Après m'être longuement battu avec FFnet, j'ai enfin réussi à poster ce premier OS. Ca fait un petit bout de temps que j'y travaille mais l'idée d'en faire un recueil ne m'est venue qu'après avoir achevé l'OS.
Pansy, d'abord, parce que ça faisait très longtemps que je voulais écrire sur elle. Parce que c'est ainsi que je la perçois et qu'elle me fascine. Quant à faire se dérouler l'histoire à Zermatt... Eh bien, pour une fois que je pouvais la placer en Suisse, je n'allais pas m'en empêcher ! (Zermatt, c'est joli, c'est tout près de chez moi, c'est bien !)
Ce texte est important pour moi. Il est bien plus personnel que presque tous ceux que j'ai écrit jusqu'ici. Alors je le poste toute stressée à l'idée de ce que vous allez en penser. J'espère qu'il vous plaira. J'espère que j'aurais réussi à faire passer ce que je voulais.
Je tiens aussi à remercier Azalan, d'abord parce qu'elle m'encourage à écrire, et puis parce qu'elle est là, simplement. Merci mille fois pour tout ! Et puis à Maude qui a eu la gentillesse de me relire, si un jour tu te décides à passer par ici.
Ensuite, les parties en gras sont tirées d'un poème de Prévert qui s'appelle Les chansons les plus courtes. Parce que Prévert, c'est un type bien.
Disclaimer : Tous les personnages appartiennent à notre chère JKR !
Titre : Chers Oiseaux
Résumé : 'Zermatt, avant, c'était un soleil savoureux, des flocons au coin des lèvres.' Mais à présent, ils sont comme des oiseaux en cage et ils tournent en rond, chacun à leur façon.
Rating : K
Bonne lecture !
Je n'aurais pas dû y penser. Je n'y aurais pas pensé… si tu n'avais pas été là. Et, dans une autre situation, j'aurais presque ri de ma malchance.
Je m'en vais me perdre dans les montagnes suisses pour t'oublier, et je t'y retrouve quelques jours après. Pourtant, en Suisse, il y en a pleins, des montagnes… et des stations de ski, plus chics les unes que les autres – d'ailleurs, qu'est-ce que tu fais dans un endroit pareil ? Zermatt, ce n'est pas pour les gens comme toi… Ce sont les perfides petites orgueilleuses de mon genre qui s'y retrouvent, pour s'enivrer de vin et fumer jusqu'à en avoir mal à la tête.
Granger tu n'as rien compris.
Je remets du sucre dans mon chocolat. Quand j'y tremperai les lèvres, je le sais, il sera imbuvable, et je t'en veux, c'est bête, je t'en veux terriblement d'avoir gâché mon petit-déjeuner. Et mes vacances. Et… tout le reste.
Dehors, les rayons s'étirent péniblement. C'est comme si un peintre avait secoué son pinceau pour ne jeter au final sur sa toile qu'une ou deux gouttes de couleurs qui s'étalent autours de moi.
Il a neigé toute la nuit et à regarder par la fenêtre, on ne voit que du coton, milles nuances de blanc.
Je tremble. Un peu, beaucoup, je m'en aperçois à peine, je ne sais pas quoi penser, je tremble, ramène mes mains tout contre mon corps. Je n'aurais jamais dû te recroiser. Même de loin, dans une rue, ça aurait été au-dessus de mes forces, et tu es là, à quelques tables de moi, avec ton sourire innocent, cette part de candeur qui m'a poussé, il y a tellement longtemps, à te désirer.
Tes doigts virevoltent, ils piquent des morceaux de fruits, touchent à tout, s'imprègnent. Je ne sais pas de quoi tu parles mais les autres rient, tu secoues la tête, fais de grands gestes. Weasley s'accroche à ton regard. Je me crispe sur mon siège.
Sa main. C'est sa main qui remonte, lentement, elle coulisse sur ta peau laiteuse, caresse ton bras, tes épaules… et toi tu lui souris. D'ici je vois ses ongles qui s'enfoncent tendrement, et il trace des cercles, chasse une mèche et comme tu ne réagis pas, il se penche tout contre toi. Te murmure quelque chose, je tuerai pour l'entendre parce qu'à te voir comme ça, tout se tord dans mon ventre.
Je ne peux pas me détacher de la scène.
