Chapitre 1 : L'halalli
Il était un simple spectateur.
A une vingtaine de mètre de sa position, aculée contre le mur de brique se trouvait une femme. Son bras droit tendu devant elle, tenant un long morceau de verre au bord tranchant s'enfonçait dans sa peau jusqu'au sang s'égoutte doucement jusqu'à former une petite flaque rouge au milieu des détritus et de l'eau croupis.
Elle se tenait maladroitement sur ces jambes, son bras gauche plaqué sous sa veste contre son abdomen. Sa respiration était rapide et bruyante. La sueur s'écoulait le long de son front, ces cheveux en bataille lui donnait un air d'animal sauvage pris au piège entouré de ces chasseurs attendant le bon moment pour lui administrer le coup fatal.
Ces yeux se baladaient entre les trois hommes qui lui faisaient face. Le premier, le plus grand des trois s'avança finalement pour mettre à terme à cette mascarade. A la vue du long couteau au dent cisaillé ne fit qu'augmenter la volonté à la femme de vouloir se battre. Raffermissant sa tenue sur son arme de fortune, elle attendit le bon moment.
- Allez chérie… Tu vas finir par te faire plus de mal l'interpella-t-il du voix rauque tout en s'avançant prudemment.
Elle ne répondit rien, ces yeux restant fixer sur l'homme au couteau. Elle essaya de contrôler sa respiration diminuant progressivement les battements de son cœur fou.
C'est là qu'il le vit en elle.
Sa détermination. Son envie de rester en vie quoi qu'il en coûte.
La détermination était l'une des armes les plus dangereuses au monde. Il était bien placé pour le savoir. Il était né dedans.
Le premier coup de couteau se déroula extrêmement vite pour un citoyen lambda alors que de son point de vue il vit l'action aux ralentis. Le pied droit de l'homme s'avança vers la femme, se tenant à un moins d'un mètre d'elle, il plongea rapidement en direction de la main qui tenait le morceau de verre. Voulant en premier lieu la désarmer.
Elle esquiva habilement le premier coup, attendant à la dernière seconde pour s'accroupir et de tendre sa jambe droite pour faire tomber l'homme. Celui-ci alla pratiquement s'écraser contre le mur de brique. Se retournant vers elle plus menaçant que jamais, il n'eut pas le temps de lancer une nouvelle attaque puisque la jeune femme le frappa avec son arme d'appoint au niveau de son ventre. Tombant à genou tout en se tenant maladroitement le ventre essayant de faire stopper le saignement. La plaie restait superficielle mais fut fatale quand elle planta le morceau de verre dans sa clavicule d'un coup sec.
Il tomba face contre terre, son corps encore parcouru de spasme, le sang s'écoulant abondamment de sa plaie. On pouvait encore entendre le faible gargouillis provenant de la gorge de la victime. Elle se retourna vers le deux autres assaillants, son verre de nouveau dans sa main recouvert cette fois de son sang mélangé à celui de l'homme mort.
45 secondes furent suffisantes pour tuer le premier homme.
Sa détermination était stupéfiante. Il se retrouva pour la première fois depuis longtemps éblouis pour une telle fugue.
Il entendit plus qu'il ne vit, la lourde silhouette de son patron. Sa forte respiration au travers de son masque d'acier était reconnaissable. S'arrêtant à sa hauteur, ces mains perpétuellement accrochés aux sangles de son gilet blindé.
- Ça suffit lui dit-il.
Il acquiesça sèchement de la tête avant de récupérer l'arme dans son dos. Portant l'arme à la hauteur de ces yeux, pris son temps pour ajuster la cible. Cœur ou tête ? Les deux étaient fatales. Viser le cœur était plus difficile qu'il ne paraissait encore fallait-il connaître sa localisation précise, de plus il était protégé par les côtes capables de faire ricocher la balle.
La tête était un bon choix, viser sous la nuque permettait une mort rapide et indolore. Une mort plus simple selon son expérience.
Il prit finalement sa décision. Il dirigea son tir vers le cœur de la femme. Elle méritait une belle mort pour s'être si ardemment défendu. Une si belle détermination était devenue si rare de nos jours.
Elle leur faisait de nouveau face, la colère et la rage de vivre lui permettaient encore de tenir debout. Après le choc de la mort rapide et inattendu de leur partenaire, les deux autres hommes partagèrent un dernier regard avant de sortir à leur tour leurs armes. Une arme de poing pour l'un et un pistolet pour l'autre.
- Espèce de sale garce ! Tu vas la regretter ! Éructa l'homme à l'arme à feu, il s'avança rapidement vers la femme, l'arme tendu devant lui. Lâche ce putain de morceau de verre ! Cria-t-il.
