Bonjour tout le monde !

Voici une petite fic parfaitement absurde, qui n'aurait jamais vu le jour sans l'incroyable Nalou (allez donc lire la fic From Gasgow to London (Sherlock BBC) que nous avons écrite ensemble !), un certain raccourci malheureux et quelques fautes de frappes... Je n'aurai jamais pensé à les appeler Neviolle Longcul et Malfroy sinon, mais au bout d'un moment on s'y fait, rassurez vous !

J'espère que ça vous plaira et n'hésitez pas à laisser une petite review si vous en avez envie !

Bonne lecture !
Flo'wTralala


Le professeur Neviolle Longcul, botaniste de renom, menait une vie paisible. Il habitait une petite maison de bois au milieu d'un vaste terrain couvert d'espèces végétales diverses, et une large serre jouxtait sa demeure. L'endroit était calme, loin de toute ville, et lui offrait la douce quiétude dont il avait besoin : Neviolle Longcul n'était pas un homme aventureux. Son caractère était posé, taciturne, et les plantes étaient la seule compagnie qu'il pouvait imaginer supporter.

Il ne souffrait pas de la solitude. Ses heures d'enseignement à Poudlard lui suffisaient en termes de temps passé en société, et il ne lui arrivait que rarement de revoir certains de ses anciens camarades.

Ses journées étaient généralement sans surprise. A l'occasion, une plante carnivore un peu trop gourmande essayait de le déchiqueter, ou une mandragore entrait en crise d'adolescence. Il gérait ces incidents avec calme, sans panique. Ces évènements n'égayaient que peu sa vie passablement monotone, légères poussées d'adrénaline qui lui rappelaient le temps de ses études, quand la guerre contre Celui-Dont-Le-Nom-Ne-Doit-Pas-Être-Prononcé faisait rage. La nostalgie envahissait alors inévitablement son esprit, et il rêvait de revenir à cette époque, celle où il était encore un jeune sorcier plein d'ambition et de maladresse.

Neviolle Longcul n'était pas un homme heureux. Au fond de lui, enfermée dans un coin sombre de son cœur, une flamme mourante vacillait, souvenir étouffé de ses rêves d'autrefois.

Sa vie n'avait pas été facile, et ses études n'avaient pas porté les fruits qu'il aurait voulus. Le jeune sorcier avait eu la tête farcie d'idées de vengeance et de pouvoir. Mais comment surpasser un mage noir à la puissance presque invaincue, quand on s'appelle Longcul (avouez que ça a moins de panache que « Voldemort »), qu'on est chez Gryffondor et qu'on a deux mains gauches ?

Neviolle avait toujours été inexplicablement fasciné par les forces du mal, jaloux de ceux qui s'en servaient. Ah, ce qu'il aurait aimé être à leur place, lui que personne ne remarquait… ! Dominer le monde des sorciers… Mais il n'avait de talent que les mains dans la terre. Alors il avait enfoui ses ambitions grandioses et ses rêves de gloire, et avait peu à peu sombré dans une vie routinière envahie par la chlorophylle. Il s'était résigné à laisser le côté obscur de la magie aux autres. A un autre.

En effet, tandis que Neviolle devenait professeur et tombait dans l'oubli le plus profond – à part dans le domaine des plantes magiques, dans lequel ses travaux finirent par pousser ses confrères à le surnommer « le Botaniste » tant il se montrait brillant – un nouveau mage noir commençait à prendre de l'envergure.

