Disclaimer : Tous les personnages appartiennent naturellement à Stephenie Meyer.

Voici une fic courte, en 4 chapitres, et, grande première pour moi, tous nos personnages y sont humains.

Pour l'écrire, je me suis inspirée de mon travail (dans l'armée de l'air) et j'ai simplement adapté mon « scénario » à l'environnement US de nos personnages préférés.

Je n'ai pas trouvé tout de suite le titre de cette fic, il m'est venu alors que passait à la radio une chanson des Innocents : « Dentelle ». Et vous reconnaitrez dans les titres des chapitres les paroles de cette chanson que j'adore.

Bonne lecture !


Juste en équilibre

Chapitre 1 : Sur les vieilles roses du couvre-lit, j'entends les choses d'ici…

(BPOV)

Assise sur la chaise qui m'est réservée dans la petite chapelle blanche, dont les premiers rangs sont encore vides, je me laisse submerger par les souvenirs. Enfoncés jusqu'au cou dans notre quotidien, nous ne nous étions pas rendus compte que les années avaient défilé à une vitesse effrayante. Mais aujourd'hui, toutes ces années me revenaient à pleine vitesse.

xx

Je me souviens encore de mon premier arrêt devant le poste de sécurité, voilà quatre années. Engoncée dans mon blouson de cuir, juchée sur mon bolide, j'avais posé pied à terre devant la barrière qui barrait l'entrée principale de la base de Port Angelès. Un sergent-chef de la sécurité militaire s'était avancé vers moi et j'avais relevé la visière fumée de mon casque. Grand, une carrure imposante - celle d'un footballeur américain, à n'en pas douter – les cheveux bruns, courts, et les yeux clairs.

-Madame, puis-je voir votre laissez-passer ? demanda le militaire d'un ton très professionnel qui me fit sourire.

Je lui tendis la lettre que le colonel Denali m'avait envoyée quelques jours plus tôt. Il la déplia et la lut quelques secondes avant de se fixer dans un salut militaire impeccable.

-Mes respects, mon lieutenant.

-Repos, sergent-chef. Aujourd'hui, je suis en simple visite. répondis-je en lui souriant. Le colonel m'attend avant ma prise de poste ici. Pouvez-vous faire préparer mon laissez-passer pour que je puisse le récupérer tout à l'heure ?

-A vos ordres, mon lieutenant. répondit-il, toujours aussi professionnel.

-Je suppose que vous serez relevé dans quelques heures. Vous pourrez laisser ma demande à votre remplaçant.

-Je m'occupe personnellement de votre demande, mon lieutenant. répondit le sergent-chef.

-Sergent-chef Cullen, dis-je après avoir regardé sa plaque d'identification, je ne veux pas vous mettre en défaut auprès de vos supérieurs. A quelle heure prend fin votre tour de garde ?

-11 heures, Madame.

-Alors, retrouvons-nous à midi sur le parking du mess. conclus-je en lui souriant.

-Bien, Madame. répondit-il avant d'ouvrir la barrière de la base.

Mon arrivée en moto dans la base ne passa pas inaperçue et lorsque je me garai devant le bâtiment réservé au commandement, les têtes des militaires qui passaient tout près se retournèrent quelques secondes vers moi. J'ôtai doucement mon casque et laissai mes longs cheveux ondulés envahirent mon dos avant d'entrer dans le bâtiment, le casque sur le bras. Le colonel m'attendait dans son bureau. A peine la porte fermée, à l'abri des regards de son personnel, Eléazar me serra chaleureusement dans ses bras.

Notre amitié datait de quelques années maintenant, alors que je prenais mon premier poste sur la base de Sacramento, voilà six ans, fraîchement émoulue de l'école d'officiers que j'avais quittée deux semaines plus tôt. Spécialisée dans l'interprétation photo, j'étais de service lorsqu'il avait appelé sur la fréquence des appels d'urgence. Ses hommes et lui étaient en territoire hostile et plutôt en mauvaise posture. Mon supérieur ce soir-là, un capitaine, s'embrouillait dans les réponses alors que nous entendions les tirs d'armes automatiques qui crépitaient dans les haut-parleurs de la salle de veille opérationnelle. Envahie d'un mauvais pressentiment, j'avais alors pris sur moi de me connecter à la discussion et avais donné les indications qui, à mon avis, pouvaient les sortir de là. Dans la demi-heure qui suivait, je me retrouvais aux arrêts pour deux semaines, encadrées par deux molosses de la sécurité militaire qui m'escortèrent jusqu'à mes quartiers où j'étais consignée, pour avoir outrepassé mes prérogatives, et pour insubordination. Alors que la première semaine se terminait, un sergent vint me chercher pour que je me présente devant le colonel commandant la base, qui m'avait convoquée en urgence. Engoncée dans mon grand uniforme de sortie, je suivis le sergent qui m'escorta jusqu'au bureau du colonel. J'entrai dans le bureau après avoir vérifié une dernière fois ma coiffure et saluai le colonel, assis derrière son bureau.

