Over the Cuckoo's Nest

Au troisième étage du 12, square Grimmaurd, se trouvait une chambre décorée de manière étrange. Lorsqu'il y était entré pour la première fois, Ron Weasley s'était étonné des barreaux à la fenêtre et du lit fixé au plancher, ainsi que de l'absence de tout autre mobilier.

Hermione avait jeté un coup d'œil et avait déclaré qu'elle ne s'attendait pas à tomber sur une chambre de malade dans une maison sorcière. Rien que le ton de sa voix indiquait qu'elle avait deviné le type de maladie.

Lorsque Sirius résidait encore au 12 – avant de se sauver chez James, bien sûr – son grand-père Pollux avait occupé la chambre. La mère de Sirius n'avait jamais eu beaucoup d'affection pour l'auteur de ses jours, mais n'en avait pas moins fait son devoir de fille obéissante et accueilli son père sous son toit lorsqu'il était devenu évident que les excentricités de celui-ci commençaient à devenir un peu trop importantes.

Bien sûr, il n'avait jamais été question d'envoyer Pollux à Sainte Mangouste. Tout le monde savait que l'hôpital engageait des sang-de-bourbe et des sang-mêlé, après tout, et hors de question d'infliger cela à un Black, même atteint de démence au point de ne plus y accorder la moindre considération.

A titre personnel, Sirius n'avait jamais apprécié son grand-père, et se rappelait avoir terrorisé avec succès Regulus en menaçant de le laisser seul avec la vieille ruine bavante. Tout de même, cela ne signifiait pas qu'il n'avait pas eu pitié de lui.

Pollux Black avait été un mage plutôt brillant, il fallait bien le reconnaître. On ne décrochait pas le poste de président sorcier du Magenmagot ou de haut fonctionnaire du bureau international des lois magiques en étant un manche. Une carrière pareille, c'était difficile à réconcilier avec la vieille ruine qui ne pouvait pas manger sa soupe sans salir ses vêtements et criait de panique en se retrouvant dans le noir.

Dans un sens, c'était la vraie malédiction de la famille Black : ils finissaient tous fous. Parfois à enfermer.

Inutile de le préciser, dès qu'il avait été en mesure de comprendre exactement l'héritage de sa famille, Sirius avait fait des cauchemars où grand-papa Pollux figurait à la place d'honneur. Il avait continué à les faire même après sa fugue de la maison, et Azkaban n'avait rien fait pour arranger les choses, forcément.

En y repensant, la cellule de Sirius à Azkaban ressemblait beaucoup à la chambre fermée du square Grimmaurd. Une petite pièce sans rien d'autre qu'un lit et des barreaux. Et un occupant fou. Enfin, au début. Sirius reconnaissait avoir un peu laissé tomber la lucidité dans les premiers temps de son incarcération, jusqu'à ce que la dépression devienne si écrasante qu'il s'était changé en chien pour la fuir.

Ça avait aidé à lui rendre ses esprits, ironiquement. Ça et savoir qu'il était innocent. Et le désir de ne pas retomber dans le gouffre noir de la dépression. Sa brève plongée dans la folie l'horrifiait, quand il se la remémorait.

Même hors d'Azkaban, il sentait la sueur froide l'inonder en se rappelant les cris qui lui meurtrissaient la gorge et poussaient les Aurors de service à l'attacher à sa paillasse pour qu'il ne s'arrache pas la peau à force de se griffer. Même quand il adoptait la forme de Patmol, il se contrôlait plus que ça.

Il s'était déjà laissé sombrer à l'état de bête, et s'était juré qu'il ne recommencerait plus. Il y arrivait plutôt pas mal.

Excepté les cauchemars où il retournait dans sa cellule. Ou ceux où il avait pris la place de son grand-père dans la chambre fermée. Ces cauchemars-là se faisaient de plus en plus vivaces au fur et à mesure que la captivité de Sirius square Grimmaurd se prolongeait.

Mais il finirait bien par sortir. Un jour, il quitterait définitivement le 12, et laisserait derrière la chambre fermée. Pour de bon, ce coup-ci.