Sans être un sorcier aussi vindicatif et cruel que Voldemort, celui-ci avait tout de même attiré l'attention du professeur Longcul, qui enviait malgré lui sa ténébreuse célébrité. Il était envoûté par son charisme. Cette classe innée, ce sourire en coin, cet air supérieur, orgueilleux… Neviolle n'avait rien de tout cela. Bien que la fin de la puberté lui ait accordé un bon mètre quatre-vingts, que le sport qu'il pratiquait régulièrement lui ait valu un corps bien modelé et qu'un soupçon d'orthodontie magique lui ait remis les dents en place (Dieu merci), il restait assez quelconque. Yeux marron, cheveux bruns coupés courts, vêtements ordinaires, rien ne le distinguait du commun des sorciers. Il aurait aimé avoir ces yeux bleus de glace, ces cheveux soyeux d'un blond presque blanc coiffés avec style, ce nez aigu…

Le professeur Longcul, prisonnier de sa vie trop tranquille, rongeait son frein.


Neviolle rempotait une mandragore lorsqu'il sentit le courant d'air froid sur sa nuque. Un léger frisson parcourut sa colonne vertébrale, et il pesta contre le loquet cassé de la porte. Il fallait vraiment qu'il le répare, avec l'hiver qui approchait…

Il termina rapidement son travail, agacé. De toute façon, la nuit commençait déjà à tomber, et l'éclairage de la serre n'était pas suffisant pour continuer. Après un coup d'œil critique vers le pot de la mandragore, il fit tranquillement volte face pour se diriger vers la sortie… et resta figé par la stupeur.

Ce n'était pas le vent qui avait ouvert le battant. C'était quelqu'un.

Mais qui, qui lui aurait rendu visite ? Personne ne connaissait son adresse, pas même sa grand-mère.

Le quelqu'un regardait nonchalamment autour de lui. C'était un homme, vêtu d'un élégant costume de velours vert sombre qui se mariait à la perfection avec le décor végétal, et mettait en valeur un corps mince et élancé. Il portait une cape assortie repliée sur un de ses bras. Le visage était dissimulé dans l'ombre d'un chapeau noir et Neviolle ne put distinguer que la silhouette d'un menton étroit, et l'éclat d'une dent dévoilée par un sourire. Une fine canne d'ébène à pommeau d'argent complétait l'allure. Le nouveau venu referma la porte derrière lui d'un léger coup de pied, et le déclic du battant se remettant en place tira Neviolle de sa surprise. Le botaniste déglutit. Quel riche inconnu mettrait les pieds dans sa petite maison campagnarde – à une telle heure, par-dessus le marché – et pour quelle raison ?!

« Hum, euh, bonsoir, bredouilla-t-il en essuyant ses mains terreuses sur son tablier déjà maculé. Vous… vous cherchez quelque chose ?

L'homme promena son regard autour de lui encore quelques instants, son visage se refusant toujours à la lumière.

- Bonsoir, Professeur Longcul, finit-il par répondre d'une voix de miel.

Neviolle eut le souffle coupé… Cette voix, ce ton… Non, c'était impossible. Ça ne pouvait pas être lui.

- Je suis dans le besoin d'un botaniste expérimenté, continua l'inconnu, imperturbable. Je viens parler affaires. Je crains de ne pas m'être fait annoncer – je suis très occupé, voyez-vous, et j'aime la discrétion.

Affaires ? Neviolle resta interdit. Il n'avait jamais été contacté par des particuliers. Il était prof, et expérimentait dans son coin, mais n'offrait pas de services.

- Je… – le professeur dut se racler la gorge pour pouvoir continuer – J'allais fermer la serre. Je peux… vous proposer une tasse de thé chez moi, peut-être ?

- Très volontiers. » conclut l'homme en hochant gracieusement la tête.

Obnubilé par cette voix suave, cette silhouette sombre et fine, le professeur Longcul guida maladroitement son hôte à l'intérieur de sa maison, et lui offrit un siège à côté de la cheminée avant de se hâter dans la cuisine.

Il refusait encore d'y croire. Qu'est-ce qu'il ferait ici ? Longcul prépara fébrilement le thé, et revint dans le salon. L'homme s'était débarrassé de sa cape et de son chapeau, qu'il avait accrochés à une patère dans un coin de la pièce. Face à l'âtre, il était de trois-quarts dos par rapport au botaniste.

