Tu es arrivée durant une soirée d'hiver, kidnappée dans le train. C'était moi qui était chargée de te réceptionner et de t'interroger pour obtenir de toi tout ce que tu pouvais savoir sur Harry Potter.

J'attendais sur le perron du manoir, debout bien droite dans le froid du crépuscule, quand j'ai vu deux hommes qui trainaient une prisonnière. Toi bien sûr... Je ne me suis pas avancée, attendant qu'ils t'amènent à moi car après tout je n'allais pas me déranger pour des sangs mêlés.

Et puis je voulais avoir le temps de te voir venir, de t'observer un peu, de cerner tes réactions.

Pour sûr tu ressembles à ta mère que j'ai connu, une serdaigle, une vraie de vraie! Et tu possèdes la même bouche aux lèvres pâles mais bien dessinées, même forme du visage, du cou. En revanche tu as pris certains défauts à ton crétin de père, ces yeux globuleux par exemple...

Mais lorsque tu m'as regardée, j'ai changé d'avis, ton regards est plus intéressant que joli certes, mais il y a dedans quelques chose que je ne peux définir et qui m'interpelle.

Tu n'avais pas l'air effrayée, ni fière, ni même en révolte. Non en fait tu me regardais avec une espèce de curiosité refoulée à grand peine. Comme si tu me trouvais insolite mais que tu n'osais pas pousser trop loin ton examen de peur de paraître impolie.

Ton expression n'a pas changé au fur et à mesure que les rafleurs malpropres te forçaient à t'approcher de moi, ce n'était pas habituel. Généralement les gens paniquent à proximité de moi.

Je t'ai réceptionnée ficelée comme un colis et j'ai chassé les rafleurs d'un revers de main, pas de pourboire pour eux. Tes chaines sont tombées lorsqu'ils ont transplanné, preuve que ce n'était pas de grandes puissances magiques. J'ai agrippé ton bras pour te forcer à te relever puis je t'ai faite marcher devant moi jusqu'à un petit cabinet isolé dont j'ai l'habitude de me servir comme salle d'interrogatoire...

assise!

Je désignais la chaise unique au centre de la pièce, mais malgré le ton sans réplique de ma voix, tu t'es contentée de hausser les sourcils.

Simple précision, m'as-tu simplement dis, Luna n'est pas synonyme de Médor.

Je suis restée un peu dérouté, le ton était doux, comme celui d'une conversation entre personne civilisées.

Mais tu savais presque aussi bien que moi que je ne faisais pas partie de ce genre de personnes, car presque immédiatement je t'ai giflée en plein visage. Si fort que tu t'es écroulée sur la dalle du parterre.

Relève toi!

Je n'attendais que cela pour te jeter de nouveau à terre, mais la seule chose que tu as relevée, c'est ton visage aux traits si doux et si naïfs, ton regard plein d'intelligence et d'imagination, de rêves, de superstitions, de croyances folles. Je voyais cela dans tes yeux de perle, et j'en oubliais que tu ne m'avait pas obéis.

Toutefois la réalité m'a vite rattrapée et mon cœur un instant ouvert s'est refermé comme une huitre, je suis redevenue Bellatrix Lestrange, mangemort et inquisitrice du seigneur des ténèbres. Ma baguette a sifflé pour accomplir cet acte qui chez moi était depuis longtemps devenu automatique.

Endoloris!

Tu as poussé un hurlement, le sort t'avait plaquée à terre et tu te tordais à mes pieds en criant. Tes yeux se sont remplis de larmes. J'ai cessé un instant pour me pencher vers ton visage.

Hé bien fillette, toujours aussi fière?

Tu ne m'as pas répondu par des paroles, mais par un simple regard curieux.

Parfait, tu voulais jouer les petites fouineuses, hé bien j'allais faire la même chose.

Légilimens!

Je n'étais pas des plus douées dans ce domaine, mais entrer dans ton esprit a été d'une facilité déconcertante. Tu ne m'opposais aucune résistance, tu n'as jamais rien eu à cacher... Ni rien à mettre en avant, alors je me suis perdue dans ton esprit, au milieu de tes souvenirs de traques, de rêves, j'ai vu aussi ta mère à travers tes yeux, j'ai vu son cadavre transpercé par un dérivé du sortilège sectusempra.

Il est dangereux d'expérimenter dans ce domaine fillette, et elle le savait.

Mais ta mère depuis son plus jeune âge était plus curieuse et plus imprudente encore que toi.

J'ai enfin trouvé ce que je cherchais, Potter... Ainsi que ses amis, et tu m'as appris beaucoup de choses, le rouquin et la sang de bourbre, Potter et la sœur de son meilleur ami... l'AD... Cela a été particulièrement intéressant. Il n'était pas si bébé que je l'avais cru, juste trop naïf.

Lorsque je suis parvenue enfin à me détacher de ton esprit, la semi pénombre de la pièce m'a semblé bien triste, alors j'ai ajouté pour me donner contenance:

tu es très instructive.

Je m'attendais à ce que tu sois impressionnée, ou effrayée. Mais rien de tout cela ne s'est lu sur ton visage et tu m'a répondu sur un ton parfaitement courtois:

Et vous vous êtes parfaitement intrigante, c'est très intéressant de vous observer.

J'ai serré les poings, pas du tout habituée à ce genre de résistance, et certainement aussi déroutée, il était rare que quelqu'un s'adresse à moi de façon aimable et polie. Plus inhabituel encore, tu semblais parfaitement sincère.

Je t'observais moi aussi, tu étais assise sur le sol comme un bébé jouant avec ses cubes, de la façon la plus naturelle du monde. J'ai jeté un coup d'œil agacé à la chaise sur laquelle tu étais sensée t'assoir.

Finalement cela m'a tellement énervée que je t'ai attrapée par les bras et t'ai soulevée, avant de le plaquer fermement à la place que je désirais que tu occupes.

Toujours est-il que tu n'as pas eu l'air franchement impressionnée...