Titre CES OMBRES QUI HANTENT NOS CŒUR

Auteur Maveck

Genre Sérieux, yaoi.

Résumé Tout ne c'est pas terminé lors de l'affrontement entre Fuma et Kamui à la tour de Tokyo. Il reste encore des ombres qui troublent les cœurs.

Voici ma première longue fic, tellement longue que j'espère que vous aurez le courage d'aller au bout. J'attends vos reviews avec impatience. N'hésitez pas à critiquer ou à dire si vous aimez. Bonne lecture.

Première Partie. L'ombre de Seïshiro.

Incapable de faire un geste de plus, je regarde, vaincu par la fatalité, Kamui et Fuma qui s'affrontent pour la dernière fois.

Je suis triste pour Kamui. J'ai vu dans ses yeux qu'il avait compris comment ramener Fuma et surtout ce que cela signifiait pour lui.

Cette cruelle injustice, qui ne fait que se répéter, va permettre aux humains de survivre à cette guerre.

Kamui va l'emporter et y laisser la vie.

Mais cela sauvera t-il vraiment Fuma ?

J'en doute. Comme la prédit la Princesse Hinoto, il va se rappeler de tout et réaliser l'horreur de ses actes.

Peut-on vivre avec un fardeau pareil ? Je pense que non à moins de ne pas avoir de cœur ou des nerfs d'acier.

Accablé de tristesse, j'assiste au coup d'épée qui blesse mortellement Kamui.

J'admire le courage de celui qui a su arriver jusqu'à mon cœur que je croyais définitivement mort avec Seï.

Face à son destin, il délivre son souhait à un Fuma qui a déjà compris que la terre n'aurait pas sa révolution.

Et tout se met en place. Un kekkai immense, dans un flash de lumière, recouvre la terre.

N'ayant plus aucune raison de continuer à lutter, je perds connaissance tandis que des larmes coulent le long de mes joues.

Je reprends mes esprits dans le monde des rêves en présence de Kakyo. Un peu perdu de me retrouver là, j'ai l'impression désagréable que le yuméni des dragons de la terre va encore exiger quelque chose de moi.

Le futur a changé, il n'est plus écrit. Et le Kamui des dragons du ciel n'est pas encore mort.

Il n'est pas mort ?

Abasourdi, je répète cette phrase qui signifie tellement de choses.

Qu'est ce que cela veut dire ? Le combat n'est pas fini ?

Quand sous l'influence d'Hokuto, votre chère sœur, je suis venu vous chercher pour aider Kamui, j'ai pour la première fois, réussit le miracle de modifier le futur. Peut-être aurais-je pu faire plus si j'avais essayé avant ? Toujours est-il que Kamui gît entre la vie et la mort. Il a une chance de s'en sortir. Qu'allez-vous faire ?

Que puisse je réellement faire ? Je trouve que la question est bonne. Kamui mérite que je sois présent à ses côtés pour l'aider mais il reste tellement de ténèbres autour moi. Comment échapper au poids du passé ?

J'ai besoin d'en savoir plus, aussi je me risque à questionner Kakyo d'une manière plus précise.

Le combat a-t-il pris fin ?

Oui, la guerre des sceaux et des anges est terminée. Mais comme je vois plus le futur, j'ignore si d'autres dangers menacent les dragons survivants.

Qu'est-il advenu de Fuma ?

Il est vivant. Je ne sais que ça.

Je vois.

Finalement, Kakyo ne sait pas grand-chose de plus que moi. Je suis seul et pourtant je dois faire un choix. N'ayant plus vraiment de souhait, il me semble difficile de trouver mon chemin en admettant que j'ai encore un futur.

Kakyo…pourquoi avoir souhaité me parler ?

Pour Kotori, je lui avais promis de faire mon possible pour les deux Kamui.

Il me fixe soudain avec insistance, le regard suppliant.

N'abandonnez pas Kamui, il détient la clé de bien des trésors. Tout peut arrivé maintenant.

Je trouve son propos un peu mystérieux mais soudain le décor s'estompe et Kakyo disparaît.

Un peu vaseux, j'ouvre les yeux. Je suis dans une des chambres du manoir. Je suis seul.

La brutale disparition du yumeni m'a laissé une impression étrange. Ce jeune homme au visage si triste dégage une réelle souffrance. Avant, j'aurais été capable de lui venir en aide.

Mais aujourd'hui, tout est différent. J'avance sans regarder où je vais et s'en m'attacher aux êtres. Je ne ressens plus rien sauf pour un jeune adolescent aux yeux améthyste.

Kamui…il me faut vérifier les propos de Kakyo. Je dois savoir enfin de pouvoir prendre une décision.

Avec peine, je me lève. Je ne suis pas très en forme, mon corps est douloureux mais j'ai vu bien pire.

Je m'habille en évitant d'écouter la souffrance et je quitte la chambre pour me rendre après de Kamui.

Assis dans la chambre où il repose, je tente d'analyser la situation.

Durant ces dernières heures, plusieurs événements importants ont eu lieu.

Arashi nous a annoncé son départ pour le mont Koya après nous avoir présenté ses excuses pour avoir voulu tuer Kamui. Elle veut connaître l'univers de celui qu'elle aime et dont elle attend un enfant.

Je peux la comprendre mais pour être honnête, son sort ne m'intéresse pas.

Yuzuriha attend que Kuzanagi se rétablisse pour retourner avec Inuki chez sa grand-mère. Elle était folle de joie de savoir que j'avais pu aider Kamui jusqu'au bout et qu'il n'était pas mort.

Elle me fait un peu penser à moi quand j'étais encore capable de me réjouir de ces petits bonheurs de la vie.

Mais même si je suis content pour elle, elle n'a aucune place dans mon monde, c'est juste une adolescente que je connais.

Le seul pour qui je m'inquiète vraiment depuis l'intervention d'Hokuto, c'est Kamui.

Les médecins ne sont pas capables de dire s'il va vivre. On ne peut que attendre et espérer. Il est dans un profond coma et ses blessures sont très graves.

Je sais que je ne peux rien faire dans l'immédiat pour l'aider mais je n'arrive pas à le quitter. Je suis incapable de prendre une décision et je n'ose explorer le fond de mon cœur. Ce qui y vit est trop douloureux, trop récent pour que je puisse y faire face.

Alors je reste là à attendre. Je vis au rythme des soins que l'on procure à Kamui. L'esprit vide, je me refuse à penser que j'ai des responsabilités en tant que chef de clan et que je suis responsable aussi de l'héritage de l'homme que j'aime.

Je ne veux pas voir la réalité et pour le moment c'est tout ce qui importe avec Kamui.

Les jours passent et j'attends. Je n'arrive pas à me sentir en vie. L'état de Kamui est stable. Comme moi, il est entre deux mondes. Nul ne sait où le temps qui s'écoule le conduit.

Je trouve qu'il a l'air de souffrir, son visage n'est pas serein. Il émane de lui une impression de lutte. Essaie t-il de rester en vie ?

Alors que l'idée de plonger dans son cœur m'effleure l'esprit, la porte de la chambre s'ouvre.

L'un des proches du directeur du Campus entre et me tend une lettre.

C'est arrivé aujourd'hui. Elle vous est adressé Subaru-san.

Merci.

Je laisse partir le jeune homme avant d'ouvrir la lettre. Elle provient de ma grand-mère. Je m'y attendais un peu. Je la lis.

« Subaru, cela fait maintenant trois semaines que je n'ai plus aucune nouvelle de vous. Je sais que vous êtes encore sous le choc des derniers événements. Mais je vous aime et je m'inquiète. Donnez moi de quoi être rassuré. Il ne me reste que vous. Pouvez vous comprendre cela ? …»

Je ne termine pas ma lecture. Je ne veux pas savoir la suite. Je remets la lettre dans son enveloppe et la glisse dans une de mes poches.

Je connais les sentiments de ma grand-mère. Mais je suis responsable de son état. C'est à cause de ma faiblesse si elle se déplace en fauteuil roulant.

Je ne peux me pardonner d'avoir ce jour-là briser sa vie, de la même façon que je me reprocherais toujours la mort de ma sœur.

Je ne suis pas digne de me présenter devant elle, encore moins maintenant que je suis le dépositaire du Cerisier.

Comment pourrais-je la regarder en face ? J'ai commis les pires crimes dont elle a toujours voulu me protéger. Je suis souillé jusqu'au plus profond de mon âme.

Comment pouvez-vous penser une telle chose, Subaru, mon enfant ?

Paniqué, surpris, je fixe honteusement la personne qui vient d'entrer dans la chambre. Je n'ai rien entendu et pour cause, ce qui m'entoure n'arrive pas à percer les frontières de mon monde.

Reprenant du mieux que je peux le contrôle de moi-même, je me lève et m'incline devant ma grand-mère.

Subaru…je suis venue car il est temps que nous parlions vous et moi. Cela fait trop longtemps que je reporte cette discussion. Avez-vous lu ma lettre ?

