Impasse des Rêves
Résumé : HP/DM. D'un côté, il y a Harry, qui habite Impasse des Rêves, mais plutôt des rêves oubliés, et Ron, qui regrette ses choix et qui trouve une liste. De l'autre, il y a Dudley, qui ne comprend pas ce qu'il a fait au ciel pour mériter ça. Et au milieu, il y a Draco.
Personnages principaux : Harry, Draco, Ron, Dudley, Hermione.
Pairing : HPDM, HGRW. Mention de LB/RW au début (sans commentaire).
Disclaimer : Rien n'est à moi, tout est à JKR : Personnages, Univers. Sauf les idées à la con, ça j'en à foison.
NDA : J'avais envie d'écrire quelque chose sur le passage à l'âge adulte, les années d'adolescent, la fête, la sensation de liberté, les coups de folie, l'amitié, l'amour, les rêves oubliés et les regrets. Foilààààà.
Aujourd'hui on est le 5 JUIN, DRACO A 37 ANS !
Chapitre 1
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Harry
1er Mars
J'habite Impasse des Rêves, mais plutôt des rêves oubliés. En tout cas c'est ce qu'aime me rappeler Luna. Ron, lui, dit que nos rêves sont dans une impasse ; la métaphore n'est pas très fine, mais pathétique de justesse. Ils sont dans une impasse depuis si longtemps que je ne sais même plus à quoi ils ressemblent, pour être honnête.
Je me sers et verre d'eau et relis le petit mot apporté par le hibou d'Hermione.
"J'ai trouvé un truc de fou. Rendez-vous ce soir au Mandragore pour en parler."
Ce soir, c'est son anniversaire. 23 ans. Ça me déprime un peu, parce que je sais que je suis le prochain. 23 ans, bordel. Pratiquement un putain de quart de siècle.
Le Mandragore c'est son bar préféré. Principalement parce qu'ils y vendent des feuilles de mandragore, qui le détendent un peu trop, ou parce que le personnel – Dean et Seamus- est plus que discret quant à la fréquence de nos visites.
Tout le monde sait que Lavande déteste que son mec fasse la fête. Ou qu'il s'amuse sans elle. Ou qu'il s'amuse tout court. Ou qu'il respire.
Bon, je suis injuste avec elle. Elle n'est pas si pénible. C'est juste qu'elle est restée longtemps à St Mangouste après la Guerre et qu'elle est un peu parano. Elle ne supporte pas que Ron soit Auror et risque sa vie chaque jour - Je crois qu'elle se fait une fausse idée de notre métier, parce que à part si les montagnes de dossiers tuent, on ne risque pas souvent notre vie-. Elle ne supporte pas que Ron soit en mission sans qu'elle sache où il est. Elle ne supporte pas rester seule chez elle. Elle a peur du moindre bruit. Mais elle a aussi peur du silence.
Elle est un peu superficielle. Elle aime parler de choses qui ne m'intéressent pas. Elle glousse encore comme quand on avait quinze ans. Elle lit des magazines horribles comme Sorcière Hebdo.
Et elle déteste qu'on regarde ses cicatrices. Elle les cache derrière ses longs cheveux blonds. Et une tonne de fond de teint, ce qui lui donne l'air d'avoir un masque sur la figure.
Mais à part ça, elle est fréquentable. Bon, en fait, elle est plutôt sympa, si on fait abstraction de son parfum capiteux et du fait qu'elle est accrochée à Ron comme une moule à un rocher. Disons que quand elle est là, c'est difficile de discuter avec Ron. Parce que sa bouche est occupé.
Mais elle cuisine bien ; à chaque fois que je vais chez eux, elle me fait de la tarte à la mélasse. Elle me pose toujours des questions sur moi, sur mon travail, et sur Neville aussi. Elle essaie d'être agréable, de ne pas avoir l'air complètement cassée. Mais je sais qu'elle l'est. Je vois bien la tête de Ron quand il arrive au travail après avoir passé la nuit à la rassurer, parce qu'elle a fait un cauchemar et qu'elle est persuadée que des gens se sont introduits chez eux. Je vois bien que Ron ne la laisse jamais longtemps seule, qu'on va rarement boire une bière au beurre après le travail.
Je vois bien que Ron est malheureux, mais qu'il ne peut pas la quitter, parce que sans elle il n'aura plus rien.
Lavande est sympa, mais elle n'est pas Hermione.
Et ça, toutes les tartes du monde n'y changeront rien.