Ses lèvres, à quelques centimètres des tiennes. Ses lèvres entrouvertes, ses dents qui étincèlent, et ta bouche qui se plisse, encore un sourire, mais tellement léger, trop léger, vous êtes si prêts…
Je rajoute du lait jusqu'à ce que la tasse déborde. Alors j'enfonce ma cuillère, je touille, je ne pleure pas, le chocolat gicle, voilà, partout, sur l'assiette, sur la nappe, et encore plus fort, je veux que la couleur disparaisse, encore du lait, du lait jusqu'à ce que tout devienne crème, et je tourne, je touille, je tourne cette foutue cuillère qui ne sert à rien.
Moi, Granger, je te voulais toute entière.
L'oiseau qui chante dans ma tête
Le soleil. Le tremblement qui agite le coin de tes lèvres. Tes yeux qui ne lâchent pas les miens. Qui suivent chaque mouvement, chaque pas en avant. Et ton souffle. Saccadé. Tes grands yeux chocolat, alarmé, alarmant. Ta fascination. Mon voix hachée. Les mots qui peinent à traverser tes lèvres. Ton immobilité.
« Qu'est-ce que tu fais ? »
Cette salle de classe. Ce devoir à rendre. Ou cet exposé. Ou ce dossier. Je m'en fiche maintenant. Ta plume brisée, la fenêtre ouverte. Toi sur cette chaise. Mes insultes s'y sont accrochées. Ta bretelle qui glisse. La chaleur d'un mois de mai. Tes mains crispées sur ta baguette. J'ai tout jeté. Tout piétiné. Tu vois, tu vois, tu m'emmerdes, je te hais, regarde donc ce que j'en fais de tes conneries, de tes précieuses notes. Le tremblement encore. Mais partout sur ton corps. Mon souffle sur ta joue.
« Qu'est-ce que tu fais… »
Tu as cédé. Ta voix s'est essoufflée.
Le bureau par terre. Mon assurance. Et tout doucement tes lèvres. Tes lèvres qui s'avancent. Des rayons éblouissants. Le bruit de l'eau. Et mes mains qui s'appuient. Tes mains qui me retiennent.
Et me répète que je t'aime
Et me répète que tu m'aimes
Je veux me concentrer sur ces images. Pas sur la suite, pas sur ton corps qui se détache, tes yeux qui s'écarquillent. Je ne veux pas me souvenir de ton air affolé, du regard que tu m'as jeté, et surtout pas, surtout pas entendre ta voix lorsque tu as dit : Je ne suis pas… comme ça.
Avec ce ton. Ce plissement sur tes lèvres. Ce mépris criant, qui traverse ton visage crispé, un mépris furtif qui s'en va aussi vite qu'il est apparut, mais je l'ai vu. Alors voilà. Tu n'es pas… comme ça.
Tu t'en es voulu après, je le sais, je l'ai senti. Quelques secondes de plus et déjà ton visage se décomposait, je t'observais te débattre avec les mots, les trier, comme ils devaient tourner dans ta tête ! Comme ils devaient se presser à tes lèvres et pourtant, un par un, tu les as tous chassés. Tu as cherché les Mots. Ceux qui te déculpabiliseraient. Mais tu ne les as pas trouvés et tu as fini par ne rien dire du tout.
De toute façon, je suis partie. Je t'ai dit : C'est bien Granger, de ne pas être… comme ça. Voilà qui changera toute mon existence ! – avec un sourire rempli de haine et une voix acide. Tu es restée pétrifiée sur ta chaise. Comme un oiseau empaillé.
Et puis la fin de l'année. Votre camping à travers le pays, les Mangemorts, Voldemort. La guerre. La fin de la guerre. Et deux ans plus tard, tu es ici, à Zermatt, comme cela te convient mal ! Tu n'y connais rien à ces gens. Maintenant que vous êtes des héros de guerre, tu t'es dit quoi, Granger, que tu pourrais peut-être entrer dans la société ? Ou peut-être est-ce l'idée de la petite rouquine qui s'accroche à Potter, avec ses yeux envieux qui détaillaient la moindre parcelle de richesse depuis sa plus tendre enfance. Et qui à présent semble ridicule, avec son café latte et ses petits croissants. La bague à son doigt est trop grosse. Elle hurle : regardez comme je vaux cher. Weasley est trop maquillée. Trop habillée.
On ne met pas une robe pour prendre le petit-déjeuner.
