/!\ ATTENTION ! Présences de personnages et couples bis, homos, hétéros et transgenres tout au long de l'histoire. Ceux que ça dérange peuvent partir.
Titre : Queer as Folk
Pairing : Multiples mais principalement du AoKaga pour ce chapitre
PDV : Externe
Rating : T
Longueur du chapitre : 14 376 mots
Résumé : UA. La vie d'Aomine, Momoi, Kise, Kagami, Kuroko, Midorima et Alex dans le quartier gay. Inspiré par la série "Queer as Folk". Je m'excuse platement pour ce résumé complètement nul -_- (j'offre un OS sur un couple au choix à quiconque me trouvera un résumé décent !)
Disclaimer : Le manga Kuroko no Basket et ses personnages appartiennent à Tadatoshi Fujimaki, la série "Queer as Folk" dont je me suis inspiré et qui m'a servi de titre appartient à ses créateurs dont j'ignore le nom.
Note : Hey ! Bonjour à tous ! Je ne sais pas quoi dire donc passons directement aux choses sérieuses. L'idée de cette fiction, inspirée de la série éponyme, m'est venue en discutant avec Woshi (merci à toi) de la série et d'une vague histoire de statistiques. Bref. Pour ceux qui ne connaissent pas la série (je vous la recommande vivement, d'ailleurs. La version US), cette fiction UA se passe dans la communauté LGBT. Tous les personnages ou presque se connaissent et/ou se sont rencontrés parce qu'ils font partie de la communauté LGBT. J'ai essayé de faire ça le mieux possible, en restant le plus réaliste possible mais je n'ai pas tant d'expérience que ça dans le domaine donc si vous avez des améliorations à apporter, des suggestions, allez-y. Aussi, parce que cette fiction est déjà assez complexe à gérer, beaucoup de traits (comme les associations/manifestations ou les lois, etc...) ne tiennent pas vraiment compte du fait que les personnages sont Japonais. J'ai écrit en fonction des lois et/ou habitudes françaises voire américaines (puisque plusieurs trucs ont été piochés dans une série US). Je m'excuse si ça ne vous paraît pas très crédible de ce point de vue là.
Note 2 : A l'heure où je vous parle, les cinq premiers chapitres sont écrits. Il y en aura une dizaine et ils feront entre 15 et 25 000 mots chacun (oui je sais, c'est long pour un chapitre). J'essaierais de poster tous les dimanches (au moins jusqu'au chapitre 5. J'espacerais peut-être en fonction du rythme d'écriture et des reviews à partir de là). Chaque chapitre se concentre sur un personnage en particulier, parfois un couple, et constitue presque une histoire à lui seul (mais chaque chapitre se suit et je ne pense pas qu'il soit possible de les lire séparément). J'aborderais beaucoup de sujets assez variés dans cette fic.
Note 3 : Un grand merci à Monkey D. Elena qui a fait un super boulot en me corrigeant et en m'aidant à trouver tout ce qui n'allait pas ! Merci à toi ! Merci aussi à Obviously Enough (pour ceux et celles qui lisent le fandom Avengers, allez voir ses fictions, elles sont top !) qui m'a aidé avec quelques infos qui me manquaient ! Je vous laisse donc avec ce premier chapitre ^^
AOMINE :
Aomine poussa la porte du snack et se dirigea jusqu'à une banquette avant de s'y laisser tomber lourdement. Il appuya sa tête contre la table froide avant de gémir longuement. L'homme à ses côtés ricana et essuya un regard noir.
_ Ta gueule, Bakagami.
_ J'ai encore rien dit. continua de se moquer le rouge.
_ Mais tu vas le faire.
L'américain fit un signe pour indiquer qu'il n'ajouterait rien.
_ Salut, Aomine ! Dis donc, t'as une sale tête, tu devrais arrêter de sortir tous les soirs !
Kagami éclata de rire comme le bleu grognait en fusillant la jeune femme du regard.
_ La ferme, Alex ! File moi un café au lieu de dire des conneries.
_ Qu'est-ce que j'ai dit ?! ronchonna la blonde en s'éloignant avec son plateau.
Le métis soupira et se redressa. Il se tourna vers Kagami et l'embrassa.
_ Alors, t'as fait quoi ?
_ Comme d'habitude.
Comme d'habitude, ça voulait dire qu'il avait passé la nuit avec un inconnu, canon de préférence. C'était la routine pour lui. Il se vantait toujours d'avoir un physique à tomber ce qui, Kagami en convenait mais ne le lui dirait jamais, était vrai. Aomine avait d'autres défauts pour compenser : l'américain avait toujours pensé que s'il avait dû être un pêché capital, Aomine aurait été l'orgueil. Il était aussi paresseux et en dépit de son je m'enfoutisme notoire, il était prompt à s'emporter. Mais toujours pour des broutilles, jamais pour rien d'important. Quand à la luxure…
_ Et toi ?
_ J'suis resté à l'appart' pour travailler sur les pancartes.
_ Les pancartes ? demanda le bleu d'une voix ensommeillée en attrapant le café directement sur le plateau d'Alex qui passait.
_ Hey ! C'était pas le tien ! s'exclama la blonde en le fusillant du regard.
Aomine l'ignora royalement et lapa une gorgée brûlante en grimaçant. Il se tourna vers son petit-ami, attendant sa réponse.
_ Oui, Daiki, les pancartes. Pour la manifestation de ce week end, je t'en ai parlé hier.
L'autre poussa un long soupir exaspéré :
_ Et c'est pour quoi cette fois ?
_ Pour la protections des enfants et ados LGBT en milieu scolaire. La plupart des établissements prennent des mesures contre les discriminations sexistes et racistes, mais beaucoup ne font rien contre l'homophobie et la transphobie. Il faut sensibiliser les gens à ce problème. Il y a récemment eu des incidents alors on a décidé que c'était…
Aomine le dévisagea, abasourdi, avant d'éclater de rire, l'interrompant :
_ Tu te fous de moi ?! C'est de pire en pire, ton truc.
_ C'est pas drôle, Daiki. Tu sais le nombre de gamins qui sont harcelés à l'école en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre ?! Le nombre de suicide chez les ados LGBT est largement supérieur à celui chez les ados hétéros et cisgenres du même…
_ Ouais, ça va, j'ai compris. Quand t'auras fini de peindre des bouts de carton pour parader dans la rue en gueulant, tu me préviendras, on pourra faire des trucs intéressants.
Kagami se renfrogna.
_ C'est important. Et intéressant.
_ Plus que de baiser avec moi ? demanda le bleu en lui adressant une œillade aguicheuse.
_ Ca a plus de sens en tout cas ! s'emporta son petit-ami.
Ils se toisèrent un moment sans parler.
_ Tu savais très bien comment ça se passerait. Je te l'ai dit dès le début. Alors viens pas me le reprocher maintenant.
_ Je sais. On n'a aucun devoir l'un envers l'autre, on n'est pas un couple marié. En fait, Daiki, on n'est pas un couple du tout. Nous deux, c'est quasiment que du sexe. Et peut-être que ça te va, mais moi j'en ai marre. Vraiment ! On ne fait presque rien tous les deux !
_ T'exagères ! Rappelles toi le blond, avec les super abdos, y a même pas deux semaines.
_ C'est pas ce que je voulais dire, et tu le sais très bien.
_ Ecoute, Taiga, si ça te gonfle, t'as qu'à te barrer. Tu savais à quoi t'attendre, t'étais d'accord. Si tu l'es plus, c'est ton problème, pas le mien.
Aomine jeta un dernier regard à la tasse encore à moitié pleine de café à présent froid et secoua la tête en soupirant avant de se lever. Il s'éloigna et claqua la porte d'un mouvement rageur derrière lui. Alex sursauta et se tourna vers son ami. Elle dénoua le tablier lâchement attaché autour de sa taille et le posa sur la table comme elle s'asseyait en face du jeune homme.
_ Vous vous êtes encore disputés.
Ce n'était pas une question et Kagami le savait. La question, celle qu'elle posait vraiment sans la formuler à voix haute, c'était "Pourquoi ?".
_ On vit ensembles, on couche ensembles, on sort en boîtes ensembles mais on n'est pas ensembles. J'en peux plus Alex. Il saute tout ce qui bouge, du moins ce qui est assez sexy pour ses standards, il accepte à peine qu'on aille bouffer ensembles ailleurs qu'ici, il ne veut jamais venir avec moi quand je vais chez mon père, je crois que le seul film qu'on a regardé ensemble était un film porno - et encore, il a commencé à me peloter après dix minutes - le plus loin qu'on ait jamais été tous les deux, c'est le boîte de nuit de la ville d'à côté et je te parles même pas de l'attitude qu'il a dès que je parle de manifester. Ce mec est une plaie.
La jeune femme le laissa parler encore quelques minutes avant de l'interrompre.
_ Taiga, mon chéri, on est en pleine heure de pointe et j'ai une armée de clients affamés qui vont me sauter à la gorge si je ne leur sert pas leur petit déjeuner dans les cinq prochaines minutes. Alors viens en au fait.
_ Il m'a dit que si ça m'allait pas, j'avais qu'à me barrer.
_ Et sur ce point là, ça me tue de l'admettre, mais il a raison. Dans un couple, surtout un couple aussi bizarre que le votre, quand les deux parties veulent deux choses complètement opposées, ça ne sert à rien d'insister. Tu veux une relation sérieuse avec quelqu'un qui accepte voire partage ton engagement, il veut une relation ouverte plus basée sur le sexe que sur les sentiments. Alors pourquoi tu cherches pas ce que tu veux avec quelqu'un qui pourrait te le donner ? Des mecs canons, célibataires, fidèles et engagés, tu peux en trouver au moins trois assis dans cette pièce.
_ Sauf que même si c'est pas réciproque, moi je l'aime, ce con ! J'ai pas envie de trouver quelqu'un d'autre.
_ Je pense que tes sentiments sont réciproques, Kagami-kun. Aomine-kun a juste trop peur de l'admettre. lâcha une voix à sa droite.
Kagami et Alex sursautèrent et se tournèrent en direction de la voix.
_ Bordel, Kuroko ! Arrête de faire ça ! T'es là depuis quand ?
_ Un moment. admit le plus petit en s'asseyant avec son ami.
_ Bon, c'est pas tout ça, mais je dois retourner bosser avant qu'une émeute n'éclate. Essaie de faire entendre raison à cet idiot, Kuroko. soupira la blonde en se levant et en renouant son tablier.
Elle s'éloigna en direction des cuisines et réapparut quelques secondes plus tard, un plateau portant une demi dizaine d'assiette. A leur table, les deux hommes se faisaient face. Kagami soupira et fixa les restes de son déjeuner, maussade.
_ Je pensais vraiment ce que je t'ai dit. Je pense qu'Aomine-kun t'aime, tu sais. Il est juste trop fier et effrayé par cette idée pour l'admettre.
Le rouge redressa la tête, agacé, et s'exclama :
_ Comment ça, "effrayé" ?! Je ne vois pas ce qu'il y a d'effrayant !