-Mes respects, mon colonel. Lieutenant Swan à vos ordres, mon colonel.

-Repos, lieutenant. Je vous ai convoquée à propos de votre dernière permanence opérationnelle.

J'acquiesçai, silencieuse. Je savais déjà que j'allais passer un sale quart d'heure et serais surement dégradée ou même renvoyée. Mais il en fut tout autre. Le colonel fit le tour de mon bureau et m'invita à le suivre dans son salon, attenant au bureau. Un lieutenant-colonel nous y attendait.

-Lieutenant Swan, je vous présente le lieutenant-colonel Eléazar Denali, commandant le groupe qui a appelé la veille en urgence lors de votre dernière permanence.

-Alors, voilà l'ange gardien qui nous a tirés de ce mauvais pas. s'exclama-t-il avant de me serrer la main. Merci. Merci beaucoup, lieutenant. Je tenais absolument à venir vous remercier en personne. Si vous n'aviez pas été là, nous aurions surement subi des pertes.

Je restai sans voix à ses remerciements.

-C'est mon travail, mon colonel. dis-je en me ressaisissant.

-J'ai appris que vous aviez quelques soucis suite à notre appel. reprit-il en me regardant puis en fixant le colonel.

Le colonel nous invita à nous asseoir et nous discutâmes quelques temps. J'appris ainsi que ma punition, injustifiée, avait été levée et que mon dossier n'en ferait pas mention. Mais surtout, le lieutenant-colonel me fit une offre que je ne pus refuser : venir travailler avec lui. Voilà comment, après à peine un mois à Sacramento, je me retrouvais sur la base de Phoenix, lieu de stationnement de l'unité. Mon arrivée là-bas se fit d'une manière totalement détendue et joyeuse, les gars tenant absolument tous à venir saluer l'« ange gardien ».

Durant ces deux années auprès d'Eléazar, j'avais énormément appris, même si je restais sur place lorsqu'eux partaient risquer leurs vies. Et surtout, j'y avais rencontré celui qui était devenu mon mari. Le lieutenant Jacob Black, pilote de black hawk dans l'escadron de transport rattaché à l'équipe d'Eléazar. Un véritable coup de foudre. Moins d'un mois après mon arrivée, il me proposait un diner et six mois plus tard, nous nous fiancions et emménagions dans un petit appartement, à quelques kilomètres de la base, les relations entre militaires d'une même équipe n'étant pas vues d'un très bon œil. Qu'importe ! Au moins, une fois chez nous, nous pouvions facilement laisser le travail derrière nous, ne vivant plus nuit et jour dans un environnement militaire. Eléazar et son épouse venaient souvent nous rendre visite et j'étais même devenue la marraine de leur petite dernière.

Mais ce tableau idyllique ne pouvait durer.

L'année suivante, Jake avait reçu une nouvelle affectation, sur la base de Port Angelès. Avaient alors suivi les longues semaines loin de l'autre. Militaires, nous connaissions ces moments loin de l'autre mais cette absence alors que Jake était sur le territoire national me pesait énormément. Eléazar et le reste de l'équipe l'avaient bien entendu remarqué, et s'arrangeaient pour occuper mes weekends « célibataire » lorsqu'ils étaient sur la base. Et lorsque tous « mes » hommes étaient en mission, je filais voir Carmen et ma petite Irina. Un matin, Eléazar m'avait convoquée pour m'annoncer sa promotion : nommé colonel, il devait prendre le commandement de la base…de Port Angelès. Cette nouvelle avait insufflé un vent d'espoir dans un coin de ma tête : l'équipe suivra peut-être Eléazar !