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Une douche, deux thés, un transplanage plus tard, j'arrive devant le bar qui est déjà bien rempli. Luna, Ron et Neville sont déjà là. Seamus et Dean sont derrière le comptoir, ils nous rejoindront sûrement quand ils auront moins de clients.
Ça me rend un peu triste de songer à l'anniversaire de Ron tel qu'on l'a fêté l'été qui a suivit la fin de la Guerre, et au petit comité présent aujourd'hui. Mais de toute façon je pense à ça chaque année. Putain. Je suis déjà un vieux con.
Ron porte, comme toujours, une robe de sorcier noire sur des vêtements moldus : jean et pull-over. C'est terminé l'époque des pulls tricotés par Molly ; maintenant c'est Lavande qui lui achète ses vêtements. Sobres. Classes. Ils lui vont bien, c'est vrai.
Mais je trouve que Ron sans un pyjama trop petit ou un pull qui gratte, ce n'est pas Ron. C'est bête, je sais.
Neville, lui, a gardé sa robe d'Auror – il travaille tard le jeudi, il a dû venir directement du Ministère- et Luna porte une robe -tunique ?- multicolore, ainsi que ses éternelles boucles d'oreilles en forme de radis. Ginny et les autres Weasley brillent par leur absence. Comme depuis des années.
On est Jeudi, un soir de semaine, et on travaille tous demain. Neville nous le rappelle sur un ton paternaliste tandis que Luna agite la main avec un petit sourire sous mon regard interrogateur – " Les joncheruines, Harry, les joncheruines" -.
On boit donc nos pintes de bière, on chante donc notre chanson – Happy Birthday to you Ron !-, on fait donc la traditionnelle photographie et à minuit tapante, tout le monde décide de rentrer chez soi.
On se promet de mieux fêter ça ce weekend, mais on sait tous qu'on sera trop morts pour sortir de notre canapé. Le travail nous tue tous, surtout Neville, Ron et moi, avec les missions à l'étranger, les astreintes de nuit, les interventions sur les équipes d'Oubliators... En fait, Lavande a raison, on travaille trop.
Neville part en premier. Luna le suit de près – tiens, tiens-. Ron et moi traînons la patte. Lui n'a peut-être pas envie de retrouver sa copine. Moi je n'ai pas envie de retrouver un appartement vide. Je croise son regard. Un élan d'affection me prend.
- Allez, montre-moi cette fameuse trouvaille, je dis en souriant.
Je m'attends à ce qu'il me sorte une bouteille de whisky qu'on aurait oubliée derrière un canapé au Nouvel An -je soupçonne Lavande d'en avoir cachées pour pas que l'on se soûle trop- ou une photographie bien laide de nous à ses 20 ans – pendant un moment, c'est Luna qui nous coupait les cheveux-, mais il dégaine un vieux parchemin aux coins écornés, qui a l'air d'avoir connu des jours meilleurs.
Pas dans l'état dans lequel est maintenant la carte des Maraudeurs, mais quand même pas très blanc, ou très lisse. Plutôt froissé, en fait. Un peu comme nous, au final.
Je lui jette un regard interrogateur et il m'adresse un sourire rayonnant. Ça me fait bizarre, il perd cinq ans juste en souriant comme ça.
- C'est la liste qu'on a écrite quelques jours avant la Bataille Finale ! S'écrit-il. Tu te souviens pas ?
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10 choses à faire après la Guerre
1 – Aller à la gare et prendre le premier train qui passe. (rêve de petit garçon moldu en quête de liberté et d'espaces sans les Dursley) (C'est bon, ta gueule)
2- Jouer à pile ou face pour toutes nos décisions jusqu'à ce qu'on arrive au bout de la liste. (T'es vraiment trop un thug, Harry) (Arrête avec les expressions moldues, Ron)
3 – Boire autant de shots que d'années vécues. (sans vomir ?)
4 – Arriver bourré à une réception du Ministère. (Et vomir sur les chaussures d'Ombrage ?)
5 – Dire oui à tout ce qu'on nous propose pendant une semaine. (Ron, si tu redis que je suis un thug...)
6 – Pisser sur le paillasson des Dursley. (VENGEANCE !)
7 – Laisser Harry/Ron dicter nos actes pendant une journée entière (Bordel)
8 - Faire tourner la mappemonde et partir en vacances là où s'arrête son doigt. (T'es trop un aventurier, Harry) (Je me répète, mais, ta gueule)
9 – Aller voir la personne qu'on aime et le lui dire. (On se demande bien qui c'est, hein, Ron ?) (C'est bon, t'es lourd vieux)
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J'esquisse un sourire en lisant les numéros 10 et 11 , que nous avons ajouté quelques mois plus tard :
10 – Ron : Demander Hermione en mariage.