S'il ne vit donc pas Neviolle pâlir, rougir, puis pâlir de nouveau, le professeur, lui, pouvait enfin voir sa tête. Il sentit sa gorge se dessécher, et il posa le plateau sur la table à proximité, avant de s'y appuyer lui-même de crainte que ses genoux ne lâchent. Comment avait-il pu nier l'évidence ? Comment ne l'avait-il pas reconnu au premier coup d'œil, même dans la pénombre de la serre au couchant ?

Il était pourtant impossible de se tromper. La peau pâle, le profil acéré, le nez pointu, et les cheveux… ces cheveux presque blancs, animés par les reflets du feu, soigneusement coiffés en arrière… Cette grâce presque animale, reptilienne…

« Malfroy… » souffla Neviolle, incrédule, effrayé, fasciné.


Sa voix avait sonné bizarrement. A peine audible, légèrement rauque. Il déglutit difficilement. L'homme releva les yeux vers lui, des yeux incroyablement clairs et perçants, et sourit lentement, prédateur.

« Longcul. J'ai cru que tu n'allais pas me reconnaître, ricana-t-il.

Le botaniste dut se retenir de se mordre la lèvre. Ce rictus en coin, ce regard qui le clouait sur place… ! Comment aurais-je pu t'oublier ? songea-t-il amèrement. Tu es la seule raison qui me pousse à rester en contact avec le monde des sorciers. Je ne vis que pour toi, dans l'espoir insensé de gravir les échelons des Forces du Mal pour être à ta place, ou mieux, à tes côtés…

- Ça ne fait pas si longtemps, répliqua-t-il seulement, l'air plus décontracté qu'il ne l'était en réalité. Et tu es célèbre, maintenant, ajouta-t-il.

- Tristement célèbres, auraient dit certains, reprit Malfroy, un sourcil levé. Je n'ai encore tué personne – j'en ai l'intention, je le concède, les Sang-de-Bourbe deviennent vraiment trop nombreux – mais les gens sont déjà affolés… Mage noir ! Un peu de nécromancie, et tout le monde perd l'esprit… Mais je vois que tu brûles de demander pourquoi je suis ici. Eh bien, demande, ordonna-t-il de sa voix enjôleuse.

Neviolle ne put qu'obéir à l'injonction, et il s'assit lentement en face de Malfroy.

- Pourquoi es-tu ici ?

Le sourire du mage noir s'élargit.

- Je te l'ai dit. Je viens parler affaires. J'ai une commande à te passer – une commande spéciale qui servira mes projets, ben entendu…

- Une commande, répéta Longcul, perplexe. Pourquoi aurais-tu besoin de plantes ? Tu refais la décoration de ton manoir ?

- Ne tombe pas dans l'ironie facile. Les végétaux peuvent avoir des pouvoirs extraordinaires, et tu es très bien placé pour le savoir, si j'en crois tes dernières publications.

A ces mots, les yeux de Neviolle s'écarquillèrent.

- Tu… tu lis mes… mes publications ? Les papiers mal rédigés qui paraissent dans des revues inconnues qui n'intéressent que les botanistes et les minutes des conférences du Salon Végétal Annuel des Sorciers ? Toi ?!

Mais l'intéressé balaya la remarque d'un revers de la main.

- Il faut bien que je me renseigne sur les personnes que j'ai l'intention d'embaucher.

- Embaucher, répéta bêtement Longcul. Tu me proposes un emploi ? Attends, je commence à peine à comprendre. Tu es certainement – Neviolle eut un petit rire, incrédule – certainement la personne qui m'a dit le plus grand nombre de fois que j'étais inutile. Tu as besoin de moi ?

- Ah, Longcul, Longcul, à Poudlard, tu m'étais inutile. Je ne pouvais pas décemment enrôler un Gryffondor – et un ami de Potter, par-dessus le marché. Mais je crois savoir que tu ne le fréquentes plus tellement. Et tu as maintenant toutes les compétences nécessaires. Je note que tu n'as pas refusé tout net de m'aider, ajouta-t-il en retrouvant son rictus.

