle partit elle-même en quête d'une âme encore vivante. Elle en visita trois mais elles se révélèrent vides; tout ce qu'elle avait décelé c'était de vieilles taches de sang séchées. Plus loin, un sergent-chef l'interpella.

- Lieutenant Hawkeye! héla-t-il. J'ai trouvé un survivant!

Riza courut auprès du militaire et il pointa du doigt l'intérieur de la cellule. Elle regarda à son tour et vit une petit forme prostrée contre le mur de la pièce. C'était un enfant d'une dizaine d'années environ, il était vêtu d'une tenue d'hôpital blanche et ses longs cheveux noirs retombaient sur son visage, empêchant la jeune femme de distinguer son visage. Elle s'approcha de lui doucement, afin de ne pas le brusquer et s'accroupit pour être à sa hauteur. Elle tendit la main et lui écarta quelques mèches de cheveux. L'enfant sursauta et releva la tête, dévoilant ainsi son visage. Ce dernier était rond et fin avec un petit nez retroussé et deux grands yeux dorés cernés de rouge, démontrant combien il avait pleuré. Riza put lire dans ses yeux qu'il n'avait pas l'air plus terrorisé que cela; au contraire, il semblait étonné et la regardait intensément comme pour essayer de découvrir qui elle était, rien que par son apparence. C'était étrange, le regard de cet enfant lui rappelait vaguement quelque chose.

- Tu n'as plus à rien à craindre, commença Riza sur un ton qui se voulait amical, on va te sortir de là.

Le petit garçon ne répondit rien et continua de fixer la jeune femme.

- Dis-moi, comment t'appelles-tu?

L'enfant tourna la tête pour jeter un regard à son épaule. Riza suivit son geste et se pencha vers lui; il lui sembla qu'un symbole, sur la peau du garçon, dépassait de sa chemise. Elle tendit un peu le tissu et put examiner ce qui paraissait être une inscription: le chiffre quatre avait été tatoué sur son épaule gauche. De plus en plus bizarre...

Qu'est-ce que cela signifie?

Riza plongea à nouveau ses yeux dans ceux du garçonnet. Alors qu'elle allait lui poser l'une des milles questions qui lui traversaient la tête, il ouvrit enfin la bouche.

- Ils m'appellent le 4, murmura-t-il d'une voix enfantine quelque peu éraillée.

- Qui ça "ils"? demanda Riza toujours plus intriguée.

- Je ne sais pas qui ils sont vraiment, mais ce sont peut-être des médecins. Ils viennent souvent me faire des prises de sang ou m'examiner.

- Pourquoi t'appelaient-ils le 4?

- Je n'en sais rien. Un jour je leur ai demandé et ils m'ont répondu que c'était ainsi, parce que j'étais le 4. Mais pourquoi parlez-vous d'eux au passé? Où sont-ils d'ailleurs? Généralement, ils viennent me voir à des heures bien précises, et là, cela fait trois heures que je les attends.

- Comme je te l'ai dit, tu n'as plus à t'inquiéter. Ils sont partis, ils ne te feront plus de mal.

- Vous savez, certains me criaient un peu dessus mais ils ne me faisaient pas de mal.

- Mais alors, pourquoi as-tu autant pleurer?

- ... Je suis tout seul, et je n'aime pas cet endroit où tout est blanc et froid. Cette chambre me fait peur... J'ai l'impression de n'être qu'un animal... et de ne pas avoir le choix.

Le petit garçon se mit à trembler et ses yeux s'embuèrent de larmes, qui roulèrent sur ses joues rondes.

- Et... et je ne me souviens de rien avant mon réveil dans cette pièce, fit-il en retenant du mieux qu'il put les sanglots qui lui remontaient dans la gorge. Peut-être.. que j'ai perdu la mémoire, ou... peut-être que je n'ai jamais eu de vie avant ici. Comme si... comme si ils contrôlaient toute ma vie, tout ce que je suis... Comme si mon chemin était déjà tout tracé...