De toute façon, ça crève les yeux qu'elle est née pauvre. Il n'y a qu'à voir sa façon de marcher.
Mais toi, Granger ?Bientôt, tu te teindras en blonde, tu soigneras tes ongles et tu te rendras à des galas de charités ? Non, pas toi… Pas toi, tu n'oserais pas…
J'ai mis du chocolat partout. Maintenant j'éponge. C'est au tour de ma serviette de brunir. De prendre un peu de ta couleur.
J'ai mal à la tête et la bouche pâteuse d'avoir trop fumé hier soir, comme si noircir mes poumons m'aiderait à m'en sortir.
Bientôt, Drago va venir. Je m'accroche à cette idée. Il va venir et il va trouver une solution, il va prendre ma main, me ramener dans ma chambre et tirer les couvertures sur moi. Comme quand on était adolescent. Comme quand j'étais malade. Drago va venir et il va tout arranger parce qu'il me connait bien, lui, il sait toujours quoi faire.
Et Astoria qui dort encore dans sa chambre. Avec Daphné. Et Blaise qui doit dessoûler.
Quand est-ce qu'ils vont arriver, tous, je ne veux plus les attendre seule, je ne veux plus boire de chocolat, je ne veux plus voir toute cette neige et ce soleil qui transperce les nuages me donne envie de pleurer.
« Potter, Granger et deux des Weasley. C'est une blague ?
– Non.
– C'est une putain de blague ?
– Je te dis que non. »
Blaise a sa tête des mauvais jours. Il fume à la fenêtre de sa chambre tout en sachant parfaitement bien qu'il n'en a pas le droit. Que rien que pour ça, il pourrait se faire virer de l'hôtel et nous avec.
« Qu'ils essaient. Ma mère venait ici chaque Noël. Ma grand-mère venait ici chaque Noël. Mon arrière-grand-mère…
– Tu comptes nous faire tout ton arbre généalogique ? »
Drago aussi traine sa mauvaise humeur.
Il n'est pas venu me chercher, bien sûr. Il aurait pu. Il aurait pu glisser ses mains glacées autours de mes épaules et murmurer :
« Je t'ai trouvé, petite alouette. »
Son odeur à lui. Sa force d'homme. Son sourire aux lèvres. J'aurai trouvé là de quoi en rire.
C'était un jeu entre nous.
Je revois sa mère, ses longs cheveux blonds et ses grands yeux clairs, avec cette cage blanche. Une vieille cage à oiseau dont la peinture s'effritait légèrement. J'entends encore le bruit de ses talons lorsqu'elle s'était glissée dans le jardin pour nous retrouver et qu'elle avait dit :
« Regardez ! Regardez l'alouette que j'ai ramenée ! »
Drago s'était approché. Il avait tendu un doigt, et puis un autre, je me souviens que l'oiseau nous regardait avec ses petits yeux ronds et ses plumes défaites. Moi je me tenais crispée derrière et juste lorsque Drago l'avait frôlé, l'alouette avait poussé un cri.
Narcissa a longtemps prétendu que c'était le début d'un chant mais moi je me rappelle la sensation de terreur qui m'avait envahi.
Et la cage s'était ouverte.
Ça avait été si soudain que personne n'avait réagi. En quelques secondes, l'alouette s'engouffrait à l'air libre et se laissait engloutir par le bleu du ciel. On en était resté pétrifié.
Depuis, il disait :
« Tu es pareille. Une petite alouette. Tu es de celles qui disparaissent sans cesse, il faut te chercher, te ramener. Tu ne vas donc jamais t'arrêter ? »
Mais c'était avant. Parce qu'avant, j'étais faible.
Donc, Drago n'est pas venu pour moi, mais il est venu quand même.
Il est descendu pour le petit-déjeuner, a bu son café en levant le sourcil face au massacre de mon chocolat, puis, lorsqu'il a aperçu Granger, les Weasley et Potter, il a manqué de s'étouffer et s'est empressé de remonter.
Je l'ai suivi parce que… Parce que bon, je n'allais tout de même pas rester toute la journée plantée dans la salle à manger de l'hôtel.
Et puis ici je me sens mieux.
