I'M BACK BITCHES !
Je suis à fond sur le Vanven en ce moment (a trop joué à KH birth by sleep final mix).
Vanven + mon cours de latin = cette fic. Bonne lecture :D
Disclaimer : Les personnages de Kingdom Hearts appartiennent à Square Enix, et la Rome Antique à Rome. Je suppose.
THE prononciation latine, by Gregukun. (si vous êtes pas fanas d'histoire, vous pouvez passer).
D'abord, il faut savoir que le j, le v et donc le w n'existent pas. les j croisés dans les noms se prononcent "i" et les v "ou" comme le u d'ailleurs.
Il existe un seul son en latin, le "ae" prononcé "aïe" qui deviendra plus tard le "é". Sinon, toutes les lettres se prononcent. Les G et les C se prononcent tout le temps de façon dure.
Exemple : Ce bon vieux Jules César.
Gaius Julius Caesar. Prononcez "Gaïous Youlious Kaïsar"
TADA ! *Remballe son costume de latiniste et vous permet enfin de lire la fic*
« Encore quelques minutes… »
Il patientait depuis une heure, tel un renard embusqué dans un buisson, dans la pénombre d'une ruelle. Les jours raccourcissaient de plus en plus et déjà à cette heure la lune éclairait les rues d'une lumière blafarde. En face de lui, un immeuble miteux, un lupanar (1), comme il y en a des dizaines voir des centaines à Rome…bientôt sa cible sortirait. Après s'être vidé dans une femme, elle se viderait de son sang sur les pavés.
De l'agitation se fit entendre dans le bâtiment, et bientôt un homme encapuchonné, gardé par deux grands hommes tout aussi mystérieux mais nettement plus baraqués, sortirent pour se mettre à parcourir la rue. C'était le moment pour passer à l'action.
Rapide comme un félin, il s'élança sur un tas de caisse à ses côtés et s'en servit comme appui pour attraper le toit de la bâtisse en dessous de laquelle il se trouvait. A présent sur les tuiles, il s'accroupit et suivit les mouvements de ses victimes depuis son point en hauteur. Il fallait juste attendre qu'elles s'engouffrent dans une ruelle pour qu'il n'y ait aucun risque qu'un vigile vienne jouer les trouble-fêtes. Et c'est précisément ce qui arriva : les trois hommes bifurquèrent vers un passage étroit entre deux immeubles. Il les tenait.
Il s'avança au bord du toit, glaive en main, attendant qu'une des deux brutes fasse l'erreur de passer en dessous de lui.
Il sauta, sa lame pointée vers le sol.
- AAAARGH !
- Que ?!
Les deux autres hommes se retournèrent et virent leur collègue au sol, le dos transpercé par une lame, sans vie. Un jeune homme vint retirer l'arme ensanglantée du corps et la pointa dans la direction des deux restants. Aussitôt le second gorille chargea en dégainant une dague mais le plus jeune esquiva habilement avant de se faufiler derrière lui et de l'égorger comme un poulet. Terrifié, l'homme chétif prit la fuite, mais l'assassin le prit en chasse.
Haletant, il s'arrêta dans une autre ruelle. Apparemment il avait semé son poursuivant. Il pourrait essayer de se remettre en route. Mais lorsqu'il se retourna il sentit le froid du métal lui transpercer la poitrine.
La seule chose qu'il vit, avant de mourir, était deux orbes dorés, brillant dans l'obscurité.
O.O.O.O.O
- Selon Caton…le pois chiche est mauvais pour tout. Mais pourtant j'ai vu les esclaves en verser dans la mangeoire pour le bétail…
Le précepteur, debout dans la pièce devant son élève et un parchemin à la main, poussa un soupir tout en se pinçant l'arête du nez.
- Par Cérès(2), Ventus…Caton veut parler du pois chiche en herbe, pas du pois chiche en grain !
- Oh…d'accord.
- Ce sera tout pour aujourd'hui, jeune homme. Ton père souhaite aller en ville pour les élections et il voudrait que tu l'accompagnes.
- Mais je n'ai pas encore l'âge de voter !
- Dans un an, Ventus. Il est grand temps d'apprendre comment le système marche.
Le jeune Ventus poussa un soupir et se releva de sa chaise, avant d'accompagner son maître vers la sortie.