Je …non, pas en entier.

Ma présence vous surprends –elle ?

Oui, un peu.

Cela vous parait si bizarre que je vienne vous voir ? Et bien sachez que j'aurais du le faire avant.

Le ton de ma grand-mère a changé. Je vois dans ces yeux une lueur qui m'averti que cette fois, il n'y aura pas d'échappatoire possible.

Par respect pour Kamui, je l'invite à continuer cette conversation dans un des nombreux salons du manoir.

Je prends place en face d'elle sur un fauteuil avec une certaine gêne.

Subaru…Vous avez l'air épuisé.

Je vais bien.

Ne pourrions nous cesser de nous mentir ?

Mais….je….

Subaru, j'ai réfléchi durant toutes ces années. Tout ce qui est arrivé n'est pas ma faute, ni la votre. C'est l'absence de communication le véritable problème.

Cette phrase éclaire soudain mon opinion sous un autre angle. Je sais que ma grand-mère a raison. Le silence tue tous les jours des innocents. Mais pourquoi perdons nous de vue une chose aussi importante ? Cette question, Fuma nous l'a posé à plusieurs reprises sans que personne ne puisse y apporter la réponse.

Subaru, pouvez vous être honnête envers vous-même pour une fois ?

Je l'ignore.

Et pourquoi ne pas essayer ?

Je laisse échapper un soupir. Puis sachant que de toute façon la vérité finira par se savoir, j'acquiesce en silence, prêt à prendre le risque de perdre à jamais l'amour de ma grand-mère.

Bien…alors comment vous portez vous mon enfant ?

Je crois que je suis épuisé mais c'est à cause du souci que je me fais pour Kamui.

En disant ces quelques mots, je découvre qu'en effet ma fatigue est réelle et bien d'origine morale. Je n'y avais pas pensé auparavant, refusant obstinément d'écouter mon corps.

Comment va-t-il ?

Il est dans un profond coma. Il faut attendre.

Il a l'air d'être important à vos yeux. Je m'en réjouis. Vous êtes si renfermé depuis que votre sœur nous a quitté. Avez vous réalisé votre souhait à son sujet ?

La question fatidique vient de tomber. Je ne l'attendais pas si vite. Avec une certaine peur, je me lance à l'assaut du problème de ma vie.

Non. Je…son assassin est mort mais je…ne l'ai pas tué.

Les mots ne viennent pas. Ils sont comme prisonniers à l'intérieur de moi. Je tente de franchir le mur qui les sépare de ma voix sans m'apercevoir que je suis devenu pâle et que j'ai fermé les yeux pour ne plus voir le regard de ma grand-mère braqué sur moi.

Malgré mes efforts, rien ne vient. Le sujet est trop intime, trop douloureux. Jamais je ne pourrais vaincre l'ombre de Seïshiro.

Je suis désolé mais je ne peux vous en dire mieux.

J'ai repris mon calme mais seulement en apparence car je viens encore une fois de perdre la bataille face à moi-même.

Et cela me pèse. Pourrais je un jour me confier sur ce que je ressens, sur ma colère et sur ma peine ? L'émotion me submerge d'un coup. Il est temps que je mette fin à cet entretien avant que ma carapace ne craque.

Subaru, je suis désolé.

Grand-mère, il faut que je retourne auprès de Kamui. Pouvons nous reprendre plus tard ?

Bien sûr.

Je vais demander une chambre pour vous.

Merci, mon enfant.

Je me lève, m'incline et quitte la pièce, soulagé d'avoir échapper à cette épreuve. Je sais que le pire reste à venir mais dans ma solitude, le chagrin devient presque mon ami.

Expédiant au plus vite les formalités pour le logement de ma grand-mère, je me refuse à rejoindre Kamui et je me réfugie dans ma chambre.

Allongé sur mon lit, je laisse pour une fois, la peine qui s'échappe de mon cœur s'exprimait. En silence, des larmes ruissellent sur mes joues.

Je n'aurai pas cru que ma grand-mère un jour me dirait ça et qu'elle se déplacerait pour me le dire.

Et je ne pensais pas que le simple fait de mentionner Seïshiro ferait ressortir une souffrance toujours aussi forte et violente.

Pourtant j'arrive à vivre normalement. Comme tout le monde, je fais ce que j'ai à faire et même si j'ignore où je vais, il me semble que nul n'a réellement conscience de ce qui se passe au fond de mon cœur. Personne, pas même moi.

Dans ces conditions que puisse je faire à part attendre ? Peut-être que le destin m'enverra un signe afin de me guider.

Ma réflexion a détourné ma peine et malgré la douleur qui brûle encore, je m'aperçois qu'il faut que je m'occupe l'esprit. Ainsi je ne penserais plus à ce vide horrible.

Déterminé à agir ainsi, je retourne voir Kamui et au passage, j'emporte un livre. Cela ne fait pas parti de mes occupations habituelles mais je suis un peu limité par rapport à l'état de mon protégé.

Je passe le restant de la journée à lire. Mon esprit ne pense à rien et je me surprends même à rire des mésaventures du héros. C'est un bon moyen d'oublier. Mais cela ne me sauvera pas de l'entretien de ma grand-mère.

Et c'est sans enthousiasme que je la rejoins après avoir soupé seul dans la chambre de Kamui.

Vous êtes venu. J'avais un peu peur que refusiez de poursuivre.

Je cherche une réponse mais rien ne vient. Mon esprit étant plutôt indécis.

Tandis que ma grand-mère me dévisage, je souhaite soudain qu'il se passe quelque chose, n'importe quoi mais que je puisse fuir.

Subaru…et maintenant, quels sont vos projets ?

Mes projets ?

Le mot « projet » me rappelle que le Cerisier finira bien par se manifester et que je ne peux être à la fois le chef des Sumeragi et le Sakurazukamori.

Je n'ai pas de projets. J'attends que Kamui se rétablisse.

Oui mais quand il sortira du coma, il aura besoin de vous. Comment ferez vous à ce moment là ?

Comment je ferais quoi ?

Ma grand-mère parait soudain très triste comme si elle ….

Vous savez ?

Le doute venant de m'envahir, je lâche la question que je redoutais de sa part.

Oui. Subaru, je ne suis pas bête. Vous êtes la dernière proie du Cerisier en vie et vous étiez avec cet homme quand il est mort donc vous êtes le nouveau gardien du Cerisier.

Bizarrement, ce simple constat me met en colère. Une colère étrange qui semble si violente et qui est dirigé contre moi.

Je comprends alors que je me déteste et que je me rends responsable de ça aussi. Bref, je suis dans le même état qu'après la mort d'Hokuto.

Avais je déjà oublier ma peine de cette époque là pour ne pas avoir réaliser avant que je ressentais les mêmes choses ?

Subaru…ça va ?

Non. Mais je vous remercie, vous venez de m'aider à comprendre quelque chose d'extrêmement important. Je vous laisse car il faut que je réfléchisse à tout ça.

Comme vous voulez. Bonne nuit, mon enfant.

Bonne nuit…et désolé pour ce que je suis devenu.

Je sors sans attendre de réponse. Je ne veux pas qu'on ait pitié de mon destin.

De retour auprès de Kamui, je fais le point sur ma situation. C'est de ma faute si tout ça est arrivé, tout ayant commencé le jour où j'ai désobéi à ma grand-mère qui m'avait demandé d'attendre son retour. Et moi, j'ai préféré suivre cette étrange énergie devenant ainsi le témoin gênant d'un meurtre et par la même la proie du Sakurazukamori.

Maintenant c'est moi le Sakurazukamori. Enfin en théorie car j'aurais plutôt envie de laisser le Cerisier crever de faim pour le restant de l'éternité. Non pas que je me refuse à tuer car certaines personnes ne méritent vraiment pas d'être en vie, mais ce n'est pas à moi de rendre ce genre de justice.

Moi, je veux savoir pourquoi rester en vie alors que ceux que j'aime sont morts.

Que se passera t-il si Kamui venait à décéder ? Aurais je la force d'envisager un futur ou sombrerais-je à nouveau dans le néant ?

Et si Kamui se réveille, comment l'aider à surmonter sa propre peine alors que je suis perdu ?

Tout cela me paraît d'un compliqué. Pourtant, il faut que je prenne une décision. Je soupire. Et si la réponse était là devant moi.

Kamui ! C'est pour lui que je suis revenu la dernière fois, parce que je ne veux pas qu'il endure la même chose que moi en étant tout seul.

Donc pour lui, je dois réagir car il va sortir du coma un jour et à ce moment là, il aura besoin de moi.

Maintenant, que faire pour Le Cerisier et mon travail ?

Honnêtement, cela fait déjà très longtemps que mon travail ne m'apporte plus rien, ni satisfaction, ni plaisir.

Mais là encore, je sais que ce n'est pas pour moi que j'œuvre. Je dois aider les gens à retrouver la sérénité.

