La nuit tous les chats sont gris…

Prologue :

Miss Pearl mordilla le bout de sa tasse de café vidé un peu plus tôt. Elle sentait l'odeur du liquide froid, désagréable certes, mais ça lui faisait bizarrement reprendre son travail plus rapidement. Elle griffonna un 'lamentable' en haut de la copie et se mit à corriger l'autre feuille qui attendait. Elle grimaça de dégout devant l'écriture peu soigné de l'élève et lut en diagonal en s'amusant à remplir la copie de rouge sang.

Elle avait toujours voulu être professeur, car cela donnait du pouvoir. Oui, enseigner était beaucoup plus important qu'un quelconque poste au gouvernement. C'était les enfants l'avenir d'un pays. C'était ces enfants qui allaient grandir et fixer les nouvelles règles. Les dirigeants accordaient parfois beaucoup trop d'importance à leur image ostensoir. Ils oubliaient vite dans leur petite bulle que l'estrade où ils se tenaient était rongée et pourrie par trop de mensonges. Un jour cette estrade se briserait et cela sera aux enfants de tout reconstruire, de réparer les dégâts de leurs prédécesseurs. C'est pour ça qu'il fallait être en bas de la hiérarchie pour mieux les influencer, pour les préparer à la future catastrophe qui allait se produire. Car elle savait que ça allait arriver dans quelques années. Elle n'était pas la seule à le savoir. Les médias étaient eux même très anxieux. Et le gouvernement était surement en plein affolement. Mais tout le monde attendait, préférant faire quelques mensonges en plus plutôt que de prendre des décisions.

Peut être qu'un confort éphémère et solitaire était plus humain qu'un confort mature et durable… pensa t-elle amèrement.

Bien sur, elle n'était pas parfaite. Elle aussi voulait absolument garder son bol de lait chaud devant la télé et son salaire. Mais le monde ne pouvait pas tourner assez vite pour que ce bonheur soit partagé par tous. La société actuelle demandait un sens trop désinvolte et insouciant.

Savoir que les choses existent mais ne pas les voir.

La vieille femme arriva à une copie un peu déchiré et froissée. Pourtant l'écriture était nette, rectiligne et homogène. Les lettres y étaient faites complètement identiques, comme si elle avait été écrite à la machine. Le professeur aimait cette écriture morbide. Cette écriture vide de sentiment car trop détaché, trop clairvoyante. Une écriture à l'image de son propriétaire. Elle sourie, pas d'un sourire victorieux ni même chaleureux. Non, un sourire désabusé. Car ça aussi elle le prévoyait. Il était l'image d'un nouveau monde.

Miss Pearl gratifia la copie d'un 'Parfais'. Le premier et le dernier, elle le savait.

Elle posa le parfait exemple en haut du tas. Le nom du propriétaire semblait toutes les narguer par son écriture si mécanique.

'Harry POTTER' : 'Parfait.'

Regarde comme les choses vont mal. Vois comme le bonheur et le confort sont éphémères. Alors tu te réfugieras dans un coin. A l'ombre. Caché par des ténèbres.

Parce qu'au fond, la lumière est trop aveuglante.

Parce qu'à la lumière, on ne voit finalement que son propre monde.

Parce que la lumière met à jour les faiblesses.

Et surtout car dans le noir, on ne voit pas tes larmes, tu le sais, n'est ce pas ?

Dans le mentaux de la nuit, tous les chats sont gris…