-Je retrouverai Jacob là-bas. Mais je perds mon équipe. dit-il doucement avant de prendre ma main dans les siennes. Je ne peux pas t'emmener avec moi, Bella.

Au fil de ces deux années, Eléazar était un peu devenu mon père de substitution, Charlie, mon vrai père, ne donnant plus signe de vie hormis à l'occasion de Noël et de mon anniversaire depuis que j'avais signé mon engagement en sortant du lycée. Eléazar était présent, lui, m'écoutant et me conseillant longuement. Alors, l'annonce de ce départ me fit l'effet d'une douche froide. Eléazar, celui qui avait cru en moi, partait loin, emmenant sa femme et ses filles.

-Je suis ravie pour toi, Eléazar. C'est une superbe opportunité et…débitai-je mécaniquement pour masquer mon désarroi.

-Bella, arrête. Je sais très bien que cette nouvelle ne te réjouit pas. me coupa-t-il en me serrant dans ses bras où je restai quelques minutes avant de me remettre droite.

-Je sais que tu as fait des demandes pour te rapprocher de Port Angelès mais qu'elles ont toutes échouées. Une fois sur place, je pourrais peut-être faire quelque chose pour toi…

xx

Et voilà comment je me retrouvais, plusieurs mois après, dans les bras d'Eléazar, dans son nouveau bureau sur la base de Port Angelès.

-Ah Bella ! Je suis heureux de t'accueillir ici, ma belle ! dit-il en me prenant dans ses bras alors que je ris à son enthousiasme.

-Merci Eléazar. Je suis tellement ravie de te retrouver ici…

-Oui, enfin surtout le capitaine Black ! me coupa-t-il en riant. D'ailleurs, il rentre mercredi. Je t'ai réservé une petite surprise que tu récupèreras avec ton laissez-passer.

L'heure était passée à la vitesse de la lumière. Eléazar me briefa rapidement sur ma nouvelle équipe, sur l'ambiance de la base, etc…Quand vint l'heure de se séparer, je ne pus m'empêcher de le prendre une nouvelle fois dans mes bras.

-J'en profite parce que la semaine prochaine, je ne pourrais plus me permettre ces gestes, mon Colonel. me justifiai-je en souriant.

-Mon bureau t'est toujours grand ouvert, Bella. Tout comme la maison. Les filles piaffent d'impatience à l'idée de te revoir. dit-il en me dirigeant doucement vers la porte du bureau.

Le cœur léger et le sourire aux lèvres, je démarrai ma moto et me dirigeai vers le mess pour retrouver le sergent-chef Cullen. En avance de quelques minutes, j'ôtai de nouveau mon casque et m'installai confortablement sur la selle pour profiter des quelques rayons de soleil de la journée. La seule chose qui me manquerait dans cette affectation : le soleil. Je n'étais pas particulièrement une adepte du bronzage mais le léger hâle qui colorait ma peau blanche suffisait à rehausser le chocolat intense de mes yeux.

Lorsque l'horloge du mess indique midi, j'eus le plaisir de voir apparaitre à une centaine de mètres, l'imposante silhouette du sergent-chef, accompagné de deux autres hommes, officiers, à en juger par leurs tenues.

xx

(EPOV)

-Merde les gars ! Vous allez me mettre en retard ! grogna Emmett en allongeant son pas.

-Notre frangin est-il pressé de remplir son estomac ? se moqua gentiment Jasper alors qu'Emmett se contentait de soupirer de plus en plus fort.

-Elle est déjà là ! Merci vraiment les gars ! ironisa notre frère, son regard se portant sur le parking.

-Elle ? T'as invité ma sœur ? demanda Jasper.

Mais Emmett ne répondit pas, se contentant de se diriger en petites foulées vers l'entrée du parking, nous distançant. Mon regard suivit sa trajectoire et s'arrêta sur une petite silhouette assise sur une énorme moto rouge. Lorsqu'elle remarqua Emmett, elle descendit de sa moto. Superbe jeune femme brune aux longs cheveux ondulés, sa taille fine superbement mise en valeur par son blouson de cuir.

-Tu la connais ? questionnai-je Jasper tout en nous dirigeant vers Emmett.

-Du tout. Mais Rose va être jalouse. répondit mon meilleur ami, avant qu'il ne me donne un coup de coude en voyant Emmett se mettre au garde à vous.

