Bonjour, bonjour !
Pour ceux qui ont déjà lu mes fics précédentes sur SPN, vous ne devriez pas être étonnés de retrouver Li. Pour les autres... hé bien, c'est une chasseuse (un peu sorcière) qui a déjà croisé les frères à deux occasions déjà. Mais ce sont des histoires différentes. Aujourd'hui, est un jour nouveau avec une nouvelle enquête !
Bonne lecture et, s'il vous plaît, laissez un message : je suis toujours ouverte aux critiques constructives.
PS : SPN ne m'appartient pas (ce serait trop facile, sinon).


Rock Lake – Wisconsin
Courant de saison 3

Rock Lake étincelait sous les rayons descendants du soleil d'automne. La cime des arbres, de l'autre côté du lac, donnait l'impression d'avoir pris feu et les yeux pouvaient à peine se poser sur l'horizon. En descendant de voiture, Li prit le temps d'observer le décor. Idéal pour une balade romantique, un barbecue improvisé ou tout simplement la retraite. Durant un court laps de temps, la jeune femme considéra la question et s'imagina faire une sorte de "pause vie". Un arrêt sur image, la mise en suspend de tout, de tous, pendant une durée non définie. Puis la mémoire et le passé vinrent ternir le tableau. Quoi qu'elle fasse, où qu'elle aille, elle aurait toujours des cauchemars et son opinion d'elle-même raserait toujours les bas-fonds des pires quartiers. S'arrêter de vivre et de travailler lui donnerait encore plus de temps pour cauchemarder et se flageller émotionnellement. Elle inspira donc un grand coup et dirigea son regard et ses pas vers l'attroupement au bord de l'eau.
Li repéra facilement le chef de la police. Un homme un peu fort, un peu dégarni, un peu barbu, un peu grand... c'était un homme de peu avec une scène de crime peu commune. Elle maîtrisa le petit sourire qui voulait récompenser sa mauvaise pensée et se dirigea vers lui.
Elle commença par sortir le badge du FBI que Bobby Singer lui avait dégoté. Sa première rencontre avec le vieil homme n'avait pas été de celles qu'elle aurait aimé raconter mais la suite avait prouvé que l'homme gagnait à être connu. Il lui avait donné quelques conseils très utiles et des astuces très précieuses, dont ce badge flambant neuf. Bien sûr, il avait fallu suivre les conseils du vieux chasseur et investir dans des tenues assez descentes pour une femme faisant partie de la police fédérale mais le résultat en valait très souvent la chandelle. Malheureusement, son épine dorsale se révoltait toujours autant lorsqu'un homme montrait ne serait-ce qu'un soupçon d'attirance à son égard quand elle arborait son taille ajusté. Elle l'avait choisi gris, de façon à paraître fade et elle avait ajouté des lunettes peu seyantes pour apporter la note frigide qu'elle voulait donner... et qu'elle ressentait.
Le policier jeta à peine un œil au badge et au costume.
— Bonjour, dit-elle. Agent spéciale Andrea Gomez. Vous pouvez me raconter ce qu'il s'est passé ?
— Bonjour, Gavin West. Personne ne m'a prévenu de votre venue.
— Désolée, répondit Li avec un faux sourire d'excuse. Mon responsable considère que c'est une perte de temps. Mais si vous préférez, je peux lui demander d'appeler votre responsable afin qu'ils s'assurent ensemble que tout le protocole est respecté.
Le type pinça un peu les lèvres avant de faire signe que tout allait bien.
— Un couple de retraités a trouvé un corps il y a quelques heures. Le corps a été complètement déchiqueté. On en a trouvé quelques morceaux près de cette anse mais il semblerait qu'il en manque quelques-uns. Mes assistants sont en train de fouiller les abords du lac et on en a déjà trouvé des bouts mais j'ai l'impression qu'on devra fouiller sous l'eau si on veut reconstituer le cadavre complet.
Le type de peu s'était approché de la rive en racontant son histoire, désignant par moment des morceaux sanglants autant pour figurer ce qu'il disait que pour que Li évite de marcher dessus.
— Je vois. J'espère qu'ils n'ont pas un dîner en famille prévu ce soir... répondit-elle.
— Oui, ils savent déjà qu'ils ne rentreront pas chez eux avant qu'on ait tout trouvé.
— Est-ce que vous savez à quand remonte la mort ?
— Notre coroner m'a dit qu'il était difficile d'avoir une heure exacte tant qu'il n'aurait pas tous les morceaux mais il a nous a donné une estimation. Ça ferait environ une demi-journée.
— Ce matin ? Est-ce que vous avez des animaux sauvages dans le coin ?
— Rien à ma connaissance qui puisse déchiqueter un être humain.
