Chapitre un

Université de Stanford septembre 1998.

Jim posa le dernier carton sur le bureau de la chambre de sa fille avant de se relever en posant ses mains dans son dos.

- Bon sang Katie! Qu'est-ce que tu as mis dans ce carton?!

- Fais voir? Oh, ce sont mes livres!

- Tu es au courant qu'ils ont une bibliothèque ici?! Je suis sûr que tu n'aurais pas le temps de lire tous les livres qu'ils ont même si tu y restais encore cinq ans!

- J'avais besoin de ces livres, répondit Kate avec un haussement d'épaules.

- Et tes étagères sont déjà pleines! Où vas-tu mettre tout ça? Sur celles de ton amie?

- Rahhh! Tu ne vas pas râler pour quelques bouquins, soupira la jeune fille. Et puis Carly n'utilise pas toutes ses étagères...

- Quelques bouquins?! Il pèse une tonne ce carton! Et dire que je pensais que tu avais déjà ramené tous tes livres l'an dernier! Je me suis certainement fait un tour de reins en le portant jusqu'ici!

- Arrête donc de te plaindre Jimmy, lança une douce voix derrière lui. Katie a besoin de ses livres, ça la rassure, c'est normal.

- Elle n'avait pas besoin de se rassurer autant quand elle est allée à Kiev pendant un semestre!

- Mais si voyons, répondit Johanna, seulement cette fois-là, ça n'était pas toi, qui portait les cartons pour la conduire à l'aéroport, mais Paul.

En entendant le prénom de son ex petit copain, Kate se figea, pourvu que la discussion "Paul" ne revienne pas sur le tapis!

- De toute façon, tu es toujours de son côté, marmonna-t-il.

- Ah, ça y est, voilà que ton père joue les victimes, rigola Johanna. Mais au fait, tu as des nouvelles de Paul? Je l'aime bien ce garçon!

Loupé! Revoilà Paul! Kate roula des yeux.

- Tu parles, ce garçon ne valait pas un clou! Marmonna Jim.

- Ne dis pas n'importe quoi, Jim, de toute façon avec toi, personne n'est assez bien pour ta petite fille chérie! Paul est un noble français, tout de même! Il vaut cent fois mieux que le grunge qui sentait le chien mouillé.

- Ah c'est sûr que celui-là, il méritait la palme! Étant donné la médiocrité de ses goûts en matière de garçons, je renouvelle ma proposition de l'enfermer dans un couvent!

- Encore cette histoire de couvent ? Combien de fois faudra-t-il que je t'explique que notre fille a grandi et qu'on ne peut pas la mettre sous cloche !

- J'ai besoin de la savoir en sécurité !

- Et moi, j'ai besoin de la savoir heureuse ! Le monde est plein de dangers, mon chéri, c'est comme ça ! Mais rassure-toi elle est suffisamment bien armée pour affronter la vie !

Kate secoua la tête, exaspérée. Se rendaient-ils compte qu'elle se trouvait dans la même pièce qu'eux ? Ils ne rataient jamais une occasion de se chamailler et elle était leur détonateur préféré. Ah… Si seulement elle avait eu un frère ou une sœur…

- Non mais ce n'est pas bientôt fini, vous deux? Râla Kate. Maman, désolée de te l'annoncer, mais j'ai définitivement tourné la page avec Paul!

- Excellente nouvelle! Se réjouit Jim.

- Quant à toi papa, je te rappelle que je suis une grande fille, tu n'as plus ton mot à dire sur le choix de mes petits amis!

- Tu es bien trop jeune! Protesta Jim.

- Peut-être, mais d'après la loi je suis majeure! Rétorqua la jeune fille en croisant les bras.

- Pas au Nebraska et encore moins dans le Mississipi!

- Eh bah heureusement pour moi, Stanford est en Californie! Siffla la jeune fille.

- Alors ça, parlons-en! rétorqua-t-il en sautant sur l'occasion de remettre ce sujet sur le tapis. Pourquoi as-tu choisi une université aussi loin de New York! J'aimais bien Columbia, moi!

- Papa, soupira Kate, tu m'as déjà fait ce cinéma l'an dernier!

- Mais Stanford est si loin de New York… geignit-il.

- Jim, on en a déjà discuté, intervint Johanna, et puis Stanford, c'est quand même plus près que Kiev!

Kate remercia sa mère intérieurement. Elle savait combien il lui coûtait de voir sa fille unique faire ses études aussi loin de la maison, mais elle faisait bonne figure et tempérait la réaction de son père, qui lui, était désespéré de voir sa petite fille chérie s'installer loin de lui. Qui allait pouvoir surveiller les garçons qui ne manqueraient pas de lui tourner autour?