11 – Prendre la place de nos statues de cire, au Musée de la Guerre, et faire peur aux gens.
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C'est con, comme un petit bout de papier peut raviver des souvenirs que l'on croyait morts et enterrés. Finalement c'était juste là, en moi, ça hibernait en attendant d'être réveillé.
J'ai envie de rire et de pleurer en même temps.
- Putain, on était con, je dis en souriant malgré moi.
Ron fronce les sourcils et met la main sur son cœur. On dirait un petit soldat. Non, pire, un général prêt à faire son discours.
Il a l'air à la fois extrêmement sérieux et super défoncé, je me dis que Lavande va sacrément l'engueuler quand il sera rentré chez eux.
- Qu'est-ce qu'il t'arrive, vieux ? Je demande.
- On n'a rien fait de tout ça, dit-il, l'air un peu triste – et je sais qu'il fixe le numéro 10 avec insistance-. On est devenu des vieux cons, Harry.
- On n'est pas si vieux que ça, je grommelle tandis qu'une petite voix dans ma tête tonne "Bientôt le quart de siècle ! Le quart de siècle !".
Il hausse un sourcil peu convaincu et sort sa baguette.
- Qu'est-ce que tu fais ?
- Tu vois pas ce qu'il y a écrit ? "à faire après la Guerre". On n'a rien fait du tout.
- T'es pas sérieux ? On a passé l'âge de faire ce genre de choses.
- On ne les a jamais faîtes ! J'ai... J'ai perdu Hermione, et toi ? Toi, t'as fais quoi, Harry ? Toi, t'es heureux ? Tu es content de rentrer chez toi, le soir ? T'es amoureux, Harry ? Tu te réveilles avec le sourire ?
Je grimace douloureusement.
- C'est bon, c'est bon, j'ai saisis l'idée. On n'a rien fait de tout ça, et alors ?
- Et alors ? Il me semble qu'on avait fait un serment au dessus de ce parchemin, non ?
Ah. Oui, ça me dit quelque chose. Dans l'euphorie de la fin de la Guerre...
C'était il y a longtemps. On fait des trucs stupides quand on a dix-sept ans et qu'on a envie de vivre.
- C'est très sérieux, les serments ! S'écrie Ron en levant le poing – je ne suis pas le seul à avoir un petit côté dramatique-. Il faut qu'on fasse tout ce qu'il y a écrit sur cette liste, sinon... qu'est-ce qu'on avait dit ? On sera couverts de furoncle, non ?
Quoi ! Merci Hermione et son influence à la con. Déjà que je ne suis pas franchement beau, être couvert de furoncles de m'enchante pas outre mesure.
- On en parle demain au Bureau ? Je demande.
- Ouaip !
- Hé, Ron ?
- Quoi ?
- Joyeux anniversaire, vieux.
- Merci. Attends, Harry !
- Quoi ?
- Prends la liste !
Je tends la main et il m'adresse un nouveau sourire radieux.
J'hoche la tête et transplane chez moi.
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Je crois que j'ai toujours détesté cette maison. Après la Guerre, je nous voyais vivre tous les trois Square Grimmaurd, Hermione, Ron et moi. C'est ce qu'on a fait, d'ailleurs.
Jusqu'à ce que Hermione parte vivre en Australie, à la rentrée. Ses parents ne retrouvaient pas la mémoire. Malgré tout ses efforts, ils ne retrouvaient pas la mémoire.
Elle ne pouvait plus être leur fille. Elle ne pouvait pas vivre sans eux, mais elle voulait faire partie de leur vie d'une manière ou d'une autre. L'appartement en face du leur se libérait. Être leur voisine, c'était mieux que n'être personne.
Alors elle est partie. Elle est partie, et à partir de ce moment là tout a commencé à aller mal.
Ron m'a laissé tomber deux fois. Je ne lui en veux pas, mais c'est un fait. Il est parti deux fois. Hermione, elle, a presque toujours fait partie de ma vie. Elle était comme une constante, un pilier. Elle nous sermonnait, nous embêtait, nous forçait à travailler. Elle était pénible, parfois insupportable, elle nous prenait pour des gamins, mais elle était surtout notre meilleure amie. Sans elle, on a vite sombré.
