Titre : la perfection est ennuyeuse
Disclaimer : Malheureusement, il faut rendre à César ce qui est à César, ils ne sont pas à moi.
Couples : Heero /Duo – Trowa/Quatre
Genre : Humour et exagération
Note : merci à Catirella pour m'avoir signalé mes erreurs que je m'empresse de corriger.
Quand Duo abandonne
La guerre est finie depuis un mois et les cinq pilotes de Gundam, acteurs principaux de cette victoire, doivent reprendre une vie normale. Mais ce n'est pas si simple, ils sont contents et en même temps, ils ressentent un grand vide et se sentent inutiles.
Pour Quatre, la situation est simple, il reprend la tête de l'empire familial et se retrouve avec de grandes responsabilités qui nécessitent sa compétence de stratège, il n'a pas le temps de se poser trop de questions.
Trowa qui est le compagnon de Quatre depuis plus d'un an a déjà longuement réfléchi et entame des études afin de devenir vétérinaire et utiliser au mieux son don avec les animaux.
Wufeï a surpris ses camarades en reprenant des études artistiques alors qu'ils pensaient tous qu'il allait s'engager chez les preventers pour continuer à combattre l'injustice, son cheval de bataille. Depuis que Wufeï fréquente Sally, il a vraiment beaucoup changé, il devient plus doux, moins inflexible, il laisse voir ses faiblesses.
Duo et Heero se sont engagés chez les preventers, ils ont encore besoin de se battre pour une cause car pour l'instant, contrairement aux autres qui se sont remis en question en choisissant une vie de couple, ils n'ont pas d'autre raison de vivre que continuer à lutter pour instaurer le calme et une paix durable.
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Leurs choix de vie divergeaient mais ils avaient une chose en commun : la certitude de vouloir continuer à vivre ensemble, ils formaient une famille, ils se soutenaient les uns les autres et il était hors de question de briser ce cocon de protection.
C'est ainsi que désormais, ils habitent dans une des nombreuses propriétés de Quatre et qu'ils n'ont quasiment pas changé leurs habitudes. Quatre partage sa chambre avec Trowa et ils vivent intensément leur relation. Wufeï qui a toujours été le solitaire du groupe a investi une chambre mais en réalité, Sally le rejoint pratiquement tous les soirs et elle vit quasiment en permanence avec les anciens pilotes qui l'apprécient beaucoup.
Heero et Duo sont ceux qui ont le moins changé. Ils partagent leur chambre comme ils le faisaient déjà dans leurs nombreuses planques, ils partent ensemble au QG des preventers chaque matin, exécutent des missions en se protégeant l'un l'autre et Duo poursuit ses actions de sape pour pénétrer la coquille du soldat parfait. Heero continue à le traiter de baka et à ne pas lui répondre. On peut pourtant dire qu'ils sont amis et que Duo est, sans conteste, la personne avec laquelle Heero se sent le mieux mais les choses n'évoluent plus et Duo en veut plus. Il sait qu'il aime le japonais aux yeux d'un bleu cobalt glacé depuis la première fois qu'il l'a vu et il n'a eu de cesse de dégeler ce glaçon depuis. Il a réussi en partie mais le conditionnement reçu par Heero, depuis son plus jeune âge, pour ne pas avoir de sentiment est difficile, voire impossible, à renverser.
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La maison est calme, Quatre lit dans le salon et Trowa est en cours. Wufeï est sorti avec Sally et Duo prend une douche. Heero travaille comme d'habitude sur son ordinateur portable et semble très concentré alors que ses doigts enfoncent rapidement les touches de son clavier.
En réalité, il tape n'importe quoi et des suites de lettres incohérentes s'affichent sur son écran. Il réfléchit à son problème actuel : Duo. Il sent que l'américain s'éloigne, il cherche moins le contact physique et Heero a bien compris qu'il attend quelque chose. Heero sait aussi qu'il ne veut pas que Duo s'éloigne, malheureusement, il est incapable de lui donner ce qu'il attend. Il ne sait pas exprimer ses sentiments, ni par la parole, ni par les gestes. Il est bloqué par son éducation, à chaque fois qu'il essaye, son cerveau refuse obstinément d'obéir, pourtant, il ne veut pas perdre Duo.