Neviolle haussa les épaules, essayant de rester détendu. Il avait envie de lui hurler qu'il ferait n'importe quoi, pourvu qu'il continue à le regarder avec ce sourire.

- Je ne refuse pas une offre d'emploi sans savoir de quoi il s'agit, répliqua-t-il.

- Intéressant. Tu veux dire que tu veux juger de mon projet avant de savoir si tu vas m'aider ou non ? Et si ce n'est pas trop malfaisant à ton goût, tu vas accepter ?

- Je… Je crois que c'est ça que j'ai voulu dire, oui.

Malfroy soupira, et son sourire se fit légèrement moqueur.

- Je vois que les plantes n'ont pas amélioré ton intellect, Longcul. Réfléchis un instant. Crois-tu que je prendrais le risque de te dévoiler mon plan, et que tu refuses ? Non. Le moment est venu pour toi de choisir. Soit tu refuses de m'aider, et je m'en irai. Tu te demanderas éternellement ce que je voulais que tu fasses et tu regretteras certainement ta décision, mais ça te vaudra la vie sauve. Soit tu acceptes d'écouter mon offre, et tu n'auras alors d'autre possibilité qu'effectuer le travail… ou emporter le secret dans la tombe. »

Neviolle resta silencieux. Il se sentait presque triste. Sa décision avait été prise à l'instant où il avait reconnu Malfroy : il ferait tout ce qu'il lui demanderait. Aveuglément. Même s'il y avait des vies en jeu, même s'il devait renier tous ses principes. Si c'était le prix à payer, il le paierait.

Mais il ne pouvait pas dire ça. Au mieux, Malfroy serait surpris, peut-être un peu déçu de n'avoir pas eu à lutter. Au pire, il trouverait ça suspect, et risquerait de retirer sa proposition.

Malfroy brisa le silence, et la réflexion du botaniste.

« Alors ?

- Je suis surpris que tu me laisses le choix, s'entendit répondre Neviolle sans réfléchir.

- Que veux-tu dire par là ?

- Eh bien… Je m'attendais à ce que le choix se réduise à travailler pour toi ou mourir. C'est magnanime de ta part de me laisser une porte de sortie…

Le mage noir dévoila une canine acérée, dans un sourire tordu qui coupa le souffle de Neviolle. Il tira nonchalamment sa baguette magique et posa délicatement la pointe sur le cœur du botaniste. Lentement – oh, si lentement – il remonta vers le cou pour caresser la jugulaire, contourna la mâchoire anguleuse, releva le menton… Neviolle avait désespérément besoin de toute son attention pour se retenir de laisser s'échapper un son indécent de sa gorge. Un neurone solitaire se demanda si Malfroy était conscient de l'effet qu'il produisait, et resta sans réponse.

- J'ai l'intention de travailler avec des gens consentants, dit-il tranquillement. Enfin, jusqu'à un certain point, mais nous verrons cela plus tard. Je n'ai pas envie que tu travaille pour moi juste pour éviter la mort. Je veux que tu travailles pour moi parce que tu en as envie.

Sa baguette tenant toujours le visage de Neviolle vers le haut, Malfroy se leva et se pencha en avant, jusqu'à coller sa bouche contre l'oreille du professeur.

- Si je devais quand même te tuer, je pourrais facilement trouver quelqu'un d'autre, souffla-t-il. Mais je veux que ce soit toi.

Il se redressa soudainement, et rangea sa baguette. Neviolle sentait ses joues le brûler et peinait à respirer calmement alors Malfroy reprit la parole d'un ton parfaitement naturel.