Pour Kamui, pour mes clients….et le Cerisier, pour qui dois-je le faire ?

Seï a toujours su que j'étais trop gentil pour tuer de sang froid une personne. Je pourrais lui prouver le contraire juste parce que c'est comme ça que l'homme a tendance à réagir.

Mais il n'en est pas question. Je vais m'occuper du Cerisier pour moi car on ne peut pas vivre si on n'a pas un peu d'égoïsme en soi.

Cela je l'ai appris à mes dépens moi le gentil et naïf Subaru qui croyais que seuls les autres comptaient dans ce monde.

Ma décision étant prise, je me sens un peu mieux. J'avertirais ma grand-mère dès demain que je reprendrais mon travail dès que j'aurais trouvé un moyen d'obtenir du Cerisier que cesse cet immonde bain de sang dans lequel ses racines plongent depuis si longtemps.

Pour cela je vais devoir laisser Kamui. Ce sera dur mais c'est aussi pour lui que je le fais. Et puis, j'ai confiance en lui, il attendra que je sois prêt pour enfin revenir parmi nous.

C'est peut être prétentieux d'affirmer une chose pareille, mais à mes yeux ça ne fait aucun doute, tout va se dérouler ainsi.

Je m'endors auprès de celui qui dorénavant me fourni une raison de vivre.

Le lendemain, après une nuit d'un profond sommeil, le premier depuis longtemps, je profite de la présence du personnel soignant auprès de Kamui pour rejoindre ma grand-mère.

Je la trouve dehors dans le parc du Campus en train d'admirer les parterre de fleurs avec le directeur.

Bonjour Subaru San.

Bonjour, mon enfant.

Bonjour.

J'expliquais à votre grand-mère que ces plantes làpréféraient un sol humide et frais. Mais je vais devoir vous laisser car j'ai une réunion et si j'arrive en retard Suô et Akira vont me tomber dessus. A bientôt.

Sur un salut, le directeur s'éclipse et nous laisse en tête à tête.

J'aborde directement le sujet car maintenant, je veux au plus vite accomplir toutes les tâches que je me suis fixé.

J'ai réfléchi, je veux continuer à représenter le Clan Sumeragi. Mais j'ai des conditions à vous soumettre. Si elles vous conviennent alors je reprendrai mon travail.

Je vous écoute.

Je veux encore une semaine avant de reprendre car j'ai des choses à faire.

Au sujet de Kamui ?

Non…du Cerisier.

Subaru….

Je veux que vous me laissiez m'occuper de l'héritage qui m'a été transmis.

Seulement si vous me faites une promesse.

Laquelle ?

Promettez moi de renoncer avant de vous trahir au point de perdre de vue l'importance de la vie. Subaru….même si vivre représente une lutte de chaque instant, nul n'a le droit d'en disposer pour vous.

Je suis d'accord avec vous et le Cerisier ne disposera pas de la mienne à sa guise. N'ayez crainte, je ne compte pas devenir un assassin.

J'ignore si vous pourrez échapper à cet arbre mais je vous laisse le soin d'en juger par vous-même.

Merci. J'aimerais aussi ne plus effectuer que deux missions maximum par jour et jamais de nuit. Je veux avoir un peu de liberté pour Kamui.

Ce garçon compte vraiment beaucoup pour vous. J'accepte. Mais j'ai aussi une condition.

Surpris, je la regarde un peu inquiet. Je ne m'attendais pas à devoir faire moi aussi des concessions.

Je veux que vous cessiez de voir en moins quelqu'un d'autoritaire qui dirige votre travail. Je suis vieille et je suis votre grand-mère. Je veux trouver le chemin de votre cœur Subaru car je suis fière de vous et que je vous aime de tout mon cœur.

Ces paroles brisent la rigidité de cette conversation. Instinctivement, je m'agenouille devant ma grand-mère et les larmes aux yeux je la serre contre moi.

Promis…grand-mère.

Nous restons là, enlacés, durant de longues minutes. Je me sens comme un enfant perdu qui vient enfin de rentrer chez lui. Je ressens le besoin d'aller jusqu'au bout de cet échange alors doucement, à voix basse, je livre mon plus gros secret car je veux créer un lien entre elle et moi.

Vous savez, je suis tombé amoureux de Seïshiro et malgré tout ce qui a suivi, je n'ai cessé de l'aimer. Je lui avais pardonné la mort d'Hokuto car c'est moi qui ai poussé ma sœur à cet acte. Lui, il n'a fait qu'exaucer son souhait. Et aujourd'hui, je l'aime toujours.

Subaru, j'aurais voulu vous épargnez toute cette souffrance mais il semble que l'amour ne soit pas compatible avec notre clan. Mon mari était un homme bien tout du moins jusqu'à ce que je m'aperçoive de son côté sombre. Il avait des amantes avec lesquelles il était violent. J'ai du prendre des mesures qui ont causé la perte de notre couple. Il m'a quitté et est mort peu de temps après, victime des ses mauvais penchants. Vos parents n'ont pas eu plus de chance. Votre père a laissé votre mère trop tôt, victime de la maladie qui l'a emporté et elle l'a rejointe en vous mettant en monde Hokuto et vous. Quand à votre sœur, elle n'a pas eu le temps deconnaître l'amour et vous, vous l'avez découvert en même temps que la trahison et la mort. Oui, l'amour n'est vraiment pas notre point fort.

Etes vous déçu que je sois tomber amoureux d'un homme et d'un assassin ?

Non, cela ne regarde que votre cœur. On ne choisis pas la personne qui nous ai destiné, c'est elle qui nous prend au piège et sauf si les sentiments sont identiques, on devient esclave de l'amour. Vous n'avez aucun reproche à vous faire. Maintenant que cet homme est mort, essayez de garder de lui que les bons moments qu'il vous a donné. Les erreurs du passé doivent vous permettre d'avancer, elles ne sont pas là pour nous tourmenter. Elles font partie de la vie. Rien n'est jamais blanc ou noir et le Yin et le Yang ne peuvent exister l'un sans l'autre.

Oui, grand-mère. Merci.

Bien, et si nous allions déjeuner ensemble dans cette cafétéria dont m'a parlé le directeur.

Vous êtes sûre ?

Oui, j'ai toujours enviée la liberté que je vous ai donnée en vous laissant prendre un appartement à votre sœur et à vous.

Subaru, laissez moi goûter à ce petit plaisir avant que je rentre à Kyoto.

D'accord, mais je ne suis pas responsable de ce qui pourrait arriver.

N'ayez crainte jeune homme, je supporterais seule le poidsde mes pêchés.

Après avoir mangé, je laisse ma grand-mère prendre un peu de repos et je rejoins Kamui. Il n'est pas seul, Akira, un des proches du directeur du campus, lui tient compagnie en feuilletant un livre de cuisine.

Bonjour Subaru San.

Bonjour. Rien de nouveau ?

Non, je vais vous laissez.

Restez….il faut que je vous parle.

A moi ?

Oui, vous ferez part de ma décision aux autres.

Bien, je vous écoute.

Je vais m'absenter pendant une semaine et même si je sais que vous allez continuer à veiller sur Kamui, j'aimerais que vous m'appeliez au cas où. J'aimerais avoir de ses nouvelles.

Il n'y a pas de problème, vous pouvez nous faire confiance. Je vais avertir Nokoru et Suô.

Merci.

Une fois seul, je m'assois près de Kamui et je prends sa main dans les miennes.

Tu sais, il vient de m'arriver un truc démentiel. Ma grand-mère m'a payé un repas à la cafétéria du Campus. J'ai beaucoup aimé ce moment. On a parlé comme si il n'y avait pas d'ombres entre nous. C'était rafraîchissant de se laisser aller et depuis que je lui ai avoué la vérité pour Seïshiro, je me sens mieux. Je vais devoir te laisser durant quelques jours. Je n'ai pas le choix. Je veux être capable de t'aider à ton réveil. Et pour ça, je dois résoudre mon destin en tant que Sakurazukamori. Ne te fais pas de souci, tout ira bien. Seïshiro m'a dit qu'il m'aimait quand il est mort. Même si son dernier cadeau est un horrible arbre assoiffé de sang, je sais qu'il me connaissait par cœur. Il savait que jamais je ne pourrais être comme lui. Je ne tuerai point. Je te demande juste d'attendre mon retour avant de te réveiller. Je t'aime Kamui.

Ces derniers mots sont sortis tous seuls. Mais ils ne me choquent pas. Ce que je ressens pour Kamui est bien réel, il est mon ami, mon protégé et je le considère comme mon petit frère.

C'est pour ça que même si je pars, je veux qu'il sache que je ne l'oublie pas.

Alors je me sers d'un sort pour créer une sphère renfermant un peu de mon aura et je la glisse à l'intérieur de la peluche que lui a laissé Yuzuriha avant de partir.

Puis après un dernier regard, je quitte la pièce. Je me rends dans ma chambre pour faire mes bagages.