La porte de la salle de bain claque violemment et Heero se retourne machinalement, Duo entre dans la chambre, torse nu, en essuyant ses longs cheveux aux reflets de miel, qu'il porte habituellement nattés, dans une serviette qu'il jette négligemment sur le sol. Heero retourne à son ordinateur mais il a bien vu que Duo est préoccupé, l'américain ne lui a même pas lancé le plus petit coup d'œil alors qu'habituellement il ne le lâche pas des yeux. Heero se sent en manque, il ne sait pas pourquoi c'est important mais il veut son attention, comme avant…
Duo se prépare puis sans un mot pour Heero quitte la chambre. C'en est trop ! Pour la première fois de sa vie, le japonais suit une impulsion, il ne pèse pas le pour et le contre, n'analyse pas les données, il sait que Duo va aller parler à Quatre et il va les espionner, il veut savoir. Il attend quelques minutes puis silencieusement, il descend les escaliers comme un chat et se poste dans un recoin du couloir qui lui permet d'entendre ce que disent les deux hommes sans se faire voir.
Duo s'est assis silencieusement sur le canapé, toujours plongé dans ses pensées. C'est ce silence qui sort Quatre de sa lecture car « Duo » et « silence » sont deux concepts profondément antinomiques. De plus, son empathie lui indique que Duo est tourmenté et triste. Il pose son livre, se rapproche de son compagnon et passe son bras derrière sa tête.
- Allez chaton, viens ici faire un câlin et racontes moi ce qui ne va pas.
En entendant ces mots, Heero se raidit, il n'apprécie pas, mais alors pas du tout, les câlins des deux hommes, il a beau savoir que Quatre est avec Trowa, il ne peut s'empêcher de ressentir de la douleur dés qu'il touche Duo. Comme il ne peut pas entrer arme au poing pour les obliger à se séparer, il respire profondément (et silencieusement) en attendant la suite.
Duo lâche dans un soupir – Heero…
- Qu'est-ce que ce monstre t'a encore fait ?
Quoi, mais j'ai rien fais du tout, moi !
- Rien !
Ha je l'avais bien dit !
- Alors où est le problème ?
C'est vrai ça, y'a pas de problème, il refait attention à moi comme avant et tout sera parfait !
- C'est ça le problème, il ne fait rien. J'ai tout essayé et je crois même qu'à sa manière particulière il me considère comme un ami… Mais on est arrivé au point ultime, je ne vois plus aucun changement et il ne m'aime pas, donc j'ai décidé de lâcher prise. Je ne vais plus le harceler car sinon il va finir par me détester et je veux rester son ami… Faute de mieux.
Mais non, quel abruti, harcèles-moi, je ne demande que ça.
- Tu devrais être plus patient. Tu sais qu'il a déjà beaucoup changé, surtout avec toi. Il t'accepte sans problème dans son périmètre, tu partages sa chambre alors que lorsqu'on l'a connu, toute personne qui approchait à moins de deux mètres de lui prenait une balle entre les deux yeux. Tu l'as dit toi-même, il te considère comme un ami, est-ce que tu te rends compte les progrès qu'il a accompli ? Un ami, il ne savait même pas ce que c'était et encore moins que ça pouvait être agréable. Il est toujours venu à ton secours lorsque tu étais empêtré dans tes missions. Lorsque tu as été blessé, il est resté à ton chevet une semaine sans te quitter une seconde et sa souffrance était visible. Tu ne lui es pas indifférent, loin de là, mais s'il a changé à l'intérieur, il lui est encore difficile de changer de comportement, le conditionnement que lui a fait subir J est trop fort.
Bravo Quatre, ce garçon est intelligent, écoutes-le Duo.
- Je sais tout ça mais la guerre est finie, pourtant, le « perfect soldier » ne disparaît pas. C'est toujours la mission avant tout, je ne montre pas mes sentiments et je hausse le sourcil d'un air dédaigneux à la moindre blague. Monsieur Perfection ne sait pas se détendre et je crois maintenant qu'il ne saura jamais. Parfait il est et Parfait il restera.
- Et sa perfection t'ennuie ?
- Le mot est faible, je n'en peux plus. J'ai envie de le secouer et de l'obliger à profiter de la vie. Mais c'est impossible. Sa perfection n'est pas compatible avec moi.
- Alors qu'est-ce que tu vas faire ?
- Je vais élargir mon horizon, peut-être fréquenter d'autres garçons.
