Titre: Le Bien qui fait mal.

Paring: Edward et Bella

Rating: M pour dark thèmes et lemons

Auteures: Mushexor

Publication: On va essayer deux fois par mois.

Résumé: Angleterre, début du XIXe s. Edward Masen est un jeune vampire envoyé à Waves Hill pour être le précepteur de Bella Swan, afin d'acquérir ce qu'il désire le plus depuis près de 70 ans: une vie.


Note:

Bonsoir.

Comme d'habitude, c'est un peu stressées que nous vous proposons notre nouvelle idée qui à la base devait être notre OS pour le concours de Bloody Valentine, mais nous nous sommes dit qu'une fic serait plus appropriée.

Alors pourquoi ce contexte? Déjà, défi personnel lol Puis, nous adorons toutes les deux Jane Austen, c'est un peu un hommage à cette époque qu'elle a décrite dans ses romans. Ensuite, je - Mush - adore l'Histoire avec un grand H, tout élément historique sera donc - normalement - véridique. Vous trouverez des notes en fin de chapitre pour plus d'explications.

En espérant vous charmer... :p Bonne lecture et à dans 15 jours si vous le voulez bien. Bizouxxx!


Le Bien qui fait mal


Prologue

***

*

La diligence roulait à vives allures malgré la pluie qui s'abattait sur le Cheshire, en ce Dimanche 7 Février 1803. A travers la fenêtre, je regardais défiler les champs à perte de vue, les petites fermes et les principaux domaines des membres de la pairie (1) et de la noblesse (2). Ils se ressemblaient tous, fiers et orgueilleux, à l'imagine de leurs propriétaires, surplombant les vallées, dominant les étangs et les forêts.

La quatre chevaux fit un virage serré sur la droite, et je pus contempler cette fois la mer; nous étions presque arrivés.

Je me redressai et serrai dans ma main droite la dernière fiole de sang pour le voyage que Carlisle m'avait donné juste avant mon départ. Il m'avait conseillé de les boire à intermittence régulière afin que la couleur de mes yeux ne change pas trop radicalement et trop brusquement. Je regardai le liquide, fasciné par sa couleur carmin, dégoûté par l'emprise qu'il avait sur moi...

" Fais très attention... Ta mission est la plus ardue de toutes. C'est ta dernière étape avant ton entrée dans le monde. Ne nous déçois pas. "

Pourquoi cela m'était-il arrivé? Pourquoi moi, et pas un autre...

C'était une question que je me posais depuis plus d'une vie humaine.

Parfois, lorsque ma soif était trop difficile, qu'elle était obsédante, aliénante, que j'avais envie de mettre fin à ce calvaire, mourir pour être enfin en paix - ou un semblant de paix - je maudissais Carlisle de m'avoir sauvé d'une mort, certes certaine, mais tellement plus préférable.

Je maudissais mon semblant de vie, mi mort, mi vivant, je haïssais le monde qui évoluait en dehors des murs dans les quels j'étais enfermé depuis près de soixante-dix ans, j'exécrais le sang qui m'aidait à survivre et l'avidité que je ressentais lorsque la gorge puissante d'un homme, le rougissement d'une femme s'offraient - heureusement rarement - à mes yeux.

J'idolatrais la nuit sans étoile que j'apercevais à travers les fenêtres de ma cage dorée, le silence de la forêt décrite dans les romans, le roulement des vagues sur la mer en pleine tempête sur les tableaux qui ornaient le cabinet de Carlisle, la solitude, amie fidèle et bienveillante.

J'idolatrais également la Mort dans toute sa noblesse, Dante et son Enfer, mystérieux et macabre, Horace Walpole et son Château d'Otrante, mystique, hors du temps et tellement irréel, le Marquis de Sade et sa Justine ou les malheurs de la vertu, immoral, redouté... exquis.

" Le domaine de Waves Hill est en vue, Monsieur! " Me cria la voix étouffée par la pluie du cocher.

Je cherchai dans ma poche intérieure le cachet que m'avait remis Carlisle de la part du gouverneur Swan, comte du Cheshire, haut dignitaire de la chambre des Lords et père de ma future élève, Isabella Mary Swan. Une jeune fille de 17 ans à qui je devais m'évertuer à enseigner les arts et les lettres et qui avait déjà renvoyé trois précepteurs cette saison.