_ C'est parce que tu ne connais Aomine-kun que depuis quelques années. Quand nous étions au lycée, il a eu pas mal de problèmes. Ses parents ont divorcé quand il n'avait que treize ans, ils se sont livrés une vraie guerre pour tout : la maison, l'argent, les meubles… Pour tout, sauf lui. Aucun des deux ne voulait avoir sa garde.
_ Je sais… Momoi m'a raconté. Mais je ne vois pas le rapport.
_ Dans ce cas, tu es un idiot Kagami-kun. Ses parents l'ont abandonné. Sa mère s'est remariée à peine quelques mois après le divorce avec un homme qui ne voulait pas d'enfants, son père est parti à l'autre bout du pays, il a passé une grande partie de son adolescence chez ses grands-parents. Ses parents n'ont jamais été présents, encore moins après leur divorce. Il ne veut pas s'engager parce qu'il a peur que votre relation se termine de la même manière. expliqua posément le bleu.
_ Tu parles, il s'en fout complètement.
_ Je ne penses pas. Il n'a jamais agi avec personne comme il agit avec toi. Tu es la première personne avec qui il a une relation plus ou moins stable, le premier à emménager chez lui, le premier à s'accrocher assez à lui pour rencontrer ses amis, pour faire simplement partie de sa vie. Je sais que tu n'y crois pas, mais au fond, il t'aime énormément.
_ Très très au fond, alors.
Kuroko sourit d'un air presque amusé.
_ Je ne sais pas si tu as raison d'attendre autant de lui, mais en tout cas, une chose est sûre, il ne veut pas te perdre. Il a peur de s'attacher à toi et que tu finisses par l'abandonner à ton tour. C'est pour ça qu'il ne veut pas d'une relation de couple comme tu l'entends.
_ Ah, tu veux parler d'une relation plagiée sur celle des hétéros ? Une relation de jeunes mariés qui n'apporte rien d'autre que des prises de tête inutiles et qui est vouée à l'échec ?
_ Tu vois, même lui reconnaît qu'il a peur de l'échec d'une telle relation. appuya le plus petit.
Kagami soupira : comme toujours, discuter avec Kuroko était dénué de sens. S'il avait vu le suspect sourire d'un air psychopathe, l'arme du crime dans ses mains tâchées de sang et debout à côté du cadavre, son ami aurait trouvé le moyen de plaider son innocence. Et de convaincre les flics alentours par-dessus le marché !
_ Comment ça se fait que ce soit Akashi l'avocat ? J'suis sûr que t'aurais été excellent.
Kuroko se fendit d'un second sourire avant de conclure :
_ Quand il te dit de partir, il pense exactement le contraire. Il a peur que tu t'en ailles. Vous êtes tous les deux mes amis et je ne te dis pas de rester avec lui si cela te fait souffrir, mais j'aimerais que tu comprennes la raison de son comportement.
L'américain haussa les épaules, las. Il leva la tête juste au bon moment pour voir Kise entrer, affublé d'un pantalon moulant et d'un top long bleu roi, une dose de khôl noir à en faire pâlir Amy Whinehouse sur les paupières et une paire de chaussures compensées le grandissant de plusieurs centimètres aux pieds. Cette vision eut le don de le faire sourire comme le blond s'avançait d'un pas léger dans leur direction.
_ Salut tout le monde ! Vous allez bien ?
_ Dis donc, tu sors de boîte où t'as déjà commencé les essayages pour la Gay Pride ?! se moqua gentiment Kagami.
Le blond lui tira la langue en poussant le plus petit pour s'installer à ses côtés.
_ Akashicchi n'est pas avec vous ? Il se fait de plus en plus rare, Kurokocchi. Cela voudrait-il dire que j'aie une chance avec toi ?
_ Il avait du travail, il a préféré aller directement au bureau. se contenta de répondre le concerné, ignorant avec un calme déroutant la dernière partie de la phrase et les yeux de chien battu du garçon.
Ce dernier ne s'en formalisa pas et sembla se satisfaire de la réponse avec un rire, faisant signe à Alex de lui amener sa commande habituelle. Il se lança aussitôt dans une histoire invraisemblable sur son voisin à grand renfort de gestes et de mimiques. Quand Midorima entra, il lui sauta presque dessus pour le saluer, au grand dam du concerné qui aurait préféré passer inaperçu.
_ Kise, j'aimerais que tu arrêtes de de faire ça. grommela-t-il sans conviction.
_ Quand je viens ici, c'est pour boire mon café avant d'aller travailler, pas pour être agressé par une furie en costume d'Halloween.
_ Tu habites à seulement deux pâtés de maison de l'hosto et c'est à l'autre bout de la ville. remarqua Kagami d'un ton innocent.
Midorima le fusilla du regard sans rien ajouter, remontant ses lunettes sur son nez. Il écouta en silence Kise reprendre ses commérages divers, espérant pouvoir finir tranquillement le café qu'Alex venait de lui servir avant d'être à nouveau assailli par une tornade colorée.
Momoi effectua un dérapage qui se voulait contrôlé mais qui la mena droit sur les genoux du vert, renversant au passage le breuvage noir sur sa chemise impeccable. Elle se releva aussitôt, lançant un regard moitié-inquiet moitié-désolé au jeune homme qui, après quelques secondes d'agacement finit par soupirer d'un air habitué. Ce genre de scènes étaient fréquentes et il avait fini par s'y faire, bon gré mal gré.
_ Salut, Momoicchi. Tu vas bien ?
La jeune femme se redressa, désorientée, et sembla se rappeler de la raison de sa présence :
_ Ah, oui. Super. Kagamin, je voulais te voir par rapport à la manifestation de ce week end ! On a une réunion demain soir, il faut effectuer un plan pour savoir qui se placera à l'avant, qui fermera la marche et qui fera la sécurité et vérifier le parcours pour être sûrs d'éviter les zones dangereuses. J'aurais besoin des dernières pancartes, tu crois qu'elles seront prêtes ? débita-t-elle à une vitesse effarante.
_ Je les ai finies hier soir. Tu peux passer les prendre dans l'après midi si tu veux. Normalement, Daiki sera là mais je peux te prêter ma clé au cas où…
_ Non, c'est bon. Je sais où il cache la clé de secours en cas de besoin. Vous venez demain ?
Kise hocha vigoureusement la tête, aussitôt imité par Kagami.
_ Alex sera là aussi, Tatsuya a dit qu'il essaierait de venir à la manifestation mais n'est pas sûr de pouvoir se libérer. ajouta ce dernier.
_ J'aurais voulu être présent à la manifestation mais j'ai rendez-vous avec Seijuro-kun et il n'a pas beaucoup de temps libre ces derniers temps. Je compte profiter du week end.
Tous échangèrent un regard entendu, l'excusant aussitôt. Aucun d'entre eux n'ignorait l'emploi du temps de ministre d'Akashi.
_ Et toi ? demanda la rose en se tournant vers Midorima qui tentait de dissimuler sans succès la tâche de café sur sa chemise.
_ Je ne vais jamais aux manifestations. En plus, je suis de garde tout le week end.
_ Bon, d'accord. J'imagine que je n'ai pas besoin de demander pour Dai-chan ?
_ Tu imagines bien. répondit durement le rouge.
_ Tu veux rester déjeuner avec nous ? proposa le blond avec son entrain coutumier.
_ Je ne peux pas, Shoichi m'attend à l'extérieur.
Elle consulta son téléphone avant de se redresser brusquement :
_ Et je suis en retard. Je suis très en retard. A plus, les garçons !
Elle s'éloigna aussitôt d'un pas vif pour rejoindre son petit-ami qui attendait effectivement dans la rue.
_ Elle me fait penser au lapin dans Alice au Pays des Merveilles. constata Kise d'un air sérieux.
_ Au Chapelier Fou, tu veux dire !
_ Ou au Chat. Celui avec un sourire bizarre.
Tous fixèrent la rue à travers la vitre, regardant leur amie grimper dans la voiture d'Imayoshi qui démarra presque instantanément.
~ Queer as Folk ~
Aomine, allongé sur son canapé, sirotait distraitement sa bière, les yeux rivés au plafond. Il essayait de garder son esprit vide, il savait que s'il commençait à réfléchir, il repenserait inévitablement à Kagami, à leur dispute et à ce que l'autre attendait de lui. Quand ils s'étaient rencontrés, ils s'étaient aussitôt détestés. Cela allait faire trois ans que Kuroko les avait présentés et il se souvenait encore avec précision du sentiment d'attraction qu'il avait ressenti. Son désir pour le rouge avait été presque instantané. La première chose qu'il avait pensé était qu'il lui fallait absolument mettre le nouveau venu dans son lit. Mais dès qu'il avait commencé à le draguer, il s'était rendu compte que les choses risquaient d'être un peu plus compliquées que prévu. Il avait essuyé un regard assassin de l'Américain qui lui avait gentiment dit d'aller se faire foutre, ce à quoi il avait répondu que ce serait avec grand plaisir avant de s'éloigner vers la piste de danse du nightclub, vexé. Il avait passé la nuit avec un type dont il ne se souvenait même plus la couleur de cheveux et depuis ce jour, les deux hommes s'étaient fusillés du regard à la moindre occasion sous l'air neutre de Kuroko et ahuri du reste du groupe. S'en était suivi une espèce de jeu que Midorima avait qualifié de malsain et Alex de ridicule, se résumant à une compétition entre eux pour savoir qui ramènerait le plus de mecs différents. Ils se narguaient régulièrement, exposant leurs amants du moment comme des trophées dès qu'ils se croisaient. Jusqu'à cette nuit, deux ans plus tôt, où ils s'étaient retrouvés dans une boîte de nuit. Midorima ne sortait quasiment jamais et de toute façon, Aomine n'avait jamais eu d'affinité particulière avec lui, Tetsu et Akashi avaient décidé de passer la soirée ensembles, Kise était porté disparu depuis la veille, Alex avait le service de nuit au snack, Satsuki était en week end avec Imayoshi. Ils avaient bu, beaucoup, avant d'entamer un nouveau round au milieu de la piste de danse, chacun dévisageant l'autre comme ils dansaient sensuellement avec des inconnus jusqu'à ce qu'Aomine ne pousse un juron et bouscule sans ménagement le compagnon d'un soir de Kagami pour venir l'embrasser. Leur relation s'était un peu apaisée, ils avaient cessé de se détester et de se faire la guerre, arrêté de se pourrir mutuellement l'existence et avaient commencé à coucher ensembles régulièrement. Puis petit à petit, l'américain avait commencé à passer quelques nuits complètes chez son amant, puis toutes ses nuits. Puis sans qu'ils ne s'en rendent vraiment compte, le rouge avait ramené ses affaires au fur et à mesure jusqu'au jour où le métis lui avait proposé d'emménager parce que "non franchement, tu vis déjà ici alors si je dois libérer un tiroir pour que t'arrêtes de répandre ton bordel dans la chambre…". C'était arrivé il y avait un peu plus d'un an.