Les rayons de soleil se sont agglutinés à chaque recoin des fenêtres. Ils s'explosent sur la neige comme des bulles de savon, se cognent aux cheveux de Daphné, elle rit, et son rire partout résonne, je l'admire, comme elle est jolie, comme elle se penche à la fenêtre et respire l'air, elle s'imprègne de toute cette blancheur, elle avale le soleil. Les autres l'admirent sans cesse. Ils tendent des mains vers elles, les glissent le long de son corps mais toujours elle les rejette. Je crois qu'elle voulait Drago mais Drago veut sa sœur. Et au fond, elle s'en fiche.
Un soir, à Poudlard, elle m'avait confié entre deux verres de vin que plus tard, elle ferait le tour du monde et que pour ça, elle devait être seule. Elle photographierait tout, elle se baignerait dans les lacs, se perdrait dans les déserts et grimperait sur chaque montagne.
Je l'admire pour cette simplicité avec laquelle elle attrape la vie, cette facilité avec laquelle elle la dévore.
« Des Gryffondor ici, répète Blaise en jetant son mégot de cigarette. Putain, l'hiver prochain, on louera un chalet et on engagera une bonne pour faire à manger. »
On s'est dit en bas dans vingt minutes parce que sinon, les pistes se noirciront de boue et de gens.
Je redescends dans ma chambre. Je te le jure qu'à cet instant, je ne pensais pas à toi, non, je t'ai croisé au moment où je m'y attendais le moins. Ton visage. Ta voix. Toi toute entière, tournée vers moi.
Ce n'est pas juste.
Je vacille, je m'étrangle, et puis non, finalement, non, je ne suis pas cette petite chose faible que tu crois percevoir, je me tourne vers toi, je t'observe et tu ne le sais même pas à quel point je suis avide de cette image que tu me renvois. Quelque part au milieu de toute cette neige, je pensais réussir à m'arracher ton souvenir. Le piétiner, le déglinguer. C'est tout ce que je voulais. Te voir disparaître. Je n'arrive pas à respirer, c'est constant, c'est une angoisse qui mord le ventre dès qu'on ouvre les yeux, c'est une terreur qui murmure ton nom, mais je ne sais même plus qui tu es.
Je ne t'ai jamais rencontré. Mais tu es là. Et tu dis :
« Pansy. »
Rien que ça… tu ne devrais pas.
Et puis je réalise. Ta main sur la poignée, les clés dans la serrure. Même ça, petite idiote, même ça, tu me l'as volé. Ici, dans mon couloir, chambre 302. Et tout mon corps se bloque devant la chambre 301 que je voudrais voir disparaître de la surface de la terre.
Ce n'est plus chez moi.
Tu as tes yeux chocolat grands ouverts sur moi, ils me tirent, tu n'imagines même pas. Et mon nom qui s'échappe de tes lèvres, et ce… cette joie qui explose dans mon ventre, qui me fait trembler de honte, je ne peux pas te répondre, il faut que tu comprennes ça… J'ouvre la porte.
Tu ne sais pas. Suis-moi. Si tu m'aimes, je t'en supplie, bloque l'entrée, retiens-moi, pourquoi restes-tu là, debout, plantée, alors que moi je suis en train de m'enfuir, non, non, je t'en prie, pose ta main sur mon bras, répète mon nom plus fort, alors je te jure que je m'arrêterai, que je te regarderai et te parlerai, je suis là, montre-moi que tu ne veux pas me voir disparaître encore une fois…
La porte s'est refermée.
Ici, il n'y a que moi.
Je reste pétrifiée sur mon lit. Tout tourne dans ma tête, je m'étrangle, ça gronde au fond du ventre, je n'arrive pas à pleurer. Je suis glacée, terrifiée, dépassée.
Et puis… et puis l'air frais sur mon visage. Ma main qui cherche mon corps. Qui touche mes joues, s'enroule autours de mes jambes. Je m'étouffe en respirant.
Je suis toute seule. Et je cherche encore les alouettes, la mienne est morte depuis longtemps mais j'entends toujours son cri, et son regard sur moi, ces deux trous noirs qui contrastaient avec le reste de son plumage. Ce qui s'enfuit ne revient pas. Je tourne en rond. Je m'enfonce.
Zermatt, avant, c'était le silence tranquille, les cigarettes du soir, les histoires sans lendemain. C'était un soleil savoureux, des flocons au coin des lèvres. Mais tu es là et tu as sali mon paysage. Tu es chez moi, tu me détruis et tu n'en as pas la moindre idée. Tu m'empêches même de boire mon chocolat parce qu'à présent, tout me ramène à toi.