Aulus Claudius Ventus (3) était le fils d'un propriétaire terrien dont le domaine s'étendait le long de la voie Cassienne (4). Blond aux cheveux fous (d'où son cognomen), aux yeux bleus comme la mer et au visage poupin, il vivait dans une villa appartenant à son unique parent : Marcus Claudius Ansem, aussi appelé « le sage », grâce à ses conseils avisés. La mère de Ventus n'était plus en vie, l'ayant perdue lors de l'accouchement.
Vu qu'ils étaient éloignés des tracas et de l'agitation de la ville, Ansem faisait souvent appel à un précepteur : Secundus Caelius Eraqus, qui venait faire l'éducation du jeune Ventus à domicile. Eraqus était un homme bon, quoique parfois un peu impatient, mais qui considérait Ventus et son père comme des amis de longue date. Il avait de longs cheveux noirs arrangés en catogan et des cicatrices sur le visage, vestige de son temps dans la légion.
Alors que le précepteur et l'élève sortaient à l'air libre sous le soleil implacable de l'été, ils virent un cortège d'esclaves sortir les chevaux de l'écurie, alors qu'un nouveau visiteur mettait pied à terre à quelques pas de là.
- Terra ! Se réjouit Ventus en reconnaissant le grand châtain aux yeux bleus.
- Eh, doucement Ven ! Dit-il, déséquilibré par le blond qui lui avait sauté au cou.
- Un peu de retenue, fils ! Le réprimanda Ansem en sortant de la villa à son tour. Nos invités vont fuir si tu leur réserve un tel accueil…
Ventus croisa les bras et fit la moue, vexé. Les trois hommes se mirent à rire et Terra ébouriffa un peu plus les cheveux du plus jeune.
Publius Caelius Terra était également le fils d'Eraqus, ce qui expliquait pourquoi les garçons des deux familles se connaissent aussi bien. Une profonde relation d'amitié s'était formée entre Terra et Ven, et ce par un caprice du destin.
*3 ans plus tôt*
L'agitation régnait comme jamais à Rome. La ville vibrait au rythme des séances interminables du sénat, et des cris de Caton qui clamait « CARTHAGO DELENDA EST ! » (5)
Dans ce climat instable, Ansem vint avec Ventus, alors âgé de onze ans, bientôt douze, afin de recruter un précepteur à domicile. Ils ne manquaient pas à Rome, mais la plupart enseignaient dans des lieux publics et ils étaient bien accrochés à leur poste.
La charrette s'arrêta et les deux passagers descendirent.
- Ven, prends ma main, je ne veux pas te perdre dans ce vaste brouhaha…
- Oui père.
Il s'exécuta et suivit son père à travers la cohue de plébéiens (6) qui déferlaient dans les rues étroites comme des combattants en pleine charge. Après avoir parcouru quelques rues, Ansem s'arrêta devant une maison de pierre, qui tranchait avec les appartements en brique et en bois aux alentours. Sous le porche, un homme écrivait sur une tablette de cire. L'homme aux longs cheveux blonds se retourna vers son fils.
- Attends-moi ici Ven, et surtout ne t'éloigne pas. La ville est un endroit dangereux pour les enfants comme toi.
- D'accord.
Ansem s'avança vers l'homme et ils commencèrent à discuter, sous les yeux de Ven qui ne tarda pas à trépigner sur place. Vous savez comment sont les enfants…
Tous ces gens qui allaient et venaient, marchandaient, discutaient…jamais le petit blond n'avait vu autant de gens, lui qui n'était jamais sorti de sa villa de campagne. Poussé par la curiosité, Ven parcourut la rue et aboutit à une petite place centrée autour d'une fontaine, représentant le dieu Neptune(7) chevauchant un dauphin. Là, il s'extasia devant la boutique d'un herboriste, avant de s'attarder au comptoir d'un orfèvre. Un cortège de femme faillit l'écrabouiller lorsque celles-ci se dirigèrent vers une boutique de parfumerie, attirée par les arômes exquis.
Il se retourna et percuta quelqu'un, pour ensuite tomber à la renverse. Il leva les yeux et vit deux jeunes garçons de son âge, dont un avec une dent en moins à l'air très énervé. Ce dernier saisit Ven par le col et le souleva de terre.