Un jour, Kagami lui avait demandé s'ils étaient en couple. Il avait répondu "tant que ça m'empêche pas de baiser qui je veux, je me fous de comment tu veux nous appeler". Il avait vu la lueur de déception dans ses yeux, le regard blessé. Il avait entendu le soupir las. Depuis, Kagami n'avait plus posé la question, parce qu'il avait compris la réponse.
A vrai dire, depuis que le rouge avait emménagé chez lui, ils passaient leur temps à se disputer : l'eau de la douche, la vaisselle dans l'évier, le désordre dans l'appartement, le ménage, la couverture que l'un monopolisait, la tendance d'Aomine à rentrer au milieu de la nuit sans se préoccuper de savoir si l'autre dormait, l'engagement de Kagami auprès de tout ce qui s'approchait de près ou de loin d'une "cause LGBT" comme il aimait les appeler. Tetsu disait que c'était leur façon à eux de se reconnaître, de s'aimer. Aomine disait simplement que son "petit-ami" avait un caractère de merde, sans jamais vouloir admettre qu'il avait sa part de responsabilité.
Sur son canapé, le bleu se redressa en soupirant : il avait pourtant tout fait pour ne pas y penser. Il allait pousser un juron quand quelqu'un frappa à la porte. Si c'était encore cet imbécile qui avait oublié ses clés, il promettait de les lui faire avaler pour être certain qu'il les aie la prochaine fois. Il se leva et alla ouvrir. Quand il vit qui se tenait dans l'entrée avec son grand sourire ravi, il décida de tout de même jurer, pour la forme. Il laissa cependant entrer sa meilleure amie, s'éloignant pour retourner à son occupation première sans lui prêter attention.
_ Bonjour Daiki, je vais bien merci de demander, et toi, ta journée ?
_ Grn.
_ Oh moi ? Pas grand-chose. J'ai renversé du café sur Midorin, j'ai passé un entretien d'embauche mais le patron ne veut pas de moi (je crois que c'est parce que je suis une femme) puis je suis rentrée avec Shoichi… Tu m'écoutes ?
_ Grn…
_ Je me suis envoyée en l'air avec Kagamin et c'était génial, je comprends pourquoi tu l'aimes autant.
_ T'as fini de dire des conneries ? râla le bleu sans la regarder.
_ Donc, tu m'écoutais en fin de compte.
_ Qu'est-ce que tu veux ?
_ Les pancartes pour ce week end. Kagamin m'a dit de venir les chercher cet après midi. Tu sais où elles sont ?
Aomine poussa un long soupir avant de se relever d'un air épuisé et de se traîner jusqu'au coin de salon où le rouge avait empilé ses morceaux de cartons.
_ Ca doit être ça. grogna-t-il en les jetant distraitement dans la direction de la jeune femme.
_ Hey ! Fais gaffe un peu ! Il y a passé du temps… Bon, je prendrais bien un café, pas toi ?
Il la dévisagea quelques secondes avant de rejoindre la machine à café et de la mettre en route : il la connaissait depuis suffisamment longtemps pour savoir que si la rose avait décidé de s'incruster, il n'avait aucun moyen de la faire changer d'avis. Il s'assit d'un côté du plan de travail qui servait à la fois de table et de séparation entre la cuisine et le salon, laissant son amie s'installer de l'autre côté.
_ Je comprendrais jamais pourquoi vous faites tout ce cirque. Vous pensez vraiment que vous allez changer quelque choses en brandissant des pancartes dans la rue et en gueulant que vous êtes contre l'homophobie ?
La jeune femme prit une grande inspiration avant de répondre, comme pour mettre ses idées en place :
_ Je pense qu'il faut montrer aux gens ce qu'on pense, oui. Pour faire avancer les choses, il faut d'abord faire avancer l'opinion publique et ça ne marche pas si l'on est invisibles.
Le jeune homme ricana en avalant une gorgée de café :
_ Si tu crois que les hétéros vont vous aider sous prétexte que vous défilez dans la rue… Ils s'en foutent : ils ont déjà les droits que Taiga et toi réclamez, ils vont pas se faire chier pour que d'autres puissent les avoir.
_ Tu te trompes… Regarde Himuro-kun !
_ C'est le frère de Taiga et le meilleur ami d'Alex, il compte pas. protesta-t-il.
_ Les hétéros comprendront jamais et ils lèveront pas le petit doigt pour vous aider.
_ Arrête de dire "vous", toi aussi t'es concerné.
_ Moi j'veux pas me marier et j'veux pas de gosses, je vois pas en quoi je suis concerné.
_ Tu pourrais perdre ton boulot, ton appart, te faire agresser dans la rue sans que la justice ait à faire son boulot, on pourrait refuser de te soigner, de te servir dans un bar… T'es aussi concerné que le reste d'entre nous, espèce de crétin des alpes ! S'insurgea Momoi, faisant un geste ample de la main qui manqua de renverser sa tasse.
Aomine bougonna, à court d'arguments, avant de lâcher :
_ Peut-être. Mais si vous comptez sur l'aide des hétéros, vous êtes encore plus cons que moi.
_ Heureusement que des personnes blanches se sont aussi mobilisées pour les droits des personnes de couleur, sinon t'irais encore dans des toilettes spéciales, abruti ! Tous les hétéros ne sont pas homophobes, et heureusement pour nous parce qu'une minorité n'aura jamais le pouvoir de passer en force sans l'aide d'une majorité au pouvoir. C'est triste à dire et c'est dégueulasse, mais c'est comme ça.
Le bleu se renfrogna à nouveau. Aucun doute : Momoi avait passé trop de temps avec Kuroko et avait récupéré sa manie d'avoir toujours réponse à tout. C'en était à se demander pourquoi ces deux là étaient ses meilleurs amis.
_ Bon, si on parlait d'autre chose. Pourquoi tu t'es disputé avec Kagamin ?
Le garçon leva les yeux au ciel, déjà agacé par la conversation qui allait suivre : à croire qu'elle avait décidé de lui pourrir la journée jusqu'au bout.
_ Puisqu'il t'a dit qu'on s'était disputés, t'as qu'à lui demander pourquoi.
_ Il ne m'a rien dit. Mais il avait l'air ailleurs ce matin et quand je suis arrivée, tu glandais sur ton canapé. Pas besoin d'aller bien loin pour comprendre. Qu'est-ce que tu as encore fait ?
_ EH ! Pourquoi ce serait forcément ma faute ?!
_ Parce que c'est toujours de ta faute, Dai-chan.
_ Bah pas cette fois. C'est lui, avec ses idées débiles de couple et de sorties à deux et de manifestations.
_ Je vois… Et toi, tu veux vraiment pas faire d'effort. devina la jeune femme.
_ Je vais pas changer sous prétexte que notre relation ne lui convient pas. S'il est pas content, il a qu'à aller voir ailleurs.
_ Je sais ce que tu penses des relations de couple, que c'est voué à l'échec et que ça n'apporte que des problèmes. Mais un jour ou l'autre, tu vas bien devoir admettre que t'es amoureux de lui, Dai-chan, parce qu'à part Kagamin et toi, tout le monde est déjà au courant. Je te demande pas de faire comme Kuroko et Akashi, de vous marier et d'adopter des gosses. Je dis juste que tu pourrais faire un effort. Je sais pas moi, l'emmener au ciné ou au resto une fois de temps en temps. Ca ne va pas te tuer, que je sache.
_ …
_ Tu pourrais au moins lui dire que tu l'aimes. Parce que si tu fais rien, il va finir par partir. Pour de bon, cette fois.
_ Il fait ce qu'il veut, je m'en fous. lâcha Aomine d'une voix mal assurée.
_ J'espère que tu ne comptais pas me convaincre avec ça parce que ta tête me dit que t'y crois pas toi-même.
_ Tu m'emmerdes, Satsuki. Prends tes putains de pancartes, va gueuler dans rue à la gloire de l'amour et des petits oiseaux et fous moi la paix.
La rose, vexée, se leva et attrapa la pile de pancartes, se dirigeant vers la sortie.
_ Une dernière chose, Dai-chan. Vous n'êtes pas tes parents, tous les couples ne finissent pas comme eux.
_ Au revoir !
~ Queer as Folk ~
Les néons fluorescents diffusaient leurs lumières colorées dans la boîte de nuit. Accoudé au bar, Midorima se plaignait déjà d'avoir cédé à Kise qui n'était même pas là. Le blond avait insisté jusqu'à ce qu'il accepte de sortir et osait ne même pas venir ! Kuroko attendait sagement que le reste de leurs amis arrivent, un cocktail à la main. Au milieu de la piste de danse, Aomine semblait déchaîné. Il était régulier que le jeune homme danse au milieu de la foule pendant des heures, son corps collé contre un autre. Mais la rage avec laquelle il se déhanchait, presque en colère, n'était pas habituelle. D'un pas agacé, il sortit de la piste de danse pour rejoindre les deux autres.
_ Ils ont toujours pas fini ? s'énerva-t-il en faisant signe au serveur qu'il prendrait la même chose que d'habitude.
_ Non. répondit placidement son meilleur ami.
_ Pourquoi tu viens, Tetsu ? demanda le plus grand pour penser à autre chose qu'à son crétin de petit-ami qui lui préférait ses manifestations débiles.
_ Que veux-tu dire ?
_ Tu ne danses pas, tu ne dragues pas, puis de toute façon tu tromperas jamais Akashi et je ne t'ai même jamais vu bourré. Alors qu'est-ce que tu viens foutre en boîte si tu t'amuses pas ?
_ J'aime la musique. se contenta de rétorquer le plus petit en dissimulant un demi-sourire.
Aomine le dévisagea un instant avant d'éclater de rire.
_ On me l'avait jamais faite celle là !
_ Tu sais, je n'ai pas besoin de boire ou de danser pour m'amuser. J'aime l'ambiance des boîtes de nuit, c'est tout.
L'autre haussa les épaules d'un air amusé. Il but une gorgée de sa boisson en jetant l'air de rien un regard aux alentours avant de soupirer.
_ Tu attends Kagami-kun ?
Aomine haussa les épaules, reprenant un air bougon : plutôt avaler une boîte de clous que d'avouer que l'accusation été fondée. Il n'avait pas besoin du rouge pour s'amuser et s'il était là, ce n'était certainement pas pour la musique. Il avala le reste de son verre cul sec, ignora le léger vertige qui lui fit tourner la tête quand il fit volte face un peu trop rapidement et se dirigea d'un pas décidé vers la masse compacte de danseurs au milieu de la piste. Il était beau, il était sexy, il était populaire et si ce crétin de Bakagami ne voulait pas passer la soirée avec lui, il trouverait bien quelqu'un qui voudrait.
A peine dix minutes plus tard, alors que le bleu se déhanchait tout contre le corps d'un type musclé, ses mains plaquées sur les fesses du gars en question, Kagami arriva. Il repéra aussitôt Midorima qui ronchonnait au bar et supposa, avec raison, que Kuroko était avec lui. Il alla les rejoindre et les salua, répondant à la question du lunetteux tout en cherchant son petit-ami du regard.
