... PUDEUR ...

& V I C E

...

Il se passionnait pour Narcisse; il s'engonçait dans son désintérêt, il boxait du peroxydé, il haïssait la banalité. Ses trois futurs gosses porteraient des prénoms douteux, il ferait le tour du monde et inventerait le dragon congelé - il se ferait cryognéniser. Non, vraiment, qui avait eu l'idée de le reléguer au second plan?

« - Hey.

- Dégage.

- Tu fais quoi ?

- Barre-toi.

- Snape n'est pas avec toi ? Etrange.

- … Tu l'aura voulu Rowle.

- Mais suis-je bête ? Il doit courir après la Eva- »

D'un geste brusque, il agrippe le serdaigle par le col de sa robe sort sa baguette. Trop rageur pour lui offrir un sourire vicieux, trop impatient de lui briser son masque impassible pour perdre son temps en paroles superflues. Deux jours que cet imbécile venait l'aborder – sous prétexte de banalités il lui tournait sans cesse autour. Pire qu'un putain de niffleur; il avait connu le bleu et argent plus intelligent.

« - Tu pensais vraiment que j'allais te laisser m'emmerder indéfiniment, sale sang-de-bourbe ?

- … Je suis un sang-mêlé.

- Pareil. Aussi attardé qu'eux. »

Naïf. Ce ne serait ni la première, ni la dernière fois qu'il risquerait le renvoi pour avoir à moitié crevé un élève de Poudlard. Il s'était jusqu'alors contenté d'échanger des insultes avec le blond; mais celui-ci cherchait apparemment à passer au niveau supérieur. Qui était-il pour le lui refuser ? Il ne retiendrait pas ses sorts – il ne s'était jamais donné la peine de maîtriser ses pulsions meurtrières.

« - Crucio. »

Tout en lançant le sort, Rabastan relâche sa Némésis, la laissant retomber; qu'il se tortille de douleur au sol, il ne s'épuiserait pas à le retenir. Que ses cris ameutent toute la bibliothèque l'importait bien peu. Il s'en sortirait, comme toujours... Les Malfoy n'étaient pas les seuls à avoir fait de la vénalité une véritable tradition familiale. Sifflotant, il range ses affaires de quelques coups de baguette, grimaçant d'avance aux sons stridents produits par la veracrasse blonde à terre... Avant de s'apercevoir qu'il n'avait pas émit un son, en dehors d'un léger ricanement. Etrange. Aurait-il plus de volonté qu'il eut cru ? Dommage; il n'aurait pas craché sur quelques suppliques de la part de Rowle. L'éventualité que son sort ait raté sa cible ne lui effleure même pas l'esprit, tout plongé qu'il est dans son égocentrisme.

Son sac sur l'épaule, toujours cette agaçante mélodie l'accompagnant, il se dirige vers la sortie; Mme. Pince lui lance un regard réprobateur. Trop de bruit ? Non, pas assez – pour avoir la conscience tranquille, il se décide à jeter un dernier regard en direction de sa victime.

« - Qu'est-ce que... »

Il s'est assit à la place que Rabastan occupait précédemment, un sourire narquois se peignant sur ses lèvres; le crucio qu'il avait subit n'avait pas l'air de l'avoir dérangé outre-mesure. Le serpentard avait toujours su que ce crétin possédait un petit coté masochiste.

« - Je l'avais prévu.

- Si tu le voulais tant que ça, il suffisait de me demander Rowle.

- J'ai calculé les chances que j'avais de recevoir un sort de magie noire...

- Mais je te dis que-

- Et je me suis protégé en conséquence. »

Toujours souriant, il sort une petite sphère noire de sa poche et la met en évidence sur la table. L'enfoiré. Et un bon coup de poing dans sa gueule, ça marcherait ?

« - … Et tu peux l'éviter, celle-là ? »

Aussitôt pensé, aussitôt fait; l'intelligence était bien la seule chose que ce peroxydé avait pour lui. Un craquement sinistre se fait entendre – barbouiller sa sale gueule de sang aura été jouissif pour Rabastan. A son tour souriant, il recule pour contempler son œuvre, évitant au passage la riposte pitoyable de son adversaire. Ce con pourrait lui sortir toutes les stratégies possibles et imaginables pour contrer ses sorts, il restait toujours aussi faible physiquement. En temps normal, utiliser une technique de combat typiquement moldue l'aurait rebuté... Mais tout était bon pour faire souffrir Thorfinn Rowle.