- Eh p'tit morveux, t'as perdu ta maman ?
- Laisse-moi ! Se plaignit-il en se débattant, sans succès.
- D'accord, mais après t'être mis à genoux et implorer mon pardon.
Ven envoya son pied en plein dans l'abdomen de son agresseur qui le lâcha, le souffle coupé. Cependant son camarade vint à son secours et plaqua le petit blond au sol dans la saleté. Comprenant qu'il était dans le pétrin, Ven se mit à pleurer et lança des « pardons » à tout bout de champ. On le retourna et vit le poing levé de son tortionnaire prêt à fondre sur son visage. Ven ferma les yeux et attendit l'impact…qui ne vint pas. Il entendit un bruit de coup mais il ne sentit absolument rien. Il ouvrit les yeux et vit les deux brutes fuir les lieux, et une grande personne masquer le soleil. Elle lui tendit la main.
- M…merci. Balbutia Ven, les joues rouges.
- Ne me remercie pas. Lui fit le garçon châtain qui le dépassait d'une tête au moins. Je m'appelle Terra, enfin, c'est comme ça que les autres m'appellent. Comment t'appelles-tu ?
- Ve…
- VENTUS ! Je t'avais dit de ne pas t'éloigner ! Raisonna la voix d'Ansem dans son dos.
Ven se retourna sur son père et lui servit un sourire embarrassé. Il était accompagné de l'homme avec lequel il discutait, qui sembla lui se diriger vers Terra.
- Terra, quelle est cette marque sur ta joue ? T'es-tu encore battu avec les fils de Caecilia ? Lui demanda-t-il avec un air inquisiteur.
- Oui, mais ils allaient le maltraiter ! Se défendit le châtain en désignant Ven.
- Ventus, est-ce que c'est vrai ? Voulut savoir Ansem.
- Oui, ils voulaient que je me prosterne devant eux sinon ils m'auraient frappé. Confirma le blond.
- Bah ! Cette harpie de Caecilia sait faire des gosses mais pas s'en occuper ! Tonna Terra.
- De la politesse, jeune homme ! Le reprit Eraqus.
- Mais tu la déteste aussi.
- Certes, mais je ne le clame pas en public. Mais tu as raison.
Les trois hommes se mirent à rire de bon cœur, et même si Ven ne comprenait pas très bien, il se joignit à eux.
*Fin Flashback*
Depuis ce jour Terra et Ven étaient devenus copains comme cochons, malgré la distance qui les séparait, le premier habitant toujours à la ville. Les visites d'Eraqus étaient souvent un prétexte pour que Terra ramène le bout de son nez chez Ventus. Mais ce jour-là, en l'occurrence, c'est Ventus qui irait chez lui. Enfin, pas chez lui, mais plutôt dans la ville où il vit. Ah, les élections…un vrai bonheur, avec ses habituels assassinats, ses pot-de-vin et j'en passe. Cela ne faisait que deux ans que Terra avait revêtit la toge virile (8), mais le fait d'élire un représentant au sénat l'ennuyait déjà profondément. De toute façon, ce n'était qu'un nid de vipères. Ou du moins le pensait-il.
- Bien, maintenant que nous sommes tous là, nous pouvons partir pour Rome. Décréta Ansem en montant en selle.
- Ouvrez la marche, mon ami. L'invita Eraqus.
Le petit groupe formé par les quatre cavaliers se mit en route et sortit du domaine pour ensuite bifurquer vers la voie Cassienne, qui reliait Rome à la plaine du Pô. Nous étions en matinée, mais le soleil faisait déjà régner une chaleur écrasante sur les campagnes étrusques inondées de couleurs estivales.
Alors qu'ils chevauchaient depuis déjà deux heures, un aigle tourna trois fois dans le ciel, avant de partir dans l'infinité azurée.
- Je ne suis pas augure (9) mais je suis certain que les élections ne seront pas annulées…Soupira Terra.
- Oui, Jupiter nous fait don de sa bénédiction pour ce jour. Poursuivit Ansem.
- Je ne savais pas qu'un oiseau pouvait décider du jour d'une élection…S'étonna Ventus.
- Ah oui, il faudra que je t'emmène voir les augures, une fois. Déclara Eraqus. Si tu veux comprendre ce que te veulent les dieux, c'est indispensable.
