Ma raison de guérir

Le marché

« On le perds ! On le perds ! ».

« Je sais ! Taisez vous donc ! ».

« Docteur… Son cœur a cessé de battre… ».

Le jeune docteur sembla réfléchir un instant, avant de déclarer : « Notez l'heure du décès. Merci de t'occuper du reste, Marianne ».

« Je t'en prie, Yuu ».

'Yuu' sortit de la salle d'opération, une moue énervée sur ses traits fins. L'opération à cœur ouvert s'était mal déroulée, ou plutôt mal finie. Le patient avait mal réagi.

Tant pis. Pourquoi Yuu s'en voudrait-il ? Ce n'était pas de sa faute.

Il rentra dans son bureau, régla deux-trois affaires rapidement.

Pourquoi être devenu médecin, n'est ce pas ? Si seulement il savait.

Mais peut-être était-ce à cause de son grand-père, qui lui avait conté tant de fois ses exploits de médecins, après la Guerre Mondiale. Mais peut-être était aussi à cause de son cœur. Parce que derrière ses airs de blasé, il y avait quelqu'un de beau. Le tout était de trouver, bien sur.

Ou peut-être était-ce à cause du fait que ses parents étaient morts plus tôt que lui. Ce n'était pas logique, pas normal. Il avait aimé ses parents, comme la plupart des gens, mais étrangement maintenant, tous les futurs parents qu'il croisait le rebutait. Ou peut-être était ce de la peur.

Comme cette Marianne, cette belle jeune fille. Elle avait son age, ils entraient tout les deux dans la trentaine. Lorsqu'ils parlaient, il voyait ces mains sur son ventre, ou une légère bosse pointait son nez. Elle était enceinte. Elle aimait son bébé comme elle aimait la vie. Elle ne le connaissait pas encore, n'avait pas encore choisi son nom, mais elle l'aimait. C'était son bébé, à elle et à cet homme qu'il avait croisé une fois. C'est tout.

Mais pourquoi avoir un enfant ? Elle entendait aussi bien que Yuu les cris des patientes dans le service accouchement. Parfois la péridurale n'était pas accordée, ou pas possible. L'enfance du gosse serait éprouvante, et c'était une épreuve pour n'importe quel couple. A l'adolescence, il serait pire qu'une pompe à fric, et dirait « ta gueule » à ses parents pour vingt euros, histoire de s'acheter un truc à la sortie de midi. Parce que c'était « cool » d'avoir de l'argent, c'était « cool » de désobéir. Adulte, il s'écraserait lamentablement au sol, en réalisant de quoi la vie était faite.

Ca devait être comme ça.

Il compléta la dernière fiche de son dossier avant de repartir chez lui. Dans son appartement rue de La Loi*. Encore une fois seul, pas accompagné.

Qui voudrait de lui, en même temps ?

~x~o~x~o~x~o~x~

Kanda consultait son agenda de la journée. Consultation, consultation, opération, pause, entre autres.

Dieu que c'était excitant d'être médecin…

Quelqu'un frappa à la porte, Yuu fit remarquer que c'était ouvert.

« Je viens pour une consultation, qui a lieu à neuf heure » dit le nouveau venu.

Yuu leva un œil à sa montre. Vingt minutes d'attente. C'était parfaitement acceptable.

« Asseyez-vous. Exposez moi votre problème » dit machinalement Kanda, arrangeant son bureau, histoire de paraître rangé et professionnel.

« Dernièrement, je me suis pris un coup, au niveau de la poitrine. Etrangement j'ai perdu ma respiration pendant une seconde ou deux » expliqua le patient, tâtant son cœur en parlant.

« Hmm… Je vois. Excusez moi, mais pourrais-je avoir votre nom ? Histoire de savoir à qui je dois adresser la facture » fit remarquer Yuu, un sourire moqueur aux lèvres, en relevant la tête vers l'inconnu.