« - Tsk. Quelle bassesse... »

Le cadet Lestranges hausse un sourcil, l'air de dire : Où est le problème ? Je t'ai cassé ta sale gueule, et c'est bien le plus important. L'angle étrange que prend le nez de Rowle semble juste là pour confirmer sa victoire sorts ou poings, quelle était la différence face au serdaigle ? Tant qu'il pouvait le faire souffrir, et en retirer le maximum de plaisir. Il le cherchait – il n'avait plus qu'à regretter. Lui qui aimait s'élever au rang de grand intellectuel, ou encore de Picasso, ses obscurs artistes moldus : eh bien voilà, il en était devenu un, de Picasso ! Malheureusement, il ne pourrait immortaliser l'instant... Note : Toujours prendre un appareil photo avec soi, dorénavant. Sait-on jamais – et dix ans plus tard, il rouvrirait l'album de ses années bonheur avec un sourire nostalgique, un ou deux gosses sur les genoux, agrémentant tel ou tel cliché d'anecdotes : « J'avais quinze ans. Serpentard avait gagné la coupe des quatre maisons... » « C'est quoi ce tas bizarre à tes pieds papa ? » « Oh, pas grand-chose... Quelqu'un qui ne mérite pas d'être nommé. » « Il ressemble au vieux monsieur dans la rue en bas de chez nous ! » « Ce n'est qu'un sang-de-bourbe sans importance : ne perds pas ton temps à lui prêter attention, Cassandre. »

Parce que oui, il en aurait, une Cassandre. Ainsi qu'une Pandore, et qu'un Aristophane... Rabastan s'était toujours passionné pour l'histoire, en particulier pour tout ce qui touchait à la Grèce antique. Dans sa logique, il était donc impensable que ses enfants portent des prénom aussi banals que « Charlus », « James », ou encore « Harry »... Il était pratiquement sûr que le prochain rejeton Potter porterait un nom dans ce goût-là. Peut-être pas Harry, mais il y verrait bien un Harold, dans cette famille totalement dépourvue d'originalité... Son frère méprisait la famille de gryffondor pour son amour inconditionnel des moldus; eh bien lui voyait surtout leur banalité affligeante. Et peut-être leur inspiration moldue. Il y en avait des tonnes, de James, chez les moldus... Lui de toute façon, n'avait jamais aimé l'héritier Potter. Comme les trois quart de sa maison, en vérité. Même Rowle, le neutre par excellence, l'abhorrait ! Pour une fois que les deux se rejoignaient sur un point. Trop arrogant, et parallèlement plus idiot que le pire des blaireaux. Sans parler de sa chevelure... Il n'avait vraiment rien pour lui. Il l'aurait presque plaint. Presque.

« - Espèce d'arriéré, lui glisse Rowle à l'oreille avant de partir en courant vers l'infirmerie – dans l'espoir que l'autre brute ne l'aie pas défiguré à vire.

- De qu- »

Et ce qui devait arriver arriva. Plongé dans ses pensées, Rabastan avait oublié jusqu'à l'existence de la petite sphère posée sur la table – pourtant, il aurait du se méfier, avec le temps. Il avait beau cracher sur les origines de Thorfinn, on ne pouvait que lui concéder l'extraordinaire intelligence de son père, langue-de-plomb renommée. Et se mettre sur ses gardes face aux petits objets que son héritier sortait de ses poches... De belles saloperies, et c'était peu dire. Et aujourd'hui, son machin encaissait pour ensuite exploser à la gueule de son destinataire...

Génial – je vais encore passer ma soirée avec l'autre harpie, fut la dernière pensée du serpentard avant de se recevoir le contenu brumeux de la sphère en plein visage.

...

« - Sale gosse... Plus inconscient que Black et Potter réunis...

- PARDON ? »