A ses mots, le soldat parfait s'écroule, une faiblesse dans les genoux l'oblige à glisser silencieusement contre le mur du couloir et un nœud dans son estomac l'empêche quasiment de respirer. Son cerveau tourne en boucle en répétant les derniers mots de Duo « fréquenter d'autres garçons ».
Au bout d'un temps qui lui semble interminable, il trouve la force de se traîner dans l'escalier et de retourner dans leur chambre. Il reste un moment debout à contempler le doux fouillis qui règne dans le coin de l'américain, les piles de CD branlantes, la serviette qui est restée par terre, les chaussettes sales qui traînent sous le lit, le désordre des draps et des couvertures qui sont restés dans le même état qu'à son lever.
Puis ses yeux se posent du coté de la pièce qui lui est réservé, un lit fait au carré, pas un gramme de poussière et pas la moindre chose qui traîne. La lumière se fait alors dans son esprit conditionné, les paramètres de la mission sont simples : Duo le laisse tomber parce qu'il ne change pas, si il ne veut pas que Duo abandonne, il doit changer. Voilà, c'est simple, il ne reste plus qu'à élaborer la stratégie et le plan qui vont permettre de réussir la mission.
Tout à coup, Heero se sent beaucoup mieux, il est sur son terrain, il n'a jamais raté une mission et vu les enjeux de celle qu'il vient de se fixer, il ne risque pas d'échouer. C'est d'un pas décidé qu'il se dirige vers son laptop afin de faire quelques recherches sur les sentiments et les comportements nécessaires pour séduire son partenaire et former un couple.
Duo rentre à cet instant dans la chambre et fixe Heero scotché à son ordinateur puis pousse un long soupir avant de prendre son blouson et d'annoncer qu'il sort faire un tour avec Quatre. Ce soupir renforce la détermination d'Heero, il sent que tout n'est pas perdu et il se plonge intensément dans ses recherches pour satisfaire les attentes de l'américain.
Quand Heero élabore sa stratégie
Après avoir cherché pendant plus de deux heures sur tous les sites parlant de comment séduire, comment réussir sa vie de couple ou encore comment rendre son conjoint heureux, Heero est arrivé à la conclusion suivante :
1) Le physique est important.
C'est ce qui attire l'autre en premier, il doit donc s'assurer qu'il plait physiquement au natté. Quand il voit le style de Duo qui est beau comme un dieu et s'habille à la perfection, il se dit qu'il a du travail. Bon, ne pas se laisser décourager par la première difficulté, il a fait exploser les bases les mieux gardées d'Oz, ce n'est pas ça qui peut lui faire peur. Mais il ne faut pas sous estimer la difficulté non plus et, sur ce coup là, il lui faut du renfort car il n'a aucune idée de ce qui est approprié ou pas. Il faut faire l'inventaire des troupes pour trouver la personne la plus qualifiée pour cette mission :
- Réléna ? Beurk, non, Duo ne supporte pas son look de bonbon rose dégoulinant.
- Hilde ? Vraiment trop hard, il ne veut pas se retrouver avec piercings et tatouages.
- Trowa ? Niveau look, il n'a rien à lui envier, non, décidément ce n'est pas Karl Lagerfeld (hé oui, les légendes ne meurent pas !).
- Sally ? Elle a d'autres chats à fouetter et son boulot à l'hôpital lui prend vraiment trop de temps. De plus, Wufeï serait capable de l'embrocher avec son sabre s'il lui demandait de passer une journée avec lui.
- Wufeï ? Même pas en rêve, la mode c'est pour les onas.
La revue des troupes étant bouclée, il ne reste qu'une solution : Quatre. En y réfléchissant, c'est forcément le bon choix puisque c'est le plus proche ami de Duo et qu'il doit donc connaître ses goûts. C'est toujours vers lui que l'américain se tourne quand il a besoin de conseils ou quand il veut se confier.
Phase 1 acceptée : relookage avec Quatre.
La communication est essentielle pour se connaître et résoudre les difficultés.