Le silence retomba sur le cortège, tandis que Terra approchait son cheval de celui de Ven, pour lui murmurer :
- Mon père a déjà présidé des cérémonies d'haruspices il y a quelques années de ça. C'est pour ça qu'il est aussi pieux.
- Oh, je vois.
Au loin, la majestueuse Rome se laissait enfin voir dans le paysage. D'ici une heure ou deux, ils seraient en ville.
O.O.O.O.O
- Voilà votre paiement, comme convenu. Dit l'homme en lançant une bourse pleine d'or au garçon.
- Merci bien.
L'homme quitta la demeure, tandis que son occupant s'assit sur son lit, ou plutôt le matelas rapiécé qui lui servait de lit, pour compter l'argent qui lui avait été octroyé cette fois-ci.
Lucius Gordianus Vanitas vivait dans un immeuble, seul, dans le quartier de Subure (10). Il n'était pas ce qu'on pouvait décrire comme un habitant aisé de la ville : vivre au troisième étage d'une insula (11) miteuse avec pour seuls meubles une table, deux chaises, une étagère quasi en ruine et un matelas n'était certes pas le nec plus ultra. Il gagnait assez d'argent pour se vêtir et se nourrir décemment, louée soit Fortuna.
Quant à son « métier »…
Il assassinait des gens, purement et simplement. Sous demande de riches patriciens, de gens cherchant la vengeance ou la justice, et de rivaux divers, il s'occupait de faire disparaître les personnes gênant ses clients. Comment en était-il arrivé là ? Par envie de vengeance. Il y a dix ans, alors qu'il n'était qu'un jeune bambin habitant une jolie maison près du Tibre, ses parents furent tués sauvagement par une bande d'assassins camouflés. Le gamin fut laissé là, impuissant, sous la vue insoutenable des corps de ses proches qui se vidaient de leur sang. Rien que de repenser à cette nuit de cauchemar, Vanitas serra les poings et se remémora ce qu'il avait vu sur les amples tuniques des assassins :
Un cœur noir, aux contours rouges strié de ronces.
Vanitas avait fui son domicile avec le maximum d'argent possible laissé chez lui, malgré le pillage des assassins. Il eut assez pour se réfugier à Subure et démarrer une nouvelle vie…une vie qu'il emploierait à ôter celle des autres. Si ce traumatisme aurait pu le dégouter de toute violence et arme, ce fut le cas contraire pour le noiraud aux yeux dorés. Il voulait ôter la vie, comme pour accomplir un sacrifice éternel aux âmes tourmentées de ses parents. Gagner sa vie dans le sang était assez lucratif en ville, surtout pendant les périodes d'élections. Nombreux étaient les hommes politiques prêts à payer le prix fort pour réduire un adversaire un peu trop populaire au silence.
Depuis qu'il était dans le métier, Vanitas s'était arrangé pour apprendre le maximum de choses sur le gang qui avait détruit sa vie. Il ne savait que leur nom : les Sine Cores. Quel nom plein d'ironie…
Il se releva et ouvrit les volets de la seule fenêtre de son appartement. La cité était en proie à l'agitation : les élections se dérouleraient dans l'après-midi. Il s'en foutait pas mal, lui, des élections. S'il était citoyen romain par la naissance, ses devoirs civiques lui importaient peu et il n'avait pas l'âge requis. De toute façon le vote était joué d'avance…Les voix des Patriciens passaient d'abord et gagneraient les élections comme toujours.
N'empêche, il sortit sous le soleil de plomb pour suivre le cortège du peuple se diriger vers le champ de Mars. Vu qu'il n'aimait pas la foule, il grimpa sur le toit d'une insula et continua sa route nonchalamment sur les toits. Au vu de sa carrière, Vanitas avait développé son agilité, sa souplesse et sa condition physique à un point remarquable pour un garçon de son âge. Peut-être viendrait-on le chercher pour l'enrôler dans la légion. Mais pour l'instant il n'avait même pas encore revêtit la toge virile. De toute façon, personne ne serait là pour lui. Il s'était même attribué lui-même son cognomen : Vanitas, pour sa vie brisée trop tôt.