— Et vous avez une piste sur ce qui aurait pu faire ça ? demanda Li.
Le type soupira un peu avant de hausser les épaules sans répondre.
— L'identité du cadavre ?
— On a ses papiers, oui. Il s'agit de Derek Gibson, dit le policier d'un air désolé.
— Vous le connaissez ?
— Oui, il vivait à Lake Mills avec sa fiancée. Ils allaient se marier l'été prochain.
Li eut une grimace involontaire. Même si elle-même n'était pas pro-mariage, elle respectait cette institution et pouvait facilement imaginer la douleur de la fiancée qui venait de perdre tout l'avenir qu'elle avait construit sur cette pierre angulaire qui venait de s'effondrer. Elle sentit ce petit pincement au cœur qui lui indiquait qu'elle commençait à faire preuve de trop d'empathie et se secoua. L'enquête était trop importante pour qu'elle se laisse aller à s'apitoyer. Elle n'avait pas de temps à perdre à pleurer quand elle pouvait sauver des gens.
— Vous savez s'il avait des problèmes ? interrogea-t-elle.
— Seulement financiers, à ma connaissance. Il enchaînait deux jobs pour pouvoir payer le mariage de rêve à sa dulcinée.
— Je vois, dit la chasseuse. Et vous ne voyez personne qui aurait pu lui en vouloir personnellement ?
Le chef de la police fit un peu la moue avant de répondre.
— Non, pas même un chat renversé. C'était un jeune homme très bien. Sous tous rapports.
Le regard de Li accrocha une tâche de sang séché et soupira.
— D'accord. Vous permettez que je fasse un tour ?
— Faites, l'invita le policier. Et si vous avez une piste, n'hésitez pas à partager.
Li sortit son téléphone portable pour prendre quelques photos et parcourut le site de long en large sans rien trouver. Des traces de pas apparaissaient à l'endroit où se trouvaient la majorité des morceaux mais la terre n'était pas assez humide pour relever des empreintes. Elle revint finalement vers le policier. Ce dernier était en train de sortir sa lampe de poche et exhortait les autres à en faire autant en attendant qu'une équipe revienne avec des éclairages plus puissants.
Li se tourna vers le lac. On était entre chien et loup et le ciel avait perdu sa parure flamboyante laissant la place à des tâches d'obscurités accentuées par les dernières lumières du jour mourant. La chasseuse soupira encore. Le paysage était vraiment magique ici.
Un cri la fit sursauter et elle faillit dégainer une des nombreuses lames qu'elle avait cachées sous son tailleur mais il ne s'agissait que du chef de la police qui pestait contre la longueur de la tâche. Elle le rejoignit.
— Monsieur West ? J'ai cru comprendre que ce n'était pas le premier corps qu'on avait trouvé dans la région.
Le policier se tourna vers elle, étonné qu'elle soit encore là.
— Oh. Oui. Vous pouvez m'appeler Gavin, ce sera plus simple, dit-il en laissant un blanc.
Li ne releva pas. Appeler les personnes par leur prénom était le plus court chemin vers l'amitié et elle n'était pas là pour tisser des liens. Elle laissa donc le blanc perdurer en le regardant dans les yeux, attendant qu'il comprenne et veuille bien répondre à sa question. Ce qu'il finit par faire.
— Heum... oui, on a trouvé un autre cadavre, à peu près comme celui-ci, de l'autre côté du lac. Mais je n'en sais pas grand-chose. C'est Ruth Garver qui s'occupe de l'autre rive du lac.
Li observa West du coin de l'œil. Parler de sa collègue de la ville voisine ne semblait pas lui plaire.
— Il y a un problème avec cette dame ?
— Si on veut. En plus d'être désagréable et malpolie, elle ne partage aucune information.
— Je vois, médita la jeune femme. Je vais vous laisser. Je vous contacte dès demain pour voir si vous avez réussi à reconstituer tout le corps.
West ne répondit pas et retourna à ses recherches. Li avait presque atteint sa voiture lorsqu'un nouveau cri l'arrêta. Cette fois, elle avait vraiment dégainé l'une de ses lames. Fort heureusement, tout le monde était tourné vers le cri et personne n'avait noté l'apparition incongrue d'une arme blanche dans la main d'un inspecteur fédéral.
Le cri venait du légiste, d'après ce qu'indiquait le dos de sa veste. Il était agenouillé près du lac et commençait à l'évidence à emballer les bouts de corps. En s'approchant parmi tous les autres, Li, qui avait rengainé aussi vite qu'elle avait dégainé, vit que le légiste ne tenait pas un morceau de corps mais de la poussière. Intriguée, elle s'approcha plus près.
— Qu'est-ce que tu fous Mark ? s'exclamait West.