C'était un jeune homme, peut-être vingt-cinq ans. Ses cheveux étaient d'un blanc étrange, sûrement une coloration. Mais pourquoi paraître plus vieux… ? Enfin. Ses traits étaient aussi fins que les siens et ses grands yeux argentés captivaient le regard. De corps, il était mince, voir tendance maigre. Il n'était pas loin de la perfection, si seulement il n'avait pas eut cette… coupure en dessous de l'œil gauche. Un original sûrement.

« Je suis allen Walker. A-L-L-E-N » précisa t-il, en voyant le médecin hausser un sourcil à l'orthographe de son prénom. Il sourit gentiment.

« Vous etes sûrement anglais… Les anglais sont originaux » murmura Yuu, regardant plus attentivement le jeune homme devant lui.

« Pardon ? » dit Allen, n'ayant pas bien entendu.

« Oh rien » répliqua Kanda. Il tourna ensuite une page, remplit un formulaire et le donna à son patient. « J'ai une idée de ce que vous avez, mais il me serait nécessaire d'avoir plus de précision. Des scanners répondraient à mes questions. Mais toujours, je vais vous donner mon numéro de téléphone, au cas ou vous auriez cette 'pause de respiration' plus longtemps. Mais laissez moi vous auscultez un peu ».

Tandis que le medecin faisait son travail, Allen se demandait mille et une choses.

« Est-ce grave ? » s'inquiéta le blanc de cheveux.

« Je ne sais pas encore très bien » répliqua l'homme, haussant les sourcils en soupirant. Il tendit la feuille au plus jeune : « Allez prendre rendez-vous au service des scanners. C'est à droite, en sortant de cette pièce. Mon numéro est sur la feuille que vous gardez. N'ayez pas peur d'appeler ».

« Merci beaucoup. C'est fort gentil de votre part ».

« C'est mon boulot, ne vous inquiétez pas. Au revoir, monsieur Walker ».

« Au revoir docteur » fit le plus jeune, sortant de la pièce.

L'homme resta dans la pièce encore quelques heures, avant de rentrer chez lui. Ce soir, il avait rendez-vous avec Lavi, son compagnon. Un spécial comme on en faisait plus.

Il gara sa voiture dans le parking, en face de son agréable maison. Il s'habilla rapidement, prenant une douche au passage.

A huit heures, il alla ouvrir à l'homme qui se trouvait devant sa porte.

« Bonjour Yuu » dit le rouquin.

« Entre donc ».

A peine eut-il le temps de fermer la porte, qu'il se retrouva dessus, coincé entre le bout de bois et le corps de Lavi.

Le rouquin plongea furieusement vers les lèvres de son aîné, en en profitant pour ouvrir de ces mains habiles la chemise de Yuu. Ce dernier lâcha un soupir de plaisir en sentant les mains de son amant sur son torse. Il remonta sa main droite jusqu'aux cheveux du plus jeune, afin de l'attirer à lui.

Kanda le dirigea jusqu'à la chambre, n'oubliant pas de fermer la porte.

Lavi était toujours aussi impatient.

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Il se souvint toujours de cet appel à huit heures et demie, quand il allait partir au travail. Quelqu'un l'appela sur son téléphone. A cette heure-ci, normalement personne ne devait l'appeler, sauf parfois Marianne, pour lui rappeler un rendez-vous. Mais il n'en avait pas oublié.

Il décrocha.

« Allo ? Docteur Kanda à l'appareil » fit-il, à son oreillette.

« Docteur… Je… » murmura une voix faible.

« Si c'est un blague, un téléphone rose, ce n'est pas amusant ».

« Docteur… C'est Allen… Walker ».

« Oh. Que se passe-t-il ? » questionna l'homme.

« Je n'arrive plus… à bien respirer… ».

« Ou habitez vous ? » demanda le japonais.

Le jeune homme lui donna son adresse, qu'il s'empressa de marquer dans son gps. Vingt minutes plus tard, il était arrivé. Il frappa à la porte, mais une voix lui dit que c'était ouvert.

'Quel imprudent' pensa le docteur.

« Je suis… ici » dit Allen, appelant son aîné de la chambre.

Le plus age rejoint son patient.