Il y avait pourtant les lettres, la cheminette, les portoloins. On était des sorciers, bordel !
On se rassurait comme on pouvait. On se parlait par cheminette. On se tenait au courant de chacun de nos fais et gestes. Je connaissais par cœur son emploi du temps, ses nouveaux professeurs, l'appartement dans lequel elle vivait. Je pouvais citer les commerçants qui se trouvaient dans son quartier, ce qu'elle avait mangé le midi, quel écharpe elle avait porté la veille, mais ce n'était plus comme avant.
Lentement mais sûrement, ma meilleure amie m'a échappé. Pour une vie que, malgré tous mes efforts, je ne connaissais pas. Le quotidien d'Hermione, c'était la Fac de Droit, l'accent incompréhensible, les tentatives de contact avec ses parents, penser à Ron et moi. Le mien, c'était l'Académie des Aurors, la pluie londonienne, les entraînements, penser à elle, m'occuper de Ron.
C'est lui qui a chuté le premier. C'était évident, car à ce moment là il était encore plus proche d'Hermione que moi – elle était son amoureuse, sa moitié, sa future femme-. Lentement mais sûrement, ils se sont éloignés l'un de l'autre. Je t'aime, mais ça ne fait pas tout.
Il était débordé par le travail que nous donnait l'Académie. Elle avait des horaires pas possibles à la Fac de Droit. Elle n'arrivait pas à se faire de nouveaux amis parce qu'elle pensait trop à nous, parce qu'on lui manquait. Elle était malheureuse en Australie. Elle voulait rentrer. On voulait qu'elle rentre. Mais on voulait qu'elle reste, aussi, parce qu'il y avait ses parents, bordel. Ses parents. Moi, je n'en ai jamais eus, et ceux de Ron... ceux de Ron se sont effondrés après la mort de Georges.
Et puis Hermione ne s'est jamais très bien entendue avec les autres filles, même du temps de Poudlard. À quoi bon ? Elle nous avait, Ron et moi. Il n'y avait pas de place pour d'autres amitiés. On n'avait besoin de personne d'autre.
Finalement, de notre côté, c'était pareil pour Ron et moi. On s'entendait bien avec Neville, en plus il était à l'Académie avec nous, et on voyait souvent Luna, mais ce n'était pas pareil qu'avec Hermione. Ron, Hermione et moi on se comprenait sans parler. On avait fini par évoluer les uns en fonction des autres. On se complétait.
Un jour, je suis rentré à la maison et Ron était assis sur le canapé, les yeux rouges. Hermione ne pouvait pas rentrer pour le week-end de quatre jours. Elle devait réviser pour les examens. Il s'est enfermé dans sa chambre et je suis resté devant la porte, à l'écouter pleurer.
Deux mois plus tard, Ron a embrassé Lavande Brown. Et moi je n'ai pas su quoi faire.
Hermione me délaisse, vieux. Je crois qu'elle traîne trop avec ce connard de Léo. Léo, quel nom de merde tu trouves pas ? C'est français, il paraît. Ouais, ouais je sais qu'elle est en TD avec lui. N'empêche que c'est quand même un trou du cul.
Comment empêcher deux personnes de faire une énorme connerie, comment les empêcher de se déchirer, alors que moi-même, je n'arrivais pas à devenir quelqu'un, ni même à savoir qui j'étais ?
Moi, j'étais Harry, Gryffondor-Serpentard, élève de Poudlard, protégé de Dumbledore, ennemi en titre de Draco Malfoy, meilleur ami de Ron et Hermione. Moi, j'étais Harry, enfant-soldat, adulte en devenir, jeune homme qui n'avait pas eu d'enfance, ni d'adolescence. Moi, j'étais Harry, meurtrier innocent, adulé du public, orphelin de tous les côtés. Moi, j'étais Harry, plus vraiment ado, pas encore adulte. Moi... J'étais perdu.
Après la Guerre, Ron et moi, on rêvait de soleil. On rêvait de liberté. On rêvait d'alcool, de drogues, de rires et de vacances. On pensait que ce serait ça, notre monde. Le monde des vainqueurs. Prendre le soleil au bord du lac, Ron, Hermione et moi. Tous les trois, comme avant. Mais Londres, c'est grand. Londres, ce n'est pas Poudlard. Londres, elle te bouffe.
À Londres, il faut marcher vite, regarder où on va. À Londres, on ne flâne pas. À Londres, je suis "Monsieur Potter", et plus Harry. À Londres, on n'a jamais le temps. "On prendra une bière, un de ces quatre !". Et au final on ne se recroise jamais. À Londres, on est constamment entouré, et constamment seul.