Bon, c'est sur que là il y a un gros problème, il va falloir arrêter les « Hn » pour formuler des phrases complètes avec sujet, verbe et complément. C'est difficile car il faut lutter contre un conditionnement très efficace, mais rien n'est impossible pour les braves. Heero ressent déjà des tas de choses et il est désormais bien conscient qu'il considère Duo plus que comme un ami. Il suffit juste de traduire les pensées en parole, ce qui ne doit pas être hors de la portée du soldat parfait qui a lu toute la littérature classique lors de sa formation. Si c'est vraiment trop difficile, il pourra toujours pomper sur les meilleurs auteurs. Quoiqu'une déclaration à la Flaubert ne va sûrement pas le faire avec Duo et placer une phrase de Proust sans reprendre son souffle dans une conversation normale, ça va être plutôt coton. Enfin, ce n'est décidément pas irréalisable, donc, phase 2 : exprimer ses pensées (sauf les plus osées qui serait carrément hors de propos dans une étape de connaissance mutuelle, il va falloir du self contrôle pour faire le tri).
Prendre du plaisir à partager des activités.
Ça fait très longtemps qu'il meurt d'envie d'essayer toutes ses choses contraires à son entraînement qui font le quotidien de Duo. Pendant la guerre, il ne pouvait pas se laisser aller mais maintenant pourquoi continuer à se refuser ces plaisirs. Combien de fois a-t-il bavé devant ses tartines dégoulinantes de Nutella alors qu'il se contentait d'un café noir. Combien de fois a-t-il eu envie de se défouler avec lui sur une piste de danse, surtout pour qu'aucun autre ne l'approche et qu'il ne voit que lui. Combien de fois a-t-il eu envie de quitter son ordinateur et ses rapports de mission pour s'affaler sur le canapé et rire avec Duo devant une comédie débile en mangeant des pops corns ? La phase 3 n'est pas difficile et se résume facilement : pizza, cinéma et boîte de nuit.
Heero est satisfait, les grandes lignes de son plan sont prêtes et il peut les mettre en œuvre quasiment toutes en même temps. Pour la partie séduction sur laquelle il est moins assuré, il verra plus tard car il a déjà assez de pain sur la planche.
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C'est au moment où Duo entre dans la chambre qu'il s'aperçoit avec étonnement qu'il est déjà minuit. Pourquoi attendre ? Heero décide de débuter sa mission « changer pour reconquérir le natté » immédiatement. Il ferme calmement son laptop puis se retourne lentement vers l'américain qui commençait à se dévêtir.
- Bonsoir Duo, tu t'es bien amusé ? Ça ne te dérange pas si je prends une douche ?
Il regarde avec satisfaction un Duo, arrêté en plein élan avec une jambe en l'air pour sortir de son jean, les yeux écarquillés et une bouche évoquant un poisson rouge qui vient de sauter de son bocal.
- Je suppose que ça veut dire que tu es d'accord – lâche-t-il avant de se diriger d'une allure sensuelle vers la salle de bain tout en ôtant son débardeur vert lentement, très lentement, en caressant négligemment ses flancs, avant de le jeter au sol dans un mouvement souple et de disparaître derrière la porte. Après tout, pourquoi attendre pour la séduction alors que c'est la partie la plus amusante du plan ?
Duo est resté comme deux ronds de flancs, il se relève après s'être lamentablement viandé (rester en équilibre sur une jambe alors que l'autre est à moitié sortie du jean n'est décidément pas un exercice facile) et fixe désespérément cette pauvre porte comme si elle pouvait apporter des réponses aux questions douloureuses qui se pressent dans sa tête.
Puis, il se ressaisit en pensant que les deux whiskys coca absorbés précédemment devaient être plus forts que prévu et que c'est la cause de l'hallucination qu'il vient d'avoir : un Heero qui lui parle gentiment et qui est plus sexe et provoquant que le meilleur acteur porno du moment. Pourtant, le débardeur vert échoué au sol comme une méduse sur la plage semble bien réel. Il préfère se coucher, après une bonne nuit de sommeil, il retrouvera sans aucun doute son Heero monosyllabique et inexpressif. Oui, voilà c'est ce qu'il faut faire. Ce qui ne l'empêche pas de faire des rêves plein de petits japonais pas très habillés.
De retour de sa douche, Heero ne peut s'empêcher de rester un long moment en contemplation devant son baka dénatté pour la nuit, étalé de tout son long sur les couvertures avec un sourire béat sur les lèvres.
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A son réveil, l'instinct de conservation surdéveloppé de Duo lui indique immédiatement des ondes anormales dans son périmètre proche, pas de danger mais quelque chose cloche.