-Mais qu'est-ce qu'il fait ? chuchotai-je alors que nous n'étions plus qu'à quelques mètres.

La jeune femme brune lui adressa un magnifique sourire et mon frère partit également dans un éclat de rire. Il remarqua notre arrivée.

-Bella, voici les lieutenants Hale et Cullen. nous présenta-t-il en se retournant sur nous.

-Cullen ? Comme vous ? demanda-t-elle, sa tête légèrement penchée sur le côté tout en regardant mon géant de frère.

-Oui, c'est mon frère.

Que devions-nous faire ? Emmett s'était planté comme un piquet devant elle. Pourquoi saluer une civile de cette manière ? Je n'eus pas le temps de faire part de mes interrogations à Jasper puisque la jeune femme, Bella si j'avais bien compris, faisait un pas vers nous, sourire aux lèvres, nous tendant la main.

-Les gars, voici le lieutenant Isabella Swan. nous annonça Emmett.

-Bella. le corrigea automatiquement la jeune femme en nous serrant la main. Je sais que çà ne respecte pas le protocole mais aujourd'hui, je suis de passage donc…enfin si vous n'y voyez pas d'inconvénients, lieutenants. compléta-t-elle.

-Pas du tout. répondis-je. Je suis Edward et voici Jasper.

-Bella prend son service ici la semaine prochaine. nous informa Emmett alors qu'elle reportait son attention sur lui.

-Bienvenue sur la base. répliqua Jasper.

-Ah, lieutenant Swan…commença Emmett.

-sergent-chef, que vous ai-je dit ? grogna gentiment Bella en pointant son index sur la poitrine de mon frère.

-Bella…pardon, c'est que…

-Oui, je sais Emmett. Mais quand je n'ai pas ma tenue, je redeviens juste Bella.

-Voici votr…ton laissez-passer. Et le colonel Denali a laissé une enveloppe pour toi. reprit Emmett en lui tendant le tout.

Elle regarda brièvement son pass et le glissa dans la poche de son blouson puis décacheta l'enveloppe. Un immense sourire apparut sur son visage. Dieu que cette fille était superbe !

-Bien, je vais vous laisser aller déjeuner. reprit-elle, les yeux toujours baissés sur le document. Emmett, sais-tu où est cantonné l'escadron Wolf ?

-Oui, hangar 7, face à la piste B. D'ailleurs, j'y serais de faction demain, un retour est prévu…répondit mon frère.

-Merci beaucoup. répondit-elle avant de nous serrer une nouvelle fois la main. On se verra surement demain alors ! ajouta-t-elle en serrant la main d'Emmett.

Puis elle remit son casque et s'éloigna sur son bolide vers la sortie.

-Alors frangin, on nous fait des cachotteries ? demanda Jasper, moqueur.

-Je l'ai rencontrée ce matin, au poste de police de l'entrée. Elle avait rendez-vous avec Dénali et je lui ai promis de m'occuper de son laissez-passer. répondit mon frère.

-Où prend-elle son poste ? demandai-je.

-Veille opérationnelle, comme interprétateur photo satellite, d'après ce que j'ai vu sur le réseau informatique. répondit Emmett alors que nous entrions dans le hall du bâtiment.

-Sais-tu si elle est célibataire ?

-Oh, Edward…grommela mon frère en me poussant vers la salle.

xx

(BPOV)

Debout devant la porte d'entrée d'une jolie maison, un peu à l'écart des autres habitations, j'attendais que l'on m'ouvre. Carmen apparut et lorsqu'elle me vit, un sourire éclatant apparut sur son visage.

-Bella ! Te voilà enfin ! s'écria-t-elle en me prenant dans ses bras.

Les trois fillettes apparurent instantanément derrière leur mère et se pressèrent contre moi. M'installant dans le canapé, je laissais les filles jouer avec mes cheveux alors que Carmen revenait de la cuisine, un plateau dans les mains. Nous discutâmes une bonne partie de l'après-midi et je pris congé après que Carmen me remit un trousseau de clés.

Alors que je me garai devant le petit immeuble, qui se dressait à quelques rues de la maison des Denali, je vis arriver au loin, dans mon rétroviseur, le trio que j'avais rencontré plus tôt.