- Nous n'avons pas encore parlé salaire, mais sache que si tu acceptes, je te fournirai tout ce dont tu pourrais avoir besoin pour effectuer ta mission, indiqua-t-il. Et si tu la mènes à bien, ta récompense dépassera tous tes rêves les plus fous… »

Neviolle retint son souffle. Il ne comprenait pas comment Malfroy pouvait ne pas remarquer son état.

- Je...

Le botaniste se racla la gorge, ne sachant pas comment continuer sa phrase. Il ferma les yeux, vague tentative pour se soustraire au regard pénétrant du mage noir, et s'obligea à respirer calmement. Après tout, il veut que j'accepte, non ? songea-t-il. Et j'ai envie d'accepter. Alors à quoi bon faire semblant ?

- J'accepte, annonça-t-il à voix haute.

Malfroy haussa un sourcil.

- Tu acceptes ? Tu mets ta vie en jeu ? Interrogea-t-il, mi-mielleux, mi-surpris.

- Non, rectifia Neviolle, un peu plus sûr de lui. J'accepte la mission. Je ne suis pas curieux de nature, Malfroy. Je pourrais très bien me passer de connaître tes plans – c'est d'ailleurs probablement ce que je devrais faire... – Mais non. Je ferai ce que tu me demanderas, tant que ce sera lié à la botanique, bien sûr.

Les yeux du mage noir étincelèrent, satisfaits.

- Intéressant, murmura-t-il pour lui même, avant d'ajouter, à l'adresse de Neviolle : parfait. Passons aux choses sérieuses...


Le professeur Longcul déglutit faiblement. Il sentait la situation lui glisser des mains – mais ce qui le troublait le plus, c'est qu'il ne s'en inquiétait pas. Dans quoi s'était-il engagé ? Il attendit la suite, mais Malfroy ne semblait pas décidé à parler tout de suite de ses projets.

« J'ai faim, annonça le mage noir tout à trac, en se levant gracieusement de son fauteuil.

Le botaniste lui lança un regard ébahi.

- Pardon ?

- J'ai faim, répéta Malfroy, l'air agacé. Pourquoi ne préparerais-tu pas un repas, et je pourrais t'expliquer ta mission tout en mangeant ? »

Neviolle ne prit pas la peine de répondre, et haussa mollement les épaules en se remettant sur pieds. Au point où il en était, pourquoi ne pas faire la cuisine, hein ? Il masqua toutefois un mince sourire et soupira intérieurement. Si Malfroy savait tout ce qu'il était prêt à faire pour lui…

Le professeur se dirigea vers la cuisine, suivi par son invité – soyons diplomates, appelons Malfroy un invité et non un hôte auto-incrusté indésirable – et se mit en quête d'ingrédients. Bien qu'il n'ait pas l'habitude de manger beaucoup ou de prévoir plusieurs portions, Neviolle dénicha de quoi nourrir Malfroy, et ils s'attablèrent bientôt devant une épaisse soupe de légumes variés accompagnée de pain frais. Tout en remplissant les assiettes, le botaniste se félicita du coin potager qu'il avait aménagé dans sa serre.

« Désolé de ne pas avoir fait mieux, s'excusa-t-il machinalement, avant de se dire que ce n'était tout de même pas de sa faute s'il n'avait pas prévu de repas.

Malfroy écarta les excuses d'un geste impatient et lui fit signe de s'asseoir.

- Ça ira, tu n'es pas un elfe de maison. Allons, trêve de bavardage, parlons peu mais parlons bien. Je suis certain que tu es impatient de savoir ce que tu as aveuglément accepté de faire pour moi…

Neviolle hocha la tête, manquant de s'étouffer sur son potage, et se maudit mentalement. N'avait-il donc aucun sang-froid ? Aucune dignité, pour s'être vendu – presque damné – pour un seul de ses regards ? Et être incapable de se contrôler, de garder un air neutre et impassible… Mais l'ancien Serpentard coupa court à ses réflexions.