Le jeune homme aboutit au Champ de Mars, noire de monde. Apparemment le vote avait déjà commencé.
O.O.O.O.O
- Ah, enfin ! Nous y sommes, voilà la Villa Publica ! Se réjouit Ansem qui connaissait bien le manège des élections.
- On vote là-dedans ? Demanda Ventus, intrigué.
- Parfaitement. Lui confirma Eraqus. Laisse-moi donc t'expliquer :
Il s'éclaircît la gorge et pointa le vaste bâtiment de pierre et de marbre qu'était la Villa Publica.
- Vois-tu, Ventus, la Villa Publica est à Rome comme un vestibule est à une maison : elle reçoit les ambassadeurs étrangers, prépare les généraux pour leur triomphe, et c'est également là que les candidats se retirent pour attendre les résultats d'une élection. A côté de ça, il y a une autre enceinte fortifiée : l'Enclos à moutons.
- L'Enclos à moutons ?
- Pendant les jours d'élections, des cordes y sont tendues pour diviser l'espace intérieur en couloirs. Pour voter, les électeurs sont guidés à travers l'Enclos comme des moutons dans un parc. La métaphore est assez facile à comprendre…
Ansem s'éloigna du groupe et Ventus le remarqua.
- Père, où allez-vous ?
- Je suis moi-même candidat pour les élections, mon fils. Lui répondit-il avec un sourire.
- Quoi ?! Mais vous ne m'avez rien dit !
- Surprise, j'imagine…Dit alors Terra avec un air dubitatif.
- Je le savais moi aussi. Les informa Eraqus. Ton père est quelqu'un de sage, Ventus, et beaucoup de gens à Rome le regrettent. Fut un temps où ton père était en passe de devenir Consul (12), et peut-être aujourd'hui est-ce sa chance, prions Jupiter.
Ventus resta silencieux et observa son père s'éloigner pour entrer par l'une des nombreuses portes de la Villa Publica. Pendant ce temps, les trompettes sonnèrent, annonçant le rassemblement général et le début du vote.
- Ventus, attends-nous ici, vu que tu n'as pas encore l'âge. Nous t'expliquerons comment ça s'est déroulé. Lui ordonna Eraqus.
- D'accord…
Le père et le fils Caelius s'éloignèrent à leur tour du garçon, se dirigeant vers l'Enclos.
Les électeurs étaient divisés par ordre de richesse, puis à nouveau en centuries.
Les organisateurs travaillaient d'arrache-pied à regrouper leurs centuries à l'endroit qui leur avait été destiné, mais dans une telle foule les quiproquos et les embrouilles n'étaient jamais loin. Tandis que Terra et Eraqus rejoignaient leur centurie, ils tombèrent sur deux patriciens en train de se rosser mutuellement en criant le nom de leur favori. Des actes de corruption étaient aussi faciles à déceler : des mains qui se serraient, des sourires, et des échanges de bourse certainement remplies d'argent. Conjuguée avec la confusion générale, la chaleur était étouffante. Il n'avait pas plu depuis plusieurs jours et des tourbillons de poussière rendaient l'air difficilement respirable.
Enfin, les deux hommes purent voter. A l'entrée de leur travée, on leur donna une tablette de bois et un stylet où ils écrivirent le nom de leur candidat. A la fin, ils déposèrent leurs tablettes dans une urne qui serrait dépouillée à la fin du vote de la centurie, le choix majoritaire comptant pour un point dans l'élection. On comptait en tout environ deux cents centuries, les deux classes les plus riches en monopolisant plus de cent à elles seules. Les classes inférieures ont ainsi beaucoup plus d'électeurs individuels mais contrôlent beaucoup moins centuries, si bien que la classe la plus pauvre – c'est-à-dire la majorité du peuple de Rome –ne compte que cinq centuries. Souvent, au moment où vient son tour de voter, l'issue du scrutin est déjà décidée et elle est dispensée de vote le peuple de la dernière classe vient donc plus pour le spectacle que pour le vote, lorsqu'il vient.
Terra et son père se trouvaient dans la troisième classe (juste après les patriciens), c'est-à-dire ceux qui possèdent à la fois une résidence en ville et une ferme en campagne. La classe moyenne, en gros.