Il se redresse donc prudemment sur son lit et cligne plusieurs fois des yeux pour ajuster sa vision à la pénombre. A première vue, il ne détecte aucune autre présence mais jusque là rien d'anormal, Heero se lève toujours à l'aube. D'ailleurs, en y réfléchissant bien, il n'a jamais vu le soldat parfait dormir, il se couche toujours le dernier et se lève le premier, c'est homme n'est décidément pas complètement humain et il faut être complètement dérangé pour en tomber amoureux.
Pourtant, l'américain sait que le problème vient du « coin Heero », il réalise un focus sur la cible et là, ses yeux s'écarquillent de stupeur, son menton tombe face à l'horreur qui se dévoile à ses yeux et envahit peu à peu sa conscience. Il secoue plusieurs fois la tête, de la manière la plus chevaline qu'il soit, mais la vision d'horreur ne disparaît pas. Il se pince et la douleur qu'il ressent lui assure qu'il n'est pas en train de rêver. Après une analyse rapide des données en sa possession, son cœur se glace car il ne peut arriver qu'à une seule et unique conclusion : il est arrivé quelque chose de grave à son Hee-chan (il ne l'appelle comme ça que dans sa tête car, formulé à haute voix, le suffixe affectueux lui aurait sans doute valu une balle dans la tête).
Aucune autre explication ne peut répondre au fait que le lit de son compagnon n'est pas fait ! Pendant toute leur vie commune (malheureusement amicale), il n'y a pas eu un matin, même avec un départ précipité pour une mission urgente, où il n'a eu au réveil la vision d'un lit fait au carré selon les plus purs préceptes militaires. C'est sur, Hee-chan est à l'agonie et les autres sont sûrement au courant.
C'est au bord de la crise cardiaque qu'il s'habille en maudissant son sommeil trop lourd et se précipite vers la cuisine d'où lui parviennent les bruits caractéristiques du petit déjeuner.
Il ouvre brusquement la porte et reste la bouche ouverte sur le cri qu'il allait pousser pour demander des nouvelles de l'agonisant. Quelque chose ne va pas, les regards que ses trois amis tournent vers lui ne sont pas inquiets mais plutôt hagards et se retournent rapidement vers le bout de la table que Duo ne peut pas voir d'où il est.
Il fait un pas en avant pour découvrir la source de leur surprise : Heero est en train de prendre son petit déjeuner. Dis comme ça, évidemment, ça ne paraît pas un événement exceptionnel et Duo doit rassembler le peu de neurones qu'il n'a pas grillé lors de sa précédente surchauffe en découvrant un lit en bataille, pour classer le flux d'informations qui parviennent à son cerveau :
1– Soulagement – Heero semble en pleine forme.
2– Heero est assis tranquillement à table alors que d'habitude il se sert un café noir qu'il boit en travaillant sur son ordinateur. Cette machine infernale est son principal rival, c'est lui qui occupe tout le temps libre de son japonais et qui est l'objet de toutes ses attentions. Duo a essayé plus d'une fois de terrasser cet encombrant rival mais c'est lui qui a failli y passer à chaque fois car Heero est très susceptible dés qu'il s'agit de la santé de son précieux joujou.
3- Heero est en train de déguster une tartine grillée recouverte d'une épaisse couche de Nutella ! Alors là c'est le comble ! Duo ne peut même plus se rappeler le nombre de fois où le soldat parfait a critiqué son amour inconditionnel de la célèbre pâte chocolatée avec des arguments totalement débiles provoquant à chaque fois le même dialogue de sourd « raison vs passion ».
- Tu devrais arrêter de t'empiffrer au petit déjeuner avec cette pâte sans aucune qualité nutritionnelle pour renforcer ton organisme.
- Mais c'est n'importe quoi ! T'écoutes jamais la pub ? Avec deux tartines, ton organisme est prêt pour une matinée de travail intensif.
- Duo (soupir résigné devant l'incommensurable bêtise du dénommé). Je pense que tu es au courant que la publicité et un outil pour faire vendre le produit. EN CONSEQUENCE, ELLE MENT BAKA !!!
- Mai euh… Je ne suis pas un crétin et c'est trop bon, ça suffit comme raison, non ?
- NON. La nourriture n'a pour seule utilité que de combler tes besoins physiques. Le Nutella n'a aucun intérêt et peut être nocif car il contient trop de sucre et de graisse. DONC, c'est idiot d'en manger. Point final à la discussion.