Mark le légiste restait bouche bée et désignait ses mains pleines de poussière. Voyant que personne ne comprenait ce qu'il tentait de montrer, il finit par retrouver l'usage de la parole.
— C'est le morceau, chef... il... il... il est parti en fumée !
— Comment ça ? Tu as bu ?
— Mais non, je vous assure. Regardez mes mains, cette poussière, je vous assure que c'est le morceau de rein que je voulais récupérer et je l'ai à peine touché qu'il s'est... qu'il est parti en poussière.
— Il y a une mauvaise visibilité avec cette lumière, vous devriez faire attention à ce que vous ramassez, le rabroua West.
Le légiste en resta bouche bée.
— Vous avez essayé de ramasser un autre morceau ? demanda Li.
Le type la regarda et écarquilla les yeux avant de revenir à ce qu'il faisait.
— Attendez, dit-il. Celui-là, par exempl... quoi !
Cette fois, Li avait vu le phénomène de ses yeux. Le morceau de jambe que le type avait touché s'était soudainement réduit en poussière. La chasseuse enfila un gant, prélevé dans la trousse du légiste et se pencha sur un autre morceau. Ses doigts s'étaient à peine refermés dessus que la chair retourna à la poussière.
— Car tu es poussière..., marmonna-t-elle. Trop bizarre.

Li était installée à la terrasse d'un chalet, au bord du Lake Mills. L'automne tournait à plein régime, faisant roussir les feuilles et donnant un magnifique air de désenchantement au paysage. Une petite brise agitait la surface du lac, forçant les humains à arborer leurs plus belles écharpes. Cependant, Li n'avait pas vu âme qui vive depuis qu'elle s'était installée dans ce chalet isolé, la veille. Le soleil l'avait attiré dehors mais elle devait lutter pour garder un peu de chaleur : bonnet, écharpe, gant, polaire, elle avait sorti la totale et l'ensemble était très efficace. Elle ne sentait pas la fraîcheur de l'air malgré la brise assassine et elle était tellement bien dans cet endroit loin de tout qu'elle s'était allongée sur une chaise longue en bois et avait fermé les yeux. Les photos de la première scène de crime qu'elle étudiait avaient doucement glissées par terre à mesure que tous ses muscles se relâchaient.
Soudain, un bruit lui fit ouvrir les yeux. Un moteur. Elle réagit au quart de tour et se leva, dégainant un poignard fin et brillant dans chaque main, elle s'éloigna de la maison et se cacha le long du chemin pour voir arriver les intrus.
Malgré tous les kilomètres qu'elle avait parcourus et en dépit de tout le mérite qu'elle avait de rouler encore à son âge, l'Impala des Winchester n'avait pas sa place sur un chemin de terre. Elle bringuebalait sur toutes les aspérités et son chauffeur serrait les dents en espérant que ses amortisseurs survivent à son périple. Arrivés devant le petit chemin menant au chalet, l'aîné coupa le moteur de son bébé et les deux frères en sortirent.
— J'espère qu'elle est là parce que mon bébé n'aime pas trop ce type d'exercice.
— On aurait dû faire le tour à pied, lui répéta son frère.
— Tu veux dire marcher ? Et puis quoi encore ?
— Hé bien, vous auriez pu appeler, ça vous aurait évité de torturer cette pauvre vieille voiture.
Les frères se retournèrent d'un bloc. Leur instinct avait porté leurs mains près de leurs armes à feu mais ils n'allèrent pas jusqu'au bout. Sortant des arbres, Li rangeait tranquillement ses propres armes en se dirigeant vers eux.
— Et gâcher la surprise de notre venue ? plaisanta Dean. Ça aurait vraiment été dommage.
— Qu'est-ce que vous faites là ?
— Hé bien... commença Sam. Bobby nous a dit que tu avais trouvé un cas intéressant.
— Et on était comme qui dirait à côté, renchérit Dean.
— Donc nous voilà, compléta son frère.
Li les regarda tour à tour.
— Vous pensez que je ne suis pas capable de m'occuper de ce cas toute seule, dit-elle calmement.
— Non, non, pas du tout, se défendit Sam. C'est juste que Bobby nous a parlé de ce truc qu'il ne comprenait même pas lui-même alors on a pensé que ça pourrait être intéressant, tu sais...
— Pour notre culture personnelle, compléta Dean.
— Parce que ça nous intéresse, renchérit Sam.
Li soupira. Elle soupçonnait les deux Winchester de penser qu'elle n'était pas capable de faire face à un monstre qu'elle ne connaissait pas. Elle soupçonnait même Bobby de penser pareil mais elle ne leur en voulait pas. Tant qu'elle ne savait pas ce qu'elle allait affronter, tout était possible. Après tout, si elle s'était croisé elle-même, elle ne se ferait pas confiance...