Mais la femme tint bon et ne lâcha à aucun moment son arme de fortune, reculant contre le mur assimilant que la fin était proche. Elle baissa légèrement les yeux vers son ami à terre complètement inconscient. Elle jura entre ces dents, être arrivée si loin, avoir survécu pendant si longtemps et devoir crever maintenant dans ce caniveau, être abattu comme un chien. Jamais !
Elle releva fièrement la tête vers ses bourreaux, rejetant sa chevelure blonde derrière ces épaules. Elle se dégagea de la veste qu'il a gênait dans ces mouvements.
Il se déroulèrent plusieurs choses au moment où la veste tomba sur le sol humide.
Avec une vue parfaitement dégagée entre les deux hommes directement sur la femme et son objectif. Il était prêt à tirer quand la cible fit tomber sa veste, il senti la lourde main de son patron se poser sur son épaule stoppant de peu son tir. Relevant son indexe de la gâchette, il jeta un coup d'œil à sa droite attendant la suite des instructions.
Mais l'homme au masque ne disait rien, regardant avec beaucoup d'intérêt la jeune femme, il fit demi-tour avant de tapoter deux fois sur l'épaule du tireur et de s'engouffrer de nouveau dans les boyaux de la ville.
Il réajuste son arme avant de tirer.
Quand la lourde veste s'écrasa au sol, les deux hommes furent surpris par ce qui était dissimulé qu'ils perdirent plusieurs secondes qu'ils leurs seraient vitales. Profitant du choque, la femme s'élança aussitôt sur l'homme au pistolet. Plantant le morceau de verre dans son bras, celui-ci lâcha son arme, aussitôt le second homme s'avança pour la frapper au visage.
Le sang de l'homme gicla sur son visage et ces cheveux quand un coup de feu retentit. Il tomba sur le sol raide mort, la nuque perforée
Elle se retourna vers le second homme mais celui-ci se tenait la main essayant vainement de retirer le morceau de verre planté dans son poignet. Ne comprenant pas d'où venait le coup de feu qu'il avait sauvé, elle retrouva sa position initiale contre le mur, ces yeux affolés cherchaient le tireur embusqué.
Son attention fut de nouveau accaparée vers l'homme qui retira enfin le morceau de verre profondément planté, il n'eut jamais le temps d'ouvrir de nouveau la bouche que celui-ci s'effondra sur le sol. Un deuxième coup de feu tuant définitivement le troisième homme. Une balle dans la nuque.
Tombant à terre, la panique s'installa de plus en plus dans son corps. Qu'est-ce qu'il se passait ? Qui était le tireur ? La police ? Inconsciemment elle tint fermement son bras gauche avec sa main droite. La douleur qu'elle ressenti lui rappela qu'elle ne devait pas rester ici et attendre de se faire abattre à son tour.
Elle se penchant vers son ami évanouis avant de glisser son bras gauche sur ses épaules, forçant sur ces jambes, elle mit toute son énergie à essayer de le soulever mais rien. Il était trop lourd pour elle s'il restait inconscient. Tombant une nouvelle fois à genou après une nouvelle tentative, elle décida de le trainer s'il le fallait.
Se positionnant au-dessus de lui, prit son bras droit et tira de toute ces forces.
Elle fit deux mètres avant d'entendre des pas derrière elle, se retournant soudainement, elle eut juste le temps d'apercevoir un foulard rouge puis plus rien.
Le coup de cross à la tête qu'il lui donna la fit tomber à terre inconsciente. Il se positionna au-dessus d'elle avant de s'accroupir rangeant de nouveau l'arme dans son dos. Il prit sont temps pour l'observer de près. Ces yeux se baladant en premier sur son visage sale et abîmé par des coupures rouge de sang et des coups avant de s'attarder sur son bras gauche.
Ou plus précisément sur l'absence de bras gauche.
Il était au trois quart coupé et emmailloté grossièrement dans un bandage sanglant. Il déplaça son attention à l'homme qu'elle essayait vainement de sauver. A lui il lui manquait la jambe droite, coupé juste en-dessous du genou.
Qu'est-ce qui leur était arrivé ? Il se retourna entendant plusieurs pas approcher rapidement.
- Débarrassez-vous des corps dit-il en désignant les trois cadavres avant de se baisser et de ramasser la jeune femme inconsciente. Et toi désigna-t-il à un des hommes, prends l'homme sans la jambe.
Ils rentrèrent de nouveau dans les égouts.
A suivre… Chapitre 2 : La fanfare du réveil