Carlisle l'avait choisie tout particulièrement à cause de ça. Son caractère insaisissable, la blancheur de sa peau, la rougeur de ses joues, la mélodie de sa voix, la douceur de son épiderme... Le parfum infernal et entêtant de son sang. Il l'avait rencontré quelques semaines auparavant et il pensait qu'elle était parfaite pour la dernière épreuve de mon apprentissage.

Si jamais j'arrivais à me conduire sereinement avec elle, en parfait gentleman, courtois et discret, si jamais j'arrivais à rester avec elle le temps de presqu'une année sans qu'elle ait des soupçons sur ma nature, sans que je ne goûte une seule fois son sang, alors il m'accorderait ce que je lui demande depuis plus d'un demi-siècle... Une vie. Une vraie. Plus d'enfermement, plus de sang dans des fioles... Je pourrai errer pour l'éternité, voyager, étudier, comprendre, savoir et qui sait, peut-être même... aimer.

Je sentis la voiture ralentir et me penchai légèrement à la fenêtre. Le manoir de Waves Hill se dressait à une trentaine de mètres devant moi, gris, triste. Les grandes fenêtres du rez-de-chaussée étaient noires et semblaient sans vie. Un vrai tombeau... Parfait pour moi, en l'occurence.

Les deux valets s'activaient à descendre mes bagages, et le cocher tentait tant bien que mal de garder les chevaux au calme. Le vent battait en rafales et la pluie tombait de plus en plus fortement.

Je bus ma dernière fiole d'un trait et tendis la main vers le loquet de la portière avant qu'un des valets ne le fasse. Je descendis lentement, le cachet toujours serré dans ma main, lorsque la porte du manoir s'ouvrit sur une jeune femme blonde d'une vingtaine d'années qui essayait de distinguer mon visage et dont le coeur semblait battre d'excitation. Elle finit par dévaler les marches du perron gris et s'avança vers moi en courant, après avoir relevé ses jupons. Elle parla quelques secondes avec l'un de mes gens et se dirigea ensuite vers moi. Je ne la quittai pas des yeux alors qu'elle me détaillait rapidement. J'essayais de me concentrer sur la pluie alors que son coeur battait légèrement plus vite.

Je n'avais pas eu ce problème avec mon entourage; peut-être qu'avec une femme, mes sens étaient plus aiguisés... Elle finit par s'incliner devant moi et me cria pour couvrir le bruit des gouttes qui tombaient - bien que cela n'était absolument pas nécessaire - :

" Bienvenu à Waves Hill, Monsieur Masen. Ma maîtresse vous attend dans le Petit Salon, deuxième porte sur votre droite. "

Elle me fit une révérence et je m'inclinai sèchement à mon tour, voulant m'éloigner le plus rapidement possible de son cou blanc et fin que j'entrapercevais sous la dentelle délicate du col de sa tenue.

Je me dirigeai alors vers le manoir et en montai les marches. Je m'arrêtai un instant et pénétrai dans la demeure.

Mon regard s'attarda alors sur les portraits qui tapissaient les murs - tous des hommes en tenue officielle, les anciens comtes du Cheshire - sur le manque de meuble qui ornait le vestibule, sur le tapis rouge sang qui menait à l'escalier de marbre un peu plus loin sur la gauche. L'atmosphère était austère mais il y régnait une forte personnalité qui incitait au recueillement et au silence lorsqu'on y pénétrait.

Je regardai les portes qui s'étalaient sur ma droite et vis la deuxième légèrement entre-ouverte. Je refermai le coche derrière moi et m'avançai silencieusement, d'un pas aérien vers mon ultime épreuve. Vers celle qui devait décider si j'allais vivre ou mourir. Arrivé devant le double battant, je dépliai et repliai deux fois mes doigts qui ne tenaient pas le cachet et toquai doucement contre le chêne brut.

" Entrez. "

Baissant les yeux, je poussai délicatement la porte et m'avançai dans la pièce.

J'entendis un immense feu crépiter dans l'âtre sur ma droite, des battements de coeur réguliers juste devant, un souffle lent... Je me tournai légèrement et fis une révérence avant de lever enfin les yeux sur elle.