Londres, c'est la cour des grands.
Et l'Académie des Aurors, c'est pas de la gnognotte. L'Académie des Aurors, elle te prend tout. Ton temps, ton sommeil, ton énergie, ton putain de cerveau.
C'est ridicule, non ? Une amitié qui résiste à Voldemort, à la chasse aux Horcruxes, elle peut résister à 10 556 putain de miles !
Apparemment non.
Je n'ai pas vraiment voulu me ranger du côté de Ron. Je ne l'ai pas vraiment fait, en fait. C'est juste que Ron et moi, on vivait ensemble. Je l'ai vu souffrir. Même si c'est lui qui a été infidèle. Même si c'est lui qui a été con.
Lavande Brown. Dans les films moldus que regardait Tante Pétunia, quand le héro trompe l'héroïne avec une pouffiasse – pardon, Ron, je ne devrais pas appeler ta copine comme ça- et qu'il quitte ladite héroïne pour la pouffiasse, c'est parce qu'elle est tombée enceinte. Mais ça ne s'est pas passé comme ça.
Je l'ai avoué à Hermione, Harry. Elle est furieuse. Contre moi, mais aussi contre toi – parce que tu ne lui as rien dit-. Je suis désolé, Harry. J'ai tout fait foirer, pas vrai ? Mais elle était trop bien pour moi, de toute façon. Tout le monde le disait. Je me suis toujours senti con à ses côtés. Elle était parfaite, Hermione, pas vrai ? Elle était parfaite et tout le monde le sait.
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Le lendemain de l'anniversaire de Ron, on ne reparle pas de la liste, car on travaille comme des forcenés sur une affaire d'artefacts de magie noire importés de Pologne. Ni le surlendemain, parce que le Samedi, Lavande et Ron cuisinent tous les deux, et s'occupent de leur jardin potager - c'est une idée de Lavande, bien sûr-.
Moi j'en profite pour aller voler à Hyde Park – seul, parce que ni Neville ni Luna ne tient à m'accompagner, et que Dean et Seamus travaillent- et puis je rentre chez moi et m'allonge sur mon canapé.
Personne ne m'attend, personne n'a envie de faire la cuisine ou de jardiner avec moi.
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"Aller à la gare et prendre le premier train qui passe"
Lundi 5 Mars
- Harry, lève-toi, j'ai trouvé une piste pour l'Affaire Cobber !
Je lève les yeux de mes dossiers. Ça fait des mois qu'on piétine avec l'Affaire Cobber, et il me semblait même qu'elle avait été classée dans les affaires non résolues.
- Hein ?
Ron lève les yeux au ciel -je rêve ou il est en train de manger un bonbon ? - et me lance mon manteau. Neville me jette un regard interrogateur et j'hausse les épaules.
On est quatre dans ce bureau : Ron, Neville, Lisa Turpin et moi. Quand on est en "grande équipe", on travaille tous les quatre, mais quand on est en binômes, c'est Ron et moi, et Lisa et Neville. C'est le chef qui a décidé ça, mais ça nous a bien arrangés, Ron et moi. De toute façon, Lavande n'aurait jamais laissé son Ron-Ron travailler avec une fille.
- Allez, dépêche-toi ! Le chef est déjà au courant.
On sort rapidement du Ministère, à croire que cette piste ne peut pas attendre une seconde de plus.
- Et maintenant, on va où ? Je demande en fronçant les sourcils.
- Maintenant, on va à la King's Cross bien sûr ! Fait mon – ex- meilleur ami en sortant de sa poche un chocogrenouille – il va ponctuer chacune de ses paroles d'un truc à grignoter ?-.
- Euh... OK.
Je ne vois pas trop comment la piste de Ron aurait pu se retrouver à la Gare, mais bon.
On transplane tous les deux dans une ruelle sombre et on se dirige vers l'entrée.
- Alors ? Je demande en regardant autour de moi.
Ron m'adresse un sourire rayonnant et s'exclame :
- Alors maintenant, on prend le premier train qui passe !
Il brandit un bout de papier et me le glisse sous le nez. C'est une copie de la fameuse liste que je pensais -espérais- qu'il avait oubliée.
- Quoi ? Je fais en fronçant le nez. Mais ta piste...
- Il n'y a pas de piste ! J'ai raconté des bobards au chef. On n'aura qu'à dire que j'ai eu une fausse information. Allez, Harry, on a une liste de rêves à accomplir !