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« Vous devriez venir chez moi » proposa le docteur.

« …Pardon ?! » hoqueta le plus jeune, ratant un battement de cœur.

« Vous avez bien ce que je pense. Vous etes jeune, ce serait dommage de vous perdre. Vous ne savez pas comment réagir. Et puis… C'est vide chez moi. Vous savez cuisiner ? ».

« Euh… Je me débrouille comme un bon célibataire… » répondit Allen, arquant un sourcil.

« Bienvenue chez moi alors… ».

« Je… Merci » articula le patient.

Un drôle de sourire s'étira sur ses lèvres, que le médecin remarqua bien vite.

« Hm ? » soupira-t-il, se retournant afin de prendre son manteau.

« Vous etes un médecin…spécial ? ».

« Ca ne vous plait pas ? D'accord… ».

Le plus jeune l'interrompit : « Non non ! C'est de l'étonnement ! ».

« Je suis médecin. Vous etes mon patient, et ça me sembles un peu plus grave que je ne le croyais. Je vous voies mal à l'hôpital, vous amuser avec les pauvres gosses » expliqua clairement l'homme. « Vous venez ? ».

« Oui ! ».

Il ferma la porte.

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« Vous avez une belle voiture ».

« Vous etes idiot… ».

L'autre sursauta à cette réponse : « Je vous fait un compliment sur votre voiture, et vous me dites que je suis idiot ! Pourrais-je savoir pourquoi ? ».

« Parce que c'est idiot. Je ne dis rien, et vous, vous ne voyez pas quoi dire pour relâcher la pression. Je n'en vois pas l'intérêt. Je n'éprouve pas le besoin de parler, si vous voulez savoir pourquoi. Du temps perdu ».

Le plus jeune le fixa avec étonnement : « Comment… ? ».

« J'ai deviné ? Vos doigts. Vous vous les triturez. C'est ce qu'on fait quand on est nerveux ».

« Je… Bien ».

« Vous etes un livre, à mes yeux. Votre visage est comme une page, j'arrive à y lire des choses. Tellement de choses, de trop… ».

Il prit une respiration, longue et douloureuse.

« Là, vous vous demandez ce que vous avez. Vos sourcils le montrent. Avant vous vous demandiez ou mettre votre main ». Il changea d'ailleurs la sienne pour conduire. « Et là vous vous demandez sur qui vous etes tombé. 'Un psychopathe, peut-être ? Non, il ne serait pas médecin…'. Ce que vous etes prévisible » finit le médecin. Il sourit.

« Vous n'allez pas me tuer au moins ? » questionna le plus jeune, se rapprochant de la portière.

« En sautant de la portière, à cent kilomètres heure, vous pourriez réussir. Et non, je suis médecin. Mon but c'est de les sauver ».

« J'ai déjà vu des médecins tuer ».

« Dans des émissions, dans le genre Experts A Miami. Malheureusement ce n'est pas vrai… ».

« Malheureusement ? » releva Allen, curieux.

« Je ne touche pas autant qu'eux, je crois » expliqua Yuu, très sérieux.

« Vous ne pensez qu'à l'argent… ? ».

« Si je ne pensais qu'à l'argent, je serai directeur, pas médecin ».

« Vous m'énervez » fit Allen, subitement, après un petit moment de silence.

« Pourquoi ? J'aurai été rapide » ironisa le plus age.

« Vous agissez comme… comme si vous saviez tout. Comme si vous aviez tout vécu, tout deviné. J'ai l'impression que vous jouez avec moi ».

« Peut-être aies-je vécu des choses que vous n'avez pas vécu… » expliqua le médecin.

« A mon avis… Quand je vous vois, je ne vois pas l'homme que j'avais vu dans le bureau. Fort et solitaire. Je vois quelqu'un qui a besoin d'aide ».

« Vous vous trompez » répondit Yuu, tournant à gauche.

« Prouvez le moi. Personne ne parle comme ça par envie. Et pourquoi pouvez vous lire en moi ? Parce que quelqu'un a sûrement déjà lu en vous » continua Allen.