- Tu as tout ce qu'il te faut? Demanda Johanna pour changer de conversation. Ton réfrigérateur est rempli?

- Maman! Tu l'as rempli toi même! Soupira Kate. J'ai là-dedans de quoi nourrir tout l'étage pendant une semaine!

- Ne dis pas n'importe quoi Katie! Et puis je sais bien que si je ne m'en mêle pas, tu nous reviendras squelettique à Noël!

- Maman! Je ne suis pas comme Lizzie! Je ne m'affame pas pour faire une carrière dans le mannequinat!

- Il n'empêche que si je ne suis pas là pour veiller à ce que tu te nourrisses convenablement...

- Je te promets faire attention et de manger trois fois par jour! Répliqua Kate pour rassurer sa mère.

Johanna sourit et prit sa fille dans ses bras.

- Oh! Mon trésor! Tu me manques tellement quand tu n'es pas à la maison!

- Toi aussi tu me manques, reconnut Kate.

- Katie! Qu'est-ce que je suis contente que tu me dises ça! Se réjouit Johanna en la serrant un peu plus dans ses bras.

- Dans ce cas, arrange-toi pour avoir deux semaines de vacances quand je reviendrai à Noël! Et quand je dis vacances, je veux dire pas de dossier à la maison, pas d'enquête pour préparer la défense d'un client et pas de rendez-vous avec qui que ce soit!

- Katie... N'exagère pas, je ne passe pas mon temps à travailler!

- Moi j'exagère?! Et qui a préparé sa plaidoirie pendant notre dernière virée à Cosney Island?! Et ne dis pas le contraire! Tu as fait des tâches de crème solaire sur une de tes fiches!

- Mhmm...touchée. Tu as gagné Katie, je te promets de ne rien prévoir pour le travail au moment où tu seras à la maison.

Kate sourit.

- Rien que des virées shopping entre filles et des ateliers cuisine?

- Et un marathon Temptation Lane!

- Et un marathon Temptation Lane, approuva Kate en riant.

- Oh non! Pas ce soap ridicule! Geignit Jim.

- Elle n'est pas si ringarde que ça, je trouve... marmonna Johann. Enfin si, elle est ringarde, mais elle reflète un peu la société dans laquelle on vit, par certains côtés...

- Tu veux rire? Il n'y a pas un brin d'authenticité dans ce truc!

- Bon d'accord, on est loin de la réalité, c'est vrai... Mais... C'est l'ambiance, qui est géniale! Se pelotonner dans le canapé avec tout un tas de trucs à grignoter!

- Génial! Grinça Jim. Cette série va nous rendre stupides et obèses!

- On ne t'oblige pas à participer, Papa, répondit Kate toujours blottie contre sa mère.

- Ta fille a raison, approuva Johanna, tu n'auras qu'à t'occuper de tout ce qu'il y aura à faire pour le réveillon : les courses...

- ... La cuisine... Ajouta Kate en redressant la tête.

- ... La décoration de la maison...

- ... Et le sapin! Tu pourrais même aller le couper en forêt pour que ça soit plus authentique!

- Et je viens encore une fois de me faire avoir, soupira Jim. Vous êtes trop fortes pour moi les filles.

Ils partirent dans un fou rire général, qui leur fit oublier un instant la séparation à venir. Ça n'était pas la première année de Kate à Stanford, ça n'était pas non plus la première fois qu'elle quittait la maison, mais chaque été, elle redevenait la petite fille chérie de ses parents et ils ne se quittaient pratiquement plus pendant trois mois, ce qui faisait qu'à chaque rentrée, ils avaient l'impression de se quitter pour la première fois.

- Ne fais pas de bêtises, dit Jim en étreignant sa fille avant de partir.

- Papa... Souffla-t-elle.

- Je sais, tu es majeure! Répondit Jim en levant les mains. Mais si tu pouvais éviter de me ramener un énième zigoto...

- Elle s'amuse, Jim, elle est jeune, c'est normal.

- Elle peut s'amuser sans tous ses énergumènes! Et puis, elle est à l'université pour étudier!

- Alors ça, s'il y a bien un reproche que tu ne peux pas lui faire, c'est bien celui-là! Elle va finir major de sa promotion au train où elle va! Promets-moi de ne pas passer tout ton temps à travailler, dit Johanna en chuchotant la dernière phrase à l'oreille de sa fille.

Kate secoua la tête, ses parents étaient incorrigibles… Et adorables aussi. Ils étaient amoureux comme au premier jour et il y avait une telle complicité entre eux. Elle espérait trouver ce qu'ils avaient un jour...

Mais pour le moment, elle avait un objectif bien précis en tête et elle allait s'y consacrer pleinement !