_ Kise a dit qu'il passait se changer chez lui avant de venir. Tu sais comment il est, il tient à soigner son entrée.
Il se tordit un peu plus le cou pour regarder la piste de danse quand quelqu'un tapota sur son épaule. Le rouge eut un léger sursaut et dévisagea Kuroko qui lui indiqua d'un geste le corps déchaîné d'Aomine se trémoussant.
_ Il t'a attendu tu sais. Je pense qu'il est juste vexé.
_ Ah ouais ? Bah moi j'suis vexé à chaque fois qu'il veut pas passer sa soirée avec moi.
_ Ce n'est pas une compétition pour savoir lequel de vous deux est le plus en tort. Vous êtes tous les deux stupides. Au lieu de râler dès qu'un d'entre vous fait un truc de travers, faites tous les deux des efforts. grogna Midorima, de mauvaise humeur.
_ T'es le seul célibataire ici, Midorima, t'as aucun conseil à me donner sur mon couple. s'offusqua Kagami, vexé à son tour.
Le vert ne releva pas et se contenta de fusiller son ami du regard avant de payer sa consommation et de lâcher :
_ Si Kise me demande, dites lui que j'en avais marre d'attendre.
Il s'éloigna à grandes enjambées comme l'américain souffla profondément, tentant d'évacuer son agacement. Il passa commande d'un ton las au barman qui lui décocha un sourire ravageur qui sembla amuser Kuroko.
_ Rigole pas, il m'intéresse pas. se contenta de lancer Kagami à son ami.
_ Je croyais que tu faisais comme Aomine-kun dans l'espoir de le rendre jaloux.
_ Ouais bah j'ai arrêté. Déjà parce que cet abruti s'en fout et ensuite parce que j'ai pas envie de me taper des quasi inconnus quand je suis attiré uniquement par mon mec qui lui, semble attiré par la terre entière à mon exception près.
Kuroko ne put s'empêcher de rire à nouveau. Il était sans doute le dernier de leurs amis à trouver leurs chamailleries constantes amusantes, tous les autres avaient fini par se lasser.
_ Tu devrais…
_ J'irais pas le chercher ! le coupa Kagami.
Le plus petit haussa les épaules. Il scruta la foule et tenta d'y repérer son meilleur ami. Ce dernier avait enfin tourné la tête vers le bar pour apercevoir le rouge. Alors il était venu finalement ? Il attendit quelques instants qu'il vienne de lui-même le rejoindre sur la piste avant de comprendre que Taiga ne viendrait pas s'il n'allait pas le chercher. Il hésita un instant à ravaler sa fierté pour aller le voir quand une voix dans sa tête (la voix de Satsuki, il aurait pu en jurer) lui souffla qu'il était en train de tout foutre en l'air. Il secoua la tête pour ignorer la voix et se dirigea d'un pas décidé vers le bar. Il passa ses bras autour de la taille du rouge qui sursauta : Kagami s'attendait à tout sauf à ça. Si on lui avait demandé, il aurait parié qu'en ne le voyant pas le rejoindre, Aomine aurait juste tenté de l'allumer un peu plus, aurait léché les amygdales d'un pauvre gusse qui passait par là ce qui aurait fini par le convaincre de partir, furieux. Au lieu de ça, il sentait les mains baladeuses de son amant jouer distraitement avec sa ceinture comme il l'embrassait en guise de salut.
_ Daiki ?
_ Ca a été plus long que d'habitude.
_ Ouais, y a eu pas mal de grabuge. Certains n'avaient pas fait leur part du boulot et…
_ Tu viens ? l'interrompit Aomine.
En tant normal, l'américain lui aurait probablement envoyé une réplique cinglante sur sa capacité d'écoute et sa manie de toujours lui couper la parole. Mais aujourd'hui n'était visiblement pas un jour comme les autres.
~ Queer as Folk ~
Aomine était en retard. Très en retard même. Il prit néanmoins la peine de décrocher le téléphone fixe qui sonnait, priant pour que ce ne soit pas (encore) Satsuki qui tentait de le convaincre de demander Bakagami en mariage.
_ Allo.
_ Allo, chéri ?
Aomine éloigna le combiné pour jurer à voix basse. Finalement, Satsuki aurait été une option préférable, au moins il pouvait l'envoyer balader sans se sentir trop coupable.
_ Maman. Tu voulais quelque chose ?
_ Hum…Tu vas bien ?
_ Aussi bien que la dernière fois que tu m'as appelé il y a trois mois, pourquoi ?
_ Oh… Trois mois, déjà…
_ Oui, Maman. Trois mois. Je suis en retard, si tu me disais ce que tu veux ?
_ Je prends de tes nouvelles ! feignit-elle de s'offusquer à l'autre bout du fil.
_ Maman…
Il poussa un soupir las.
_ La dernière fois que tu m'as appelé, c'était pour que je garde la morveuse pendant votre voyage à toi et à l'espèce de chimpanzé en costume sur mesure. Et depuis que je t'ai dit non, tu ne m'as même pas envoyé un mail. On sait tous les deux que t'as quelque chose à me demander. Qu'est-ce que tu veux ?
_ Hum… Tes grands parents nous ont invités à passer le week end avec eux dans leur villa sur la plage…
_ A condition que tu fasses l'effort insurmontable d'inviter ton dépravé de fils ? J'ai déjà prévu quelque chose pour ce week end et je déteste la plage. Trouvez vous d'autres plans !
Il hésita à raccrocher aussitôt et avec le recul, il aurait sans doute dû le faire.
_ Tu ne fais aucun effort, Daiki ! Tu pourrais au moins faire ça pour ta grand-mère, tu sais à quel point ça a été dur pour elle de te voir t'éloigner de nous.
_ C'est vous qui vous êtes barrés ! pesta le bleu en fronçant les sourcils, sentant un début de migraine s'insinuer dans son crâne.
_ Fais le au moins pour ta sœur, c'est difficile pour elle de ne pas voir son frère.
_ Demi-sœur. crut-il bon de préciser avant de reprendre, agacé :
_ Et vu tout ce que son père doit lui dire sur moi, je doute de lui manquer tant que ça.
Il entendit un long soupir à l'autre bout du fil et imagina sans peine sa génitrice se pincer l'arrête du nez et faire claquer le bout de sa chaussure de luxe sur le carrelage. C'était un tic chez elle quand les choses ne se passaient pas comme elle le voulait. Elle s'emportait rapidement, convaincue d'avoir raison. Il refusait de l'admettre mais il tenait sans doute ça d'elle.
_ Daiki, arrête de te comporter comme un enfant. J'essaie de renouer les liens et toi, tu me repousses. Je ne comprends pas, je suis ta mère…
Le jeune homme se retint de lui répondre. Se battre contre sa mère était épuisant. Plus que de se battre avec son père, plus que de se disputer avec Satsuki, plus que de débattre avec Tetsu quand il savait qu'il avait tort et parfois même plus que s'engueuler avec Taiga. Il avait beau avoir saisi son manège depuis des années, il finissait toujours par craquer face à son chantage affectif et même quand il parvenait à rester sur ses positions, il en ressortait lessivé et sa confiance en lui en prenait un coup. Gardant le silence, il se demanda si changer de numéro serait suffisant pour rompre définitivement les liens avec elle. Il y avait pensé à plusieurs reprises, il l'avait même fait une fois. Mais il avait fini par en informer ses parents dans l'espoir ridicule qu'ils finiraient par l'appeler sans arrière pensée comme Monsieur Kagami appelait régulièrement Taiga ou comme les parents de Satsuki l'appelaient deux ou trois fois par semaine.
_ Chéri, pourquoi tu refuses de venir avec nous ? Cela ferait tellement plaisir à tes grands parents, même à moi d'ailleurs. En plus, je sais que tu adores la plage. Tu as toujours adoré la plage, regarder les jolies filles en maillot et…
_ Les garçons, maman. Je regarde les garçons, pas les filles. l'interrompit-il
_ Daiki, on en a déjà parlé ! lâcha Madame Aomine d'un ton sévère.
_ Exactement, c'est pour ça que je ne comprends pas comment tu peux encore te tromper. Bon, je suis en retard. Je ne viendrais pas, alors si c'était tout ce que tu avais à me dire…
_ Bien ! Mais c'est toi qui appelles tes grands parents. Ils seront tellement déçus que tu ne veuilles pas essayer de…
Le jeune homme propulsa le combiné sur son socle de façon si brutale qu'il en tomba. Il le ramassa en soupirant et attrapa sa veste avant de claquer la porte de l'appartement.
~ Queer as Folk ~
_ Ca va ? demanda Momoi dès qu'elle vit son meilleur ami à la pause déjeuner.
_ Ouais, super.
_ T'es sûr ? Parce que t'as la même tête que quand t'as parlé à tes parents. lâcha la jeune femme avec un demi sourire.
_ …
_ Merde… Sérieusement, Daiki ? Lequel ? s'écria-t-elle, regrettant sa dernière intervention.
_ Ma mère.
Il planta rageusement sa fourchette dans sa viande, éclaboussant la table de sauce.
_ Elle voulait que je passe le week end avec eux. En fait mes grands parents refusaient de leur laisser leur maison de vacances si j'étais pas là.
_ T'as répondu quoi ? demanda la rose d'un ton prudent.
_ Non.
_ Bien. Problème réglé. affirma la jeune fille d'un ton résolu.
_ …
_ Tu sais ce que j'en penses. Que ce n'est pas parce qu'ils font semblant de ne pas se rappeler que tu dois oublier aussi. Et surtout que tu ne leur dois rien. Et aussi que tu devrais changer de numéro, mais bon, c'est toi qui voit.
Il haussa les épaules juste au moment où son téléphone sonnait. Il regarda distraitement le nom de l'appelant avant d'écarquiller les yeux, incrédule. Il montra l'écran à son amie qui lui fit de larges signes pour lui indiquer de ne pas décrocher alors qu'il collait déjà le combiné à son oreille :
_ Papa ?
_ Salut, fiston ! Alors, comment tu vas ?
_ Euh…
_ J'suis sûr que tu vas bien. Tu vas toujours bien. J'ai appris pour ta mère et les vacances à la mer.
Aomine se demanda comment diable son père pouvait bien être au courant de ça alors qu'il n'avait plus aucun lien avec son ex-femme.
_ Je sais que t'as dit non, t'as bien fait ! Elle comprendra jamais rien, ta conne de mère. Maintenant qu'elle a du fric, elle se croit tout permis.
Le jeune homme grimaça et tenta de s'éloigner de sa meilleure amie qui collait une oreille curieuse contre son oreille dans l'espoir d'entendre la conversation.
_ Ouais, mais t'avais pas besoin de m'appeler pour ça.
_ J'imagine la tête qu'elle doit faire ! Ca te dit de fêter ça avec ton vieux père ? Toi, moi, une bière et un match de foot ?
_ J'aime pas le foot. se contenta de répondre Aomine, pris au dépourvu.