- « … » (Duo reste sans voix devant une logique aussi tordue).
4- Non seulement il déguste du Nutella mais il le fait avec une gourmandise qui frôle la sensualité pure. Duo, tout comme ses camarades, ne peut se détacher de ce fascinant et surréaliste spectacle.
Heero affalé sur sa chaise, le corps complètement renversé en arrière, ses yeux mi-clos ne laissant qu'entrapercevoir le bleu si spécial de ses iris. Ses mains effleurent du bout des doigts la tartine de Nutella que son bras replié ramène lentement vers sa bouche entrouverte. Ses lèvres légèrement humidifiées tremblent par anticipation du plaisir attendu par ses papilles. Lorsque enfin l'objet du désir entre en contact avec sa bouche, il retrousse délicatement ses lèvres et mord tendrement dans le pain croustillant. Il referme alors sa bouche et reste quelques secondes immobile, laissant son palais s'imprégner du chocolat déjà légèrement fondu par la chaleur du pain, puis il mâche lentement avant d'avaler avec délice, tous les traits de son visage respirant le plaisir.
Ce spectacle dégage tellement de sensualité que Duo se sent flotter, il ne peut plus réagir et reste immobile à fixer son Hee-chan.
Lorsqu'il a enfin fini sa tartine, Heero se redresse lentement et semble prendre conscience de la présence des autres, il pose alors ses magnifiques prunelles cobalt sur Quatre
-J'ai besoin de ton aide, peux-tu m'accorder du temps aujourd'hui ?
Quatre est tellement surpris qu'il reste sans voix et Heero considère cette non réponse comme un oui
- OK, on se retrouve dans une demi heure et on prend ma moto.
Trowa fixe Heero avec un regard où se mêlent stupeur et fureur, de quel droit le soldat parfait veut-il monopoliser son Quatre ? Mais la main de son petit blond qui lui caresse lentement l'avant bras en signe d'apaisement le dissuade d'intervenir. Considérant que tout est réglé, Heero se lève et, en passant près d'un Duo toujours pétrifié, il s'approche de son oreille pour lui murmurer
- Tu avais raison depuis toujours, il n'y a rien de mieux que le Nutella le matin.
Duo doit prendre quelques instants pour gérer toutes les émotions et sensations qui le parcourent. Désir – ses hormones ont réagi au quart de tour à la dégustation de pâte chocolatée et s'il les avait écouté il aurait sauté sur Heero, l'aurait basculé sur la table de la cuisine et… Non stop, il faut vite penser à autre chose. Bonheur – c'est quand même la première fois que Heero lui donne raison et qu'il partage un des ses plaisirs. Jalousie – pourquoi a-t-il demandé à Quatre de l'accompagner et pas à lui ? C'est la natte hein ? C'est ça le problème, il n'aime pas les cheveux longs !
Une fois son calme à peu près revenu, il se tourne vers Quatre pour lui intimer d'un ton sans réplique
- plus jamais, tu m'entends, plus jamais, tu n'achètes du Nutella !!!
- Mais c'est ce que tu préfères au petit déjeuner !
- C'est vrai, mais encore une séance comme celle là et moi, qui me suit autoproclamé Shinigami, je meurs de frustration, ce qui serait du plus ridicule pour le dieu de la mort, non ?
Quand Quatre s'éclate
A leur arrivée en centre ville, Heero propose à Quatre d'aller prendre un verre afin de lui expliquer ce qu'il attend de lui. Ils se rendent ensuite dans le plus grand magasin pour homme afin de renouveler la garde robe du soldat qui veut passer de parfait à séduisant.
- Tu sais Heero, c'est bien de vouloir plaire à quelqu'un mais il faut d'abord que tu sois bien dans tes vêtements. Tu ne pourras jamais être séduisant dans des vêtements qui ne reflètent pas ta personnalité. Alors dans quoi te sens-tu particulièrement à l'aise ?
- Débardeur et spandex.
- D'accord… Bon, mauvaise question. Tu oublies ta tenue habituelle car même si ton short en lycra met ton joli postérieur en valeur, c'est un tue l'amour.
- Hn.
- Vu l'éclairage que me donne cette réponse, je vais faire une sélection de vêtements qui me semblent te correspondre et tu vas essayer pour voir dans lesquels tu es le plus à l'aise. D'accord ?