-Perdue ? me demanda gentiment Emmett alors que les trois militaires s'arrêtaient à ma hauteur.

-Non, je pense être devant le bon immeuble. Je cherche l'appartement du capitaine Black. répondis-je en enlevant mon casque et mes gants.

-Oh. Le capitaine Black est dans l'immeuble d'en face, appartement 3B. Mais Jake n'est pas là, il…la renseigna Jasper.

-Il rentre demain. Oui, je sais. Vous habitez ici ? demandai-je, ne voulant pas trop en dire sur moi pour l'instant.

Dans un mois, je serais mariée à Jacob, ce qui évitera les bruits de couloir, même si Eléazar m'avait assurée que l'ambiance du quartier résidentiel de la base était plutôt familiale et loin du carcan strict de la vie militaire. Il n'avait d'ailleurs pas compris pourquoi Jake et moi avions acheté une petite maison à moins d'une heure d'ici, à Forks, dont nous aurions les clés le mois prochain.

Mais j'avais remarqué que Jasper l'avait appelé Jake, ce qui signifiait qu'ils étaient surement amis avec mon fiancé.

-Edward habite ici. Nous, nous vivons dans l'immeuble là-bas, un peu plus loin, avec nos amies. répondit Emmett.

-Ok. Je vous laisse rentrer alors. dis-je en détachant le sac de voyage que j'avais sanglé sur l'arrière de ma moto. J'espère qu'on aura l'occasion de se revoir. Bonne soirée.

-Bonne soirée. me répondit le trio avant que je n'entre dans l'immeuble de Jacob.

La matinée du lendemain passa rapidement, entre les courses et les démarches administratives nécessaires pour conclure notre acquisition. A 17h, je me garai devant le hangar 7 et me présentai au poste de garde avec la lettre d'Eléazar. La jeune femme qui me reçut me dirigea vers l'intérieur du hangar où Eléazar attendait, accompagné de Carmen, tous deux, en tenues décontractées, discutant avec un petit groupe.

Déjà lorsque nous étions à Phoenix, Eléazar avait pour habitude de faire venir la famille proche lors des retours de mission. Il organisait cela de façon tout à fait informelle, en tenue décontractée, à l'écart du reste du personnel de la base, hormis les militaires nécessaires dans le bâtiment. Le côté militaire ne revenait que l'heure suivante, lors du débriefing. Et j'étais plus que ravie qu'il ait installé cette tradition ici.

Carmen me remarqua et me fit un petit signe. Je rejoignis le groupe et saluai tout le monde. Le stress montait doucement dans mon estomac. Dans 30 minutes, il sera là. Après deux mois séparés, nous serions enfin réunis. Je me servis un café et me dirigeai vers le bord de la piste pour tenter de me calmer. Je reconnus immédiatement la carrure d'Emmett qui terminait son inspection.

-Salut Bella. dit-il joyeusement en me serrant la main. Alors, que fais-tu là ? Tu visites ?

-Salut Emmett. On peut dire çà. répondis-je en souriant, guettant malgré moi l'apparition de l'avion de transport au loin.

-Le colonel organise toujours la venue des familles quand il y a un retour de mission à l'étranger. m'informa-t-il.

-Je sais, c'est pour çà que je suis là.

-Mais ? pour qui ? enfin, je ne veux pas me montrer trop curieux mais je connais tous les membres de l'équipe et leurs familles et je….oh ! Black ! tu es…tu es la princesse de Jake ! débita Emmett, sans reprendre son souffle, ce qui me fit franchement rire.

-Respire, Emmett ! C'est bien moi !

Nous continuâmes à discuter quelques minutes puis Emmett prétexta une vérification de dernière minute. Je restais seule, debout, au pied du tarmac, devant les grandes portes du hangar, ouvertes pour l'occasion. Une silhouette noire apparut dans le ciel azur, se rapprochant de plus en plus de la base, alors que mon cœur battait de plus en plus vite.

xx

(EPOV)

La sonnette retentit et la porte d'entrée de mon appartement s'ouvrit, laissant apparaitre mon frère.

-Ah, te voilà enfin ! L'avion était en retard ? s'écria Rose.

-Il y avait un retour ce soir. Mais le quart d'heure « retrouvailles » a duré plus d'une heure avant qu'ils ne partent en debriefing, donc… répondit mon frère en se laissant tomber dans le canapé, entre Jasper et sa moitié.