C'était presque un rituel quand il parlait avec son paternel : il partageait son temps entre faire des blagues graveleuses (que son fils aurait adoré en temps normal si la plupart n'avait pas été des insultes à demi voilées) et médire sur son ex-épouse. Il en venait parfois à croire que contrarier sa mère était devenu un objectif à part entière dans la vie de son père.
_ Oh, allez. Tous les mecs aiment le foot ! T'es bien un mec, rassures moi !
_ Papa, je…
Il ne put résister à la pression de Satsuki qui lui arracha le portable des mains avant de vociférer :
_ Vous savez quoi ? Mon mec aussi déteste le foot. En fait, je crois être la seule du groupe à aimer ça. Et si vous ne prêtez pas assez attention à votre fils pour savoir qu'il préfère le basket depuis qu'il a huit ans, ça ne sert à rien de continuer prétendre vous intéresser à lui. Vous pouvez garder vos invitation aux soirée machos, misogynes et homophobes pour vous.
Elle raccrocha et essuya le regard meurtrier de son meilleur ami.
_ Quoi ? Il avait vraiment besoin que quelqu'un le lui dise ! Et puisque tu vas pas le faire…
_ Satsuki, c'est pas tes affaires.
_ Ah ouais ? Pourtant c'est moi qui recolle les morceaux après chaque soirée bière/foot/pizza quand tu viens me voir complètement bourré parce que ce salaud t'as insulté pendant tout le match !
_ Hey, c'est de mon père dont tu…
_ Oui, et il ferait bien de s'en souvenir de temps en temps, qu'il est ton père. Et pas uniquement quand il a besoin de fric ou de quelqu'un pour l'écouter se plaindre.
Presque aussitôt, le téléphone sonna et Aomine décrocha, presque malgré lui :
_ Oui ?
_ C'était qui cette pouffe ? Ta blonde ? Parce qu'elle a besoin de…
_ C'était Satsuki.
_ Qui ?
Aomine soupira et s'épargna la corvée de lui rappeler qu'il connaissait la rose depuis ses quatre ans.
_ Une amie.
_ Hum. Je parie qu'elle est du genre à sortir les seins à l'air, barbouillée d'inscriptions ridicules, pas vrai ? Pas étonnant que t'en ai pas trouvée une correcte si tu traines qu'avec ce genre de nanas…
_ Ecoutes, je peux pas ce soir. Une autre fois.
Il posa le combiné sur la table avant de repousser son assiette, l'appétit coupé.
_ T'aurais dû lui dire que je garde mes seins au chaud. grogna la jeune femme, furieuse.
Aomine poussa un profond soupir. Cette journée semblait partie pour être atroce du début à la fin. La poisse l'avait poursuivi depuis son flacon de shampooing vide et la cafetière en panne jusqu'à sa dispute avec sa meilleure amie qui continuait de maugréer à ses côtés.
_ Je ne comprends pas pourquoi tu t'acharnes à garder le contact.
_ C'est mes parents.
_ C'est tes parents quand ça les arrange et être parents, c'est un boulot à plein temps.
_ Venant de la fille qui a failli se faire larguer parce qu'elle refuse d'avoir des gosses, je trouve ça dingue comme réflexion ! C'est pour ça que t'as dit à Imayoshi que tu voulais pas d'enfants, parce que "parents, c'est un boulot à plein temps" ?
Momoi s'empourpra violemment, ce qui chez elle annonçait plus fréquemment une envie incontrôlable de frapper quelqu'un qu'un quelconque embarras. Aomine retint un énième soupir. Il était conscient de mériter la réaction qui allait fuser, peu importe ce qu'elle serait, et envisageait déjà de s'excuser. Il ouvrait la bouche pour le faire à contre cœur quand la jeune femme reprit la parole d'un ton dur :
_ Le fait que tes parents soient incompétents et te déçoivent constamment ne te donne pas le droit d'insulter les autres, espèce de sale…
Elle se mordit la langue, visiblement blessée et hors d'elle.
_ Tu sais quoi ? Tu m'appelleras ce soir, après que ton père ait passé la soirée à t'expliquer qu'il n'y a pas de tapettes dans le foot et qu'il serait temps que tu te trouves une gonzesse. Comme ça, "la fille qui a failli se faire larguer parce qu'elle voulait pas de gosses" pourra éponger tes larmes…et ton vomi.
Elle se leva, balançant quelques billets sur la table avant d'ajouter :
_ Connard.
Elle quitta le restaurant à grands pas sous le regard intrigué d'Alex. Aomine s'enfonça dans le siège, un mélange désagréable de tristesse et de culpabilité rongeant son estomac comme il payait à son tour l'addition et se levait. Y avait vraiment des jours où il devrait écouter les élucubrations de Midorima sur la convergence des astres.
~ Queer as Folk ~
Le nez levé au plafond, Aomine attendait sans y prêter attention l'heure où il pourrait enfin quitter le bureau étroit dans lequel il travaillait. Il savait qu'il devait appeler Satsuki pour s'excuser. Il ignorait simplement par quoi commencer. Il détestait cette impression d'avoir tellement de choses à se faire pardonner qu'il était plus facile de s'excuser pour avoir simplement ouvert les yeux ce matin. Alors à la place, il pensait appeler Kuroko, lui raconter sa journée de merde, et attendre un conseil qu'il connaissait déjà. "Sors tes parents de ta vie, excuse toi auprès de Momoi-san et parle à Kagami-kun". Finalement, il n'avait envie d'entendre aucun des trois conseils que le bleu ne manquerait pas de lui donner après l'avoir écouté se plaindre d'une oreille attentive. Il aurait pu parler avec Taiga mais il était presque certain que ce dernier allait lui reprocher son comportement et il n'avait pas besoin d'aide pour ça. Alors il soupira longuement, jouant avec son siège de bureau pour faire passer le temps. Peut-être que ce dont il avait besoin, ce n'était pas de parler. Juste de quelqu'un qui se fichait de sa vie, de son histoire et ne poserait aucune question.
~ Queer as Folk ~
_ Daiki ? T'es là ?
Kagami referma la porte et posa ses clés sur le meuble de l'entrée avant de s'avancer. Il nota distraitement des voix provenant de la chambre et s'y dirigea. Quand il ouvrit la porte et vit son petit-ami au lit avec un inconnu, il aurait été incapable de dire quelle émotion de la colère ou de la douleur était arrivée en premier. En revanche, il savait très bien la quelle avait pris le dessus.
_ Hn… Taiga ?
_ C'est ton…aaah…copain ?
_ …
Le rouge claqua la porte de la pièce. Quelques secondes plus tard, Aomine entendit la porte d'entrée se refermer brutalement à son tour. Il avait repoussé son coup du jour au moment où l'autre était rentré dans la chambre et commençait déjà à se rhabiller. Taiga n'aurait pas dû rentrer avant au moins trois quart d'heure, il n'était pas supposé débarquer en plein milieu de sa partie de jambes en l'air. Il savait que l'américain acceptait de plus en plus difficilement l'idée d'une relation libre et cela faisait des mois qu'ils évitaient ce genre de situations. Il gémit doucement : il s'était vraiment foutu dans la merde. Encore.
_ Tu devrais pas aller le voir ? demanda le grand brun, assis sur le bord du lit.
_ Pour lui dire quoi ? Nan. Il va se calmer et revenir tout seul. lâcha Aomine, tentant de se convaincre plus qu'il n'essayait de convaincre son vis-à-vis.
_ T'es sûr ? Parce que quand il a découvert que je le trompais, mon mec s'est barré aussi. Sauf qu'il est pas revenu.
_ Je l'ai pas trompé, ok ?! s'emporta-t-il.
Le type haussa les épaules et termina de boutonner son jean avant de se lever.
_ Si tu le dis. Enfin, tu devrais quand même faire gaffe.
_ Bordel, vous avez tous décidé de me faire chier, aujourd'hui ! Vous vous êtes passé le mot ou… ?
Le brun secoua la tête et laissa Aomine seul avec ses insultes et sa mauvaise humeur pour rejoindre le salon et s'en aller. Il récupéra la veste qu'il avait lancée quelque part en arrivant et avisa un morceau de papier.
_ Eh, mec… Tu devrais quand même venir voir ça. J'ai pas l'impression que ton copain ait décidé de se calmer.
Aomine se redressa en grognant et se leva du lit pour se traîner jusqu'à la salle à manger à présent déserte. Il vit le papier posé sur le plan de travail, recouvert d'une écriture noire visiblement pressée :
"Je dors chez Tatsuya. Je reviendrais chercher mes affaires demain."
_ Putain de journée de merde…
~ Queer as Folk ~
Il avait hésité de longues secondes avant d'appuyer sur la touche de son téléphone. Puis, avec un soupir, avait reconnu qu'il n'avait pas vraiment d'autre choix. Il laissa le téléphone atteindre la messagerie avant de recommencer. Il savait que ce ne serait pas aussi facile. Il était préparé. Alors il recomposa le numéro et attendit. Lors du quatrième appel, il hésita à laisser un message puis y renonça : il allait encore dire quelque chose qu'il ne pensait pas et aggraver la situation. Il se contenta donc de rappeler une nouvelle fois, priant pour que quelqu'un décroche. Et effectivement, au bout de deux tonalités, il entendit une voix sèche et visiblement toujours énervée aboyer :
_ QUOI ?
_ Je suis désolé. commença-t-il, et les excuses étaient en soi assez inhabituellement sobres pour que la voix, toujours agacée lui réponde :
_ Précise un peu.
_ Je suis désolé d'avoir dit ce que je t'ai dit. Je sais très bien pourquoi tu ne veux pas avoir d'enfants et je n'aurais jamais dû t'insulter comme je l'ai fait. J'étais juste…vraiment…déstabilisé. Je te promettrais bien que ça ne se reproduira pas mais il semblerait que ma capacité à éviter les emmerdes relationnelles soit quelques peu limitée ces derniers temps. lâcha-t-il d'un ton plat qui contrastait avec la théâtralité de la dernière phrase.
_ Waouh… Ca doit vraiment être sérieux pour que tu te fendes d'un tel monologue.
Si Satsuki semblait toujours lui en vouloir, au moins n'avait-elle toujours pas raccroché. Il prit cela comme un encouragement à s'expliquer :
_ Disons que j'ai bien merdé. Dans le genre encore pire que ce midi.
Il eut droit à un léger sifflement ironique de la part de sa meilleure amie.
_ Kagamin ?
_ Ouais.
Elle poussa un long soupir avant de lâcher d'un ton résigné :
_ Ok… J'suis là dans 20 minutes.
Elle allait raccrocher quand il ajouta :
_ Je le pensais vraiment, pour les excuses.
_ Je sais, abruti.
Aomine esquissa un petit sourire. Il n'était sans doute pas vraiment pardonné mais il savait que sa meilleure amie comprenait. Comme elle l'avait promis, elle était là 20 minutes plus tard, entrant sans frapper et se plantant face à Aomine, les mains sur les hanches. Elle lui lança un regard oscillant entre l'exaspération et l'agacement, exigeant silencieusement que le jeune homme lui raconte tout sans omettre le moindre détail gênant. Avec un soupir résigné, il s'exécuta, attendant la réaction de la rose.
