Yuri en avait par-dessus la tête de tenir la chandelle à ses parents adoptifs. Oui, il était heureux de voir que Yuri et Victor étaient toujours aussi amoureux après trois ans de mariage, mais leurs lancers de bisous volants étaient pires que pathétiques. Ils étaient écœurants.
Les mains dans les poches, son pied rencontra rageusement un caillou qui traînait sur le chemin. La Russie avait beau être son pays natal et resplendir sous la neige hivernale, il haïssait vivre ici. Les entraînements étaient pénibles, la vie familiale insupportable et sa vie sociale inexistante. Tout était trop parfait pour que Yuri se sente heureux. Il avait cette impression de fausseté qui le mettait mal à l'aise.
Un vrombissement sur sa gauche suivit d'une exclamation plus ou moins vulgaire attira son attention. C'était un garage privé mais ouvert sur la rue. Des outils trainaient partout autour d'une moto d'un noir profond et lorsque Yuri laissa son regard vagabonder dans l'intérieur, ses yeux accrochèrent une forme en mouvement. Un jeune homme d'à peu près son âge, plutôt grand avec des cheveux noirs coupés undercut. Le blond le reconnu tout de suite.
« Otabeck ?! »
Deux yeux gris acier se fixèrent dans les siens et Yuri eut un peu de mal à respirer. Il se sentait mal, et honteux et il avait désespérément envie de fuir. Une main agrippant fermement son poignet l'en empêcha, et en moins de trente secondes il fut plaqué contre un mur froid, une bouche ravageant la sienne. Ses mains sortirent de ses poches pour essayer de remettre de la distance entre eux mais elles aussi furent emprisonnées.
« Ota...nhg. Ota... ah. Ota ! »
Malgré les tentatives avortées pour le repousser, le noiraud ne l'écoutait pas. Il continuait de l'embrasser comme si Yuri était son sang, son oxygène et sa raison de vivre. Ce que le blond appréciait plus qu'il ne le devrait, et au bout d'une minute ou deux, il se laissa aller.
Il lui avait manqué.
Après leur premier championnat, Otabeck Altin avait disparu du monde de la glace pour devenir mécanicien. Yuri Plissetsky et lui avaient eu une relation pendant un an après ça, mais la distance les avait séparés lorsque le plus jeune était parti rejoindre ses parents adoptifs. Surement la décision qu'il regrettait le plus dans sa vie.
Les mains se firent plus fermes sur ses hanches et son ex relâcha finalement sa bouche, rougie et gonflée de tous les regrets qu'ils portaient dans leurs cœurs. Leurs yeux se fixaient comme s'ils détenaient la solution à la douleur qu'ils ressentaient. Puis un front chaud se posa contre le sien et Otabeck parla enfin :
« Si tu savais comme tu m'as manqué. »
Yuri, habituellement froid de toute émotion, senti ses larmes remonter au bord des yeux. Il n'avait jamais voulu le blesser, il n'avait jamais voulu qu'il souffre mais… mais il avait eu peur de leur relation, de son intensité et de ce qui l'attendait s'ils continuaient. Il avait été lâche. Il l'avait abandonné.
« Pardon. »
Sa voix s'étrangla, mais il l'avait dit. Et il le pensait sincèrement. Une larme glissa silencieusement sur sa joue, et un pouce d'une tendresse infinie l'effaça. Puis il fut étouffé entre deux bras réconfortant et il sut qu'il avait trouvé sa vraie place.