De son côté, Ventus avait trouvé un coin d'ombre auprès d'une insula. Il n'était pas encore en âge de voter, mais il savait que quand le moment serait venu, il s'ennuierait autant qu'il le faisait à ce moment.
O.O.O.O.O
Vanitas restait là, sur les toits, à prendre le soleil plus que de raison. L'élection était moins ennuyante que la dernière, au vu des accrochages sanglants qu'il avait aperçu : un duel au couteau s'était terminé par l'évacuation des deux parties, un paysan s'était fait balancer hors de la file par un groupe de jeunes en furie. Ah, les beautés de la vie en ville…
Après plus de trois heures de vote, la foule commença à se disperser, mais la majorité du peuple attendait avec impatience l'issue du scrutin. Sur le « podium » de la Villa Publica, les participants s'alignèrent, sous les acclamations de la foule.
Vanitas sut que l'un d'eux était Ansem, malgré la distance. Il l'avait vu plus bas, en compagnie d'autres hommes avant de se diriger vers la Villa Publica. Ensuite, il ne restât plus que le jeune blond, assis juste en dessous de lui, à l'ombre. Il le trouvait perdu, là, tout seul. Sûrement un petit campagnard qui n'avait pas l'habitude de la crasse grandiose de la Ville et de ses petites émeutes. Le pauvre ne tiendrait pas deux heures à Subure.
Le résultat du vote allait être annoncé dans peu de temps. Descendu de son perchoir, le noiraud entendit une clameur s'élever depuis le champ de Mars : Ansem et Tullius seraient consuls cette année. Jamais le jeune homme n'avait vu la foule dans un tel émoi devant le résultat d'une élection, à croire que cet Ansem dont il entendait parfois parlé était aimé de tous, ou presque…
Lassé de tout ce tumulte, Vanitas repartit chez lui, empruntant désormais les routes, désertées par le peuple.
O.O.O.O.O
- Toutes mes félicitations ! Fut accueilli Ansem par Eraqus, qui échangea ensuite une accolade amicale avec lui.
- La foule semble très heureuse de l'issue des votes ! Remarqua Ventus. Ils viennent tous t'acclamer !
- Bof, moi pas trop. J'avais voté pour Xehanort…
Les trois hommes se retournèrent sur Terra qui avait lâché cette phrase désinvolte. Ils partirent tous dans un grand éclat de rire devant la plaisanterie du châtain. Soudain la foule s'écarta et laissa un cortège formé d'un vieil homme courbé et d'une pléthore de gardes du corps s'arrêter devant Ansem, dont le sourire disparut bien vite.
- Tu as bien eu de la chance, Marcus Claudius. Si tu n'avais pas aussi bien joué de tes relations peut-être l'issue du scrutin aurait-elle été différente…Lui lança le vieux Xehanort.
- Le peuple a choisi, Gnaeus Julius, tu ne peux rien faire contre ça. Lui répondit Ansem le plus sereinement du monde.
- Tss…je n'ai que faire de tes balivernes. Bientôt le peuple pleurera de t'avoir choisi. Nous savons très bien que c'est moi qui aurais dû gagner ces élections.
- Peut-être aurais-tu du te redresser un peu alors ? Tu es si courbé que les électeurs ne t'ont peut-être même pas vu…
La foule entière massée autour d'eux éclata de rire. Humilié, le vieux Xehanort tourna les talons en maudissant tout le monde, accompagné de ses gardes du corps qui sur le coup avaient un petit peu ri aussi. Tandis que le calme revenait et que la foule se dispersait, Ansem se retourna sur ses amis.
- Que diriez-vous d'un grand repas pour fêter cela ?
- Oh oui ! Répondit immédiatement Terra.
- Comment refuser ? Dit Eraqus plus calme que son fils.
Ils se mirent donc en route à travers la cohue du peuple rentrant chez lui. Après quelques minutes de marches, ils arrivèrent à la demeure citadine d'Ansem. Un somptueux jardin soigneusement entretenu précédait la porte d'entrée en bois massif. Une fois à l'intérieur de la villa, Ansem n'eut que deux mots à dire pour mettre ses esclaves au travail. Les cuisiniers dégainèrent tous leur attirail tandis que les invités étaient reçus dans le triclinium (13). Confortablement installés, ils n'eurent plus qu'à papoter tout en attendant le repas.