Mon regard voyagea sur une robe d'intérieur bleu presque marine, s'arrêta sur la main diaphane qui tenait un exemplaire de roman à la reliure dorée, remonta sur la taille fine soulignée par une ceinture aussi bleu marine, découvrit le galbe d'une poitrine mise en valeur par un corset, la peau blanche qui semblait irradier à la lueur des flammes, la croix simple en or, portée en ras-du-cou, le cou gracile, fin et enfin ce visage... Des traits délicats et réguliers en forme de coeur, une bouche légèrement pulpeuse et rosée, un petit nez retroussé et de grands yeux marron qui m'observaient à travers d'épais cils noirs. Ses cheveux chatein foncé étaient relevés sur la nuque et elle me toisait d'un regard critique en fronçant légèrement les sourcils.

Je m'inclinai une nouvelle fois avec raideur alors que j'entendais son sang circuler dans ses veines, que j'écoutais malgré moi les battements de son coeur, que je sentais son souffle entrer et sortir de ses poumons, que l'odeur de son corps commençait déjà à m'envahir. Carlisle avait raison: elle était mortelle... Un poison sous une apparence charnelle et délicate.

" Edward Masen, Miss Swan. Je suis mandaté par votre père pour être votre nouveau précepteur. " Murmurai-je.

Je me redressai et mon regard s'attarda encore une fois sur le galbe de ses seins, où je devinai sans mal le coeur pulser. Elle dût s'en rendre compte car ses battements cardiaques s'accélérèrent légèrement mais je restai tout de même un instant à la fixer avant de contempler les gerbes de feu lécher le bois dans la cheminée. Malgré moi, cette vision me fit tressaillir.

" Quel âge avez-vous? " Me demanda-t-elle sur un ton abrupt.

Je jetai un regard à son visage et vis le sang affluer à ses joues. Damnation!...

Elle me demandait mon âge... Je pouvais faire un peu d'humour et lui dire le vrai; je la verrai pâlir ou au contraire, rougir encore plus... Carlisle voulait me faire tenter le Diable...

" J'ai 24 ans, Miss. - L'âge au quel j'ai cessé d'être un humain...

_ C'est bien jeune pour être précepteur. Nous n'avons même pas dix ans de différence.

_ J'ai étudié à Eton et à Oxford. Cela a semble-t-il contenté votre père. Répliquai-je sur un ton acide.

_ Soit. Puisque tel est le désir de mon père. " Répondit-elle sur un ton sombre et froid.

Je la toisai un moment et scrutai son visage pour savoir ce qu'elle était en train de penser.

Son ton froid et méfiant pouvaient n'être qu'un simple subterfuge. Après tout, je n'étais qu'un étranger pour elle et j'allais devoir vivre sous son propre toit, habiter à côté de ses appartements, " dîner " avec elle et lui apprendre ce que toute jeune fille en âge de se marier doit savoir afin d'attirer un bon parti.

La carnation de ses joues était toujours aussi rouge et son coeur battait toujours légèrement plus vite alors qu'elle soutenait encore mon regard sur elle avec aplomb et distance. Je la vis un moment serrer des dents et refermer ses doigts sur le livre qu'elle tenait en tremblant imperceptiblement.

" Votre père m'a confié un cachet à votre intention. " Finis-je par lui dire en m'avançant vers elle avec hésitation.

Elle se redressa et inspira à grandes goulées d'air sans quitter mon visage des yeux ou plutôt, mon regard.

Voulant cacher le malaise qui naissait en moi, je posai rapidement la missive sur la table basse devant elle et me reculai de quelques pas.

Elle brisa le contact visuel et tendit une main fine et blanche pour saisir la lettre, qu'elle décacheta et lut en fronçant les sourcils.

" Bien... Je vous remercie. Vous pouvez monter dans vos appartements, un valet va vous y conduire. " Me dit-elle au bout d'un moment de silence en repliant le message.

Elle commença à se diriger vers la porte sans plus un regard pour moi, avec raideur, lorsque je lui demandai platement:

" Quand voulez-vous commencer vos exercices? "

Elle se figea et me répondit sans me regarder:

" Dès demain matin. Plus tôt nous aurons commencé, plus tôt vous serez libéré de vos obligations.

_ Je crains fort que ma présence ne vous soit imposée plus longtemps, Miss. Votre père m'a mandaté jusqu'à la nouvelle année prochaine.

_ Je ne pense pas qu'il vous tiendra rigueur de ne pas me supporter jusqu'au mois prochain.