Dans un premier temps, je vais raccompagner ma grand- mère à Kyoto puis après je partirais à l'assaut du Cerisier.

La nuit va bientôt tombée quand je prends place dans la voiture aux côtés de ma grand-mère.

C'est gentil à vous Subaru de me raccompagner.

Cela me fait plaisir et puis ma présence fera taire les mauvaises langues.

Ne soyez pas si dur Subaru. Le clan a besoin d'avoir un chef à sa tête et ils veulent pouvoir compter sur lui.

Peut être. Mais certaines de nos traditions sont totalement dépassées par la vie réelle et puis que va devenir le clan si jamais je meurs.

Vous voulez dire sans laisser une descendance ?

Je ne pense pas pouvoir tenir ce rôle là en effet.

Ce n'est pas grave. Le plus puissant de nos membres sera élu comme le quatorzième chef mais nous n'en sommes pasencore là. Personne ne vous demande d'avoir un héritier à l'heure actuelle et surtout pas moi.

Tant mieux car j'ai d'autres envies.

Subaru…soyez gentil et détendez vous. Après tout, je crois pouvoir vous apportez un peu d'aide au sujet du Cerisier.

Comment cela ?

Je sais où se trouve la demeure ancestrale des Sakurazukamori.

Mais le Cerisier est au parc Ueno.

Non, c'est seulement une porte qui donne sur son véritable lieu de résidence. La demeure ancestrale des Sakurazukamori se trouve à Kyoto.

Mais comment le savez vous ?

Je l'ai toujours su comme tous les chefs des Sumeragi avant moi. Mais je n'ai pas pu vous le révéler, pas après que vous soyez devenu sa proie. J'avais trop peur pour vous et puis apprendre ce genre de détails vous aurez inciter à vous jeter dans la gueule du loup or on ne revient pas vivant d'un endroitpareil.

Vous n'aviez pas confiance ?

Honnêtement, ais je eu tort ?

Je m'accorde quelques instants de réflexion avant de répondre. Cela aurait il vraiment changer quelque chose de connaître le lieu où vivait Seï ? La réponse est non. Face à Seï, même au bout d'un siècle, j'aurais perdu, encore et toujours à cause de mes sentiments. Et puis à une époque, mon souhait était de périr de sa main. Si j'avais su où le trouver, je n'aurais peut être jamais entendu ces derniers mots et je ne saurai peut être pas devenu la personne la plus chère à son cœur.

Vous n'avez pas eu tort.

Alors laissez moi vous conter l'histoire des Sumeragi et des Sakurazukamori. Il y a plus de quatre mille ans, une puissante famille pratiquait la magie du Yin et du Yang. Ces deux pouvoirs étaient parfaitement équilibrés dans ce clan. Ils savaient mettre à profit le côté sombre et le côté lumineux de chaque être vivant, hommes, animaux et végétaux confondus. Ils étaient vraiment très forts et cela inspirait lapeur chez eux qui faisaient appel à leurs services. Cette peur s'amplifia avec les siècles au point que certains décidèrent de mettre un terme à une telle puissance. Mais pour arriver à leur fin, ces gens n'avaient qu'une arme, attiser et provoquer un conflit interne dans le clan. Ils échouèrent de nombreuses fois puis ils finirent par y arriver provoquant une guerre entre les deux frères héritiers. Cette guerre s'envenima et dégénéra suffisamment pour provoquer la séparation du Yin et du Yang. Ainsi naquit le clan Sumeragi et le clan Sakurazukamori. Et depuis notre histoire à de nombreuses fois croisée la route de ce clan d'assassins.

Et la demeure, où est elle ?

Dans la montagne, proche de Kyoto. Je vous y ferais conduire.

Personne n'a essayé de rassembler les deux clans ?

Si, des tas de fois mais nous sommes tous allés trop loin dans le blanc et le noir. Nous avons oublié que seul le gris existe sur cette terre. Alors toutes les tentatives ont échoués.

Et l'histoire du Cerisier, vous la connaissez ?

Non, pas vraiment. Mais vous trouverez certainement des réponses chez les Sakurazukamori.

Oui, certainement.

La voiture se gare devant la maison familiale après avoir franchi l'imposant portail du domaine des Sumeragi. Revenir ici me rappelle toute mon enfance, tous les jeux qu' Hokuto inventait pour me détourner de mon apprentissage, et tous ces fous rires propres aux enfants heureux.

Ma grand-mère m'accompagne elle-même jusqu'à une chambre et après m'avoir souhaité une bonne nuit, elle me laisse.

Je suis épuisé et je m'endors sans même prendre la peine de me déshabiller.

Quand je me réveille, il fait déjà jour depuis longtemps. J'ai un message d'Akira sur mon portable. Il m'assure que Kamui va aussi bien que possible. Cette nouvelle me rassure un peu par rapport à tout ce que je m'apprête à faire.

Il est trop tard pour penser à déjeuner, alors je décide d'aller faire un tour avant de rejoindre ma grand-mère pour le déjeuner de midi.

L'endroit n'a pas changé, tout est toujours pareil comme si le temps n'avait pas de prise sur ce lieu. Des demeures traditionnelles aux murs de bois et aux panneaux de papier sont dispersées dans un immense parc où la végétation occupe une large place.

Mes pas me conduisent à l'endroit qui nous servait de terrain de jeux à Hokuto et moi. Touché par l'ironie du sort, je contemple ce lieu nommé le Clos des Cerisiers.

Entouré par une barrière naturelle de bambous, l'espace herbeux sur lequel pousse des cerisiers aux troncs noueux n'a pas changé lui non plus.

Hokuto adorait venir ici. Elle pouvait y passer des heures. Penser à tous ces souvenirs me rend nostalgique. Je quitte ce lieu pour aller me changer dans ma chambre.

Je mets un habit traditionnel pour montrer à tous que malgré mon absence et mes disparitions, je reste avant tout un Sumeragi.

Vêtu de mon kimono de cérémonie, je retrouve ma grand-mère et les autres membres de la famille dans l'habituelle salle des banquets.

Prêt à assumer mon rang, je donne le change de mon mieux durant le repas. Je m'en sors avec les honneurs et les yeux brillants de fierté de ma grand-mère m'aident beaucoup.

Puis une fois le repas terminé, je rejoins ma grand-mère dans son salon privé. Assis à même le sol, je la laisse m'offrir une tasse de thé.

Je vous remercie Subaru d'avoir tenu votre rang. Si vous le souhaitez toujours, mon chauffeur est prêt à vous conduire chez le clan Sakurazukamori.

Pourquoi le clan de ses assassins se compose t-il que d'une personne en vérité ?

Je pense que cela est du à leur politique et puis je ne suis pas sûr que l'arrivée du Cerisier n'est pas aidé cet état de choses.

Ça se peut en effet. Je partirais dans une heure. Avant j'aimerais aller avec vous me recueillir sur la tombe d'Hokuto.

Avec plaisir.

Je conduis ma grand-mère à travers les allées de sable jusqu'à un kiosque funéraire. Là repose mes parents et ma sœur. Je prie plus par habitude que par désir. Il y a longtemps que je considère ma sœur autrement que par le biais d'une tombe.

Nous rentrons en silence à la demeure principale où un homme m'attend. C'est le chauffeur. Je récupère mes affaires et pour la première fois depuis longtemps, je me permets d'embrasser ma grand-mère pour la remercier et pour lui dire au revoir.

Soyez prudent Subaru.

Je repasserais vous voir avant de retourner auprès de Kamui. Merci pour tout.

Précédé par le chaufeur et le cœur un peu serré par l'angoisse, je monte dans la limousine.

J'ignore ce qu'il va se passer mais je sais déjà que cela risque de changer ma vie à jamais. Pourvu que je sois assez fort et que Kamui n'est pas à souffrir de mes choix.

La limousine, après une heure de route, s'engage dans un chemin de terre qui se termine par un sentier tortueux entre de vieux arbres aux troncs noueux.

Nous sommes arrivés Sumeragi San. C'est ici que je devais vous conduire.

Merci. Dites à ma grand-mère que tout ira bien.

Oui. Au revoir Sumeragi San.

Mon sac à la main, j'attends que la limousine ait disparue pour m'engager dans le sentier.

L'air est doux et le soleil de l'après midi caresse agréablement ma peau. Le décor est beau, d'une beauté sauvage qui me séduit au fur et à mesure que je m'enfonce dans ce couloir végétal.

Le sentier se termine par un mur de végétation dont émane une forte aura d'ancienne magie. Cette barrière naturelle est impressionnante par sa taille et par sa complexité.

Sachant fort bien que forcer le passage ne servirait à rien, je m'avance et d'un geste, je m'entaille un doigt. Quelques gouttes de sang tombe sur les feuilles du mur. Je récite un sort de protection pour parer à une éventuelle agression.

Le temps se fige l'espace d'un instant puis le mur s'ouvre dans une douce lueur dorée. Un passage apparaît et je m'engouffre à l'intérieur sans écouter la peur qui me noue le ventre.