Alice se leva et partit chercher des boissons dans la cuisine.

-Jake est rentré ? demandai-je.

-oui, et vous ne devinerez jamais qui l'attendait sur le tarmac. répondit mon frère, un sourire sur les lèvres.

-Jake n'a pas de famille ici, Emmett. intervint Jasper.

-Hé bien, depuis hier, si ! Sa fiancée était là.

-Sa fiancée ? Et à quoi elle ressemble ? demanda ma sœur, toujours aussi curieuse.

-Petite, mince, brune aux cheveux longs. commença à décrire Emmett tout en nous regardant avec insistance Jasper et moi. Vous ne voyez pas qui, les gars ?

Voyant à nos mines que nous ne comprenions toujours pas, il ajouta :

-elle fait de la moto.

-Le lieutenant Swan ? risquai-je.

-Ouep ! La princesse de ce cher Jake, c'est Bella ! affirma mon frère, fier de son annonce.

-Comment le sais-tu ? demandai-je, totalement refroidi par cette annonce.

La fille qui hantait mes pensées depuis la veille était la fiancée d'un de mes meilleurs amis. Je rangeai cette information dans un coin de mon cerveau. Je devrais me contenter d'être simplement un ami.

-Elle attendait dans le hangar 7, avec les familles. Comme d'habitude, le colonel a invité les familles à sortir sur le tarmac une fois les moteurs coupés. Jake est sorti le dernier et s'est précipité vers Bella pour la prendre dans ses bras. Digne d'un film ! Je les ai croisés juste avant de venir ici, Jacob nous invite tous chez lui demain soir pour arroser son retour.

-Qui est Bella ? questionna Alice.

Ce fut Emmett qui répondit à la question de ma sœur, qui ne cessa alors plus d'en parler de la soirée…

xx

(BPOV)

Le lendemain de son retour, nous avions reçu Emmett et sa fiancée, Rosalie, ainsi qu'Edward, Jasper et son amie Alice. En discutant, j'avais appris qu'Alice, Emmett et Edward étaient frères et sœurs, tout comme Rosalie et Jasper, jumeaux. Edward et Jasper travaillaient au contrôle aérien, Rosalie était assistante sociale sur la base et Alice tenait le rôle de secrétaire au hangar 7 où servait Jacob.

Ma prise de fonction le lundi suivant se déroula sans encombre et j'y rencontrais des collègues vraiment sympathiques et une ambiance très familiale et simple. Passées les obligations du règlement militaire, j'avais vite appris à tutoyer toute l'équipe et nous étions rapidement devenus amis, notamment Angela, la secrétaire de notre unité, amie d'Alice depuis le lycée.

Ma première visite au service médical de la base m'étonna lorsque je me retrouvai face au docteur Cullen. Hé oui ! Encore un Cullen ! A ma mine étonnée, il s'était mis à rire, devinant aisément que j'avais déjà rencontré ses enfants. Proche de ses enfants, il avait absolument tenu à se rapprocher d'eux. Médecin dans un grand hôpital de Seattle, il avait postulé pour prendre le poste de chef du service médical de la base. Civil, il n'aurait pas dû avoir le poste mais Eléazar avait remarqué sa candidature et s'était arrangé pour que le poste lui soit attribué. Tout comme il l'avait fait pour que je puisse retrouver Jacob.

Eléazar fonctionnait ainsi, à l'instinct, et savait s'entourer des bonnes personnes, quelques soient leurs statuts, et il pouvait ainsi compter totalement sur chacun de nous.

Nous avions enfin emménagé dans notre petite maison, à Forks, dans laquelle nous faisions des travaux, aidés par toute la bande, ce qui n'avait pas été de tout repos car nous avions choisi une grande maison, avec trois chambres et un bureau, en prévision d'enfants que nous souhaitions par-dessus tout.

Lorsque Jacob était en mission, Alice, Rose et Angéla ne manquaient jamais de venir me retrouver à Forks et d'organiser des sorties shopping ou des « soirées filles », ce qu'Alice affectionnait par-dessus tout car elle pouvait laisser parler sa folie pour la mode et la beauté sur nous qui lui servions de mannequins. Nos soirées finissaient invariablement par des fous rires généralisés, surtout lorsque les garçons nous rejoignaient.