_ A l'instar des trois précédents. Répliquai-je, sarcastique.

_ A l'instar des trois précédents. Répéta-t-elle sur un ton glacial.

_ A ce rythme, vous ne trouverez jamais un parti susceptible de vous vouloir. Vous allez pourtant bientôt atteindre la seconde jeunesse... "

Elle eut un sourire moqueur, se tourna vers moi et me défia du regard, ses joues redevenues pâles.

" Il n'est visiblement jamais venu à l'esprit de quiconque que cela pourrait être une finalité de mon comportement.

_ En étant l'une des héritières les plus en vue du royaume, cela semble insensé. Votre père vous mariera, de gré ou de force, n'ayant pas eu d'enfant mâle. Il ne peut se permettre que son nom s'éteigne et il le sait parfaitement. Voilà pourquoi il s'acharne à vous donner un semblant d'éducation que vous devriez être fière de pouvoir recevoir, contrairement à beaucoup d'autres.

_ Cette chance que j'aie, je l'offrirais volontiers à d'autres. Contentez-vous d'assurer vos fonctions, et ne cherchez pas à vous mêler des alliances que l'on tentera de m'imposer. Ce qui concerne ma vie, je m'en préoccuperai seule. Me dit-elle, froide.

_ Vous n'êtes qu'une femme; vous n'avez pas la voix à ce chapitre. "

Ses joues prirent une légère couleur rosée qui me fit déglutir et me crisper. Son coeur avait reprit une cadence plus accentuée et je sentais la colère et le dédain émaner de sa peau.

" Et vous ne valez pas mieux que vos pairs. Vous n'aurez pas plus d'influence sur mon attitude. Rétorqua-t-elle.

_ Là n'est pas mon intention. Je vous mets simplement en garde pour votre avenir et votre comportement envers moi. Vous auriez beau être froide et hautaine à l'image des lieux que vous habitez, vous ne me ferez pas partir. Je suis vraiment curieux de savoir ce qui a poussé mes confrères à fuir votre compagnie.

_ Vous n'allez pas tarder à le découvrir, j'imagine. "

Je la toisai un instant avant de m'incliner avec raideur.

" Je mangerai dans mes appartements, la route a été longue, je vous épargnerai donc ma présence pour la soirée. A demain. "

Elle me fit une légère révérence, et s'en alla d'un pas qu'elle voulait sans doute digne, sans un mot.

Je soupirai et passai ma langue sur mes lèvres, afin de les humidifier un temps soit peu. A peine une demie heure que j'étais là, et ma gorge était déjà sèche. Pourquoi Carlisle m'avait-il infligé ça? Pourquoi me tenter avec tant de véhémence? Car cette femme était une tentation... à l'emportement, l'agacement, la colère, le désir de voir jusqu'à quel point elle pourrait me tenir tête. Le désir de la voir rougir un tant soit peu, de sentir l'odeur de son sang chaud m'envahir.

" Monsieur Masen?... Veuillez me suivre, s'il vous plaît. Je vais vous montrer vos appartements. " Me dit une voix féminine depuis l'entrée de la pièce.

Je me tournai lentement vers elle et vis la même jeune femme qui m'avait accueilli un peu plus tôt. Son coeur battait toujours aussi vite et elle me dévisageait toujours avec autant de complaisance.

Un rictus déforma ma bouche et son coeur s'emballa encore un peu tandis qu'elle tournait les talons et s'engouffrait dans le hall.

Je la suivis sans un mot et montai derrière elle les marches de l'imposant escalier.

" Lord Swan vous a assigné dans l'étage des invités. Contrairement à d'habitude, vous ne logerez pas à celui des domestiques, sous les toitures. La bibliothèque se trouve au premier étage, là où se trouvent les appartements de ma maîtresse; vous pouvez vous y rendre quand bon vous semble. Les instruments de musique s'y trouvent également. " me dit-elle lorsque nous arrivions au second étage.

Je regardai furtivement les quelques portraits - moins présents qu'au rez-de-chaussée - et les natures mortes qui ornaient les murs, m'habituant à la personnalité des lieux. Je m'arrêtai alors devant le portrait d'une jeune femme dont la carnation me rappela étrangement celle de mon hôte. Plus brune, mais aussi pâle et aussi fine, elle surplombait, dans une robe rose pastel, un paysage sombre et inquiétant. Une lumière dans les ténèbres...