Un domaine de proportion réduite par rapport à l'immensité de celui de mon clan se dévoile lentement à mes yeux.

Le jardin est composé de multiples variétés d'arbustes d'ornement qui se marient avec des parterres de fleurs. Le tout se perd au milieu de multiples bassins d'eau, d'allées de sables et de murets de pierres.

Hormis le fait que cet endroit est la demeure où je perdrais peut être mon âme, je trouve qu'il est splendide. Le calme et la paix règne dans cet havre de nature.

Guidé par une force mystérieuse, je prends l'allée principale et j'arrive devant l'arbre maudit.

Le Cerisier est encore plus impressionnant ici. Son aura meurtrière est dense et étouffante. Son tronc est immense, sombre et ses branches couvertes d'un manteau de fleurs. Ses pétales volent en répandant un parfum de sang.

Une montée de dégoût m'étreint et je lutte pour ne pas vomir tellement l'odeur de mort est forte.

Le Cerisier semble me toiser avec un mépris profond. Cette sensation me semble si forte que je suis un peu surpris quand ses branches s'enroulent en douceur autour de mes bras et de ma taille.

J'essaie de conserver mon calme et obéissant à sa pression sur mes reins, je m'avance de moi même vers le tronc du Cerisier.

Comme attiré, mes yeux se pose sur le symbole des Sakurazukamori qui vient d'apparaître dans l'écorce épaisse de l'arbre. Le pentacle inversé, tracé à l'encre rouge, du sang sans aucun doute, ressemble à un sceau.

Je pose ma main en son centre et ma supposition se révèle exacte.

Une lumière blanche, aveuglante et crue, m'oblige à fermer vivement les yeux.

Puis je recouvre la vue dans un paysage différent. Les branches m'ont lâchés et l'arbre se tint loin de moi comme séparé par un voile dimensionnel.

Une demeure typiquement japonaise se dresse devant le flanc de la montagne qui se découpe derrière elle. Ici aussi, la végétation est omni présente. Mais tout cela disparaît pour moi quand une silhouette aux contours familiers capte mon regard.

Un homme dont je connais chaque trait se tient dans un merveilleux kimono de soie noir brodé de fils d'argent, sur le perron de la maison.

Sa vue me rend sourd et muet au monde. J'étouffe, oubliant de respirer sous son éternel regard de miel.

Seï…shiro…mais….

Bonjour Subaru. Comment vas-tu ?

Tu es vivant ?

Non.

Incrédule, je le fixe déjà un peu énervé par l'étrange tournure que prennent les événements.

Comment ça Non ?

Je suis mort. Tu m'as tué, dois-je te le rappeler ?

Cet air moqueur, ce sourire amusé m'agace alors sèchement, luttant contre la joie qui m'a envahi à sa vue, je me défends.

Et moi, dois je te rappeler que tu m'as piégé ?

Je vois, tu m'en veux pour avoir exaucer mon souhait le premier.

Ton souhait était comme toi, stupide, égoïste et crétin !

Son rire jaillit tandis qu'il s'avance vers moi comme une ombre.

Même ça, on ne peut le faire normalement.

Sa voix est devenue grave et caressante. Je frisonne malgré moi en captant son odeur et la chaleur de son corps maintenant si proche du mien.

De quoi tu parles ?

De nos retrouvailles. N'étais tu pas heureux de me revoir ?

Bizarrement, je ne réponds pas. Une chose semble vouloir attirer mon attention. Un détail qui me frappe, qui me mets en garde mais que je ne saisis pas encore.

Moi, je suis ravi de voir que tu as survécu à ma mort. Remarques je n'en doutais pas. Kakyo m'avait renseigné sur le futur, il avait vu juste.

Qui es tu ?

Vraiment tu l'ignores ?

Tu es lui mais ce n'est pas toi. Alors qui es tu ?

Je suis son ultime souhait, son reflet. Une parcelle de l'ancien Sakurazukamori qui t'attendait pour t'aider à trouver ta voie. J'ai sa mémoire, son cœur et tout ce qui est lui. Une espèce de Seïshiro version concentré si tu préfères.

L'espoir meurt doucement en moi avec douleur. Les miracles n'existent pas dans ce monde, dans mon monde. Cependant, je ressens une certaine joie à l'idée que l'homme qui tuait sans rien éprouver, ait eu l'idée de me laisser un peu de lui pour me guider.

J'avais donc réellement atteint ce coeur de marbre et cette pensée allume une douce flamme en moi.

Quel est ton rôle ?

Je suis là pour répondre à tes questions, pour te permettre de vivre comme Hokuto et moi le souhaitions. Je veux redonner vie à ce Subaru qui m'as séduit et fais connaître l'amour.

Bonne chance.

Cette phrase un peu ironique m'a échappé mais je ne la regrette pas. Je n'ais aucune envie de me laisser manipuler une fois de plus. J'ai beaucoup de choses à comprendre et à découvrir. Et Kamui attend mon retour.

Je passe devant l'ombre de Seïshiro et je me dirige avec calme vers cette mystérieuse demeure.

Elle a un côté familier qui reflète ses anciennes origines de Sumeragi. J'entre pour découvrir un intérieur totalement différent du caractère ancien de l'endroit.

Que veux tu, le moderne a tellement de côté pratique.

Je suis déçu….on se croirait dans un studio ou même dans un lieu public style salle des fêtes. Tu n'as pas de goût ou quoi ?

Ma mère avait tout aménagé avec un certain luxe mais quand je l'ai tué, elle a émis le souhait d'emporter son mobilier dans sa tombe.

Tu te fous de moi ?

Si peu. Le cerisier exauce un souhait au moment de ta mort. Rien, sauf te redonner vie, n'est impossible. Mais cela ne veut pas dire que certains souhaits sont logiques. Image mon désarroi devant la maison vidée de ses meubles. J'ai fait au mieux, avec les moyens du bord.

Excuse moi de ne pas pleurer !

Je t'en prie.

Exaspéré par autant de stupidité, je préfère continuer mon exploration plutôt que de répondre à toutes ces provocations.

Je découvre une demeure pleines de pièces avec énormément de clarté et qui dégage une sérénité apaisante.

Je choisis un endroit pour chambre. C'est une vaste pièce avec une terrasse. La vue est magnifique et je juge que je m'y plairais.

Puisse je avoir cet endroit comme chambre ?

Comme tu veux. Pose ta main sur le sceau qui se trouve sur la porte et imagine la pièce que tu souhaites. Tu es le nouveau Sakurazukamori, cela devrait t'être possible.

Docile, j'obéis. Un éclair brûlant jaillit et la pièce se transforme sous mes yeux ébahis.

Et tu as osé te moquer de mon goût pour la décoration !

Mais….

La pièce s'est transformé en capharnaüm avec tout un tas d'objets hétéroclites dont pour certains, j'ignore même l'usage.

Ton système d'aménagement est complètement défectueux.

Désolé mais ici nous ne faisons ni garantie, ni reprise et ni échange.

Je veux une chambre.

Je t'avais préparé ça, tu viens ?

Oui.

Un peu déçu, j'abandonne ce coin qui me plaisait et je suis Seïshiro jusqu'à une porte de bois sculpté.

C'est ici.

J'ouvre et devant mes yeux, un décor somptueux se déploie. Des meubles de bois, des tableaux peints sur la soie, des plantes vertes, des voilages aux teintes lumineuses et des objets d'art anciens forment un ensemble parfait.

Aménagé par moi, avant ma mort. Ton avis ?

Tu avais un certain potentiel du temps de ton vivant.

Faut dire qu'à l'époque, tout ici m'obéissait.

Comment ça ?

Le Sakurazukamori contrôle cet endroit par sa volonté et son pouvoir. Le Cerisier est notre source de puissance. Ses racines et ses branches sont présentes dans chaque recoin. Regarde !

Un peu énervé d'être toujours obligé de supporter cet arbre, je constate en effet que le plafond est recouvert d'un filet végétal dans lequel le Cerisier s'étend en toute impunité.

Cet arbre est vraiment collant.

Tu t'y feras très bien, enfin t'as pas le choix.

Je m'assois dans un fauteuil en rotin et je ferme les yeux quelques instants. J'ai l'impression d'être dans un rêve. Tout se déroule avec un subtil mélange de logique et d'absurdité. Cet endroit a l'air d'un monde à part avec des règles dont l'auteur est un gigantesque arbre buveur de sang.

J'ouvre à nouveau les yeux au moment où une branche du Cerisier dépose à mes pieds mon sac avec mes affaires.

Tu vois, cet arbre a quelques côtés bien pratiques.

Si on veut. Quelle est son histoire ?

Seïshiro s'assoit en face de moi après avoir pris dans le bar à l'angle de la pièce deux verres et une bouteille dont le contenu ressemble à de l'alcool.

C'est juste de la limonade faite maison. Une passion de ma défunte mère. Tu en veux ?

Oui, merci.