Terra s'approcha de Ventus.
- Pitié, ne m'apprend plus de trucs électoraux ! Le supplia ce dernier.
- Ne t'inquiète pas, tu sais déjà tout, merci à mon père. Rit le châtain en ébouriffant ses cheveux.
- C'était ennuyant…
- Oui, j'avoue que la politique, ce n'est pas très réjouissant…mais bon, avoue que tu as bien passé ton temps, tout de même.
Il lui fit un clin d'œil, sans que le cadet comprenne.
- J'ai vu que les légionnaires t'intéressaient beaucoup…surtout leur plastique.
Ventus devint pourpre à la réflexion de Terra qui ne manqua pas de rire à l'air scandalisé du blond.
- Allons, Ven, il n'y a pas de mal à avoir un faible pour un séduisant soldat, du moment que tu ne te transforme pas en grec (14).
- Hm…
- Allez, souris un peu !
Il lui fit un immense sourire caricatural.
Au fond de lui Ven était heureux que Terra soit un garçon ouvert. A l'âge où l'on commence à faire ses premiers pas en amour, le petit blond était complètement insensible au sexe opposé…mais sa virilité s'était déjà dressée plusieurs fois devant le spectacle d'esclaves travaillant torses nus au soleil. Pire même, dans son lit, Ven avait déjà fantasmé sur son meilleur ami.
Avant que Terra ne puisse ajouter quelque chose, les mets furent placés sur un gigantesque plateau sur la table. Généreusement arrosés de Garum (15), les olives, choux, poireaux et la viande de porc accompagnée de tout un assortiment d'herbes aromatiques étaient un régal pour les yeux et surtout pour le ventre. Régulièrement, les esclaves vinrent, amphores à la main, remplir à nouveau le gobelet de vin des invités. Ensuite, le deuxième service arriva, composé de poissons et de volailles rôtis.
Enfin vint le temps du dessert. Des gâteaux au miel, des dattes, des figues fraîches, des pommes, poires et du raisin furent servis avec une nouvelle ration de vin. Le festin se prolongea jusqu'à la tombée de la nuit, dans la joie et la bonne humeur, et surtout dans le vin.
O.O.O.O.O
Vanitas était debout, devant la dépouille d'un homme fraîchement poignardé, dans une ruelle sordide comme il y en a tellement à Rome. Les rues étaient vides, l'élection ayant épuisé tout le monde et le soleil déclinant, colorant le ciel d'orange rosé.
Quelle ironie, c'était l'un des deux duellistes au couteau qui était venu le voir, sa plaie aussitôt pansée pour le sommer de mettre fin aux jours de l'homme qui avait osé lever la main – ou plutôt le glaive – contre lui. Ce fut vite régler, les deux pugilistes ayant été soigné au même endroit et se saouler dans la même taverne pour terminer sur une bataille de poivrots. Son client s'était enfui le premier et trouver son adversaire ne fut donc pas difficile. Aussi facile que d'égorger un petit goret.
Vanitas avait même demandé au client d'attendre chez lui en attendant de lui ramener la tête de sa cible. Ce fut chose faite lorsqu'il jeta la partie humaine sur le plancher, encore dégoulinante de sang.
- Vous voilà servis.
L'homme eut une expression de dégoût et ordonna à son garde d'ôter la tête découpée de sa vue. Pendant ce temps, il paya l'assassin pour ses services, en lui promettant d'ailleurs de faire vent de ses « talents » auprès de ses amis. Quelle délicate attention, venant de la bouche d'un patricien.
Les deux hommes quittèrent l'insula et Vanitas put enfin se reposer. La nuit tombait, mine de rien cette affaire de dernière minute lui avait pris une bonne heure. Assis sur son matelas, il dégusta des galettes de céréales, puis en dessert quelques fruits frais et un peu de vin bu à même l'amphore, le tout acheté sur le Forum un peu plus tôt dans la journée. Il se déshabilla puis se coucha, la fenêtre grande ouverte pour évacuer l'air étouffant de l'été.
Mais le ciel ne lui accorda pas encore le repos. Tandis qu'il avait fermé les yeux depuis deux minutes à peine, on frappa à la porte. Il se releva en grognant et se rhabilla en vitesse pour ensuite ouvrir la porte et tomber sur un vieil homme encapuchonné.