- T'es malade ou quoi ? T'as menti au chef ?
- Ben quoi ? Harry Potter, le type qui a tué Voldemort, a peur de Dawlish ?
Je lui jette un regard furieux.
- Baisse d'un ton, on est entourés de moldu !
Mais Ron ne m'écoute plus. Il est en train de jouer avec les machines qui vendent les billets. On dirait un scientifique en pleine découverte d'une nouvelle espèce.
- Ça suffit, je rentre au Ministère ! Je soupire en tournant les talons.
- Harry ! Attends, Harry !
Il m'attrape le poignet et me jette son regard de licorne innocente - Non, ce n'est pas vraiment une expression sorcière, c'est moi qui l'aie inventée-.
- S'il te plaît, Harry... J'en ai vraiment besoin.
Je soupire lourdement.
Il sait que je vais dire oui. Est-ce que j'ai, une fois dans ma vie, refusé de la suivre dans ses conneries ?
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Le train défile à toute allure.
Je colle mon nez contre la vitre, il fait de la buée.
Ce n'est pas aussi drôle que je l'imaginais à 17 ans, mais c'est quand même amusant.
Ron a vomi dans le train, bien sûr. Sur moi, bien sûr. J'ai dû aller dans les toilettes pour me jeter un récurvite, mais l'odeur ne part pas.
Je ne comprends pas comment un type qui a pris le Poudlard Express pratiquement chaque année depuis ses 11 ans peut-être malade dans un train moldu alors que c'est le même principe, bordel - Même si Ron soutient le contraire-.
J'ai essayé d'acheter de l'eau mais j'ai sorti des gallions, l'autre mégère m'a jeté un regard – comme si j'étais un veracrasse ou quelque chose dans le genre – et j'étais tellement gêné que je lui ai dis de garder la monnaie. J'ai donc payé dix livres pour une foutue bouteille d'eau.
On n'a pas le droit de fumer dans le train, alors que je pense que dans mon petit cerveau de 17 ans, je m'imaginais les cheveux au vent, la clope au bec, le soleil sur les épaules, les écouteurs aux oreilles, dans un train qui m'emmènerait dans un lieu inconnu.
"I am a passenger
And I ride, and I ride"
Le train ralentit. On arrive à Bristol, je ne suis jamais venu ici. C'est beaucoup plus petit que Londres, mais ça a l'air joli.
On transplane pour aller à la mer. " Pas question de remonter dans un véhicule moldu", me fait Ron, plus blanc que jamais.
Il gèle – foutu vent- et il fait un temps de chiotte, mais c'est quand même sympa.
On marche un peu sur le sable, la mer est déchaînée. Le vent fouette mon visage, mes lèvres sont salées.
On finit par en avoir un peu marre et on décide de rebrousser chemin. Au bord de la plage, il y a des petits restaurants. Ron me jette un regard larmoyant. J'hoche la tête, résigné.
On mange un fish and chips et Ron reprend des couleurs.
On parle de choses et d'autres. Le Quidditch. Neville et Luna. Le jardin-potager qui reprend forme après un long hiver. Surtout pas d'Hermione. Surtout pas de Molly, d'Arthur, ou de Fred. Surtout pas Fred.
La règle d'or : Ne jamais parler de Fred.
Ron me sort de mes pensées en buvant bruyamment la fin de son thé.
- Bon, on trouve une pièce ? Fait-il en engloutissant les frites que j'ai laissées sur le côté de mon assiette.
- Pour quoi faire ? Je demande en fronçant les sourcils.
- Regarde la liste, dit-il en souriant.
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" Jouer à pile ou face pour toutes nos décisions jusqu'à ce qu'on arrive au bout de la liste."
Dudley
La première fois que c'est arrivé, Maya avait deux ans. Elle pleurait depuis des heures et je ne savais pas quoi faire.
Je ne savais pas quoi faire, parce que Éva était déjà partie depuis des mois, parce que mes parents n'étaient pas à la maison à ce moment-là, parce que j'avais 21 ans et que je n'étais pas prêt à être père.
Parce que cette petite chose qui pleurait dans mon oreille me fixait de ses grands yeux bleus, parce que je me sentais toujours maladroit quand je la prenais dans mes bras, parce que j'avais peur.
La deuxième fois que c'est arrivé, Maya avait deux ans et demi, et elle jouait avec le neveu du voisin. On était assis à table, on avait laissé les enfants sur une couverture, dans l'herbe. J'ai entendu un grand cri et quand je me suis tourné, le gamin – Kilian, il s'appelait- flottait dans les airs.