Pour en revenir au Cerisier, sache que son histoire est un secret mais vu que tu es son nouveau gardien, tu as le droit de la connaître.

J'évite de dire à Seïshiro ce que je pense au sujet de mon nouveau travail. Il le découvrira bien assez tôt si il ne s'en doute pas déjà.

Quand les maîtres du Yin se sont installés ici, ils ont voulu développés une puissance représentée par le côté sombre de la vie. Mais cela engendra conflits et tueries au sein même du clan. Un de mes ancêtres qui avait de l'ambition se servi d'un sort interdit pour s'assurer le pouvoir. Il offrit en sacrifice tous ceux de son clan contre une puissance maléfique et inépuisable. Il choisi pour réceptacle d'une telle force un cerisier. Son choix fut guidé par l'image trompeuse que dégageait l'arbre. Il tua donc tout le monde et pour être sûr de n'avoir aucuns remords, il donna son âme et son cœur à l'arbre. Le pacte fut conclu. L'arbre devint fort et puissant par le biais des cadavres tués en son nom. Et voilà comment commença le règne du Sakurazukamori.

Ton ancêtre était fou, il a détourné une force de vie pour assouvir son rêve de tueur.

Oui, mais comme il s'est servi d'un sort interdit, il a du assumer le contre sort. C'est pourquoi si jamais nousdécouvrons l'amour, nous sommes condannés à mourir de la main de notre aimé et cela fait de lui le nouveau gardien du Cerisier.

Ce qui est tout sauf une preuve d'amour.

J'avoue que j'en sais rien. L'amour est trop complexe pour se résumer en un acte.

Et moi dans tout ça ?

Toi, tu es le nouveau Sakurazukamori enfin ça reste à prouver.

C'est-à-dire ?

Soyons honnête. Que fais tu ici ? L'arbre t'a t-il appelé ?

Non, il ne s'est pas manifesté et je suis venu pour savoir comment ne pas être son Gardien.

Je vois. Je dois y réfléchir un peu. Je te laisse t'installer et puis je vais nous préparer un bon repas. Rejoins moi au kiosque qui est là bas vers le bassin.

Je laisse Seïshiro sortir puis je me lève et commence à déballer mon sac et à ranger mes affaires.

Cette activité me ramène au tourbillon d'émotions que je dissimule depuis mon arrivée.

L'homme que j'aime est là mais il n'est pas réel, c'est juste un résidu d'âme. J'ai déjà du exorciser plusieurs fois ce genre de fantômes qui ont tout d'un être vivant même les besoins les plus intimes et qui n'existe que grâce à une grande force mentale.

La situation est vraiment déroutante, jamais je n'aurais imaginé une chose pareille. Même l'endroit est surprenant de beauté, de calme et de sérénité.

Seïshiro me parle comme si j'étais enfin adulte à ses yeux, il a perdu cette lueur qui faisait saigner mon cœur. Son ton moqueur des premiers instants a évolué en une curieuse complicité qui m'angoisse un peu.

Je peine à m'avouer que j'ai eu plaisir à parler avec lui même si le sujet n'était pas des plus agréables.

Je me change en vue du repas cherchant inconsciemment à plaire. Mon cœur est amoureux et même si ma raison lui crie d'être réaliste et prudent, le désir est une chose puissante qu'on ne peut pas toujours contrôler.

Habillé d'un pantalon moulant et crème avec un simple tee shirt à manches longues d'un noir profond, je quitte la pièce et pars me promener un moment dans le jardin.

Avec tout ce que j'ai appris sur le Cerisier et le Sakurazukamori, je ressens de la pitié pour ces gens et cet arbre. Un Cerisier est destiné à traverser le temps avec pour unique but de vivre malgré l'hiver, la pollution et les parasites. Il est un enfant de la nature. Comment peut on souillé et détourner à ce point une force de vie ? Il faut vraiment avoir vendu son âme au diable.

Et ces assassins malgré eux qui sont condannés sur un sentiment positif. Tout cela respire un profond mépris pour l'équilibre naturel des choses.

C'est pousser le vice à son maximum et c'est contraire à la vie et à la mort elle-même. Une telle malédiction est impossible à stopper car elle engendre un cercle vicieux sans fin.

Vais-je moi aussi succomber à ce terrifiant piège ? J'espère que non car maintenant je sais que même par amour pour Seïshiro, je ne donnerais pas mon âme en pâture aux démons.

Je veux pouvoir vivre. Je veux être mon propre chef. J'ai assez souffert et j'ai perdu beaucoup de temps. J'aurais du m'écouter, cesser de regarder à travers les autres et venir me jeter dans les bras de celui que j'aimais quitte à ce qu'il me tue.

Mais cela s'est passé autrement et on ne peut pas revenir en arrière. Je dois avancer vers l'inconnu en suivant les signes qui ont enfin décidé d'éclairer ma route et que j'ai surtout enfin décidé d'arrêter d'ignorer.

La nuit commençant à tomber, je vais m'asseoir dans le kiosque où Seïshiro m'a demandé de le rejoindre.

Le décor est ancien. Le bois du kiosque est patiné et il porte de nombreuses marques d'agression faite par le temps qui passe et n'épargne rien sur son passage.

L'intérieur est accueillant avec quelques chaises en fer forgé de style européen et une table au lourd plateau de marbre blanc.

Des bougies parfumées aux délicates senteurs fruitées éclairent le tout d'une faible lumière aux reflets incertains.

Qu'en penses tu ? C'est intime, non ?

Seïshiro vient d'arriver avec les bras chargés de vaisselle. Sa démarche de prédateur lui a permis de me surprendre.

En quel honneur ?

Aucun si ce n'est le plaisir de te voir à la lueur des bougies.

Quand vas-tu disparaître ?

Ta question est plutôt directe. Serais tu pressé ?

Je veux une réponse.

Cela dépend de toi. J'ai émis un souhait quand le Cerisier a récupéré mon âme. Un souhait que toi seul peux découvrir et rendre réel.

Je croyais que ton souhait était déjà exaucé.

Non, j'ai fait les choses de façon à ce que cette fois ci, aucun de nous ne souffre. Si tu perces le mystère de mon souhait, la délivrance sera notre récompense, à toi, à moi et au Cerisier.

Et si j'échoue ?

Le destin reprendra son cours et tu n'échapperas pas à la malédiction du Cerisier.

Bref, une fois de plus tu te sers de moi.

Sous l'effet de la colère et de la trahison, mes yeux lancent des éclairs et je masque ma souffrance derrière cette apparence de révolte.

Erreur, je veux réparer le mal que je t'ai fait. Seulement, je ne puis y arriver seul. L'aide du Cerisier m'était nécessaire et la tienne est indispensable. Subaru, peux tu accepter une dernière fois d'être prisonnier par amour ?

On ne doit pas emprisonner les gens qu'on aime !

Oui, mais tu pourrais le vouloir.

Maintenant, je suis debout face à cette ombre qui me demande d'être consentant et docile. Je sens une infinie tristesse dans son unique œil doré et cela me fait hésiter à le frapper pour qu'il partage un peu de cette souffrance qu'il vient à nouveau de réveiller.

Subaru, pense aux erreurs de passé, aux souffrances que cause le silence et aux destins qui basculent quand on refuse d'écouter son cœur.

Curieux conseil venant de ta part !

Peut être mais je suis un excellent exemple de ce qu'il ne faut pas faire.

Là il marque un point. Pour avoir une chance d'échapper à tout ça, je dois m'accepter et me livrer à nouveau. L'envie de résister est forte mais pour Kamui et pour le chemin que j'ai souhaité prendre, je commence à capituler.

Que veux tu exactement de moi ?

Rien, juste ton bonheur. Pour cela, il faut que tu choisisses de jouer le jeu. Accepte d'être celui qui nous délivreras et pour y arriver accepte de t'en remettre à nous.

Ais je le choix ?

Oui et c'est là qu'est le danger pour toi.

Répons à ma question. M'aimes tu ?

Seïshiro me regarde avec une soudaine douceur. Il me sourit comme jamais il ne l'a fait avant.

Je t'aime Subaru.

Aucune trace de mensonge dans cette voix de velours et dans ce regard de feu. Alors je me soumets et d'un pas, je franchi l'espace qui me sépare de lui.

Il pose la vaisselle sur la table et d'un geste tendre, il m'attire contre son torse.

Merci.

Plutôt que de répondre, je préfère suivre mon nouveau destin et la tête appuyée sur son épaule, je me laisse enivrer par son odeur d'homme.

Ses bras me tiennent fermement et l'instant se prolonge dans un calme étrange où plus rien n'a d'importance. Cette paix est immense, elle coule à l'intérieur de moi comme un fleuve depuis longtemps ignoré.

Ce sentiment reste malgré le fait que nous nous séparons doucement. Je retourne m'asseoir et empli d'une nouvelle force, je le regarde mettre la table.