- Vanitas, j'ai besoin de tes services. Demanda une voix rauque sous la capuche.
- Et qui êtes-vous pour me tutoyer?
Pour réponse l'homme ôta sa capuche et découvrit un visage couleur de bronze dépourvu de cheveux, mais pas d'un bouc grisonnant.
- Oh, c'est vous? Le reconnut le noiraud.
- C'est cela oui…injustement. Grogna le vieux chacal en entrant.
- Et donc peut-être voulez-vous que le consul Ansem quitte son poste prématurément ?
Xehanort poussa un petit rire machiavélique avant de se retourner sur le jeune homme. Ce dernier savait que ça présageait un plan rocambolesque…Le vieux politicien était le client le plus fidèle de Vanitas, vu qu'il détestait pas mal de monde…et le monde le lui rendait bien.
- C'est très tentant, en effet…mais j'ai d'autres projets pour lui.
- Développez ?
- Ce fils de gorgone m'a humilié devant le peuple de Rome et mes autres adversaires. Cette mission est beaucoup plus complexe que ce que j'ai pu te confier jusqu'à présent, Vanitas. Je ne veux pas qu'il meure, non…je veux qu'il souffre. Son fils est son point faible. Tue-le.
- Je vois…De plus je l'ai déjà aperçu en journée.
- Bien, alors mets-toi au travail dès que possible. Je te paye d'ores et déjà une partie de la prime.
Il déposa une bourse volumineuse sur la table. Voilà pourquoi Vanitas adorait avoir des politiciens dans sa clientèle…
Le vieux rabougri quitta l'immeuble. Vanitas n'eut même pas le courage de vérifier le montant de son paiement, il s'effondra sur son matelas et ferma les yeux en priant Morphée de venir le chercher au plus vite. Demain, il partirait étudier la cible chez elle…
S'il y avait bien une mission à ne pas rater, c'était celle-là.
(1) Etablissement qui sonne en français sous le nom distingué de "bordel".
(2) Déesse romaine des cultures.
(3) Les prénoms de nos héros sont en fait ici leurs surnoms. Les romains fonctionnaient sur le principe du tria nomina. Tout citoyen possédait un Praenomen (prénom), Nomen (nom) et Cognomen (surnom attribué après la naissance). Vu qu'à Rome il y avait au plus quarante prénoms, on appelait plus souvent une personne par son cognomen que par son prénom. D'où ici Aulus Claudius Ventus. Cheveux fous à cause du vent, vous voyez la subtilité ? :D
(4) Comme son nom l'indique, construite sous le Consul Cassius.
(5) Phrase la plus célèbre : Carthage doit être détruite. Malheureusement Caton mourra avant de voir son vœux exaucé (Mort en -149 alors que Carthage est rasée en -146).
(6) Le peuple, qui s'oppose aux patriciens, les nobles.
(7) Dieu romain de la mer, équivalent de Poséidon en Grèce.
(8) Cérémonie par laquelle un jeune garçon atteint l'âge adulte (seize ans).
(9) Prêtre qui observe le vol des oiseaux et décrit les présages envoyés par les dieux.
(10) Subure, un des quartiers les plus malfamés de Rome, fréquemment victime d'incendies et d'épidémies.
(11) littéralement Île. A Rome il désigne un immeuble qui peut compter plusieurs étages. Les insulae sont souvent très sales et fragiles, surtout dans un quartier comme Subure.
(12) Tous les ans, on élisait deux Consuls à Rome pour diriger l'état, qui se surveillaient mutuellement. Le Consulat était la magistrature suprême et le point culminant d'une carrière politique.
(13) Salle à manger. Chez les Romains, on mangeait allongé sur des divans spéciaux et on saisissait sa nourriture à une main tandis que l'autre tenait l'assiette. Les aliments étaient tous prédécoupés, donc ils n'utilisaient que des fourchettes et des cuillères.
(14) Les Romains méprisaient les Grecs, qu'ils trouvaient efféminés et décadents.
(15) Sauce au poisson fermenté. Ils en mettaient n'importe où, même sur les desserts. Aujourd'hui ça a un équivalent vietnamien dont j'ai oublié le nom.
Donc voilà la première partie de ce (long) récit.
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