J'ai fini par me relever et m'habiller, on m'attendait, on a râlé, je me suis laissé entrainer sur les pistes de ski. Ma journée s'est résumée en quelques mots mal alignés : Une bué qu'on souffle vers le ciel, un rire qui se bloque dans la gorge, un soleil rempli d'ouate. Un vide qui me maintient de bout. De longs silences. Et puis le café quand les derniers rayons s'étirent.
« Mais merde, quand est-ce que tu l'épouses ? »
Et Blaise ricane, il tend la main vers moi, attendant que je la frappe, tandis qu'Astoria blêmit, rougit, plonge le nez dans sa tasse et se tait. Drago sourit et Daphné regarde ailleurs.
« Vous nous inviterez, au moins ?
– Après tout ce qu'on a fait pour vous ! »
Des yeux gris faussement exaspérés se posent sur Blaise et moi.
« Allez donc vous faire foutre. »
Et mon rire s'étrangle. Est-ce que ça se calme, là, dans mon ventre ? J'ai peur d'y penser. Tout va trembler, leur bonheur me reste dans la gorge, c'est tellement bête… J'ai fais de ma vie un drame alors qu'eux se sont remplis de soleil.
Je sens encore la chaleur de Blaise contre mes doigts. J'aimerais me tourner vers lui et lui crier de ne jamais me lâcher. À la place, je sers plus fort encore cette main tranquille. Il ne dit rien mais son regard coule sur moi.
Et me répète que je t'aime
Il me reste un oiseau dans le ventre, il respire encore et se cogne contre ma peau, fort, fort, fort. Il voudrait transpercer cette enveloppe charnelle, parfois, d'un coup d'aile, il remonte mais n'en sort jamais.
Et me répète que tu m'aimes
On est rentré en fin de journée, épuisés. Dans le couloir qui me ramène à ma chambre, j'ai regardé partout dans l'espoir de te revoir. Mais non. Non, heureusement, il faut que tu te glisses hors de ma vie.
J'ai pris une douche. L'eau a coulé longtemps sur mon corps, le shampoing m'a piqué les yeux et j'ai tremblé de froid en sortant de là. Je me suis cherchée à travers la buée. Puis je l'ai essuyée.
Mon lit. Mes cheveux mouillés éparpillés sur mon oreiller. Le soleil est reparti, j'ouvre un verre de vin, j'ai envie de fumer, je ne le fais pas. Je bois lentement. Dans une demi-heure, je dois être habillée, maquillée, coiffée, et j'ai la sensation futile que jamais je n'y arriverai. Le temps glisse entre mes doigts ouverts. Ça m'inquiète.
Je vais bien.
Je finis mon verre, je vais très bien.
Je souris à mon miroir, mets du rouge sur mes lèvres.
En sortant de ma chambre, c'est Weasley que j'ai croisé. Il a ouvert de grands yeux étonnés. Je ne me suis pas arrêtée.
Encore du vin. Beaucoup de vin. Des paquets entiers de cigarettes. À nous cinq, on repeindrait le ciel. La nourriture passe entre mes lèvres, je ne sens plus rien. Une autre bouteille. Du fromage fondu tombe sur ma serviette, j'ai perdu mon pain, c'est moi qui paie le vin.
On est sorti du restaurant en riant. Je vacille. Je ne suis même pas en talon, je m'accroche à Blaise, je compte les étoiles et je les montre du doigt. Je fume encore. Toute cette neige… et Daphné me tire en arrière, elle lâche autours d'elle des millions d'éclats de rire.
De la musique. Je réalise qu'on est en boite lorsqu'un bras enlace mes hanches et qu'on me tend un cocktail rouge sang. Il fait noir, je n'y vois rien, je crois qu'il est blond, ou châtain, je n'en sais rien, il a à peine murmuré son nom que déjà je l'ai oublié, je danse, je suis fatiguée, j'ai mal au ventre et à la gorge, et puis non, je pense à toi, je tourne la tête, je souris, il m'embrasse, un fauteuil, je m'installe, je passe mes jambes au-dessus des siennes, il a l'air gentil, je crois, il essuie mon rouge à lèvre et les traces de mascara, où est-ce que tu habites, tu parles français, anglais, oh, jusqu'à quand restes-tu là, tu es jolie, tu ne devrais pas te mettre dans ces états.