Ce jour-là, Maman s'est enfermée dans sa chambre et a pleuré jusqu'au lendemain matin.
Et puis s'est arrivé tant de fois que j'ai arrêté de compter. Papa a crié, tempêté, claqué des portes, Maman a pleuré, supplié, ignoré, mais ça n'a rien changé : Maya était comme Harry.
Elle était différente de nous.
Les incidents bizarres et inexplicables se sont multipliés, comme aujourd'hui, à l'école. Ça aurait été plus facile de la garder à la maison, mais j'ai refusé : Ce n'est pas juste que ma fille ne vive pas une enfance normale, avec des camarades de classe, tout ça parce qu'elle était une... Une sorcière.
Mademoiselle Anderson me jette un regard agacé parce que je contemple les arbres à travers la vitre. Elle n'a pas l'air de comprendre. Je suis déjà au courant que ma fille est spéciale. Pas la peine de raconter la scène en détail.
- Et ainsi que nous avons récupéré Maya, fait l'institutrice de ma fille en fronçant le nez.
Ils ont dû aller la chercher dans un tilleul - le plus haut de toute la cour de récréation-. Cet arbre fait cent fois sa taille. J'esquisse un sourire. Est-ce qu'elle jouera à ce jeu auquel Harry jouait aussi, dans son école ? Celui qui se joue sur des balais volants ? Ma fille, la voltigeuse !
- Mmmm.
- Avez-vous la moindre idée de comment cette enfant s'est retrouvée dans un arbre alors que quelques secondes plus tôt elle avait les deux pieds posés sur le sol ?
J'ai bien une idée, mais si je lui dis, elle va me faire interner. J'hausse les épaules.
Mademoiselle Anderson parle de nouveau mais je ne l'écoute pas. Je pense à Harry. Je sais qu'il est vivant car le Ministre de la Magie en personne nous a envoyé une lettre pour nous dire que la Guerre était finie et que nous pouvions retourner chez nous, mais qu'est-ce qu'il est devenu ? Est-ce qu'il est marié, fiancé ? Est-ce qu'il a des enfants ? Est-ce qu'il est heureux ?
Mademoiselle Anderson finit par se taire et me raccompagne à la porte.
Je monte dans ma voiture, allume la radio et chantonne sur le chemin du retour. Quand j'arrive, Papa n'est pas encore rentré. Il travaille tard en ce moment, parce qu'ils ont reçu une grosse commande. Maman et Maya sont en train de préparer une tarte à la tomate. Mon ventre gargouille.
Maman lève la tête quand j'entre dans la cuisine.
- Maya, chérie, va regarder la télévision pendant que je parle à ton Papa.
Ma fille hoche la tête - elle est tellement sage- et part en trottinant. Maman ferme la porte qui relie la cuisine et le salon et me tend une feuille de papier.
- Il faut que l'on fasse quelque chose, Dudley. Cette petite ne peut plus vivre comme ça. Et... Nous non plus.
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J'ai réécrit cette lettre au moins dix fois, mais au moment de la poster, j'ai envie de faire marche arrière et de la relire pour être sûr qu'elle ne comporte aucune erreur d'orthographe - je n'ai jamais été très fort en anglais- ou que je n'ai rien écris de stupide. Mais maman fronce les sourcils et je m'empresse de la mettre dans la boîte.
- Tu penses qu'il va répondre ? Je demande à voix basse.
Maman se mord la lèvre. On n'a pas parlé de Harry depuis des années. Après la Guerre, j'ai bien essayé de poser quelques questions, mais ça rendait Papa fou, alors j'ai arrêté.
- Je pense, oui. Harry a toujours volé au secours des autres, dit-elle d'une voix égale.
Harry vole très certainement au secours de ceux qui le méritent, oui. Mais qu'en est-il de nous ?
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Harry
- C'est quoi ? Me demande Ron, curieux.
Je penche la tête sur le côté et observe l'enveloppe. C'est indéniablement une enveloppe moldue. Il y a même un timbre dessus.
- J'en sais fichtrement rien. C'est Parvati qui me l'a donné quand je suis arrivé au bureau, il y a cinq minutes, je réponds en ouvrant l'enveloppe.
Ron se penche par dessus mon épaule pour lire. Ça me fait toujours rire quand il fait ça. Ça me rappelle Poudlard.