Nous nous étions également liés d'amitié avec les parents d'Emmett, Edward et Alice, que nous invitions de temps en temps chez nous avec Eléazar et Carmen. Quelle ne fut pas notre surprise lorsqu'un soir, Carlisle et Esmée nous annoncèrent qu'ils avaient acheté une villa aux abords de Forks, charmés par la région !

Jacob et moi nous étions mariés à la fin de l'été, dans la chapelle de la base et nous y avions convié une bonne partie du personnel. Après tout, je n'avais plus de famille et Jacob n'avait plus que son père, alors...

Je me souviens encore de la surprise qui apparut sur les visages des uns et des autres alors que je remontai la petite allée centrale dans ma longue robe blanche, dégottée par Alice, au bras d'Eléazar en grande tenue d'apparat. Personne sur la base ne connaissait nos liens si forts, hormis les Cullen et les Hale, et nous avions évité de les afficher pour que les rumeurs ne se développent pas. Eléazar m'avait fait un rapide clin d'œil lorsqu'il avait remarqué les visages de son personnel nous découvrant ainsi. Puis, nous avions fait la fête dans le jardin de la villa des Cullen, décoré pour l'occasion par Esmée, Alice et Rosalie, sous le ciel étoilé.

L'année suivante, Emmett et Rose s'étaient mariés et avaient eux aussi acheté une maison, à deux kilomètres de la notre. Nous avions l'impression de recréer notre cercle de la base tout près de chez nous. Alice et Jasper avait eu un petit garçon, Riley, et vivaient désormais dans la maison voisine de celle des Denali. Les jours défilaient, les uns plus difficiles que les autres mais notre vie nous semblait si agréable que nous nous aidions tous à surmonter les difficultés.

Alice et Rosalie agissaient avec moi comme si j'étais leur propre sœur, ce qui ne me déplaisait pas car, dans leur « grande bonté », mes parents, ou plutôt mes géniteurs, avaient préféré faire de moi un enfant unique.

Ma relation avec les garçons était un peu différente. Emmett s'était tout de suite proclamé comme mon grand frère et avait alors voulu faire passer un « interrogatoire fraternel » à Jacob, ce qui avait évidemment bien fait rire tout le monde. Jasper avait le don de me faire parler de moi, de mes craintes. Au fil des mois, il était devenu un confident, m'aidant à comprendre mes réactions lorsque cela n'allait pas et que Jake était loin. Edward, lui, était un peu à part. Comme les autres, il était proche de moi mais semblait garder une certaine réserve, limitant les contacts physiques, contrairement à ce géant d'Emmett. Mais, je pouvais compter sur lui à n'importe quel moment, sa seule présence près de moi suffisant à me canaliser. Auprès de lui, j'avais l'impression que mon esprit se mettait en veille et se reposait.

xx

Il y a six mois, Eléazar m'avait convoquée dans son bureau en urgence. Il avait appris qu'une mutation allait bientôt me tomber dessus et pourrait m'envoyer à l'autre bout du pays. Il s'était alors renseigné et voulait me proposer une alternative afin que je puisse rester à Port Angelès.

-Bella, tu mérites plus que tout de faire une belle carrière militaire. Mais tu sais que les promotions vont avec les mutations. commença Eléazar. Je ne sais pas comment tu envisages ta carrière mais je me suis renseigné et il existe une alternative. Tu dois resigner ton engagement dans six mois. Si tu le signes, tu partiras alors que Jacob restera ici. Par contre, si tu ne le signes pas, je peux t'assurer que tu garderas ton poste ici, mais en tant que personnel civil. Je ne veux pas ta réponse tout de suite. Discute avec Jacob. Tu m'annonceras ton choix dimanche, quand vous viendrez déjeuner à la maison.

-Merci Eléazar. Mais je sais déjà que...commençai-je

-Non, Bella. Prend le temps de réfléchir cette semaine. Mais, même si je vais te paraître égoïste et que tu vas peut-être avoir l'impression que je te mets la pression, je serais ravi que tu choisisses la seconde solution, comme çà, nous te garderons près de nous. Et si jamais Jake est muté sur une autre base, ce que je ne pense pas avant plusieurs années, tu pourras le suivre plus facilement. finit-il avant de se lever pour embrasser ma joue.