- NON ! Je crois que tu n'as pas bien intégré les paramètres de ta mission ! Tu dois trouver des vêtements qui plaisent à Duo, le reste n'a aucune importance.
- Ce n'est pas la peine de me faire ton regard « tu vas mourir dans d'atroces souffrances ». Tu m'as choisi pour cette mission, maintenant tu EXECUTES.
Après un nouveau regard qui tue copyrighté Heero Yuy, le soldat parfait reconnaît la valeur de l'argument et un long calvaire commence pour lui.
Il suit Quatre qui s'arrête à tous les rayons pour prendre des vêtements qu'il lui entasse sur les bras. C'est un Heero surchargé et déjà épuisé qui arrive à la cabine d'essayage pour jouer au pretty boy.
Au bout d'une heure de supplice, Quatre se déclare satisfait par le style « sexy chic » des vêtements choisis. Heero soulagé se dirige à grand pas vers la sortie mais Quatre ne l'entend pas de cette oreille ;
- Où crois-tu aller comme ça ?
- Mission réussie : on rentre.
- Tu ne crois quand même pas que je viens de passer autant de temps à refaire ta garde robe pour que tu gardes aux pieds tes affreuses baskets jaunes qui ne ressemblent à rien ?
- Hn.
- Direction les magasins de chaussures et plus vite que ça !
Au bout de deux heures supplémentaires de torture, Heero dispose de toutes les chaussures nécessaires pour le jour, la nuit, le sport, la détente, le golf… Il est plus que soulagé de se retrouver enfin sur le parking lorsqu'il réalise qu'il y a un énorme problème. De grosses gouttes de sueur coulent sur son front et il retourne un visage désespéré (mais néanmoins superbe) vers Quatre qui lui sourit hypocritement.
- Je crois que tu n'as pas préparé correctement la mission. Nous ne pouvons pas ramener tous les paquets sur la moto. Donc, je ne vois qu'une solution, tu cherches un taxi et je ramène la moto.
Sur ces mots, il démarre laissant un Heero qui rassemble toute sa fierté pour ne pas s'écrouler en larmes au milieu du parking.
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En rentrant dans la maison, Quatre est mort de rire et c'est presque en pleurant qu'il pénètre dans le salon où Trowa, sourcil gauche levé en signe d'exaspération, lui fait clairement comprendre qu'il a intérêt à s'expliquer très vite. Quatre se laisse tomber sur le canapé à coté de son chéri toujours impassible et prend quelques minutes pour se remettre de son fou rire.
- Ça fait du bien, j'ai dû me retenir toute la matinée pour ne pas rire ! Où sont les autres ?
- Wufeï est à la bibliothèque et Duo est sorti furieux après votre départ. Il m'a juste dit qu'il allait faire un tour. Maintenant tu vas m'expliquer ce que tu as fait avec Heero et d'ailleurs où est-il ?
- Il doit rentrer en taxi et à mon avis, il va mettre du temps à en trouver un ! Mmmwwouaaaaaawwwoaaaaaaaaaaaaa !!!!!!
Devant l'air exaspéré de son plus vraiment impassible mamour, Quatre se reprend vite pour enfin donner les explications tant attendues.
- Tu ne devineras jamais ce que cet imbécile a inventé !
- Non, c'est pour ça que j'attends que TU M'EXPLIQUES !!!!!
- Heero a entendu notre conversation lorsque Duo s'est plaint de sa perfection et comme il a enfin compris qu'il tient à lui, il a préparé un plan afin de séduire son natté…
- Mais pourquoi tu ne lui as pas dis que Duo fait une crise de ce type à peu près tous les mois et que ça ne l'empêche pas de continuer à lui courir après dès le lendemain.
Pour toute réponse, Quatre lui offre le regard le plus innocent de ses grands yeux bleu turquoise. Du coup, Trowa s'inquiète sérieusement car ce regard signifie qu'une idée machiavélique a germé dans l'esprit de son petit blond.
- Qu'est-ce qui t'es passé par la tête ? Il suffisait que tu dises à Heero que son baka lui était tout acquis et ils arrêtaient une fois pour toute de jouer à je t'aime moi non plus et de nous casser les pieds par la même occasion.
- Tu as raison, mais justement tu ne crois pas qu'on a le droit à une petite compensation pour avoir supporté toutes les crises de mélancolie de duo et les colères froides de Heero parce qu'il ne sait pas comment se comporter ?