_ Tu as fait quoi ? s'insurgea-t-elle comme Aomine versait négligemment une nouvelle dose de café dans sa tasse, éclaboussant la table.
_ Tu sais très bien comment se passe notre relation.
_ Oui mais le fait que Kagamin sache que tu couches avec d'autres hommes et le fait qu'il te voie en action sont deux choses trèèès différentes.
_ Je sais. souffla son ami en détournant les yeux.
_ Je ne vais pas te dire que je te l'avais dit - même si en fait, je te l'avais effectivement dit - mais j'aimerais bien savoir comment tu comptes arranger les choses ?
_ C'est pour ça que t'es là. admit le jeune homme, l'aveu lui coûtant.
_ Je croyais que tu avais juré de ne plus jamais suivre mes conseils après l'épisode de l'anniversaire oublié.
_ Comme quoi, tout est possible.
_ Sauf que là, la seule idée que j'ai, c'est que tu lui parles franchement de tes sentiments, Dai-chan. Et ça, tu le feras jamais, pas vrai ?
_ …
_ Ecoutes, je sais que je me répète mais vous n'êtes pas tes parents. Votre couple, ou peu importe comment tu veux appeler votre relation, n'est pas destinée à se terminer dans un bain de sang, vous n'êtes pas obligés de vous séparer en vous détestant et de vous faire la guerre à la moindre occasion et vous n'avez pas non plus besoin de détruire votre cercle proche en leur demandant de choisir. Mais je peux t'assurer que c'est ce qui va finir par arriver si tu continues de t'obstiner. Je comprends que t'aies peur de l'engagement. Mais ça fait longtemps que vous êtes ensembles et je pense que Kagamin a bien du courage d'avoir enduré ton caractère et cette relation libre juste pour te faire plaisir.
_ C'est pas "juste pour me faire plaisir"… Il aurait pas dit oui si ça lui convenait pas. tenta d'argumenter le garçon, oubliant volontairement le reste de la phrase.
_ Vraiment ? Tu en es sûr et certain ?
_ Lui aussi il a eu d'autres relations !
Elle lui adressa un regard lourd de reproches, le mettant au défi d'affirmer que Kagami avait jamais été pleinement satisfait de cet arrangement. Le bleu baissa les yeux une nouvelle fois sans savoir quoi répondre.
_...
_ Bon. Dai-chan, c'est à toi de voir. Mais t'as fait tout ce que t'as pu pour pas t'attacher, pour pas avoir mal et maintenant que tu sais que ça n'a servi à rien, tu devrais probablement faire un effort.
Le métis ne répondit rien. Il baissa la tête, résigné, et soupira. Il lança un regard dur à la jeune femme. Elle savait. Elle savait mieux que personne ce qu'il avait enduré à cause de ces couples d'abrutis finis qui passaient un jour devant l'autel pour se jurer amour et fidélité éternels et finissaient par s'entre-déchirer sans aucune considération pour ceux qu'ils laissaient derrière. Elle n'avait pas le droit de lui imposer ça, de lui demander de faire cette erreur. Pas après les heures qu'elle avait passées à l'écouter parler au téléphone, pas après les disputes violentes auxquelles elle avait assisté, pas après les nuits qu'il avait passées chez elle pour fuir ses parents, pas après les jours passés au tribunal, entre les avocats et ses parents qui se battaient pour savoir lequel des deux n'aurait pas le fardeau d'un ado de treize ans à élever, pas après les après midi qu'elle avait passés chez ses grands parents à assister à la fin de toutes ses croyances naïves sur la famille. Il serra le poing et comme si elle avait su à quoi il pensait, elle posa une main qui se voulait rassurante sur son épaule.
_ Il faut que tu comprennes que tous les couples ne finissent pas comme eux. Tu ne veux pas souffrir mais c'est déjà le cas. Tu ne veux pas le blesser mais c'est trop tard. Tu penses vraiment que vous allez répéter leurs erreurs ? Je pense que tu en as assez vu chez toi pour savoir comment éviter d'en arriver là. Et puis Kagamin ne t'a jamais demandé de l'épouser devant 400 personnes, de partir en lune de miel en Toscane ou de fonder une famille dans les prochains mois. Tu devrais vraiment lui parler de tes doutes, Daiki. Lui expliquer pourquoi c'est si compliqué. Et non seulement il comprendra mais en plus il attendra que tu sois prêt pour certaines choses. Tu devrais avoir confiance en lui.
Aomine la fusilla du regard. Elle ne savait rien, elle ne comprenait rien, elle parlait sans savoir. Presque aussitôt, il ferma les paupières. C'était injuste de penser ça. Elle avait été aux premières loges, elle était sans doute la seule à vraiment savoir. Mais cela ne lui donnait pas le droit de lui dire tout ce qu'il n'avait pas envie d'entendre, tout ce qui était difficile. Ni de le forcer à regarder en face tout ce qu'il s'efforçait d'ignorer depuis des années. Pour la première fois depuis plusieurs années, il se mit à détester ses parents. A vraiment les détester, à les tenir responsables de ce qu'il était devenu. Momoi raffermit sa prise sur son épaule et murmura doucement :
_ T'en fais pas. Ca va aller.
Elle sembla hésiter à le prendre dans ses bras avant de renoncer à cette idée saugrenue et de lui sourire. Elle lui donna une dernière tape d'encouragement avant de descendre ce qui lui restait de café d'une seule traite et de lui annoncer qu'elle le laissait réfléchir à ce qu'il allait faire. Quand il réalisa que la jeune femme était dans l'entrée, il s'efforça de lancer un "merci" un peu faiblard mais dont elle sembla se contenter.
~ Queer as Folks ~
Aomine faisait les cent pas dans le salon quand il entendit le bruit de la porte. Il sursauta légèrement. Il pensait qu'il aurait plus de temps pour se préparer à affronter Taiga. Ce dernier apparut, un sac sur l'épaule et l'air froid, fermé. Décidé à partir.
_ On peut parler ? tenta le bleu d'une voix mal assurée.
L'autre laissa son bagage vide tomber sur le sol et écarta les mains :
_ Vas-y, parle !
_ J'suis désolé pour hier…J'ai eu une sale journée.
_ Ah ouais ? C'est pour ça que t'as couché avec un inconnu ? Bah alors t'as trop de "sales journées" pour moi.
_ Mes parents m'ont appelé. Les deux.
L'expression furieuse de Kagami se fissura un instant avant qu'il ne puisse la recomposer, pièce par pièce.
_ Et ?
Son ton était plus doux, presque compatissant. Ils n'avaient jamais vraiment abordé le sujet mais le rouge savait qu'il entretenait des relations compliquées avec ses géniteurs. Il avait été témoin de quelques échanges entre lui et eux et en avait suffisamment appris de Kuroko et Momoi pour comprendre à quel point parler avec ses parents perturbait son amant.
_ Et… Ils sont tellement…eux. Quand je leur parle, je finis toujours par me rappeler pourquoi je crois plus aux happy end. Surtout les happy end de…
Il sembla hésiter mais le message était passé.
_ Et donc, ça te précipite dans les bras de mecs que tu connais pas parce que ? Parce que t'aimes détruire ta propre vie ?
_ Parce que je préfère la foutre en l'air avant qu'elle se foute en l'air toute seule. reconnut Aomine d'une voix dure.
_ Je comprends pas.
_ Je sais, comment tu pourrais ?
La colère de l'américain sembla revenir aussitôt.
_ Pardon ?
_ Tes parents s'aimaient et t'aimaient toi. Tu parles souvent à ton père, il t'accepte et se rappelle du nom de tes amis. Les miens arrivent même pas à intégrer que je me tape des mecs ! s'emporta le bleu.
_ Et ? Ca veut dire que je peux pas comprendre ce que tu ressens ? Peut-être que je ne peux pas exactement savoir ce que c'est, en fait c'est même certain, mais je risque pas de comprendre quoi que ce soit si tu ne dis jamais rien ! Tu te rends compte que c'est la première fois qu'on en parle ! Il faut que je te menace de me barrer pour que tu me racontes tout ça ? Parce que désolé, mais je donne pas dans le chantage affectif.
_ Putain, Taiga ! J'essaie vraiment, là. Fais un effort !
_ UN EFFORT ? Avec toi j'en fais tous les jours des efforts, sale con. J'en fais depuis qu'on est ensembles ! Tu crois que c'est ce dont j'avais rêvé ? De m'enticher d'un abruti qui a la trouille de juste dire un putain de truc sympa une fois de temps en temps, qui refuse qu'on sorte et qui veut pas qu'on aille au ciné ? Je sais pas si t'as honte d'être homo ou de sortir avec moi ou si c'est juste que tu te détestes trop pour ça, mais j'en ai marre. J'ai vraiment essayé, pendant des mois et des mois j'ai essayé. De te laisser du temps, de comprendre, d'accepter cette relation tordue ! Et tu m'excuseras mais le trip relation ouverte, c'est pas ce que je veux. Ca l'a jamais été. Je veux un mec, pas un plan cul ! hurla Kagami, laissant la colère l'emporter sur le reste.
_ Tu veux une petite relation d'hétéros bien sous tous rapports !
_ Non, je veux une relation classique avec un mec ! J'suis pas hétéro et je cherche pas à le devenir et parfois, j'ai pas l'impression que ce soit ton cas.
Il se pencha pour ramasser son sac et partit en direction de la chambre. Aomine le suivit d'un pas lourd et le regarda vider le placard.
_ On va vraiment en arriver là ?
_ A toi de me le dire. répliqua le rouge en lui faisant face.
_ Je veux pas qu'on se sépare. admit le métis d'une voix brisée, comme si cet aveu était douloureux. Il l'était d'une certaine façon.
_ Ah, donc on est ensembles ! Bon à savoir.
_ Taiga…
Ce dernier soupira, las et fatigué. Le bleu se laissa tomber sur le matelas, épuisé. Sa tête était un véritable champ de bataille, il était incapable d'aligner une seule pensée cohérente. Il avait presque l'impression d'être hors de son corps, prêt à s'effondrer de fatigue. Il n'avait pas fermé l'œil depuis la veille et se sentait tellement impuissant qu'il commençait à vraiment considérer d'appliquer les conseils de Satsuki.
_ T'es le seul mec… T'es le seul mec à qui j'ai présenté mes amis, à qui j'ai parlé de mes parents et qui ait emménagé chez moi. Je suis pas prêt pour…ce que tu veux de moi.
Elle lui avait bien dit d'être honnête, non ? Ce n'était probablement pas le genre d'honnêteté que la rose avait en tête quelques heures plus tôt mais…
_ Je sais. C'est pour ça qu'on devrait peut-être se séparer. lâcha Kagami et cette phrase sembla tomber comme un couperet sur leur tête à tous les deux.