« Taisez-vous ».

« Vous voyez, j'ai raison. Vous avez besoin d'aide, je le vois. C'est pour ça qu'on s'est rencontré » finit le plus jeune.

« Vous avez la foi vous… Vous n'etes qu'un patient, et moi un docteur. Vous m'énervez comme le monde entier m'énerve. Je vous en veux, comme j'en veux au monde entier, ça vous va ? Taisez-vous donc, vous qui ne savez rien. Vous qui croyez que Dieu, ou quelque chose comme ça aurait voulu notre rencontre, afin de me sauver » expliqua, en crachant presque ses mots, Yuu. « Je n'ai pas besoin d'être sauvé ».

« … Pourquoi refusez-vous… ? ».

« Vous avez deux ans de retard. Deux ans. C'est peu dans une vie, mais trop dans la mienne. Vous espérez quoi ? » demanda l'homme aux cheveux de jais.

« Vous aider… ».

« Vous mentez. Vous ne dites que des mensonges, des phrases idiotes sans queue ni tête qui n'ont qu'un but : M'embrouiller. Et vous espérez que je marcherai… ». Il tourna à droite, se tut, quelques secondes. « L'espoir est bon pour les faibles. Ceux qui ne passent pas à l'acte, qui attendent, attendent, que quelqu'un vienne changer quelque chose. Leur vie sûrement. Ca a peut-être été votre cas, et vous voulez jeté votre 'positive attitude' sur moi. L'espoir n'a pas sa place dans ma vie. Moi je me base sur des faits, des choses qui se sont passés et arriveront. L'espoir c'est se tuer à petit feu ».

« Vous etes si triste… ».

Allen leva la main vers le visage du plus vieux, et caressa la joue.

« Arrêtez ça… ».

« Faisons un pacte, d'accord… ? ».

« Je vous écoute ».

La main d'Allen se retira, puis vint se poser sur la main libre du conducteur.

« Je vais vous sauver. En échange, sauvez moi de ma maladie, enfin de ce que j'ai. D'accord ? » prononça calmement le plus jeune, un sourire merveilleux aux lèvres.

Yuu le regarda attentivement, détaillant son visage rapidement.

« Ca ne sera pas si facile » répondit-il, finalement.

« Vous parlez de moi ou de vous ? » questionna le plus jeune.

Il ne répondit pas.

« Faisons un effort… ».

Kanda le regarda avec intérêt le visage d'Allen. Il étudia la commissure de ses lèvres, comment elles formées. Son nez, fin, ses yeux, grands et d'une beauté cristalline.

Il sourit rapidement pour dire qu'il acceptait.

« Merci… Merci » fit Allen, se recalant sur son siège.

Un long moment de silence suivit cet échange. Mais ils n'avaient pas besoin de parler.

« Je vais vous déposer à l'hôpital, devant l'entrée. Je vous rejoindrai quelques minutes plus tard, après avoir garé ma voiture. Je vous prendrai un rendez-vous urgent » expliqua le docteur.

« Je… Merci ! » fit le plus jeune, étonné par cette initiative.

« Plus vite je saurai ce que vous avez, plus vite je pourrai vous ramener chez vous » plaisanta le plus âgé, entrant dans le parking de l'hôpital.

« Vous mentez… ».

« Qui sait… ». Il étira ses lèvres dans un sourire, mais Allen ne le vit pas.

« Et puis, mon 'chez moi' maintenant, c'est plutôt 'chez nous' ! ».

« 'Chez nous'… » répéta Yuu.

« Oui… Oh, arrêtez vous ! Il faut que je sorte ici, c'est plus rapide pour rentrer ! ».

Il s'arrêta.

« A tantôt ! » fit le plus jeune, clapant la porte.

« Oui… ».

-END-

Je tiens à dire que je m'excuse, de un, je n'ai toujours pas fini Endlessly, et de deux, j'ai abandonné Kanda psychologue :(. Excusez moi, mais je n'avais pas le courage…

J'espère que ça vous plaira, n'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez !