Ecrit pour la 59ème nuit du FoF, sur le thème Chapeau.
Disclaimer : Les personnages et l'univers ne m'appartiennent pas. (Et vu ce qu'ils souffrent, c'est sans doute mieux comme ça.)
Pour Kitty Scat, parce qu'elle l'aime, sa poupée rousse !
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SOLEIL !
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Est-ce la main de Dieu
Et celle du Malin
Qui, un jour, s'unissant,
Ont croisé nos chemins ?
Est-ce l'un, est-ce l'autre ?
Vraiment, je ne sais pas
Mais pour cet amour-là
Merci, et chapeau bas !
Chapeau Bas, Barbara.
i. Chat perché
Shirley n'aime pas vraiment Lelouch Lamperouge.
C'est un égoïste paresseux, et il ne fait partie de l'association du Bureau des Étudiants que pour n'avoir pas à rejoindre un club. Il préfère parier (de l'argent !) et il entraîne Rivalz dans ses frasques, alors que Rivalz est un gentil garçon, serviable et sérieux. Bon peut-être pas vraiment sérieux, mais certainement pas un tire-au-flanc comme lui.
Elle essaie d'habitude de l'ignorer, elle réussit plutôt bien d'ailleurs, mais cette fois-ci, il doit l'aider à vérifier les budgets des clubs et sans surprise, il est aux abonnés absents.
Shirley est fatiguée, parce que elle, elle ne dort pas en cours et qu'elle fait aussi partie du club de natation et elle aimerait en finir vite.
« Si je t'attrape, murmure-t-elle pour elle-même en parcourant les abords du bâtiment de l'association des étudiants, si je t'attrape, tu vas passer un sale quart d'heure. »
Elle sait que ce ne sera pas vraiment le cas. Elle est loin d'être timide mais elle ne peut juste pas crier sur quelqu'un comme ça et puis de toutes manières, ça ne lui fera ni chaud ni froid.
Après vingt frustrantes minutes, Shirley finit par renoncer à mettre la main sur Lelouch et en conclut qu'elle ferait d'autant mieux de s'y mettre que seule, elle est loin d'avoir finie.
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ii. Colin-Maillard
Lelouch s'est endormi sur une des chaises, et sa longue silhouette est avachie sur la table avec une grâce insoupçonnée.
Elle n'avait jamais remarqué avant que Lelouch était gracieux.
Elle savait qu'il était beau, elle a des yeux, mais c'était presque un défaut pour elle, un atout supplémentaire dans son arsenal de manipulation, une tactique de plus pour paraître ce qu'il n'est pas.
Mais après tout, Lelouch n'est pas vraiment ce qu'il parait être. Lelouch est quelqu'un de gentil, qui prend la défense des plus faibles sans rien chercher à en tirer en retour. Il est toujours tire-au-flanc et inappliqué, et pourtant, elle n'arrive pas à le détester autant qu'avant.
Qu'avant le jour où elle l'a vu s'interposer entre un Britannien et un Eleven et disparaître sans vouloir écouter les remerciements de l'homme.
Elle tend une main hésitante vers ses cheveux. Ce n'est pas la première fois qu'elle le touche mais c'est la première fois qu'elle le fait délibérément.
Les mèches noires ne sont pas particulièrement douces sous ses doigts, et elle est un peu déçue sans vraiment (vouloir) savoir pourquoi.
Puis elle se rend compte de ce qu'elle fait, elle est en train de toucher un garçon, et sans sa permission en plus, et elle se met à rougir immédiatement avant de reculer sa chaise, en renversant au passage une bouteille d'eau sur le rapport d'activité du club d'escrime.
Lelouch se redresse immédiatement au vacarme et en se frottant les yeux et en baillant à demi, il interpelle doucement : « Shirley ?
─ Je suis là. » Elle déteste sa voix tremblante, elle déteste sentir son visage écarlate depuis son cou jusqu'à la racine de ses cheveux.
Elle déteste sentir son cœur battre à toute vitesse quand elle l'entend prononcer son prénom.
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iii. Cache-cache
C'est le grand jeu de la Présidente. Envoyer Lulu la chercher.
Elle sait qu'elle est tombée amoureuse de Lelouch et qu'elle ne le cache pas très bien, qu'elle le cache même si mal que seul l'intéressé ne s'en est rendu pas compte.
Elle en est à la fois horriblement frustrée et immensément soulagée.
Milly semble trouver tout ça très amusant, tant ses rougissements intempestifs que le manque total de prise de conscience de Lulu qui par ailleurs, lui demande parfois si elle n'a pas de la fièvre car elle est un peu rouge.
Même Nunally, la petite sœur de Lulu, s'est rendu compte de la situation et elle est aveugle.