_ Je vais rester chez Tatsuya ce week end, aller à cette putain de manif et essayer de... J'ai besoin de réfléchir.
Il ferma son sac et quitta la pièce. Aomine considéra un moment l'idée de lui emboîter le pas avant de renoncer. Il avait sans doute besoin de réfléchir lui aussi. En fait, c'était même certain. Il avait attendu jusqu'au point de non retour pour se poser la question que Kuroko ne cessait de mettre sur le tapis à chaque fois qu'ils en parlaient et que Momoi s'acharnait à lui poser depuis des mois. Que voulait-il ? Il se laissa tomber sur le matelas. Il avait mal à la tête. A tel point qu'il en avait la nausée. Il ferma les yeux et se força à se concentrer. Il allait devoir choisir. Et contrairement à ce qu'il pensait encore deux jours plus tôt, il ne disposait pas de tant de temps que ça pour prendre sa décision.
~ Queer as Folk ~
_ Et donc ? Que veux-tu ? Tu veux être avec Kagami ou continuer de vivre sans te fixer ?
Aomine passa une main lasse sur son visage. Il regarda Kuroko, l'air épuisé. Il savait au moment même où il avait donné rendez-vous au bleu que ce dernier ne le laisserait pas tranquille. Kagami l'avait appelé dans la soirée, la voix tremblante, pour tout lui raconter.
_ Il est mal, tu sais. Il hésite.
_ Il avait pas l'air d'hésiter au moment de me larguer.
_ Est-tu sûr que c'est ce qu'il a fait ? Il m'a dit qu'il avait seulement besoin de prendre du recul pour savoir vraiment ce qu'il pouvait continuer d'accepter ou pas.
Aomine contempla le fond de son verre d'eau sans rien dire. Il fit tourner le récipient entre ses doigts, concentré.
_ Aomine-kun, il faut vraiment que vous…
_ Taiga. Je veux Taiga. Mais je ne peux pas lui donner ce qu'il cherche. Alors je fais quoi, Tetsu ?
Avec son air fatigué et perdu et sa voix suppliante, le plus grand ressemblait à un enfant.
_ Tu le lui dis.
_ On croirait entendre Satsuki. maugréa le bleu.
Le plus petit esquissa un sourire.
_ Alors je vais ajouter quelque chose que Momoi-san a déjà dû te dire. Je pense que c'est à toi de décider ce que tu peux ou ne peux pas faire. Je dois y aller, j'ai rendez-vous avec Seijuro-kun.
Il lui accorda un petit geste de soutien et un regard encourageant avant de le laisser, au moins aussi perdu qu'avant cette discussion. Aomine poussa un énième long soupir. Chacune des discussions qu'il avait eu depuis que sa mère l'avait appelé deux jours auparavant lui avait donné la migraine. Quand il vit quelqu'un s'asseoir en face de lui et poser un tablier sur la table, il eut le sentiment que cette désagréable série n'était pas près de s'arrêter.
_ Si t'es venue me dire que je suis un connard insensible, crois moi, c'est pas le moment.
Il releva la tête pour dévisager Alex. Cette dernière avait une expression neutre quoiqu'un peu dure, les bras croisés, et ne le quittait pas des yeux. Elle remonta ses lunettes d'un geste machinal qui lui fit vaguement penser à Midorima avant de demander :
_ Tu l'aimes ?
_ Quoi ?
Il n'était pas vraiment sûr de comprendre la question. Ou plutôt pourquoi on la lui posait.
_ Taiga. Est-ce que tu l'aimes ?
_ C'est quoi cette question à la con ?
_ Ecoute, c'est pas bien compliqué. Réponds simplement par oui ou par non. Je suis même d'humeur à me contenter d'un mouvement de tête.
_...
Aomine fixa ses doigts, sentant malgré lui sa tête bouger imperceptiblement.
_ Bien. Dans ce cas, je vais t'épargner le savon que j'avais prévu de te passer. Quand il m'a dit qu'il emménageait avec toi mais que vous continuiez votre espèce de relation bizarre, j'étais vraiment pas convaincue. Puis je t'ai bien observé, Ahomine. Taiga peut encaisser beaucoup de choses, sans doute plus que tu ne le crois. Mais ton silence et ton acharnement à le repousser, je pense pas qu'il puisse. Alors si tu l'aimes vraiment, prends une décision, mon vieux : soit tu te comportes comme l'adulte de 26 ans que tu es censé être, soit tu le laisses partir et chercher ailleurs ce que t'es pas foutu de lui donner. Et je t'assure que si tu choisis autre chose, c'est à moi que t'auras affaire.
Le jeune homme hocha lentement la tête. Il ne s'était jamais vraiment entendu avec la blonde. Taiga lui disait parfois qu'ils se ressemblaient. Ils avaient soi-disant le même humour et le même goût de la drague. Il n'y avait jamais cru. Les rares fois où il avait discuté avec elle, entre deux commandes d'œufs au bacon ou de salade composée, la conversation concernait son amant et dégénérait en dispute. Il y avait aussi les piques acides lancées des deux côtés, parfois avec un sourire amusé, parfois avec un regard noir. Tout dépendait de l'humeur. Ce n'était même pas la première fois qu'elle le menaçait, subtilement ou non. Pourtant, c'était la première fois qu'il se disait que si les choses tournaient mal entre Taiga et lui, il devrait peut-être aller manger ailleurs.
La serveuse le regarda encore quelques secondes, comme pour s'assurer qu'il avait bien compris, avant de se lever en attrapant son tablier.
_ Hey, Alex ?!
Elle se retourna, surprise.
_ Tu vas à la manif aujourd'hui ?
Elle sembla hésiter avant de répondre puis finit par lâcher :
_ Oui. Pourquoi ? Tu veux que je passe un message ? J'suis pas ton pigeon voyageur, Aomine.
_ Tu peux juste lui dire que j'essaierais de passer ?
Elle haussa les sourcils, stupéfaite, avant de les re-froncer aussi sec.
_ Ok… Mais t'as intérêt de venir. Sinon…
Elle fit semblant de réfléchir quelques secondes avant de lâcher avec un petit sourire qui rendait la menace encore plus effrayante :
_ Sinon, tu devras réfléchir à deux fois avant de manger ton prochain hamburger.
Il lui rendit son sourire, paya, et se leva pour partir.
~ Queer as Folk ~
_ T'es sûr que ça va ? demanda Momoi à Kagami pour la douzième fois alors qu'elle garait sa voiture.
_ Bordel, tu vas pas me poser cette question tout l'après-midi ?! J'te dis que ça va. Et puis même si ça allait pas, je ferais quand même cette manif.
La jeune femme baissa les yeux et emboîta le pas de l'américain comme ils rentraient dans les locaux de l'association.
_ Je crois que je comprend ce que tu veux dire.
_ Pourquoi ? Tout ne va pas bien au paradis ?
La jeune femme haussa les épaules.
_ Sérieusement, Momoi, ça ne va pas avec Imayoshi ?
_ C'est juste…un peu tendu. Mais pour sa défense, il m'arrive d'être vraiment difficile à vivre.
Elle lui lança un grand sourire qui sonnait un peu faux et auquel le rouge répondit de la même façon.
_ Ca doit être la saison. Ou l'horoscope. Il me semble avoir entendu Midorima baragouiner quelque chose à propos de l'alignement de Venus et Pluton… Quelque chose comme ça. maugréa-t-il.
Ils ricanèrent de concert. Ils récupérèrent les pancartes et le plan du parcours avant de retourner à la voiture pour se rendre au point de rendez vous en silence. Momoi se demanda si la tension entre eux étaient due à son amitié avec Aomine ou simplement à la mauvaise humeur évidente de son passager. Elle décida de ne pas se poser la question et de mettre la radio, interceptant le regard reconnaissant dans le rétroviseur.
Le reste du trajet se fit en silence, Kagami gardant son air crispé et agacé. Ils retrouvèrent Kise, Himuro et les autres et commencèrent à se mettre en place. Quand Alex arriva, elle salua tout le monde et se pencha vers Kagami pour lui chuchoter à l'oreille. Momoi observa la scène, intriguée, et sourit en voyant l'expression étonnée sur le visage de son ami, vite remplacée par un demi-sourire plein d'espoir.
~ Queer as Folk ~
Il était 16h45. Il avait attendu. Tout le long du parcours, il l'avait attendu. Quand Alex lui avait dit que Daiki comptait passer, il avait été surpris. Puis il avait naïvement pensé que c'était un pas en avant, un signe que cet abruti comptait faire des efforts. Il avait cru, au moins, qu'il allait vraiment venir. Il avait cherché les cheveux bleus tout l'après midi. Il avait même attendu que tout le monde soit parti. Il serra compulsivement les mains sur le volant et grinça des dents. Il attendait un signe, il l'avait eu. Il gara son véhicule devant les locaux de l'association. Il s'était proposé pour ramener le matériel, les pancartes et les banderoles, et avait refusé l'aide qu'Himuro et Alex lui avaient proposée. Au moins là bas, il serait seul et on arrêterait de lui demander comment il allait tous les quarts d'heure. Il descendit, claqua la porte avec colère et se dirigea vers le coffre quand un mouvement lui fit faire volte face. Il était là, debout devant la porte d'entrée.
_ J'suis con…J'ai oublié de demander un plan à Alex et Satsuki répondait pas sur son portable… Comme je savais pas où vous étiez, j'me suis dit que j'aurais peut-être une chance de te trouver ici.
Kagami hésita entre sourire ou frapper son vis-à-vis. Il opta pour le premier choix : il était là, après tout. Il avait vraiment décidé de venir.
_ Je croyais que t'avais changé d'avis.
_ J'y ai pensé… Je savais pas vraiment ce que j'allais te dire.
Ils se regardèrent, comme pour mettre en ordre leurs pensées.
_ Pourquoi t'es là, Daiki ? Qu'est-ce qui a changé depuis hier ?
_ Je peux pas te donner ce que tu cherches. Le romantisme, les petites attentions, les mots doux… C'est pas moi.
_ T'avais pas besoin de…
_ Mais je peux… essayer. En fait, j'ai demandé des conseils à Tetsu et Satsuki et ils ont l'air d'accord sur un point. Même Alex m'a conseillé de te parler, t'y crois ? Alors écoute bien parce que j'ai vraiment pas envie d'avoir à répéter ce que je m'apprête à dire.
Il prit une grande inspiration et, après s'être assuré qu'il avait toute l'attention, il reprit :
_ Quand j'avais treize ans, mes parents ont divorcé. C'était pas une surprise, je crois que les voisins et moi, on avait compris depuis un moment. En fait, j'ai su avant qu'ils me le disent parce qu'ils avaient arrêté de se crier dessus. Puis y a eu le divorce à proprement parler. C'était pas beau à voir. Genre vraiment moche. Je te passe les détails mais… Ils ont dit et fait beaucoup de choses. Je t'en ai jamais parlé parce que je savais que Tetsu et Satsuki l'avaient fait. Et puis j'aime pas en parler. Mes parents se détestent. Je crois que l'un des buts dans leur vie, c'est de pourrir celle de l'autre. C'était vrai avant, ça l'est toujours. Mon père a oublié mes deux derniers anniversaires. Ma mère m'appelle quand elle a besoin d'une baby-sitter pour sa fille…
_ Tu as une sœur ?! l'interrompit Kagami, interloqué.