Elle passa devant les deux garçons encore en attente de sa réaction.
— Vous venez ou vous restez devant la porte ? J'ai des bières au réfrigérateur.
L'aîné sourit à pleines dents.
— Voilà un accueil comme je les aime.

Les trois chasseurs étaient installés à la terrasse du chalet à siroter leurs bières et Li leur faisait un compte rendu détaillé de ce qu'elle avait déjà appris.
— Ce matin, je suis allée voir Ruth Garver, la chef de la police de London, de l'autre côté du lac. Elle m'a donné les photos de sa scène de crime. Comme celui d'hier, le type était en lambeaux et chaque foutu morceau est parti en poussière dès qu'on les a touché.
— Tu as pu discuter avec les proches des victimes ? demanda Sam.
— Pas encore eu le temps, répondit-elle.
— Tu es quand même vachement bien installée ici, fit remarquer Dean en montrant le paysage.
— Oui, j'ai eu de la chance de trouver cet endroit. La proprio est une vieille veuve qui ne vient plus et qui est tellement riche qu'elle ne loue même pas l'endroit.
— Comment tu le sais ? s'étonna l'aîné des garçons.
— J'ai quelques bases de piratage. Ça m'ennuie de squatter comme ça mais je ne peux pas me permettre d'aller à l'hôtel.
— Pourquoi ? s'étonna Sam.
— L'argent, soupira lourdement Li. Je ne sais pas comment vous faites mais moi j'ai un mal de chien à me faire payer par des morts et je ne me vois pas racketter les personnes que je viens de sauver.
Dean et Sam se regardèrent. Ils semblaient dubitatifs.
— Quoi ? Vous faites comment, vous ?
— Heum... commença Sam.
— Fausses cartes de crédit, poker, parties de billard... dévoila Dean. On pourra te montrer quelques trucs, si tu veux.
La chasseuse les regarda tour à tour, bouche bée.
— Vous voulez dire que... vous escroquez ?
Sam décida de se taire et se tourna vers son grand frère.
— Non ! se défendit ce dernier.
Les deux autres le regardèrent, attendant la suite.
— Bon, d'accord, mais on fait un métier d'utilité public qui ne rapporte rien. Il faut bien qu'on subsiste, non ? Et puis je suis sûr que si les gens savaient ce qu'on fait, ils seraient heureux de nous donner de l'argent... mais comme ils se contentent de partir en courant, il faut bien qu'on se serve quelque part.
Sam soupira et se tourna vers Li.
— Il a raison, tu sais. Il faut bien qu'on vive, donc on picore un peu de-ci, de-là. Et puis on ne pointe jamais une arme sur personne pour obtenir cet argent.
La jeune femme les regarda d'un air sceptique mais ne chercha pas d'autres explications.
— Quoi qu'il en soit, dit-elle, un type de la morgue de Lake Mills m'a abordé tout à l'heure. Il avait l'air bizarre d'un type qui ne peut pas en dire beaucoup sur son lieu de travail et a proposé de me retrouver ce soir.
— Très bien, on peut t'accompagner.
— Il ne vaut mieux pas, il n'avait vraiment pas l'air à l'aise et je ne veux pas l'effrayer.
Un sourire torve apparu sur le visage de Dean.
— Tu veux dire que tu as une touche et que tu ne veux pas t'encombrer de deux magnifiques spécimens pour ne pas l'effrayer.
Li se redressa, piquée et pas du tout amusée. Ce qu'il insinuait la révoltait et elle ne voulait pas donner l'impression qu'elle pouvait tisser des liens de cette nature.
— Non. Vous m'accompagnerez de loin, dit-elle en se levant et en rassemblant les photos éparses.
Le rire de Dean lui fit grincer des dents.
— Oh mais on ne veut pas déranger, rit-il.
Les garçons sursautèrent lorsque la sorcière tapa du poing sur la table.
— Arrête ça.
Elle fixait l'aîné, les mâchoires crispées, les yeux sombres de rage. Dean ouvrit la bouche pour tenter une autre blague.
— Tout de suite ! s'énerva la sorcière, serrant les poings.
Dean referma la bouche pendant que Sam la regardait de travers.
— Pas de souci, dit le cadet d'un ton apaisant. On te suit de loin.
Elle jeta un regard à Sam qui lui sourit gauchement, un peu incertain sur la conduite à tenir. Après avoir jeté un regard meurtrier à l'aîné, Li repoussa violemment sa chaise pour s'éloigner à pas rageurs.
Les garçons s'entre-regardèrent sans mot dire après qu'elle eu claqué la porte du chalet.