Alors en plus de donner des indications pas vraiment subtiles sur les sentiments de Shirley envers lui (« Regarde-la, Lulu, est-ce que Shirley n'est pas radieuse aujourd'hui ? Les femmes amoureuses ont toujours une lumière spéciale, tu sais. »), elle s'ingénie à créer des situations où ils se retrouveront ensembles.
C'est comme ça qu'il est apparu successivement à la piscine, à ses cours de français, pendant sa leçon de violon et même dans son dortoir, parce que la Présidente la réclamait urgemment.
Cette fois-ci, elle est dans les vergers près du potager du club de jardinage, où elle aide Alicia, la petite sœur de sa compagne de chambre, à cueillir des mirabelles, quand il arrive vers elle.
Et tout en lui proposant les petits fruits d'or plus sucrés que le miel et en l'écoutant lui expliquer que la Présidente a eu une Idée (Aie, méfiance des idées de Milly quand elles ont un I majuscule), Shirley ne peut s'empêcher d'être absurdement heureuse de voir qu'une fois de plus, il a su la retrouver.
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iv. Jacques a dit
Elle est dans ses bras, les bras de l'assassin de son père qu'elle a embrassé et pour qui elle a tiré sur une femme, et elle a mal comme elle n'a jamais eu mal de toute sa vie.
Chaque respiration est difficile et douloureuse et chaque respiration est un crime parce que Lelouch est Zero, que Zero a tué son père et qu'elle l'aime tout de même.
Et tout ce dont elle peut se rappeler, c'est Ophélie, un personnage détesté d'une pièce qu'elle n'a jamais aimé et elle se dit que non décidément c'est trop facile de glisser dans une rivière au milieu d'une guirlande de fleurs.
Et puis Ophélie n'a tué personne.
Pas de pardon, pas de pitié, ni pour Lulu ni pour elle.
« Oublie ça, lui dit-il, tu peux oublier toutes ces horreurs. »
Et elle est dans ses bras, là où elle a toujours rêvé d'être, et c'est comme le pire des cauchemars.
« Oublie, » répète-t-il, et elle hurle alors que son âme se brise, alors qu'elle sent les souvenirs qui disparaissent, alors que le chagrin, la douleur mais aussi la joie et le bonheur éclatent comme des bulles de savon sans laisser de trace.
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v. Marelle
C'est un chemin familier maintenant, un chemin qu'elle a déjà parcouru trois fois.
Un chemin qu'elle empruntera une quatrième fois si besoin, parce que son âme connait le chemin. Elle commencera par le détester, puis il la surprendra, puis elle se rendra compte qu'elle l'aime, il fera quelque chose d'horrible et elle continuera de l'aimer tout de même.
Elle est heureuse d'avoir retrouvé ses souvenirs, aussi horribles qu'ils soient, mais son bonheur est teinté d'amertume. Comme en peinture, ça rend le contraste plus brillant.
Elle sait à quel point elle l'aime, parce qu'elle sait à quel point elle a souffert à cause de lui, parce qu'elle lui a sacrifié son humanité et parce que si elle n'arrive pas à se pardonner à elle-même, d'ailleurs ce n'est pas elle de se pardonner, c'est au professeur Villetta, elle peut le pardonner lui.
C'est merveilleux d'avoir le pouvoir d'absoudre l'homme qu'on aime, de prendre une partie de ses péchés à son compte.
Si elle en a la force, si elle se souvient cette fois, elle en prendra le plus qu'elle peut.
Et sinon, elle refera à nouveau le chemin. Dans cette vie ou dans la prochaine.
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vi. Un, deux, trois, soleil ! (« SOLEIL ! »)
Lelouch a beau fermer les yeux en espérant que quelque chose changera lorsqu'il les rouvrira, Shirley n'a pas bougé, poupée rousse et ensanglantée.
Shirley ne bougera plus jamais, il ne la verra plus jamais rire, rougir, pleurer, se fâcher.
Il a perdu Shirley et pour une brève seconde, plus rien n'existe, ni le pouvoir, ni la victoire, ni même Nunally.
Shirley sera belle et jeune et rayonnante et souriante dans la mort mais ce ne sera plus jamais pour lui.
Il regrette qu'elle ait croisé son chemin, parce que si elle ne l'avait pas connu, elle aurait été plus heureuse, et elle serait vivante aujourd'hui mais il est quand même bassement, honteusement, reconnaissant de l'avoir rencontrée. Elle l'a aimé pour lui-même, inconditionnellement et malgré tout ce qu'il lui a fait, elle a éclairé ses ténèbres de son sourire, de sa tendresse et de son pardon.
(Et tout est si sombre maintenant.)
(S'il ferme les yeux, vraiment, vraiment, elle ne bougera pas ?)
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Parce que j'aime Rollo mais franchement, il avait besoin de tuer Shirley ?