Et voilà. Retour à la case départ. Invariablement, Rabastan finissait toujours ses journées, ses soirées, voire parfois ses week-end enfermé dans une pièce plus blanche que blanche, prisonnier d'un amas de draps de seconde main, assaillit olfactivement par les effluves nauséabondes de quelques potions entreposées dans la réserve personnelle de l'infirmière. Et parlons-en, de l'infirmière ! Un véritable monstre. Aux grosses mains boudinées; sa coiffure rappelait vaguement les finitions bâclées d'un Comète 102. Et sa poitrine... Mordred, sa poitrine ! Devait-elle leur infliger son semblant de coquetterie avec ses odieux décolletés ? Deux bouts de chaire flasques, pendants ou ballottant au fil de ses mouvements. Mais on pouvait bien le lui pardonner, pour ses magnifiques yeux verts, tout droit sortis d'une forêt de jade. Oui, ils pouvaient être magnifiques – quand elle ne vous fusillait pas du regard, ou ne vous gueulait pas d'insultes à damner un sang-de-bourbe (le cadet Lestranges les avait toujours trouvé immensément vulgaires...). De plus, allez savoir pourquoi, Mademoiselle -elle avait l'audace de se dire demoiselle!- Jones (horriblement banal, comme nom.) avait pris Rabastan en grippe depuis leur première rencontre. D'après Rodolphus, ce laideron avait jadis essayé de séduire leur père, pour s'imposer dans le cercle très fermé des vieilles familles sang-pur. Ainsi qu'Abraxas Malfoy, et tout le gratin... Elle pouvait bien haïr toute la maison serpentard, si l'on commençait par-là. Presque dix ans qu'elle persécutait les vert-et-argent, et ce putain de Dumbledore parvenait toujours à la sauver des griffes du conseil d'administration. Si il n'y avait pas là ségrégation ! Il était bien beau, le tolérant directeur, à laisser cette rageuse et ses propos discriminatoires s'imposer dans l'établissement.

« - Enfin réveillé, Monsieur Lestranges ? Je vous pensais bien plus résistant... Un simple grimoire, croyez-vous ?!

- Mais de qu-

- Je le pensais également, mademoiselle. »

Bien sûr. Rabastan avait presque oublié Rowle -malheur!- allongé dans un lit avoisinant le sien. Cette saleté n'avait déjà plus que quelques traces de sang séché sur le visage. Et lui, eh bien... Momifié dans diverses sortes de bandages. C'était bien dans le genre de l'autre, de lui rallonger sa convalescence. Pouvait-on rêver de plus charmante compagnie ?

« - Qu'es-

- De quidditch, en plus ! Il est bien beau, « l'un des poursuiveurs les plus doués de Poudlard » ! Incapable de rattraper un livre au vol...

- En vérité, il tentait au même moment de me lancer un sort. Le livre lui a explosé au visage... Un cousin du Monstrueux Livre des Monstres, paraît-il.

- Mais c'est tragique !

- J'vous le fait pas di-

- Attaquer ainsi un pauvre camarade sans défense ! Je m'assurerais que cet incident ne se reproduise plus, Mr. Lestranges... J'irais contacter votre directeur de maison tout à l'heure.

- Il vous dit des co-

- Quant à vous, Monsieur Rowle, votre courage sera récompensé. Peu d'élèves osent parler sous la menace comme vous le faites !

- …

- Je n'ai fais que mon devoir, Mademoiselle Jones. Je parle au nom de tous les autres élèves ces persécutions n'ont que trop duré. »

Une fois de plus, Rabastan se retrouvait totalement désoeuvré devant le talent d'acteur de sa Némésis, et la nette tendance de l'infirmière à croire n'importe quelle histoire sortant de la bouche de son ennemi déclaré. Surtout lorsqu'elle jouait contre sa faveur. Trois ans qu'il se l'était mise dans la poche, la harpie. On prend les mêmes, et on recommence ! Chaque passage à l'infirmerie se terminait invariablement de la même façon :

« - MAIS TU VAS ENFIN ME LAISSER EN PLACER UNE VIEILLE SALOPE ? »

Toutes ces années ne lui avaient décidément rien appris.

Et il avait fallut que Mcgonagall passe justement par-là. Un air choqué de circonstance de la part de Jones, une exclamation outrée de Rowle et le tour était joué. Moins cinquante points pour serpentard. Ce foutu blond et sa complice avaient toujours eu une nette tendance à faire ressortir le côté le moins noble de sa personnalité. La simple vue de la sale gueule -voilà qu'il recommençait!- de Rowle suffisait à le rendre vulgaire, à la limite de l'indécence. Ah, si Mère l'entendait... Elle le jetterait à Dumstrang pour le remettre dans le « Droit chemin », tiens ! « Rabastan, on ne s'abaisse pas à insulter les sang-de-bourbe ! L'ignorance est le meilleur des mépris ! » savait-elle que ce dicton était d'origine moldue ? Sûrement pas; elle en hurlerait.

Bon; ne restait plus qu'à se recomposer un masque correct, s'enlever tout ce paquetage humiliant qui le recouvrait de la tête aux pieds, partir dignement cette fois-ci, et se venger la semaine d'après. Il n'y pouvait rien; on le cherchait.