Puis, il éclata en sanglots. Riza prit l'enfant dans ses bras et l'appaisa en lui murmurant que tout allait s'arranger désormais. Néanmoins, elle pensait à ce qu'il venait de dire; c'était tout de même incongru d'avoir de telles raisonnements à cet âge. Il devait vraiment être en avance sur n'importe quel enfant pour penser de cette manière; il était même plus mature que beaucoup d'adultes. Curieux, pour un enfant; dans de telles circonstances, un enfant pleure parce qu'il est seul et parce qu'il a peur de ce qu'on pourrait lui faire. Le garçonnet avait peur parce qu'il était seul dans cette chambre opprimante, certes; mais un enfant, quel qu'il soit, ne va pas chercher plus loin, surtout lorsqu'il est concentré sur sa peur et sur ce qu'on pourrait lui infliger. Et pourtant, cette adrénaline qui bloque habituellement chaque enfant, a au contraire stimulé le cerveau du garçonnet, qui s'est mit à réfléchir et à chercher en profondeur pourquoi se trouvait-il là et surtout qui il était. Riza serra un peu plus fort l'enfant.

Cela doit être dur de ne pas savoir qui l'on est.

Dans une autre aile du bâtiment, Miles découvrait nombres d'informations sur ceux qui avaient opéré en ces lieux. Au vu de tout ce qu'ils avaient laissé, ils avaient du partir en hâte; ils avaient même oublié ce qui semblait être le fruit de nombreuses années de recherche. Pourquoi diable partir comme cela, en abandonnant ce qu'ils avaient mis tant de temps à bâtir? Le commandant Miles demanda à ses subalternes de prendre le nécessaire dans les documents qui trainaient un peu partout; peut-être que grâce à cela ils pourraient comprendre ce qui se tramait en ces lieux. Par ailleurs, il gardait sous son bras, un grimoire qui semblait être le plus précieux bien de cette organisation, vu qu'il l'avait trouvé dans un coffre-fort. Un livre qui semblait fort ancien et dont la langue dans lequel il était écrit ne lui disait rien, sûrement un dialecte qui datait de quelques siècles déjà.

Un de ses subordonnés le héla; il sembla à Miles qu'une pointe de terreur filtrait dans la voix du soldat. Il se précipita vers l'homme en question qui lui montra d'un doigt tremblant une machine sophistiquée, dans laquelle se trouvaient séparés deux liquides. Miles prit son courage à deux mains ets 'approcha de l'engin pour l'identifier. Un cadran ajusté à la cloison, affichait des chiffres dont certains défilaient toutes les secondes. Il resta paralysé sur place un instant, réalisant avec anxiété qu'il avait en face de lui une bombe extrêmement puissante. Le compteur affichait désormais qu'il ne lui restait plus que sept minutes pour foutre le camp, lui et son équipe. Il recula en vitesse et hurla à ses hommes de battre en retraite. Mais avant qu'ils ne commenca à bouger, un autre soldats arriva en courant et aperçut la bombe que Miles venait d'examiner à l'instant.

- Bordel! s'exclama-t-il. Il y en a une ici aussi?!

- Que.. Que voulez-vous dire? demanda Miles sur le grill.

- C'est la quatrième que je vois, commandant! Et à mon avis il y en a encore d'autres éparpilées un peu partout dans le complexe!

- Appelez les autres unités et dîtes-leurs de filer en vitesse! Il ne nous reste plus beaucoup de temps pour évacuer et nous mettre en lieu sûr.

- A vos ordres!

Miles se jeta sur l'un des appareils radio que transportait un soldat de Briggs et saisit le combiné.

Pourvu qu'on arrive à sortir de ce merdier à temps.

Le soldat dont le combiné était collé à l'oreille reçut la nouvelle comme un choc électrique. Sa main trembla, puis il se ressaisit et dit à tout le monde de faire passer le message. Le sergent-chef qui se trouvait avec Riza, stressa plus qu'il n'en fallait en entendant l'information qui lui était parvenue en quelques minutes. Il entra en hâte dans la pièce où se trouvait sa supérieur.