Ses gestes sont sûrs comme toujours. Les bougies dessinent des ombres mystérieuses sur son beau visage. Je me plais à le regarder sans honte. C'est l'homme que j'aime, celui qui a prit mon cœur.

Je vais chercher le repas.

Et il s'éloigne, félin dans sa démarche.

Je sais que tout cela n'est que folie mais maintenant que j'ai cédé à mon cœur, c'est lui qui décide et il est bien trop heureux de cette soudaine liberté pour accepter de se taire à nouveau.

Il ne me reste qu'à espérer que j'ai pris la bonne décision et que la délivrance est vraiment au bout de cette route.

Seïshiro revient avec un plateau sur lequel il y a tout un assortiment de plats. Une odeur appétissante envahit le kiosque et je m'aperçois que je meurs de faim.

Sers toi.

Et toi ? En tant que résidu d'âme, tu n'as pas besoin de manger.

Résidu d'âme ! Quel terme peu flatteur. Sache que je suis plus que ça. Et moi aussi, j'ai faim.

Je trouve étrange qu'il puisse se nourrir. Aucune force mentale ne peut être assez puissante pour créer un système digestif. Que me cache t-il ?

Tout en mangeant, je cherche dans ma mémoire comment une telle chose est possible. Mais rien ne me donnes une réponse probable.

Alors tu aimes ?

Oui, c'est très bon.

Que dirais tu après d'aller te coucher ? Demain, j'aimerais regarder le soleil se lever avec toi.

Quel romantisme ! Es-tu sincère ?

Je sais, ça fait cliché mais l'idée est séduisante, non ?

Comme tu veux.

Bien, alors je te raccompagne à ta chambre.

Je pars derrière lui, avec une étrange envie au fond de moi qui monte, cherchant à percer le silence.

Et voilà, je te souhaite une bonne nuit Subaru.

Seï…je….dors avec moi.

Une soudaine rougeur m'envahit sous l'œil de braise de Seïshiro. Je suis surpris de ma propre audace et en même temps, je suis prêt à défendre mon idée.

Tu es sûr ?

Hélas….oui.

Bien, j'accepte ton invitation. Le cerisier va s'occuper de débarrasser la table. Alors au lit.

Pour échapper à la tournure que prennent les événements, je me met en pyjama sans oser me préoccuper de ce que fait Seïshiro puis je me glisse dans les draps frais du lit. Un corps chaud ne tarde pas à me rejoindre et une fois de plus, je me demande qui est vraiment cette ombre de Seïshiro pour dégager autant de vie.

Bonne nuit Subaru.

Mu par l'instinct, je me tourne vers Seïshiro et plantant mon regard dans le sien, je me lance pour enfin savoir ce qu'il cache.

Tu as sommeil ?

Pas vraiment.

Tu manges, tu dors, comment c'est possible ?

Je suis là pour toi, il est donc normal que je sois proche du Seïshiro que tu aimes. Hors il me semble qu'il adorait déguster des glaces avec Hokuto et qu'il rêvait de partager son lit avec toi.

C'est assez dur à vivre, tu es comme lui et pourtant tu vas me quitter, n'est ce pas ?

Pas comme tu l'entends mais ne brusque pas les choses. Commençons par passer notre première nuit ensemble. Que dirais tu d'un câlin ?

Un quoi ?

Un câlin, juste pour te prouver à quel point je t'aime.

Bonne nuit.

Résolument, je tourne le dos et j'essaie de me persuader que c'est ce que je veux. Mais impossible de calmer mon cœur et le sommeil me déserte. N'y tenant plus, je soupire puis je fais de nouveau face à Seï.

Ce dernier est immobile, les yeux ouverts, il contemple le plafond suivant du regard les branches de Cerisier qui parcourent la pièce.

Tu ne dors pas ?

Non, je pense à toi. Je me disais que j'avais tout faux avec toi. Je ne me cherche pas d'excuses mais hélas ma mère ne m'a jamais appris l'amour. Pourtant j'ai étudié cet étrange sentiment qui frappe les hommes à l'aveuglette et qui les conduit à des actes insensés. Je n'ai rien compris à cela et perdu, j'ai préféré lutter plutôt que de céder. Aujourd'hui, je sais que le véritable amour se donne dans une absolue confiance et que j'ai détruit notre chance le jour où ce pari idiot a pris fin.

Pourquoi me dire tout ça ?

Et pourquoi pas ? N'as-tu jamais tenté de comprendre les erreurs que tu as commises ?

Si mais justement c'est parce que j'ai eu confiance que mon malheur est arrivé.

Idiot ! Toi, tu étais la victime. Toi, tu n'as aucune responsabilité dans tout ça. Tu ignorais l'enjeu de notre relation, tu n'as pas à te salir en te sentant coupable.

Le rôle de la victime laisse des traces et de la culpabilité.

Oui, mais la victime, aujourd'hui, peut elle pardonner et accepter ce qui existe depuis si longtemps entre nous ?

Je soupire doucement emporté par ce que cette interrogation réveille en moi.

Je t'ai pardonné depuis longtemps. Et je sais ce que je ressens pour toi !

Ma voix de basse et passé à haute et je tremble presque devant la violence de l'amour qui coule dans mes veines pour cet homme.

Subaru, nous n'avons pas de deuxième chance. Ceci est juste un répit avant que tu repartes auprès des tiens. J'aimerais te donner tout ce qu'il te revient de droit. J'aimerais t'aimer et t'emporter si loin de ta peine que jamais tu ne l'as retrouveras. Qu'en penses tu ?

J'en pense que c'est impossible. Tu n'es pas réel.

Est-ce là le seul obstacle à notre amour ?

J'en sais rien.

Subaru, je suis tel que tu le souhaites. Ne comprends tu donc pas ce qu'une telle chose signifie ?

Mais je….

Tu ne sais pas ce que tu veux. Très bien alors laisse moi t'aider à trouver la réponse.

Non….je sais ce que je veux mais je ….j'ai peur de souffrir encore plus après.

Oui, je comprends mais n'ais aucune crainte, le pire est derrière toi. L'amour est notre salut à tous les deux.

Vraiment ?

Tu dois y croire et le vouloir pour que cela arrive.

Bien.

Hésitant, mais sachant que j'en ai envie, je me rapproche de Seï et doucement nos corps se touchent. Le sien est si doux. Je m'y blotti en repoussant la voix de la raison. Deux mains me planquent plus étroitement contre la peau satiné de Seï qui je le découvre est nu dans le lit.

Entraîné par le vertige des mes sentiments, je le laisse me caresser le dos. Je suis bien, heureux et fou à la fois. La même paix renaît en moi et j'accepte cette chose qui grandit dans mon corps.

C'est d'abord un frisson sous cette main chaude qui glisse le long de ma colonne vertébrale puis le frisson fait place à une étrange chaleur quand une bouche douce et tendre frôle mes lèvres. La chaleur se répand comme un feu sous la pluie de baisers qui tombe sur mon corps offert et elle devient vive quand une langue s'attarde sur mon torse. Elle envahit d'une énergie nouvelle mon bassin et mon sexe au contact d'une caresse plus hardie que les précédentes. Puis elle disparaît dans un souffle chaud pour mieux renaître dans la douleur du combat qui se livre quand je deviens sien. Maintenant c'est un brassier, une lave brûlante qui se concentre en un seul point et qui ne vit que par lui. Attisée par sa propre flamme, elle explose dans un cocon de passion avant de se répandre à nouveau dans mon corps engourdi. Bercé par la paix qu'elle a allumée, je m'endors contre mon amant le cœur rempli d'amour.

Je passe une nuit de rêve dans les bras de l'homme que j'aime. Car maintenant je sais qui il est, c'est vraiment Seï. Même si il ne vit que par ma présence, il est enfin là pour me donner ce dont j'ai le plus besoin au monde.

Je me promets d'accepter cela et de vivre intensément tous ces moments de bonheur.

La douce caresse du soleil sur ma peau nue me tire de mon profond sommeil. Je suis toujours dans les bras de Seïshiro. Il me sourit tandis que je croise son regard.

Bonjour toi. Bien dormi ?

Oui. Merci.

Hélas comment tu peux le constater, le soleil est déjà levé.

Pas grave, l'idée ne m'emballait pas trop.

Je vois, tu n'es pas romantique.

Si mais je crois que l'amour ne doit pas suivre les chemins déjà tracés. Il doit être unique.

Il est unique vu qu'il n'appartient qu'à toi et moi. Allez, levons nous et allons déjeuner. Puis après je te ferais découvrir une partie de moi que tu ne connais pas encore.

Intrigué, je m'exécute en ne pouvant m'empêcher de jeter des regards furtifs sur le corps musclé de Seï alors qu'il remet son kimono de soie.

Puis il m'emmène dans une nouvelle pièce où nous attends un copieux déjeuner.

Jamais on ne pourra manger tout ça.

Moi qui croyais que l'exercice de cette nuit t'avais ouvert l'appétit.