« - Monsieur Lestranges, nous n'avons pas fini de-

- C'est bon, c'est bon gardez votre salive pour vous, Crackity. »

Il en serait presque dégoûté – donner un si beau prénom à une telle femme ! Elle aurait dû s'appeler Kate, ou encore Mary. C'est simple, Kate. C'est banal, Mary. Tout comme elle. Il lui lance un dernier regard dédaigneux avant de quitter la pièce, d'un pas royal.

...

« - 'Stan ? Qu'est-ce qu'il t'es encore arrivé ?

- Bof. Explosion. »

Comme si c'était normal – mais ça l'est sûrement, chez lui.

« - Alors, comme ça on va se battre à la moldu avec... Un sang-de-bourbe ? »

A peine si il ne pouvait pas l'entendre, son sourire méprisant.

« - Sang-mêlé, sang-mêlé. »

Parce qu'il aurait pu chanter les louanges de sa Némésis, si cela aurait suffit à déstabiliser Bellatrix. Pas qu'il ne l'aime pas mais ces temps-ci, elle avait tendance à se faire légèrement plus hautaine qu'à l'habitude. Et à ses côtés, Rodolphus grinçait des dents – lui connaissait parfaitement les raisons de la... « Joie » de sa fiancée. Passée dans les draps de l'autre, là. D'après la vieille grand-mère Rosalia, ce fameux Lord Voldedouleur – ou Voldevie?- s'appelait en vérité Tom. Tom ! Il y en avait des milliers rien qu'à Londres ! Pas étonnant qu'il se soit pris cet extravagant pseudonyme. Un simple Tom ne devrait pas avoir plus d'ambition que celle de devenir barman.

Les deux commençaient déjà à se disputer – la courte absence de Rabastan était passée inaperçue. D'ailleurs, sa présence même semblait leur être passée par-dessus la tête. Charmant. Pas étonnant que depuis quelque jours la moitié des vert-et-argent les fuyaient... Tiens, Bellatrix avait sorti sa baguette. Boucherie en perspective.

Il ne s'y attarda pas, aux côtés de ce charmant couple, préférant, une fois de plus, passer son chemin. Ce n'était pas comme si ils déploreraient son départ.

« - HEY Lestranges ! »

La plupart du temps, lorsque Rabastan entendait son nom, son premier réflexe n'était pas de se retourner, mais bien de tendre l'oreille; après tout, ils étaient deux, dans cette école. D'ailleurs, il suffisait souvent d'attendre quelques secondes pour constater que c'était bien son frère aîné qu'on appelait, et non pas lui; une surprise ? Pas vraiment, il s'y était toujours habitué.

« - Putain t'es bouché ou quoi ? Allez viens, le capitaine nous attend pour l'entraînement !

- C'est bon, c'est bon. Pas besoin de me crier dessus non plus Flint. »

Et quelques fois, il pouvait se dire qu'il n'était pas qu'une tête parmi tant d'autres, et qu'il en restait tout de même un ou deux pour faire la différence entre lui et Rodolphus. Rabastan, juste Rabastan.

Il y en avait bien un, pour remarquer ce petit brun perdu dans la masse, qui passait la moitié de son temps à l'infirmerie, et qui une fois ressorti courait agripper la robe d'un grand blond de serdaigle pour lui hurler tout un chapelet d'insultes au visage. Ou deux, pour plaindre ses futurs enfants : Andromaque, Perséphone et Romulus. Leurs prénoms changeaient tous les deux jours mais n'en déplaise à Rabastan, il donnerait à ses enfants de « beaux prénoms chargés d'histoire ». Parce qu'il devrait bien ça à Morphée, Styx et Narcisse. Quelques uns, peut-être, pour froncer le nez en découvrant ce bâtonnet moldu qu'il porte parfois à sa bouche en secret. Mais il restait tellement pour se dire en haussant les épaules : Bah, juste une jolie déco' sans importance.


Parce que Rabastan aussi, il a une vie de merde. \ô

Nouvelle fantaisie de ma part. Avis, questions, suggestions, critiques? Le petit bouton "review" vous tend les bras. JE VEUX PLEINS D'AVIIIS.

Note: Donc donc, comme j'ai rien mis en haut, j'le met en bas. J'trouvais que ça le faisais pas en haut... 'Fin bref quoi. Rythme de publication: irrégulier, donc. Passke j'ai aussi MoM et Replay (ouii il va arriver le prochain chapitre!) derrière. J'essaye de m'avancer dans MoM en ce moment. Et de réfléchir plus sérieusement au synopsis de Replay; sinon ça va partir dans tous les sens. Et en attendant. Y'A CA. Ohohohoh. Alors, alors, alors?

Scalandre, your maid.