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"Bonjour Harry,
J'imagine que tu dois te dire que je suis sacrément culotté de t'écrire après toutes ces années.
Surtout pour te demander de l'aide.
Mais je ne savais pas à qui d'autre m'adresser.
Je ne sais même pas si tu liras cette lettre un jour. Maman m'a donné une vieille adresse qu'un des tiens lui a laissée quand nous avons quitté la maison, avant votre Guerre.
Je t'écris parce que ma fille, Maya, est une sorcière. Elle fait de la magie. Aujourd'hui, elle s'est retrouvée dans un arbre sans savoir comment. Elle n'a que quatre ans alors ça ne la perturbe pas vraiment, mais son institutrice était assez énervée, comme tu peux l'imaginer.
Maya grandit et les "incidents" sont de plus en plus fréquents. Un jour, elle me posera des questions.
Je ne sais pas quoi faire pour contenir sa magie. Je ne sais pas quoi lui dire. Je ne connais rien de ton monde et Maman ne veut pas être mêlée à ça.
Je joins à cette lettre mon numéro de téléphone, mon email, mais saches que j'habite toujours chez mes parents donc tu peux aussi me joindre à Privet Drive.
A bientôt j'espère,
Dudley Dursley."
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- Bah ça alors ! S'exclame Ron, me faisant sursauter.
Il me fixe de ses grands yeux bleus et continue :
- T'as pas de nouvelles de ton cousin depuis, quoi, cinq ans ? Six ? Putain, et sa fille est une sorcière ! Ton Oncle doit être tellement furax !
Je pose la lettre sur mon bureau et me sers un verre d'eau. Ron et les autres sorciers utilisent leurs baguettes pour ça, mais faut croire que je suis resté un peu moldu dans ma tête.
- Tu vas l'aider, hein, Harry ? Tu peux pas le lancer dans la bouse de dragon comme ça !
- Je ne sais pas, je réponds avant de boire une gorgée.
- Quoi ! Mais pourquoi ?
- Mon cousin et moi, on ne s'est jamais très bien entendus.
Quel euphémisme. Je ne sais pas si j'ai très envie de les revoir, Tante Pétunia, Oncle Vernon et lui. Je me porte vraiment mieux sans eux.
- Il ne s'agit pas que de lui ! S'écrie Ron, les yeux plus écarquillés que jamais. Maya a quatre ans, t'as pas lu la lettre ?
Je rougis furieusement. Il sous-entend quoi, là ?
Il remarque mon agacement et pose une main sur mon épaule.
- Harry, allez. T'es pas ce genre de personne.
Je cligne des yeux. Il a raison. Je ne suis pas ce genre de personne.
- Tu sais quoi ? On devrait le jouer à pile ou face, dit-il en souriant doucement.
Il sort une pièce de sa poche et continue :
- Pile, tu réponds à sa lettre. Face, tu n'y réponds pas et on oublie tout. Ok ?
- Ok.
Il lance la pièce et la rattrape, puis la retourne vivement.
- Pile ! S'écrie t-il en souriant.
o
Neville m'écoute en hochant lentement la tête. Une fois de plus, je me dis que j'ai de la chance de travailler avec lui, parce qu'en plus d'être un bon Auror, il est vraiment gentil.
- Ron m'a dit qu'il avait entendu dire qu'après la Guerre, Kingsley avait créé un poste exprès pour l'insertion des sorciers nés-moldus, je termine en triturant nerveusement ma robe de fonction.
C'est quelque chose que Hermione aurait su. Moi, j'ai dû en entendre parler, et oublier immédiatement après.
- Oui, c'est vrai. C'est moi qui suis responsable du suivi des dossiers. Je m'assure que tout est en règle, tout ça. Tu veux prendre contact avec la personne responsable de la branche insertion ?
- Oui, s'il te plaît.
Neville esquisse un sourire bizarre. Il fouille dans son bureau et me tend un parchemin quelques secondes plus tard.
- J'aimerais bien être une petite souris pour voir la tête qu'il fera quand il te verra, dit-il, toujours en souriant.
Hein ? Qui ça, il ? De quoi il parle ?
Ron se penche de nouveau par dessus mon épaule et siffle.
- Bah dis donc, Harry ! T'as vraiment pas de chance, vieux !
Je baisse les yeux sur le parchemin et esquisse une grimace.
Responsable de l'intégration des sorciers nés moldus :
Par décision du Magenmagot - Le 10 Juin 1999
Draco Lucius Malfoy.
A suivre