« Excuse-moi, elle est avec nous et on va rentrer. Maintenant. »
Blaise m'a remise debout. Je suis surprise par sa force soudaine lorsqu'il prend ma main, mais je n'en veux pas, moi, de son aide, je n'ai pas besoin de lui, je suis assez grande.
« Arrête tes conneries !
– Laisse-moi tranquille, bordel, qu'est-ce que ça peut bien te foutre, tout ça, tu t'en fiches, tu t'en fiches, laisse-moi ! »
Ça ne veut rien dire. Je tremble. Je remonte dans ma chambre. Daphné est derrière moi, elle me prend la clé des mains.
« Je vais le faire, d'accord ? Ne pleure pas, Pansy… Ce n'est pas grave. Ça passera, tu verras. »
Il y a du bruit dans ta chambre, Granger. Est-ce que Daphné t'a entendu rire ? Y a-t-il quelqu'un d'autre au monde qui t'as entendu aussi fort que moi ?
Elle a refermé très doucement la porte derrière moi. J'ai entendu ses pas s'éloigner et je me suis approchée du mur.
Tu es là. Je me cogne aux meubles. Tu es tout près de moi.
Alors voilà. Tout ce que tu avais à me donner, c'était ça. Ce petit cri étouffée, mon nom qui a coulé au bord de tes lèvres et a fait tremblé les murs. Tu ne comprendras donc jamais rien, n'est-ce pas ? Tu as repris ta petite vie tranquille, tu vas te ranger et on finira chacune de notre côté, ce n'est pas grave, je devrais le savoir, je n'ai besoin de personne, mais maintenant je me demande… où est-ce qu'ils iront, mes mots, puisque jamais tu ne les entendras ? Où est-ce qu'ils reprendront du sens, avec qui, avec quoi, est-ce que vraiment ils en valent la peine ? Et toutes ces larmes que j'ai fait couler, cette angoisse qui m'a tordu le cœur pendant tant d'années… Sans toi, qu'est-ce que je ferai ? Où est-ce que je la cracherai ? Je me suis accrochée à ce baiser comme une noyée à sa bouée, pour pouvoir… je ne sais pas… souffrir et faire souffrir. Et je pleure encore. Pour cette guerre qui déferle au fond de moi. Parce que je n'arrive pas à être heureuse, parce que j'ai peur de moi, de ce qui se passera, parce que je ne t'ai même pas eue que déjà je t'ai perdue.
L'oiseau au fastidieux refrain
Je le tuerai demain matin
Je t'aime, tu ne comprends pas, je t'aime, j'ai besoin de toi. Depuis la première fois, et ça n'a pas de sens, je ne te connais pas, mais je sais, moi, que je t'aime, que je t'aime plus que les autres, parce que je te regarde de loin, parce que tu m'as embrassé, il y a très longtemps, parce que tes ongles se sont enfoncées dans ma peau, que ta langue a cherché la mienne, parce que j'ai pu mordre tes lèvres, j'ai pu sentir ton odeur de partout, parce que… parce que durant quelques secondes, je t'ai eu toute entière.
Maintenant je suis collée contre le mur, comme une voyeuse. J'entends ton rire, parfois.
J'ai débranché l'alarme incendie de ma chambre. Je fume.
Je pleure.
Je me demande combien de temps je dois attendre encore. Avant de ne plus te reconnaître. Avant d'oublier ton nom parmi un million d'autres noms. J'aimerais te lâcher dans le ciel, comme un oiseau, te laisser te perdre dans ces nuages opaques, et alors peut-être que je te recroiserai mais je ne m'en rendrais plus compte parce que tu seras semblable à tous les autres oiseaux qui traversent les routes et moi je te dirais que je m'en fiche.
Mais de l'autre côté du mur, toi tu ris encore plus fort.
Voilà, voilà. Ouf, j'espère vraiment que vous avez aimé !
Je suis contente de commencer ce recueil. Depuis le temps que je voulais écrire sur les Serpentards ! Surtout Daphné, qui m'intéresse depuis un bout de temps. Mais je pense que le prochain OS sera du point de vue de Blaise (mais par pitié, empêchez-moi d'écrire avant mes examens !)
Bref, je vous laisse maintenant vous dire ce que vous en avez pensé à travers cette magnifique chose qu'est la review ! ;)
Bisous !
Ana'