_ Demi-sœur. Je l'ai vue trois fois. Elle est hautaine et… Disons que son père ne me tient pas en très haute estime. Pire que le mien si c'est possible.
_ Je… Je savais pas.
_ Satsuki est la seule au courant. Peut-être qu'elle l'a dit à Tetsu mais il m'en a jamais parlé. Ce que je veux dire, c'est que ça fait longtemps que j'ai arrêté de croire que les couples étaient faits pour durer. Ces relations, se promettre de s'aimer pour toujours… c'est tellement hypocrite.
_ Daiki, je t'ai jamais demandé ça.
_ Je sais. Mais ça viendra.
_ On verra à ce moment là, tu crois pas ?
_ Peut-être. concéda Aomine, les yeux dans le vague.
_ Tu peux pas faire ça. Décider que les relations "classiques" sont toutes vouées à l'échec parce que tes parents ont fait des erreurs. Je peux pas te promettre qu'on se séparera pas en se détestant et si je le faisais, tu me croirais pas. Mais on peut pas continuer comme ça. Je sais ce que je veux, à toi de voir si tu veux la même chose.
Aomine haussa les épaules avant d'admettre, la voix un peu tremblante parce qu'il était persuadé d'avoir l'air ridiculement romantique :
_ Je veux être… Je veux pas qu'on se sépare. Mais je peux pas te donner tout ce que tu recherches. Et je peux pas te garantir que j'en serais capable un jour, ni que j'en serais toujours incapable d'ailleurs.
_ Il faut juste qu'on fasse quelques concessions.
_ Ca veut dire quoi ?
_ Que je comprends, j'imagine.
Kagami fronça les sourcils, comme s'il venait de réaliser qu'ils étaient séparés de plusieurs mètres. Il secoua la tête et s'approcha. Il se planta face au bleu et le regarda un moment avant de poser sa tête sur son épaule. Il se sentait vidé.
_ J'ai pas envie qu'on se sépare non plus. Mais… J'ai pas envie de continuer comme ça.
_ Je sais. Je vais essayer…
L'américain se redressa et hocha la tête. Deux fois. Puis il soupira et jeta un coup d'œil à sa voiture.
_ Faut que je range tout ça.
_ Hum. Besoin d'aide ? proposa le bleu d'une voix incertaine.
L'autre considéra l'offre avec un sourire narquois avant de secouer la tête.
_ Ca ira, va. Je devrais m'en sortir. Puis ça me videra la tête.
Aomine opina du chef, l'air clairement soulagé. Il hésita quelques secondes avant de s'éloigner sans pouvoir s'empêcher de jeter quelques coups d'œil par-dessus son épaule.
~ Queer as Folk ~
_ T'as l'air d'aller mieux, toi ! s'exclama Momoi en s'accoudant au bar.
La musique lui brisait les tympans et elle avait trop chaud. Elle avait perdu l'habitude, l'ambiance l'étouffait un peu, l'odeur de sueur et d'alcool lui piquait les narines et les lumières vives projetées par les néons fluorescents lui donnaient mal à la tête. Pourtant, elle commanda un verre et se tourna vers son meilleur ami. Ce dernier était debout devant plusieurs verres vides, un léger sourire distant flottant sur ses lèvres depuis qu'il avait fini le quatrième.
_ Je sais pas trop, on verra. Et toi ?
_ Quoi moi ?
_ Satsuki… Je suis sans doute un meilleur ami minable mais je pense que j'ai passé assez de temps à me plaindre ces trois derniers jours pour te laisser ton tour.
_ Qui êtes-vous et qu'avez-vous fait de mon Dai-chan ?! s'exclama la rose en pointant un doigt accusateur sur le torse du jeune homme.
Ce dernier se contenta de secouer la tête, amusé.
_ Ca faisait longtemps qu'on t'avait plus vue en boîte de nuit. T'es sûre que tout va bien ?
_ Waouh… Je sais pas ce que Kagamin t'a dit, mais ce changement radical est étrange. Pas déplaisant, remarque. T'es sur la bonne voie.
_ Satsuki, pourquoi tu cherches à détourner la conversation ?
La jeune femme perdit son sourire et termina son verre sans répondre.
_ Un problème avec Imayoshi ?
Momoi fit la grimace : elle comprenait enfin ce que ressentait son meilleur ami quand elle refusait de lâcher le morceau. Et s'il prenait exemple sur elle, ils allaient y passer la soirée jusqu'à ce qu'elle craque.
_ On se dispute pas mal ces derniers temps.
_ Quel genre de dispute. Le genre que j'ai avec Taiga ou… ?
_ Non. C'est plus sérieux. En fait… Je crois que je devrais lui dire.
Le bleu sembla ne pas comprendre pendant quelques secondes avant d'écarquiller les yeux.
_ Attends ! Tu lui as pas dit que t'en pinçais aussi pour les nanas ? Mais tu lui donnes quelle excuse pour ton…engagement militant très… poussé ?
_ Il pense que je fais ça parce que plus de la moitié de mes amis sont homos ou trans.
_ Tu te fous de moi ?!
_ …
_ Ok… Tu vas lui dire, alors ?
Son amie haussa les épaules.
_ Ca l'a jamais dérangé, Shoichi est quelqu'un d'ouvert d'esprit.
_ Mais ?
_ Mais tu sais très bien que les gens réagissent parfois de façon imprévisible.
Elle se força à sourire et regarda le jeune homme en ajoutant :
_ C'est comme tu l'as dit : on verra. Au fait, le week-end prochain, t'as prévu quoi ?
_ Hein ?
_ Pour ton anniversaire, crétin.
_ Ah… Rien. Tu sais que j'aime pas les fêter.
_ Compte sur moi pour t'empêcher de passer ta soirée à te souler sur ton canapé. déclara la rose d'un ton déterminé, adressant un clin d'œil à son ami.
Ce dernier feignit une grimace désespérée avant de secouer la tête et de retourner à son verre.
~ Queer as Folk ~
Aomine se réveilla avec une migraine de tous les diables. Il se redressa lentement et prit sa tête entre ses mains. Il se leva sans se précipiter et se servit un plein bol de café qu'il avala avec une aspirine. Il jeta un coup d'œil distrait à son téléphone portable. 4 appels en absence, 3 messages. Il avisa le nom de ceux qui avaient tenté de le joindre : sa mère, une fois, son père, une fois également et Taiga, deux fois. Avec lassitude, il colla le mobile à son oreille.
"Allo, Daiki mon chéri ? C'est maman. J'appelais pour savoir si tu voulais passer le week end avec nous. Masamune a dit que ça ne le dérangeait pas et puis ça fait longtemps qu'on ne s'est pas vus. On pourrait déjeuner à la maison tous ensembles avec ta sœur et tes grands parents si tu promets de ne pas faire de scandale. On ne t'en veux pas pour le week-end à la mer alors rappelle moi."
_ Demi sœur ! Ne put-il s'empêcher de corriger pour lui-même.
Il secoua la tête en maudissant sa mère et effaça le message.
"Daiki ? Salut fiston ! Pour ce week end, j'ai prévu une soirée bowling père et fils, pour rattraper la soirée foot que tu as annulée. Des collègues seront là mais ne t'en fais pas, je serais tout à toi. J'espère que ta mère a pas décidé de faire une énième dîner à la con, tu détestes ça. Elle n'a jamais rien compris de toute façon, celle là. J'suis sûr que c'est de sa faute cette histoire de pédés, elle a toujours été trop autoritaire avec toi. Bref, rappelle moi pour me dire ta pointure pour les chaussures."
Il soupira profondément. Son père le connaissait encore moins bien que son ex-épouse si c'était possible. C'en était affligeant. Il effaça le message en se jurant de lui signifier prochainement qu'il haïssait le bowling presque autant que ses collègues misogynes, homophobes et parfois racistes. Il décida d'écouter le dernier message : au point où il en était.
"Salut Daiki. Je sais que t'aimes pas fêter ton anniversaire mais je me disais que si tu voulais, on pouvait faire un truc. Juste avec le reste de la bande. Tu choisis les boissons et le gâteau. Ou si tu préfères, on va en boîte et on se cotise pour te payer une bouteille de champagne. Enfin, c'est comme tu veux, quoi. Tiens moi au courant, je rentre demain… Et Daiki, je… non laisse tomber."
Il raccrocha sans prendre la peine d'effacer le message. Il savait ce que Taiga avait voulu dire, il savait aussi pourquoi ce dernier s'était ravisé au dernier moment et pour une raison inconnue, il était triste qu'il l'ait fait. Il s'assit et finit son café, obnubilé par le dernier message. Dire qu'il n'avait pas été inquiet quand Taiga n'était pas revenu la veille aurait été un mensonge éhonté. Il avait envie de le voir, de l'embrasser, de le toucher. Merde, cet espèce de con lui manquait. Il jura, abattant violemment le bol sur le plan de travail. Puis il passa une main sur son visage avant d'attraper son téléphone. Il composa un numéro et fut soulagé de tomber sur la messagerie : ce serait moins gênant, plus facile.
_ Taiga, c'est moi. Hum… Je voulais te dire, pour l'autre fois, je le pensais vraiment et… en fait, pour ce week end, je me disais qu'on avait qu'à le passer tous les deux, aller bouffer quelque part et se faire un ciné J'ai pas envie de voir tout le monde. Ah, et Taiga… non, rien. Laisse tomber.
Note d'Après Propos : Voilà pour le premier chapitre. J'espère que vous avez aimé et que vous avez envie de lire la suite ^^ Le personnage suivant me semble assez facile à deviner !
Ceux et celles qui me suivent que je ne suis pas le genre d'auteur à vraiment réclamer des reviews (en tout cas je n'en ai pas l'impression) mais cette fiction est longue et m'a pris énormément de temps et d'énergie, j'y ait passé une petite centaine d'heure jusqu'ici (et je n'en suis qu'à la moitié niveau écriture) en comptant les recherches sur internet, l'écriture, la relecture, la correction, etc... Et ça me ferait vraiment plaisir que vous laissiez un petit commentaire pour me dire ce que vous en avez pensé, même s'il n'est pas très long. Juste pour me dire que la suite vous intéresse (ou pas) et que vous serez là pour la lire (ou pas). Lire des reviews, surtout sur une fiction dans laquelle on s'est autant investi(e), c'est toujours agréable et très motivant pour les auteurs (et s'il vous faut un autre argument : j'écris plus vite quand on me motive un peu et il me reste encore cinq ou six chapitre à écrire !). Je remercie d'avance tous ceux qui le feront ^^
Merci à vous d'avoir lu et à la semaine prochaine (et pour ceux qui suivent Rock & Roll is Dead, je posterais bientôt également !)