" Lady Caroline de Brunswick. Epouse du Prince de Galles, cousin de notre roi, George IV.(3) Une amie autrefois intime de Lord Swan.

_ Les couleurs sont saisissantes... Qui en est l'auteur? Murmurai-je sans quitter le portrait des yeux.

_ Un certain Thomas Lawrence (4), Monsieur. "

Je hochai de la tête en silence et me détournai pour croiser des yeux bleus curieux. Je me reculai d'un pas lorsque je remarquai qu'elle se tenait juste à côté de moi, et ses joues s'empourprèrent. Un grognement imperceptible sortit de ma gorge et elle recula à son tour avant de faire précipitamment demi-tour.

J'entendai son coeur battre follement dans sa poitrine et passai une main tremblante sur mon visage, tentant de retrouver un semblant de calme.

A quelques pas de là, elle ouvrit un double battant sur la gauche et s'engouffra à l'intérieur.

Regardant une dernière fois le portrait, je finis par m'avancer vers mes appartements.

Je remarquai immédiatement mes affaires posées à l'entrée, les fenêtres immenses et claires qui surplombaient le domaine de Waves Hill, le ton vert pastel qui recouvrait les murs et mon regard fut attiré par un nouveau portrait au dessus de l'âtre devant le quel la femme de chambre s'activait.

Les cheveux chatein foncé, le visage en forme de coeur et la peau pâle me rappelèrent ma pupille et me firent frissonner.

" Lady Renee de Winster, comtesse de Swan, notre regrettée maîtresse.

_ Elle est décédée? Murmurai-je en contemplant l'air paisible du visage féminin.

_ Il y a trois années, déjà. Une mauvaise fièvre. Cela a bouleversé mes maîtres, mais de différentes façons. Lord Swan ne vient pratiquement plus en ces lieux à part pour la saison de chasse, et Miss Swan se refuse à quitter le refuge préféré de sa mère.

_ Elle ne va jamais à Londres?

_ Jamais, Monsieur. Ce n'est pas faute à Lord Swan d'avoir essayé. "

Je hochai une nouvelle la tête et m'avançai silencieusement vers les fenêtres, sans m'attarder sur le reste de la pièce.

" Voulez-vous du thé? " Me demanda la femme de chambre quelques minutes plus tard.

Je me retournai pour lui faire face et l'observai un instant avant de secouer négativement la tête. Elle soutint nerveusement mon regard; je le sentais au tremblement de ses mains, à son sang qui pulsait dans sa gorge, à son souffle légèrement saccadé et finit par me faire une petite révérence maladroite.

" Si vous avez besoin de quoi que ce soit, appelez-moi. Je suis à votre entière disposition. "

A ces mots, un rictus déforma ma bouche et ses joues s'enflammèrent une nouvelle fois, me faisant déglutir.

Carlisle avait parlé de mon élève... pas de la femme de chambre.

" Votre nom? Murmurai-je.

_ ... Jessica, Monsieur. Jessica Stanley. Souffla-t-elle, le coeur palpitant.

_ Eh bien, Jessica... Je vous appellerai en cas de besoin. "

Je lui fis un signe de la tête avant de retourner vers le paysage gris, pluvieux et venteux.

De longues minutes après que les portes se soient refermées derrière moi, je me détachai de ma contemplation et me dirigeai vers mes bagages. J'ouvris le plus petit coffre et le regardai avant de sortir une fiole de sang. A la vue du liquide, la gorge s'assécha et l'avidité de me gagna. Je la débouchai et posai mon regard sur le lit recouvert d'une tenture blanche, à ma gauche. J'y allai m'assoir et portai la fiole à mes lèvres.

Je fermai les yeux lorsque le sang coula le long de ma gorge et réprimai un grognement de satisfaction alors qu'une question commençait à tourner dans ma tête pour la première fois depuis mon départ: étais-je vraiment prêt à affronter ça?...

A suivre...


(1) et (2): rangs sociaux de la haute société anglaise

(3): Caroline de Brunswick ( 1768 - 1821 ) épouse du Duc George-Frédéric Auguste de Hanovre, prince de Galles. Fut la maîtresse du peintre Thomas Lawrence.

(4): Thomas Lawrence ( 1769 - 1830 ) célèbre portraitiste anglais.