- Je ne vois pas de quelle compensation tu parles.
- S'AMUSER A LEURS DEPENS BIEN SUR !!! Pour l'instant, je ne connais que la phase 1 du plan « séduire Duo » puisque j'ai passé ma matinée à relooker Heero pour la mettre en œuvre. Tu aurais vu sa tête quand je l'ai forcé à essayer une tonne de vêtements ! J'ai cru que je ne pourrais pas me retenir de rire lorsqu'il est sorti de la cabine dans un ensemble en cuir digne des Village People. Il n'a pas voulu me révéler le reste de son plan mais je suis sur qu'on va s'amuser comme des fous.
- Tu sais qu'avec ces deux là ça pourrait mal tourner. Ils sont capables de ne jamais se mettre ensemble parce qu'ils sont incapables, l'un comme l'autre, de faire le premier pas. D'ailleurs, on serait peut-être dans le même cas si je n'avais pas pris mon courage à deux mains !
- Si ça dégénère j'interviendrai mais en attendant, je compte bien m'amuser un peu.
- C'est vrai qu'après le coup du Nutella ce matin, j'ai hâte de voir la suite ; J'ai bien cru que Duo allait nous faire une crise cardiaque.
Les deux compères éclatent de rire à ce souvenir mémorable. C'est le moment que choisit Duo pour rentrer manifestement de mauvaise humeur. Il s'affale sur un fauteuil en portant un regard noir sur les deux complices gondolés.
- Je vois que vous avez le moral, c'est bien de rigoler comme des bossus alors que moi je ne sais plus où j'en suis. Non mais vous avez vu Heero ce matin, c'était quoi ça ? D'ailleurs qu'est-ce que vous avez fait tous les deux ? Où il est Heero, qu'est ce que tu en as fait ?
- Calmes toi ! Il m'a juste demandé de l'aide pour refaire sa garde robe et il est rentré en taxi car les paquets étaient trop nombreux pour qu'on les rapporte avec la moto.
- Ha c'est ça…
Tout à coup, les yeux de Duo s'agrandissent et il fait un bond pour se retrouver face à Quatre, les yeux étincelants et les mains sur les hanches.
- QUOI ?????!!!!!!!!!! C'est quoi cette histoire. Depuis quand il s'intéresse aux fringues celui là ? Et surtout depuis quand il estime que tu es un expert en mode ? Tout le monde sait que c'est moi le roi du shoping et du bon goût. Mais qu'est-ce qui lui arrive ? Il faut absolument qu'il consulte un psy, je crois qu'il a un contrecoup à son conditionnement de soldat parfait. My God, il devient fou !
Les petites cellules grises de Duo fonctionnent à plein régime pour comprendre pourquoi son Hee-chan s'intéresse subitement à des choses aussi futiles que ses vêtements. Un flash éblouissant traverse son cerveau et la seule réponse possible lui apparaît. Cette révélation le fait retomber comme une larve suintante et amorphe sur son fauteuil.
- Sheet, fucking bastard, he's in love ! La détresse a toujours tendance à le faire revenir à sa langue maternelle.
- Qu'est-ce que tu marmonnes l'interroge Quatre légèrement inquiet de la pâleur de son ami.
- Je viens de comprendre, il est amoureux.
- Comment serait-ce possible puisque tu dis toujours qu'il n'a pas d'émotions ?
- ça je n'en sais rien mais crois-moi, je vais le découvrir et surtout je vais trouver de qui afin de descendre cette personne sans aucune moralité. Comment oser séduire quelqu'un d'aussi pur et parfait, c'est vraiment dégueu !!!
- Je pense que tu as raison, il faut découvrir de qui il s'agit et le descendre répond Quatre en essayant de ne pas regarder l'œil pétillant de rire de Trowa.
Fort de cette approbation, Duo se rend sur le champ dans leur chambre afin de débuter immédiatement son enquête. Il commence bien sur par son portable chéri et la découverte de l'historique des consultations Internet le conforte dans ses pires craintes. Il est tellement pris par la découverte de tous les sites sur la séduction et le couple qu'Heero a consulté qu'il met quelques secondes à réaliser que la porte s'est ouverte. Il appuie précipitamment sur la touche arrêt du laptop avant de se retourner d'un air qu'il veut dégagé.
- salut Heero, tu as passé une bonne journée ?
A suivre