Joyeux anniversaire Nin' ! Et bonne chance, bon courage pour ton année de khâgne ! :D
Ils se faisaient face. Ils se regardaient dans les yeux.
Le petit homme malingre, minuscule, bien droit, fier, les yeux brillants.
Le géant de glace, immense, majestueux, comme définitif.
Ils se faisaient face et se taisaient. Pas besoin de mots pour communiquer. Presqu'aucun son. Si ce n'était la chanson répétitive des grillons et, çà et là, le cri aigu d'un animal terrorisé. Et le souffle rapide du petit homme malingre et minuscule.
Bob avait toujours été fasciné par les jeux de lumière sur la glace et la neige, la cristallisation de chaque rayon de soleil sur ces surfaces lisses et écorchées. Ici, maintenant, en face de ce géant figé, faussement hostile, il pouvait contempler tout son soûl le jeu des photons qui se mêlaient aux flocons, des pieds à la tête, en passant par l'immense barbe ciselée.
Il soupira de bonheur. Et tourna son regard vers la garde rapprochée du géant de glace, elle aussi immobile. Les lances pointées vers le ciel étaient beaucoup plus menaçantes. Noires, effilées et acérées, tourmentées… Il fit une grimace un peu gênée et retourna à la contemplation de son géant.
Le monstre titanesque était resté muet. Et devait le rester toujours. Mais Bob s'en fichait éperdument. Il lui parlait, il le savait. Son regard noir, son regard de pierre lui déployait devant les yeux la saga de ses ancêtres titans, son établissement dans la vallée sur laquelle il régnait, ses exploits et ceux des pauvres hommes qui avaient voulu l'abattre, le conquérir. Il racontait ses victoires, ses forces, ses peurs, le temps qui passe.
Et ses gardiens, ses gardiennes semblaient hocher la tête, approuver son récit, ajouter des anecdotes violentes et sanglantes et glacées. Mortelles, nostalgiques. Les glaces qui avaient fini par les emprisonner les avaient mis à la merci des hommes vengeurs qui, dans leur conquête, avaient eu l'affront de les renommer, en guise de victoire.
Mais les hommes continuaient de les craindre. Et dans l'escalade de la peur, avaient fini par s'y attacher. Très étranges, ces hommes. Affolés par le géant de neige et ses golems de pierre, mêmes figés par les glaces du temps, et pourtant toujours fascinés par eux, parfois même amoureux de leur beauté sauvage et folle. Terrorisés, mais toujours plus attirés.
Toi aussi, n'est-ce pas ? lui demanda le titan.
Bob étendit les bras, comme pour l'étreindre, comme pour l'enlacer. Il l'aima. Si fort, qu'il en eut les larmes aux yeux. Si fort, qu'il en oublia la douleur de ses doigts rougis par l'effort et de ses pieds gonflés par la chaleur et la crispation.
« Eh oh ! Tu fous quoi, là ? »
Bob jeta un coup d'œil en bas. En dessous de lui, cramponné à la corde, Théo l'assurait depuis déjà un bon moment.
« Sérieux, qu'est-ce que tu fous ? Décide-toi, tu montes ou tu descends, mais arrête de contempler le paysage ! T'auras toute la journée pour le faire !
- Théo ?
- Quoi, bordel ?
- Je suis tombé amoureux. »
Il regarda une dernière fois le Mont Blanc immense et majestueux et sa cohorte d'Aiguilles acérées, et passa les deux mains dans son baudrier.
« Tu peux me descendre. »
Théo agrippa la corde et commença de la dévider adroitement. Bob détourna la tête de la vallée de Chamonix avec regret et désescalada la paroi de pierres.
Voilà voilà ! J'espère que ce petit UA t'a plu ahah !