- Bien, reprit-il, son regard pâle plongeant dans les yeux marron et troublés de son vis-à-vis, je sais que ton domaine de prédilection est le croisement d'espèces, si j'en crois l'enquête que j'ai menée à ton sujet. Et la lecture de tes articles m'a appris que tu étais particulièrement doué pour donner à tes nouvelles plantes des pouvoirs bien précis et calculés. C'est exactement ce dont j'ai besoin : une plante avec un pouvoir spécial…

Soudain, Neviolle fut extrêmement concentré. Il était passionné par les végétaux, et malgré le contexte peu habituel dans lequel il se trouvait, la demande de Malfroy constituait un défi – un défi qu'il était tout prêt à relever. Il passait ses journées à étudier les plantes, et à en créer de nouvelles juste pour la science. Le professeur hocha la tête, invitant Malfroy à continuer.

- J'ai besoin d'une plante capable d'influencer les sentiments des gens qui la consommeront. Peu importe sous quelle forme – ingestion, infusion, inhalation, que sais-je…

Le botaniste fronça les sourcils et resta silencieux quelques instants. Lorsqu'il s'aperçut que sa concentration était happée par les lèvres fines de son interlocuteur, il se secoua et répondit, pensif :

- Je ne suis pas sûr de comprendre. Un simple filtre d'amour ne pourrait-il pas faire l'affaire ?

Mais Malfroy rejeta la suggestion en secouant la tête.

- Non. Un filtre d'amour, c'est un sort, c'est temporaire, c'est faux. Non, je veux que cette plante ait un effet permanent, irréversible et immédiat.

Sur ces mots, il se leva et retourna s'asseoir près du feu, laissant sur place un Longcul interloqué. Une plante à effet définitif, c'était impossible. Ça n'existait que dans les livres. Tout en réfléchissant, il débarrassa la table et rejoignit Malfroy devant la cheminée.

- Je peux poser une question ? s'entendit-il demander.

Le mage noir opina, son mince sourire supérieur de retour sur sa bouche pâle.

- Pourquoi ce pouvoir ? Quel intérêt pour un mage noir de posséder une telle plante ?

Une fraction de seconde, le sourire tomba. Trop peu de temps pour que Neviolle ne le remarque.

- Longcul, Longcul… Tout génie du mal qui se respecte aime être adulé – et a besoin d'adeptes. Pourquoi ne pas joindre l'utile à l'agréable ? Grâce à cette plante, je pourrai disposer de sorciers désespérément enclins à m'obéir, pour un regard, pour une seconde d'attention…

Neviolle se retint de ricaner tristement en entendant la parfaite description de son cas, et marmonna un vague acquiescement. Puis il se releva, pour tenter de masquer son trouble et se donner une contenance.

- Du thé ? proposa-t-il, bien plus nonchalant qu'il ne l'était vraiment.

- Volontiers.

Il allait passer la porte de la cuisine lorsque Malfroy le rappela.

- Longcul !

- Oui, eut le temps de dire Neviolle en faisant volte-face, avant de rester figé devant la vision qui s'offrait à lui.

Malfroy le fixait de ses yeux glacés, installé négligemment – élégamment vautré – dans son fauteuil. Ses longues jambes croisées et son menton posé sur le dos d'une main blanche, le mage noir lui décocha un sourire de prédateur affamé. Et sa voix fut d'une douceur exquise, basse, suave, imperceptiblement rauque, une vibration profonde qui prit Neviolle aux tripes lorsqu'il prit la parole.

- Tu vas me faire cette plante, Longcul. »

Ce n'était pas une question, ce n'était pas un ordre, c'était un simple fait énoncé calmement. Jambes flageolantes, cœur battant, joues enflammées et souffle égaré, Neviolle ne put prononcer qu'un mot. Il le murmura, et tout son corps le hurla avec lui.

« Oui. »


Mais quel suspense insoutenable !
Ne vous en faites pas, je poste le deuxième (et dernier) chapitre ce soir aussi ^^