En rentrant ce soir-là, j'avais tout expliqué à Jake, même si je n'en avais pas éprouvé le besoin. J'avais déjà fait mon choix en sortant du bureau d'Eléazar. Le dimanche, nous avions ouvert une bouteille de champagne pour l'occasion. Six mois plus tard, nous avions organisé une grande fête pour mes adieux au monde militaire durant laquelle je mettais un peu l'ambiance avec le groupe que nous avions monté sur la base.

Quand Alice m'avait parlé de ce groupe, monté par quelques collègues d'Emmett, je n'avais pas réagi tout de suite. Mais Emmett et Rose n'avaient pas cessé de me harceler pour que je fasse un essai « voix » avec eux. D'après mes collègues et amis, j'avais un joli filet de voix. J'avais fini par céder à leurs suppliques et après un essai de quelques minutes, j'avais été intronisée dans le groupe comme chanteuse. Nous répétions au gré des disponibilités de chacun et il fallait avouer que le groupe m'occupait bien l'esprit lorsque mon mari était loin de moi.

Une seule personne manquait à cette fête: Billy, le père de Jacob. Il nous avait malheureusement quittés le mois précédent. Il avait cessé de se battre contre la maladie et s'était éteint alors que nous étions avec lui, à l'hôpital. Nous n'avions plus de famille mais nous avions nos amis.

J'avais tout de même versé une petite larme lorsque j'avais rangé mon bel uniforme dans sa housse pour la dernière fois. Mais le meilleur restait à venir.

Fini le lieutenant Swan. Je pouvais enfin porter le nom de mon mari sur mon lieu de travail. Isabella Black. J'avais conservé mon poste – nous n'étions pas nombreux à être aussi spécialisés – et la zone nord-ouest avait trop besoin d'un personnel surqualifié pour se permettre de me reprendre mon job.

Jake partait toujours en missions mais moins souvent. Les relations diplomatiques étaient un peu plus détendues et nos troupes étaient moins nombreuses en territoire étranger. Ce qui n'était pas pour me déplaire. Bien entendu, le risque zéro n'existait pas et lorsqu'il partait pour quelques semaines, mon cœur se serrait toujours autant.

xx

Un claquement de talon familier sur les dalles anciennes de la chapelle me ramène brutalement à la réalité. Je n'ai pas besoin de me retourner pour savoir ce qui se passe à l'entrée. Je me lève, lisse ma petite robe d'un revers rapide de la main et pivote légèrement vers l'allée centrale. La musique résonne sous les voutes et je lève doucement les yeux vers l'entrée. C'est à cet instant que je remarque que la chapelle est pleine. Le prêtre, debout dans l'entrée, discute avec un groupe dans lequel je distingue Carlisle, Eléazar et Edward. Ce dernier me voit et soutient quelques secondes mon regard, la tristesse emplissant ses yeux. Il se penche vers les autres, leur disant quelque chose et ils se retournent tous vers moi. Edward s'avance vers moi, droit dans son superbe uniforme blanc et vient embrasser ma joue avant de me demander si je suis prête.

Que répondre ? Je ne serais jamais prête à ce qui va suivre. Mais il le fallait.

Je fais un léger signe de tête à Edward, lui adressant un léger sourire. Il pose sa main sur la mienne quelques secondes et se redirige vers les autres. La musique se modifie légèrement et des voix masculines profondes et graves s'élèvent. Un frisson m'envahit. L'hommage des militaires à leur compagnon. Je fixe mon regard sur le prêtre qui a pris la tête du cortège, mené par Emmett, pour rapidement passer sur le fin tissu tricolore qui recouvre le cercueil qui s'avance doucement dans l'allée, porté par six soldats en tenue. Le cortège passe lentement près de moi, puis s'installe dans le chœur, quelques mètres devant moi. Eléazar et les commandants des unités de la base, le suivent. Ils s'arrêtent à mon niveau et saluent en silence. Puis Eléazar se détourne et vient se placer à ma gauche. J'aurais tant aimé à cet instant, pouvoir prendre son bras et me serrer contre lui. Mais je connais le protocole strict militaire et ne veux pas infliger à l'assemblée l'image d'une veuve à genoux sur le sol, pleurant bruyamment toutes les larmes de son corps. Je garde cela pour plus tard, lorsque la solitude de notre maison m'engloutira.