Le souvenir de tout ce que j'ai ressenti me met le feu au visage. Et cependant, je ne suis pas très satisfait car j'ai subi, docile, l'étreinte de Seï. Il m'a aimé et moi, je n'ai rien fait pour lui faire comprendre ce que j'éprouve depuis si longtemps.

Je mange tout en me demandant comment on peut aborder un sujet aussi intime sans se prendre la honte de sa vie.

Tu es bien silencieux.

Je réfléchis.

A quoi ?

A cette nuit.

Et ?

Et rien !

Menteur ! On peut en parler si tu veux.

C'est gênant.

Non, je ne suis pas d'accord. Viens je vais te faire lire un ouvrage qui devrait changer ton opinion à ce sujet.

Il m'entraîne par la main et me tire jusqu'à une grande pièce remplie d'ouvrages. Il y en a des milliers.

C'est impressionnant !

N'est ce pas ? Tiens lis celui là.

Il me donne un livre d'une centaine de pages à la couverture en cuir reliée. Aucun titre, aucun auteur pour me renseigner sur sa provenance.

Je trouve que c'est étrange mais je m'installe quand même dans un des moelleux fauteuils près de la baie vitrée qui remplie la pièce de clarté.

Je te laisse, puis après nous pourrons parler d'amour.

Plongé dans cet étonnant livre, je ne l'entend pas quitté la pièce.

A voix haute, pour mieux m'empreignais du texte, je relis ce passage.

« L'homme à plusieurs besoins naturels à satisfaire pour vivre en harmonie avec son enveloppe corporelle. Il doit boire, manger, dormir, évacuer et se reproduire. Notre esprit a su donner à ces actes primaires une notion de plaisir. Ainsi nous varions les saveurs et nous partageons notre nourriture avec nos proches, nos amis. Nous buvons diverses boissons profitant de ces instants pour se réunir. Nous dormons dans de grands lits couverts par des textures moelleuses et douces. Nous avons aménagés des endroits propres et intimes pour nos besoins et nous continuons à considérer l'acte physique comme une souillure, une perversion de nous même. Pourquoi un tel rejet pour ce désir de contact, de chaleur et de plaisir ? Simplement parce que nous avons peur. Plongé dans cet acte, nous perdons le contrôle de notre esprit et c'est uniquement notre corps qui domine. Un tel abandon effraye et pourtant cela n'est guère différent de quand nous dormons. Il faut accepter son corps, ses pulsions et surtout savoir ouvrir son cœur à la pureté de l'amour sous toutes ces formes et sous tous ces aspects…. »

Ouvrir son cœur….admettre ses désirs….que sais je vraiment de moi ? Cette nuit, j'ai vécu au milieu d'un feu qui m'a consumé sans que je pense à participer. Comment est mon corps ?

Ce livre soulève de nombreuses interrogations. Il ramène le sexe à un acte simple et naturel qui perd de sa force à cause de notre peur d'abandon totale.

Il est vrai que j'ai peur, depuis toujours et j'ai pleins de barrières en moi sur ce sujet. Mais personne ne m'a jamais appris l'amour et personne ne m'a jamais parlé de cet univers inconnu.

Je termine le livre et pensif, je rejoins Seï qui tranquillement arrose les plantes devant la maison.

Qui a écrit un tel ouvrage ?

D'après le Cerisier, c'est le premier chef du clan des Sumeragi qui était aussi le chef des Sakurazukamori.

D'après le Cerisier ?

Oui, l'arbre communique avec son gardien par la télépathie. Il est vivant, il a des souhaits, des envies et des peurs comme nous. Il devint un peu ton partenaire et il manifeste ses émotions de diverses façons.

Surprenant. Tu es d'accord avec le contenu de ce livre ?

Je l'ai découvert par hasard, un peu avant notre dernier combat. Et je pense en effet que nous compliquons tout. On devrait se contenter d'avancer avec l'innocence qu'on les enfants qui viennent au monde. Mais dans le monde d'aujourd'hui, c'est impossible. Alors ici, à l'abri de tout, j'espère pouvoir y parvenir avec toi.

Calmement, je m'assois dans l'escalier de pierre devant la maison.

Cette nuit, j'ignore ce que nous avons fait. J'ai été emporté loin de tout par une vague de chaleur qui se répandait en moi.

Oui, c'est cela je crois l'abandon totale qui effraye tant les gens.

C'était très agréable mais comment peut-on appeler ça ?

Je t'ai donné de l'amour, mon amour. Et tu l'as pris comme tel. L'acte physique est différent. Faire l'amour peut être merveilleux ou douloureux. Tout dépend de ton partenaire et de ses sentiments. Si deux personnes souhaitent inclure dans leur relation des actes que la morale désapprouve, que va-t-il se passer ?

Les gens vont les condamner.

Exact, mais pour eux, que va-t-il se passer ?

Aucune idée.

Et bien, ils seront heureux. Tout simplement parce qu'ils auront écouter leurs désirs. En résumé, en amour, je crois que tout est permis du moment que tu le fais avec l'accord total de ton partenaire. Seule la peur engendre la souffrance, les violences et les crimes sexuels.

J'aurais aimé que tu penses cela à une époque.

Moi aussi, mais si tu n'as personne pour te guider, c'est impossible de comprendre une telle chose par toi-même. Il faut souffrir pour enfin découvrir la paix que procure l'amour.

Qui t'as permis d'en arriver là ?

C'est toi. J'ai compris trop tard que j'étais dans l'erreur. Alors pour réparer mon tort envers toi et envers moi-même, j'ai souhaité ce qui se passe aujourd'hui.

C'est compliqué.

Oui, mais si tu es partant, on peut espérer devenir qu'un seul et unique cœur rien que grâce à la force de notre amour.

C'est tentant.

Alors reprenons le cours de notre emploi du temps. Je veux te faire découvrir un aspect de moi que tu ignores.

Seïshiro part en direction d'un hangar un peu à l'écart de la maison. Je le suis encore perturbé par tout ce que je viens de découvrir.

Je me demande quel est ce fameux aspect de sa personnalité dont j'ignore tout. Pourvu que ça ne soit pas un truc de macabre ou d'un genre complètement douteux. Quoi que si c'était le cas, il ne serait pas aussi pressé de me le montrer.

Allez viens. De toute façon, tu vas être surpris.

Oui, j'arrive.

Je rejoins Seï qui ouvre les portes du hangar sans le moindre effort et une fois habitué à la pénombre, je découvre un spectacle vraiment surprenant.

Un bateau en bois de cerisier, je suppose que c'est une particularité de tout bon Sakurazukamori qui se respecte, repose sur des cales. Sa construction n'est pas achevée mais il est déjà magnifique à tout point de vue. Attiré par son aspect, je me risque à caresser sa coque avant de tourner un regard brillant vers Seï.

C'est toi qui l'as construit ?

Oui, j'y travaille dessus depuis maintenant dix sept ans. Il ne manque plus grand-chose pour qu'il puisse prendre la mer.

Déjà il manque la mer.

Pas si sûr.

D'un geste précis, il soulève une trappe et je distingue un escalier taillé dans le sol qui s'enfonce dans les profondeurs de la terre. Il s'y engage, m'invitant du regard à le suivre une fois de plus.

Je me retrouve rapidement sur un sol d'une autre nature. Il y a une grotte sous la demeure des Sakurazukamori. Seï se dirige sans aucune hésitation dans le dédale de ce labyrinthe naturel vaguement éclairé par quelques torches.

L'air est froid et chargé de l'odeur caractéristique de la mer. Cela me surprend jusqu'à ce que je remarque que nous suivons de loin un canal souterrain.

C'est la sortie de secours ?

Une des sorties, oui.

Et ça conduit à l'océan ?

Exact. Vois tu j'ai découvert cet endroit quand j'étais enfant. Depuis, je rêve de le suivre jusqu'à l'océan à bord de mon bateau. Nos rêves d'enfant sont un peu étranges, non ?

L'idée me plait. Pourquoi ne pas finir le bateau ?

Parce que je ne peux quitter le domaine des Sakurazukamori, c'est ici que le Cerisier me donne vie.

Evidement, ça aurait été trop beau.

Ne sois pas déçu. On peut le finir si tu y tiens. J'ai hâte de te voir un outil à la main.

Mais à quoi bon ?

Pour continuer à rêver tout simplement. Remontons.

Continuer à rêver…. La vie est vraiment cruelle des fois. J'étais vraiment emballé par l'idée de partir à l'aventure avec l'homme que j'aime. Je suis un peu déçu mais je décide que ce rêve là, je vais trouver un moyen de le réaliser car soudain, je sais qu'il est précieux à mes yeux. Peut être parce que c'est un bout de l'enfance de Seïshiro.

Et je rattrape mon amour qui surpris, finit par me sourire tandis que je glisse ma main dans la sienne.

A suivre ….

Fin du chapitre. J'ai été obligé de couper la première partie en deux. C'était trop long.

La suite arrive bientôt. Biz. Maveck.

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