- Lieutenant Hawkeye! Il faut que nous partions au plus vite!

- Que se passe-t-il?! demanda Riza.

- Des explosifs ont été installé un peu partout dans le bâtiment; il ne nous reste plus que six minutes pour sortir nous abriter loin d'ici!

Riza garda du mieux qu'elle put son sang-froid et ordonna aux soldats de prendre le chemin de l'ascenseur qui les conduirait à la surface. Puis, elle agrippa l'enfant qui passa ses bras fins autour de son cou et elle suivit ses subordonnés. Ils coururent pendant plusieurs mètres à travers les couloirs, jusqu'à ce qu'une explosion retentisse. Riza se jeta à terre et protégea le petit garçon de son corps. Lorsque le souffle de la déflagration fut enfin terminé, la jeune femme se releva pour observer autour d'elle. Elle aida le garçonnet qui toussait, à se relever et constata les dégâts: tout un mur s'était écroulé entre elle et son équipe. Elle et le garçon se retrouvait dans une impasse; et le temps qui tournait... Bientôt ce serait le complexe entier qui volerait en éclats!

- Merde! jura Riza.

- On va s'en sortir, madame, dit le garçonnet sans une once de peur dans la voix.

- Hein?

- Il y a un escalier pas loin, je ne sais pas où il mène mais on pourrait essayer.

- Tu saurais le retrouver?

Pour toute réponse, il lui prit la main et l'entraîna dans le dédale de couloirs. Ils arrivèrent dans une allée plus large au bout de laquelle se trouvait une porte. Riza en tourna la poignée et vit avec soulagement qu'il y avait bel et bien un escalier, qui les conduirait peut-être à la surface. Ils empruntèrent ce dernier en montant les marches quatre à quatre et ils débouchèrent finalement dans une autre salle. Riza courut auprès de ce qui semblait être la cage d'ascenseur; elle tenta d'ouvrir la porte à double battants... en vain. Elle avait beau appuyer sur le bouton ou tirer sur les deux portes, elles refusaient de céder. On avait dû la saboter. Elle tomba à genoux, la défaite s'imposant à ses yeux, il n'y avait plus aucun moyen pour qu'ils puissent s'échapper. Elle tourna son regard vers l'enfant, réfléchissant à ce qu'elle pourrait lui dire pour lui expliquer le fait qu'ils allaient certainement mourir ici, lorsqu'elle le vit enlever les gants qu'il portait aux mains. Des gants?! Elle ne les avait pas remarqué auparavant.

- Pourquoi portes-tu des gants? demanda Riza ayant oublié leur situation désastreuse, parce qu'elle préférait ne pas y penser.

- Je n'en sais rien, répondit l'enfant. On m'a juste dit que je ne devais pas les enlever, mais j'aimerais bien savoir ce que l'on a voulu me cacher.

Intriguée, Riza s'approcha de lui et le regarda enlever son autre mitaine. Il présenta alors ses mains, paumes vers le haut. Un frisson parcourut l'échine de la jeune femme, ce qu'elle voyait lui rappelait vaguement quelque chose. Deux cercles parfaits étaient tatoués dans chacune des paumes du petite garçon.

- C'est... commença Riza.

- De l'alchimie, finit l'enfant.

- ...?! Tu sais une telle chose?!

- Euh... Ben oui. Je ne sais pas comment, mais je sais que je connais pas mal de choses sur l'alchimie. Mais je ne savais pas pour ces tatouages, peut-être que ce sont les gens en blouses blanches qui me les ont fait.

- Oui, peut-être... C'est tout de même étrange.

- Je me demande quel effet ils ont; je ne suis pas sûr de comprendre l'association des symboles. Je vais tenter le coup; qui sait, cela nous aidera peut-être à sortir?

- Je ne sais pas si c'est une bonne idée, on devrait les faire étudier, et éviter de les utiliser tant que l'on ne sait pas de quoi ils sont capables.

- Et pourquoi pas? De toute façon, on n'a pas le choix! C'est cela où on reste ici pour l'éternité, et moi je veux revoir la lumière du soleil!

Ne laissant pas le temps à Riza d'en placer une, il s'avança vers la cage d'ascenseur et réfléchit au mode opératoire.

- A mon avis, les deux cercles doivent s'assembler. Bon, j'y vais.

Il frappa donc ses mains l'une contre l'autre et les posa sur la porte. Il sentit que la réaction marchait à merveille, des éclairs apparurent et se propagèrent sur les moindres recoins de la porte, faisant enfler cette dernière. Affolée, Riza tira le petit garçon en arrière, juste avant que la porte n'explose en milles morceaux. Ils se relevèrent et aperçurent que la voie était désormais libre. Riza s'avança vers ce qui servait, il y a encore quelque minutes, de porte et se pencha en avant pour contempler le gouffre sombre qui s'offrait à elle. Elle jeta un oeil au-dessus: pas de trace de l'ascenseur. Sur le côté, elle remarqua une échelle qu'ils pourraient emprunter pour monter en haut. Elle fit passer l'enfant devant elle et grimpa les échelons à sa suite. Comme il tremblait à chaque fois qu'il mettait un pied sur un échelon, Riza lui interdit formellement de regarder en bas, ordre qu'il s'empressa de désobéir. Il retint une exclamation en voyant le puis sans fond et s'accrocha définitivement aux barreaux de l'échelle en fermant les yeux, de peur de tomber dans le vide. Riza monta de quelques centimètres pour le rejoindre et lui intima de continuer l'ascension; il refusa catégoriquement et se débattit furieusement lorsqu'elle essaya, avec beaucoup d'efforts, de le décrocher de l'échelle. Elle arriva à ses fins et lui dit de ne surtout pas la lâcher. Le garçonnet se serra contre elle avec force et n'ouvrit pas le yeux durant toute l'ascension. Arrivés en haut, ils se retrouvèrent près de la porte du rez-de-chaussé qui se trouvait être fermée. Riza dénicha un bouton d'ouverture d'urgence, malheureusement trop loin pour qu'elle l'atteigne avec sa main. Elle dégaina donc avec prudence son revolver et tira une balle, qui atteignit la cible visée. Les battants s'ouvrirent en grinçant. Riza poussa un soupir de soulagement, cependant, elle se hâta de reprendre son ascension car ils n'étaient pas encore sorti du bâtiment et le temps qu'il leur restait pour se mettre à l'abri devait être bien court. Elle fit grimper l'enfant en dehors de la cage d'ascenseur et le rejoignit. A bout de souffle, elle se releva et prit la petite main du garçon; la porte en face d'eux était grande ouverte sur cet environnement enneigé que sont les montagnes de Briggs. Lorsqu'ils auraient rejoint la forêt qui se trouvait à proximité, ils pourraient enfin souffler.

- Maintenant, je veux que tu cours plus vite que ton ombre, décréta Riza. Tu t'en sens capable?

- On fait la course? s'exclama l'enfant avec enthousiasme.

- Si tu veux. Fais attention, je suis très rapide.

- C'est parti!

Aussitôt, il partit à toute allure en direction des bois, Riza mit les dernières forces qui lui restait dans ses jambes afin de courir le plus vite possible. Le garçonnet menait avec quelques mètres d'avance sur elle. C'est qu'il courait vite! Il avait vraiment l'air de prendre cela pour un jeu, tellement qu'il courait plus vite qu'elle; peut-être était-ce là la clé, il lui fallait penser que ce n'était qu'un jeu. Bien déterminée à ne pas se laisser battre, Riza accéléra malgré la vive douleur qu'elle ressentait dans ses deux jambes. Elle rattrapa finalement l'enfant à l'orée du bois, mais celui-ci criait déjà victoire et ralentissait la cadence de ses pas. Il s'écroula sur le dos exténué et Riza stoppa elle aussi ses pas et se pencha en avant pour reprendre sa respiration.

- Vous... vous avez vu? fit-il en levant un bras en signe de victoire. J'ai... gagné.

- ... Je te félicite, dit Riza qui se retourna pour regarder le bunker qui se trouvait loin désormais. On doit être en sécurité ici.

Cela ne va pas tarder à exploser.

En effet, une gigantesque déflagration fit voler en éclats le bunker et trembler le sol. Le petit garçon plaqua ses mains sur ses oreilles, tandis que Riza le prenait dans ses bras pour le protéger. Le calme enfin revenu, ils consentirent à ouvrirent leurs yeux; un nuage de fumée s'élevait haut dans le ciel à présent. Ils n'entendaient plus de nouveau que le vent dans les ramures des épicéas. Ils se relevèrent et sortirent à découvert, Riza espérant que Miles et son équipe la repéreraient. Près d'elle, elle sentit l'enfant grelotter de froid. Bien qu'elle n'ait qu'un manteau pour la protéger de l'air glacial du Nord, elle l'ôta pour le mettre sur les épaules du petit garçon, qui la remercia. Ce dernier tira sur la manche de la veste de la jeune femme, afin de solliciter son attention.

- Je suis désolé d'avoir paniquer dans la cage d'ascenseur, s'excusa-t-il.

- Ce n'est rien, répondit-elle en lui adressant un sourire rassurant. Tu es encore un enfant, c'est normal que tu ne saches pas encore garder ton sang-froid.

- Mais, j'aurai pu nous faire tomber tous les deux...

- Dis-toi que même les adultes les plus accomplis peuvent éprouver la peur.

- Vous avez déjà eu peur?

- Oui... Plusieurs fois même.

Le regard de Riza s'étant assombri, l'enfant préféra ne pas poser davantage de questions (après tout ce n'était pas ses affaires). Pourtant, une chose importante lui vint à l'esprit.

- Puis-je vous demander comment vous appelez-vous?

- C'est vrai, je ne me suis même pas présenté! Je m'appelle Riza Hawkeye.

- C'est joli, Riza.

- Et toi alors, comment va-t-on te nommer? Le "4" n'est pas un prénom.

- Choisissez m'en un alors!

- C'est un privilège que tu me fais là. Bon, de toute manière, ce ne sera qu'en attente que l'on trouve ton véritable nom. Hum... Voyons... "Candide", cela t'irait?

- Pourquoi pas? A partir de maintenant, je m'appelle Candide.

L'enfant sourit; cela avait l'air de lui plaire que l'on choisisse son prénom à sa place. Riza s'étonnait elle-même du prénom qu'elle lui avait choisi. Un prénom tout ce qu'il y a de plus innocent et qui allait comme un gant à cet enfant; pourtant... Il y avait beaucoup de choses chez lui qui lui faisait penser à une toute autre personne qui était loin d'être ingénue.

Ses spéculations furent interrompues par le petit garçon qui lui montrait une troupe de soldats qui s'approchaient d'eux. Elle reconnut les militaires de Briggs et les héla. Dans un sursaut, Riza intima à l'enfant de remettre ses gants; il chercha à savoir pourquoi, à quoi elle répondit que sinon il allait attraper froid. Le garçonnet fit une moue dubitative, ne comprenant plus tout à coup la jeune femme. Cette dernière ne pouvait aucunement lui dire que les cercles tatoués dans ses paumes lui étaient revenus en mémoire sous la forme d'un homme qu'on lui avait chargé de retrouver. Cela lui paraissait irréel, elle ne voulait pas émettre d'hypothèses avant d'en savoir un peu plus sur cet enfant et ce qu'il avait bien pu se passer dans ce laboratoire souterrain. Bientôt, les réponses s'imposeraient d'elle-mêmes.


H: Bon c'est une version sans l'intro que j'avais posté au début. Je l'ai enlevée car je la trouvais trop tirée par les cheveux et j'ai désormais une idée plus simple pour l'histoire, qui sera révélé par la suite. Enjoy! =D